Dans une Algérie traversée par de nombreux bouleversements depuis le quatrième mandat de Bouteflika, il ne se passe pas un jour sans se heurter contre un constat de profonde dégradation, de pourrissement et d’abus au parfum de l’oligarchie qui a régné 20 ans durant sur la société et l’économie nationale. L’aveugle avidité qui a fait des bruts des bandits de grands chemins, ont laissé un pays exsangue, financièrement, voire même socialement si l’on s’éloigne de la trompeuse façade des grands pôles urbains modernes et luxuriants.
Le porte-parole du gouvernement en personne le reconnait, affirmant sur les ondes de la radio nationale que «l’Etat algérien est, depuis un an, dans un état de délabrement total». En récupérant les commandes du navire qui chavirait au grès de la voracité des responsables génération Bouteflika, grâce au noble et gigantesque Hirak, le tableau ne suscita qu’hallucinations et désespoir. Le legs économique est catastrophique, et pour reprendre encore les propos de plusieurs membres de l’actuel exécutif, le président Abdelmadjid Tebboune n’a hérité que d’une situation larvée, entre autre marquée par de très fortes inégalités sociales, par le rapt inimaginable de la trésorerie de l’Etat qui s’élève à 1250 milliards de dinars, une créance de 10 milliards de dollars, «objectivement impossible à rembourser», confiait le porte-parole du gouvernement mardi dernier !!!
C’est un secret qui projette les faisceaux de la planète sur les exécrables et honteux ministres, hommes d’affaires, valets du système, ces hommes courageux dans la dilapidation des biens de la Nation, des diables aux vaisseaux irrigués par la tentation du diable, méprisant n’importe quel aveu, cet instrument de l’expiation dont ils pensaient que cette dernière ne les concernerait jamais. Cette mafia des temps modernes bénéficiait de crédits choquants sur un simple appel téléphonique et sans jamais se référer à un dossier. Une véritable violence à la société. Ainsi se présente le chapiteau dans lequel le Cabinet de Premier Ministre Abdelaziz Djerrad entame les processus de reconstitution économique et sociale du pays.
La bataille du développement économique s’avère rude. Les besoins pour assurer cet objectif sont considérables, pouvant même tutoyer des seuils pharaoniques. La transition politique et économique se pose comme le défi suprême de l’Algérie, baigné dans une démocratie participative et d’économie de marché qui œuvre à la création de richesses et d’emplois, ainsi qu’à la lutte contre la corruption et la bureaucratie. Le Président de la République et son Gouvernement affichent leur détermination à mettre la Nation à l’abri de tous les dangers, en impliquant le dialogue, la concertation et le partenariat continu et sincère. En fait, l’objectif nodal de cette Révolution, sur le terrain comme dans l’esprit, porte un seul mot: la rupture avec le passé. Rupture avec les modes de gestion lourds et insidieux, et d’autre part, en direction d’une société nouvelle sans n’en exclure aucun acteur productif et honnête. L’intention déjà exprimée lors de la campagne électorale, puis réaffirmée lors de la récente rencontre Présidence-Gouvernement-Walis, visant à créer une «Nouvelle République née des aspirations populaires».
Ce choix se fonde sur trois priorités incontournables et inaliénables: «le développement humain, la transition énergétique et la transformation numérique». Les trois leviers du programme du candidat Abdelmadjid Tebboune. Certes, notre économie est à bout de souffle, mais elle regorge de ressources abondantes. Quand beaucoup d’experts et d’instituts d’études français prévoyaient l’écroulement du pays, des solutions pour rétablir la courbe descendante des indicateurs économiques ont été activées. Il s’agit d’un ensemble de mesures pour l’édification d’une économie diversifiée, axée particulièrement sur une réelle industrie et non sur celle de la quincaillerie, sur l’encouragement des exportations et sur la réduction des importations. Référence à cette irréductible balance commerciale dont les yoyos ont battu tous les records fin 2019 avec des statistiques inattendues et dangereuses de -35%. La bataille pour le redressement ne dispose d’aucune excuse pour réussir: elle nous impose de limiter, et drastiquement, les importations, notamment ces gâteries pour les castes qui vivent dans le luxe, à savoir les fruits exotiques, les boissons de luxe, céréales, les chocolats, confiseries, cosmétiques que même les Européens des couches moyennes ne peuvent se permettre. La guerre pour retrouver les couleurs d’une Algérie économiquement sereine et indépendante, transite obligatoirement par des décisions incontournables, comme celles des importations qui choquent par rapport à notre contexte, voire même celles des véhicules de moins de trois ans, l’occasion pour la pègre et les trafiquants des voitures d’occasion de les refiler aux Algériens insouciants des conséquences que ce marché entraînera sur l’environnement du pays, déjà passablement pollué.
Enfin, retrouver la prospérité signifie de sortir de la règle maléfique qui nous broie, celle d’une économie exclusivement tournée vers l’exploitation des matières gazières et pétrolières. Les indicateurs macroéconomiques ne changent pas: 95% de note trésorerie en monnaie forte proviennent de ces dons du ciel qui, naturellement et forcément se tarissent, ainsi que des deux tiers des recettes fiscales. Le pétrole a contribué à nous extirper de l’insécurité et de la disette pendant trois décennies. L’«après-pétrole» a toujours été un slogan creux, avec les épopées de Sellal et de Ouyahia, notamment, pour avoir servi à la redistribution et de la captation de la rente entre les mains des oligarques et des affairistes proches du pouvoir corrompu. A présent, place à une économie totalement intégrée. Même s’il faut s’ouvrir aux emprunts extérieurs et aux capitaux étrangers. Mais ceci est une autre histoire….
Par Fayçal Haffaf
Ouest Tribune, 19 fév 2020
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