« L’Algérie mène une vaste opération d’espionnage téléphonique ciblant des citoyens marocains de la région d’Oujda ». Cette opération serait menée à partir d’un centre d’écoute high-tech de la base navale de Mers El Kebir. « Les sahraouis dans les camps de Tindouf ne sont pas des réfugiés, mais une population séquestrée par l’armée algérienne »…
Ce sont là quelques affabulations des médias marocains, qui mènent sous l’impulsion du makhzen une campagne de dénigrement sans pareille de l’Algérie. S’ajoute à ces élucubrations, le récent dérapage du consul marocain à Oran qui qualifia l’Algérie de « pays ennemi ».
Le mensonge et la manipulation des médias marocains ont atteint leurs paroxysmes quand l’Afrique du Sud, président en exercice de l’Union Africaine, a réaffirmée son soutien à l’exercice du peuple sahraoui de son droit à l’autodétermination lors de la réunion du Conseil de sécurité consacrée au Sahara occidental du 9 d’avril dernier. Une position qui ramènera le front Polisario à rendre hommage à l’Afrique du sud à l’occasion de la célébration de la journée de la liberté et la fin de l’apartheid qui coïncide avec le 27 avril. Cet hommage du Polisario au pays de Mandela fera réagir un média du royaume chérifien qui écrira « Le Polisario oublie pour autant aussi que le Maroc est le seul pays sur le Continent Africain qui ait accueilli sur son territoire les plus brillants « révolutionnaires » que le monde ait connu à l’image de Che Guevara en 1959 qui a séjourné à Rabat, Casablanca et Marrakech, ensuite Fidel Castro qui a déjeuné avec le Roi Hassan II à Rabat, puis Mandela qui est resté à Oujda de 1960 à 1962 ». Voilà que le Maroc veut usurper le titre de la Mecque des révolutions acquises par l’Algérie juste après son indépendance. Certes, Nelson Mandela a séjourné à Oujda en 1961, mais pas comme invité de la famille royale. Sur invitation du Gouvernement provisoire de la révolution algérienne (GPRA) le leader sud-africain a séjourné dans un camp de l’armée de libération nationale. De son séjour avec les combattants de l’ALN, Mandela témoigne que c’était le docteur Chawki Mostefai qui « a expliqué que ce genre de guerre n’avait pas pour objectif de remporter une victoire militaire mais de libérer les forces économiques et politiques qui feraient tomber l’ennemi. Il nous a conseillé de ne pas négliger le côté politique de la guerre tout en organisant les forces militaires ». Un an plus tard, le 5 aout 1962 Mandela est arrêté une première fois, puis une seconde fois en 1963. Lors de son procès de Rivonia le 20 avril 1964 et dans sa plaidoirie Nelson Mandela citera le défunt Président Ahmed Ben Bella et l’Algérie parmi les pays africains qui soutiennent la lutte du congrès national africain (ANC) mais à aucun moment il ne cite le nom de Hassan II est du Maroc. Malgré la condamnation de Mandela à la prison à perpétuité, l’Algérie poursuivra son soutien à l’ANC en accueillant ses militants et sous son l’impulsion et le soutien du mouvement des non-alignés, l’ONU décrète un embargo sur la vente des armes à destination de l’Afrique du sud en 1977.
L’aveu de Mandela
Après plus de 27 ans de détention Nelson Mandela est libéré le 11 février 1990. Trois mois plus tard, le 16 mai 1990 il effectue une visite à Alger (pas à Rabat). En foulant le sol algérien, il dira que c’est « l’armée algérienne qui a fait de moi un Homme ». Allusion à son séjour dans le camp de l’armée de libération nationale en 1960. En 2004, l’Afrique du Sud reconnait officiellement la RASD.
Mandela aux côtés des combattants de l’ALN
Concernant Fidel Castro il y a lieu de ramener sa rencontre avec Hassan II à sa juste valeur. En avril 1963 le leader cubain effectuait une visite officielle en URSS. A son retour de Moscou, Fidel Castro fait escale à Rabat où il déjeune avec Hassan II. Cinq mois plus tard, le Maroc lance une offensive militaire sur Bechar et Tindouf. Fidel Castro et Che Guevara apportent un soutien illimité à l’Algérie. Des armés et des troupes cubaines sont envoyés pour soutenir la jeune armée algérienne qui vient tout juste de sortir d’une terrible guerre d’indépendance. L’agresseur marocain est repoussé hors des frontières de l’Algérie.
Trois ans auparavant, le premier ministre marocain de l’époque, Abdallah Ibrahim invite Che Guevara, alors ministre cubain des finances, à visiter le Maroc. Les deux personnalités se sont rencontrées à l’ambassade du Maroc au Caire en janvier 1959. Au mois d’aout de la même année, Che Guevara et en compagnie de trois de ses collaborateurs atterrissent à Rabat. Les services de sécurités marocains vont les mettre rapidement en résidence surveillée dans un hôtel à Rabat. Ce n’est que suite à une intervention du Premier ministre marocain Abdallah Ibrahim qu’ils ont été autorisés de quitter l’hôtel. L’ordre de mettre Che Guevara en résidence surveillé serait venu de Hassan II, alors prince héritier. Il deviendra deux ans plus tard, en 1961 roi du Maroc après le décès de Mohammed V. On est bien loin de ce mensonge d’un royaume du Maroc qui accueille les révolutionnaires à bras ouvert.
Che Guevara a effectué, par contre, deux visites en Algérie. La première le 4 juillet 1963 à l’occasion de la célébration du premier anniversaire de l’indépendance. La seconde a coïncidée avec la tenue d’un séminaire économique de solidarité afro-asiatique qui s’est déroulé à Alger du 22 au 27 février 1965. Che Guevara était alors ministre cubain de l’industrie et prononcera son dernier discours à cette occasion. En rentrant à Cuba, il démissionnera de son poste de ministre et reprend la guérilla en Amérique latine. Juan Vives, un ancien agent du renseignement cubain écrivait dans ses mémoires que Che Guevara s’intéresser déjà, en 1963, à la libération de Sakiet El Hamra et Oued Edhahab (actuel Sahara occidental) de la colonisation espagnole.
Le légitime droit sahraoui
Dès 1963, lors de sa première visite à Alger il s’attela à organiser les militants sahraouis. Quelques-uns, qui parlaient espagnoles, seront envoyé à cuba pour une formation politico-militaire. Des étudiants sahraouis et même des écoliers seront scolarisés à la Havane. C’est ainsi que le Mouvement de Libération du Sahara est créé. Il deviendra le front Polisario le 10 mai 1973. La même année, la lutte armée contre l’occupant espagnole est déclenchée. En 1980, Cuba reconnait la RASD. Le Maroc rompt ses relations avec le pays de Fidel Castro. Il est clair qu’un royaume féodal ne peut attirer la sympathie des mouvements révolutionnaires.
Début de l’automne 1975, le Président espagnol Francisco Franco agonise. Il est donné à plusieurs reprises pour mort par les médias espagnols. Profitant de la situation, Hassan II lance sa marche verte pour l’occupation du Sahara Occidental le 6 novembre 1975. Le 14 novembre 1975 un accord est signé à Madrid entre l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie. Le retrait de l’Espagne de cette colonie est officialisé. Le Sahara occidental est partagé entre le Maroc et la Mauritanie. Le Polisario, représentant légitime du peuple sahraoui est exclu de la réunion de Madrid. Quatre ans plus tard, la Mauritanie se retire de la partie qu’elle occupait et reconnait la RASD en 1981. Le Maroc restait seul occupant du Sahara occidental.
Lors de la tenue du Sommet virtuel des chefs d’Etas et de gouvernements des non-alignés, le 4 mai passé, le Président de la république, Abdelmadjid Tebboune, rappelle la position de principe de l’Algérie concernant la décolonisation et les conflits. Il dira dans son discours « Depuis cette tribune, je lance un appel au Conseil de sécurité des Nations unies pour se réunir, dans les plus brefs délais, et adopter une résolution appelant solennellement à l’arrêt immédiat de toutes les hostilités à travers le monde, notamment en Libye, sans omettre la situation dans les territoires occupés en Palestine et au Sahara occidental.
Il est, désormais, impératif de donner une chance, en zones de conflits, à tous les acteurs pour qu’ils puissent lutter efficacement contre la propagation de la pandémie de Covid-19 ».
La position de principe de l’Algérie est confortée par une récente étude menée par le département de la recherche du Parlement allemand. Ce rapport conclut à l’existence de « violations substantielle de la quatrième convention de Genève par le Maroc, qui doit être considéré comme une puissance occupante ».
Par ailleurs et concernant les camps de réfugiés sahraoui de Tindouf, la réponse aux affabulations des milieux marocains hostiles est venue d’organismes et de pays occidentaux. Depuis le début de ce mois de mai, l’union européenne, la Suisse et même la France, soutien inconditionnel de l’occupation du Sahara occidental par le Maroc, ont débloqués des aides financières au profit des réfugiés sahraoui.
Des gestes humanitaires qui font voler en éclat la propagande marocaine selon laquelle les sahraoui seraient séquestrés par les autorités algériennes.
En visant l’Algérie par cette campagne de désinformation le Maroc pense qu’il pourrait imposer le fait accompli de sa colonisation du Sahara occidental.
Et en en tentant de bloquer le processus de négociation de l’Onu visant à trouver une solution juste et conforme au droit internationale, le Maroc ne fait que compliquer la situation dans la région. Une région déjà sérieusement menacée par la situation en Libye, au Mali et la région du Sahel.
Le Jeune Indépendant, 18 mai 2020
Tags : Maroc, Algérie, Sahara Occidental, frontières,
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