Satisfaisant à un rituel bien établi depuis François Mitterrand après l’élection d’un nouveau président de la République, Emmanuel Macron se rend le 6 décembre à Alger pour une courte visite de «travail et d’amitié» d’une dizaine d’heures. Sauf que, cette fois-ci, sans doute pour marquer sa différence avec ses prédécesseurs, il est le premier chef d’État français à débuter une visite au Maghreb par le Maroc (17 juin) et non par l’Algérie. Ce qui n’a pas manqué de provoquer quelques froncements de sourcils côté algérien, alors que, pour la première fois depuis 1962, les relations entre les deux pays, souvent marquées par de réelles tensions, étaient dans une phase d’apaisement. Candidat à la présidence de la République, Emmanuel Macron a agréablement surpris les Algériens en qualifiant, sur une télé privée algérienne, le colonialisme de «crime contre l’humanité». Un propos vite atténué une fois installé à l’Élysée, assurant dans un entretien accordé à deux quotidiens algériens – El Watan (francophone) et El Khabar (arabophone) – qu’il ne voulait pas être «l’otage » du passé. Mais voilà, une fois à Alger, il est vite rattrapé par le passé colonial, quand, lors d’un bain de foule dans la rue Ben-M’hidi (ex-rue d’Isly à Alger), il est interpellé sur ce sujet par un jeune Algérois. L’échange est vif et musclé : les images des deux hommes, amplifiées sur les réseaux sociaux, vues par des millions d’Algériens, illustrent bien la difficulté d’une normalisation apaisée des relations, débarrassées du poids du passé. Tourner la page, comme si de rien n’était, est un exercice qui risque de s’avérer bien compliqué «lorsque l’on en connaît la toile de fond historique». En effet, «les Algériens ont plus qu’aucun autre peuple de la région souffert de la domination coloniale, soulignait l’historien Gilbert Meynier. Nulle part ailleurs, il n’y eut conquête aussi atroce, dépossession des terres et confiscation à une telle échelle des meilleurs sols, domination coloniale aussi bouleversante ; et, in fine, une guerre de libération aussi meurtrière que traumatisante».(1) Tandis qu’en France, pour des raisons opposées, la droite et l’extrême droite n’hésitent pas à réveiller ce lourd passif parce que les harkis et les nostalgiques de l’Algérie française constituent un vrai vivier électoral.
Le pari impossible des Accords d’Évian
Les Accords d’Évian, signés le 18 mars 1962, mettant fin à sept ans et demi de guerre et à une domination coloniale de 132 ans, fixant le cadre politico-juridique de la coopération et des relations entre l’Algérie et la France, auraient dû autoriser tous les espoirs si l’Algérie indépendante n’avait pas été soumise à des conditions limitant sa souveraineté. «La coopération avec la France limite certes notre indépendance économique ; les troupes françaises continueront de stationner sur notre territoire. Mais la coopération que nous avons définie avec la France ne revêt aucune forme institutionnelle […] La révolution algérienne n’est pas terminée ; l’indépendance n’est qu’une étape», prévenait le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).(2) «La coopération telle qu’elle ressort des accords (d’Évian) implique le maintien des liens de dépendance dans les domaines économique et culturel», avertissait le programme de Tripoli adopté par le Conseil national de la révolution algérienne (CNRA) fin juin 1962.(3) Parmi les conditions imposées au nouvel État algérien : des garanties concernant les intérêts économiques français (exploitation pétrolière notamment), les droits acquis pour les personnes physiques et morales, le maintien de l’Algérie dans la zone franc, les droits culturels. De plus, la France conserverait l’usage de la base navale de Mers el-Kébir pour un bail d’une durée de quinze ans renouvelable, les sites et installations nucléaires au Sahara pour cinq ans et bénéficierait de facilités de liaisons aériennes militaires pour une même durée de cinq années sur des aérodromes algériens. En contrepartie, Paris assurerait une assistance technique, culturelle et financière d’un montant d’un milliard de francs par an, équivalant à celle en vigueur avant l’indépendance algérienne et les immigrés algériens bénéficieraient d’un statut privilégié relativement favorable par rapport aux autres nationalités.(4) En ce qui concerne le million de «Français d’Algérie», ils se voyaient garantir des droits politiques, sociaux et civiques – la jouissance de leurs biens, le droit d’administrer les quartiers d’Alger, d’Oran et d’autres villes où les Européens étaient numériquement majoritaires et de créer leurs propres associations. Ces accords qui dessinaient les contours d’un État multiculturel étroitement lié à la France, comme le voulait le général De Gaulle, vont être vidés de leur contenu par l’OAS (Organisation de l’armée secrète). En pratiquant une politique de «terre brûlée » – destruction et sabotage des infrastructures socio-économiques, culturelles et éducatives – et meurtrière à l’endroit des Algériens et des Européens tentés par le vivre-ensemble, l’organisation fasciste provoque le départ massif des Européens d’Algérie craignant des représailles du FLN. Ce qui fait que le pari de la réconciliation entre Algériens et Européens sur lequel reposait une partie de cet édifice politicojuridique signé à Évian devenait de fait caduc. Côté algérien, le premier gouvernement de l’Algérie indépendante dirigé par Ben Bella, issu d’un conflit au sein du FLN ayant pour enjeu le pouvoir, se réfère au programme de Tripoli dont les orientations socialisantes et anti-impérialistes allaient nécessairement à l’encontre de l’esprit des Accords d’Évian. C’est le cas lorsqu’il décide d’entériner par décret dès novembre 1962 l’occupation, par des collectifs de travailleurs constitués en comités de gestion, des grandes fermes coloniales et des entreprises industrielles et commerciales abandonnées par leurs propriétaires européens : c’est le début de l’autogestion socialiste qui sera institutionnalisée par les décrets de mars 1963(5). Et ce, alors que les Accords d’Évian prévoyaient, dans le cas d’une réforme agraire, le rachat négocié des terres coloniales. Ce processus autogestionnaire couplé aux demandes de révision des clauses militaires des Accords d’Évian, exprimées par le gouvernement Ben Bella qui, par ailleurs, a commencé à nouer des relations avec les pays socialistes d’Europe et d’Asie, l’Égypte de Nasser et Cuba, dans un contexte d’ascension du Mouvement de libération des peuples, allait nécessairement provoquer de premières frictions entre les deux pays, moins de deux ans à peine après l’accession de l’Algérie à l’indépendance. Paris prend des mesures de rétorsion : l’aide financière est maintenue, mais diminuée de quelque 200 millions de francs représentant le montant de l’indemnisation des colons expropriés par l’État algérien. Bon an mal an, la coopération se poursuit, notamment dans le domaine culturel : Paris tient à ce que le français reste langue de travail et d’enseignement, d’autant que le premier gouvernement algérien a engagé un effort de scolarisation et d’éducation visant à réduire l’analphabétisme qui touchait en 1962 plus de 80% de la population.(6) Toutefois, une chose était sûre : l’Algérie ne faisait pas mystère de son intention de récupérer la totalité des richesses minières et pétrolières. Ce n’était qu’une question de timing. Le général De Gaulle, pas dupe des intentions algériennes, savait qu’il serait difficile de faire respecter la totalité des engagements pris à Évian. Aussi avait-il recommandé de maintenir la coopération avec l’Algérie quelles qu’en soient les «péripéties »(7). Selon Le Monde, il voulait démontrer qu’il était «possible de réussir avec l’Algérie ce que les États-Unis n’ont pas su faire avec Cuba».(8) Mais à l’évidence, ses successeurs, Valéry Giscard d’Estaing en particulier, n’étaient pas sur la même longueur d’onde.
Nationalisation des hydrocarbures et tournant giscardien
Avec l’arrivée de Houari Boumediene au pouvoir, succédant à Ben Bella après l’avoir renversé le 19 juin 1965, l’Algérie affiche clairement sa volonté d’entamer la dernière étape de la décolonisation en procédant à une série de nationalisations durant les années 1966-1968 — mines, banques, commerce extérieur, industries — suivie, cinq années plus tard, le 24 février 1971, par la nationalisation des hydrocarbures. Avec la création de la compagnie pétrolière Sonatrach, en décembre 1963, puis la création, en 1965, avec l’aide de l’URSS, de l’Institut algérien du pétrole (IAP) pour former des techniciens et des ingénieurs, il était évident que les autorités algériennes, engagées dans un ambitieux plan de développement (1971-1974), voulaient se donner les moyens de leur politique. Et de ce fait, la récupération et le contrôle des ressources naturelles revêtaient une importance stratégique. La nationalisation des hydrocarbures le 24 février 1971, que seuls le PCF et le PSU avaient soutenue, provoque la première crise majeure entre les deux pays : mise en quarantaine du pétrole algérien, menaces de poursuites judiciaires à l’endroit d’acheteurs éventuels du «pétrole rouge», fermeture de l’usine de montage Renault-Algérie, cessation d’achat du vin algérien, le tout assorti d’une menace de révision de l’accord de 1968 sur la main-d’œuvre en France. S’ensuit alors une flambée raciste – «chassons les fellaghas qui nous prennent notre pétrole» – avec mort d’hommes, culminant, deux ans plus tard, le 2 avril 1973, par un attentat à la bombe visant le consulat algérien de Marseille, faisant plusieurs morts et blessés. La multiplication des actes racistes conduit, le 19 septembre 1973, le président Boumediene à suspendre «jusqu’à nouvel ordre» l’émigration algérienne vers la France, alors contingentée à raison de 35 000 personnes par an. Les relations entre les deux pays sont alors à un niveau critique. Avec la nomination de Michel Jobert à la tête de la diplomatie française en avril 1973, les relations entre les deux pays connaissent un début d’apaisement. Il sera de courte durée. Un an plus tard, avec l’arrivée au pouvoir de Giscard d’Estaing, connu pour ses liens avec les milieux de l’extrême droite «Algérie française» et qui n’a pas pu se faire à l’idée d’une Algérie indépendante, la politique française à l’égard d’Alger va subir une inflexion porteuse de nouvelles tensions. Or, en avril 1975, Giscard d’Estaing surprend en étant le premier président français à se rendre en Algérie. Sa visite, toutefois, n’aboutit à aucun résultat. Pourtant, Houari Boumediene, tout nationaliste sourcilleux qu’il était, était disposé à une coopération avec la France. Il n’en sera rien. Les années Giscard, souligne René Galissot, sont celles de «l’alliance triangulaire» France-États- Unis-Maroc face à ce qui est considéré comme «le triangle adverse» Algérie-URSSPolisario. Une «alliance» sur fond de poursuite d’actes racistes souvent meurtriers contre les Algériens en France, de préparation par le Maroc de la «marche verte», qui lui permettra, avec le concours de l’armée française et de l’Espagne franquiste, d’occuper le Sahara occidental en 1975.(9) Prenant ainsi le parti du Maroc, la France giscardienne prétexte la capture de cinq techniciens français par le Polisario et la menace que fait peser ce dernier sur la Mauritanie pour intervenir militairement — c’est l’opération Lamentin — contre les forces sahraouies.(10) Paris accuse de plus l’Algérie de complicités avec les ravisseurs. Alger redoute alors une guerre impliquant la France aux côtés du Maroc.
Cuba met rapidement à la disposition de l’Algérie une assistance militaire. Renouant avec un atlantisme avec lequel De Gaulle avait rompu, Giscard d’Estaing, qui voyait déjà d’un mauvais œil le positionnement de l’Algérie sur la scène internationale avec l’aide aux mouvements de libération africain, arabe et latino-américain et le rapprochement avec les pays socialistes d’Europe et d’Asie et Cuba, est encore plus irrité quand il apprend, le 27 décembre 1977, la libération des techniciens français de la bouche de Georges Marchais de retour d’Alger où il avait été reçu par le président algérien.(11) Et le fait que l’Algérie regarde avec sympathie communistes et socialistes français alliés autour d’un programme de gouvernement ne va naturellement guère contribuer à faire baisser la tension. Elle va même franchir un nouveau palier quand, le 9 février 1978, Giscard d’Estaing demande la révision des Accords d’Évian pour les remplacer par «un nouveau cadre juridique» plus adapté «à la situation actuelle».(12) Pire, évoquant «l’importance de la population algérienne en France», il entendait mettre en place une politique fondée sur le retour volontaire, voire forcé, de quelque 500 000 Algériens, à raison de 100 000 par an, malgré l’opposition de Raymond Barre et Simone Veil, retour volontaire que l’historien Patrick Weil qualifiera de «déportation».(13) S’il a fini par y renoncer, il a maintenu un quota de retour de 35 000 par an pour les 400 000 Algériens installés en France après le 5 juillet 1962. Quant aux relations économiques, déjà en berne depuis la crise de 1971, elles le resteront jusqu’à l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981.
La gauche au pouvoir, espoirs et désenchantements
Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, suivie par la visite de François Mitterrand à Alger (30 novembre-1er décembre 1981), les rapports entre les deux pays connaissent leur première embellie depuis 1962. Un climat de confiance s’instaure, que le ministre des Affaires étrangères, Claude Cheysson, qualifie de «coup de passion». On parle alors de politique de «codéveloppement» entre le Nord et le Sud. La gauche socialiste enterre le projet de renvoi massif des immigrés algériens, régularise plus de 15 000 Algériens en situation irrégulière, les visites ministérielles se multiplient, des accords économiques sont signés — la France acceptant même que le prix du gaz soit indexé sur le prix du baril. Bien plus, Mitterrand apprécie le nouveau président algérien, Chadli Bendjedid, en train de rompre graduellement avec la voie socialiste de développement de son prédécesseur, Houari Boumediene, décédé prématurément à l’âge de 46 ans en décembre 1977, et qui prend peu à peu ses distances avec l’URSS et le camp progressiste (Alger n’a pas soutenu la candidature du Nicaragua à la tête du Mouvement des non-alignés), avant d’opérer en cours de mandat un recentrage de l’État autour des valeurs araboislamiques. «Le coup de passion» sera pourtant de courte durée. Politique de rigueur oblige, Paris demande la révision des accords sur le prix du gaz, et ce, au moment même où Alger subissait de plein fouet la chute du prix du baril (40 à 8 dollars). De plus, selon Le Monde, «le remplacement de M. Mauroy par M. Fabius» au poste de Premier ministre, «et celui de M. Cheysson par M. Dumas (Affaires étrangères) n’ont pas réjoui Alger».(14) La visite officielle à Rabat le 27 avril 1985 de Laurent Fabius, assurant qu’il tenait à visiter le Maroc avant l’Algérie(15), «l’attirance » de F. Mitterrand pour la monarchie marocaine(16) et le fait que, selon Hubert Védrine, sur le Sahara occidental, «il a été plus ouvert au Maroc»(17), compliquent encore la relation franco-algérienne. Le changement de majorité intervenu en France en mars 1986 ne modifiera pas la situation. Pour satisfaire son électorat de droite, le nouveau Premier ministre, Jacques Chirac, veut durcir les conditions d’entrée et de séjour des Algériens. Prétextant la vague d’attentats ayant frappé Paris en 1986, l’exécutif chiraquien instaure un visa d’entrée aux non-Européens. Alger réplique en instaurant la réciprocité. Les échanges entre les deux pays connaissent un tassement (elles ont baissé de 15 milliards de francs par rapport aux années précédentes). La France, premier créancier de l’Algérie, multiplie les pressions, veut la contraindre à aligner le prix du gaz sur les cours du marché forcément en baisse. La question des enfants de couples mixtes devient une nouvelle source de discorde : près de 300 enfants étaient retenus par leurs pères (divorcés) en Algérie suite à des décisions de justice d’inspiration islamiste accordant la garde de l’enfant au père. Même la visite de François Mitterrand à Alger en mars 1987 – il se préparait à entrer en lice pour un second mandat – ne peut débloquer la situation. Faute d’accord sur les prix, les négociations sur le gaz commencées en juillet 1986 sont rompues en novembre 1987. Et comme Alger, tournée désormais vers un projet d’union avec Tripoli (Libye), considérait que le gaz est, selon le Premier ministre islamo-conservateur Abedelhamid Brahimi, le nerf de la coopération, les projets d’usines Renault et Peugeot sont gelés au profit du constructeur italien Fiat et des instructions sont données aux entreprises algériennes pour chercher des partenaires autres que français. Pire, au nom de l’arabisation de l’administration, des entreprises et du système éducatif, la coopération technique et culturelle est réduite au minimum : il est ainsi mis fin aux contrats de milliers d’enseignants, ingénieurs et cadres français ou d’autres nationalités étrangères exerçant en Algérie. Même les réfugiés chiliens et latino-américains, victimes collatérales de cette fièvre araboislamiste et nationaliste, sont poussés vers la sortie. Comme si cela ne suffisait pas, s’y ajoute la décision de l’Algérie de récupérer les lycées français, avec interdiction d’accès aux élèves algériens, y compris aux enfants de couples mixtes, à compter de la rentrée scolaire 1988- 1989. Dans un violent discours prononcé le 19 septembre 1988, moins de deux semaines après la visite de Roland Dumas, dépêché par François Mitterrand pour tenter de mettre fin à l’étiolement des relations entre les deux pays et jeter les bases d’une coopération renouvelée, le président Chadli Bendjedid considère la récupération des lycées français comme une «question de souveraineté nationale, sacrée et non négociable».(18) En vérité, «cette affaire ne concerne que quelques centaines d’enfants à Alger […] Elle est l’un des symptômes d’un contentieux beaucoup plus large qui oppose, au sein du parti (FLN), un nationalisme rigide, en l’occurrence partisan d’une arabisation totale de l’enseignement, aux tenants d’une politique de libéralisation et d’ouverture».(19) Seule la coopération sécuritaire semble échapper au climat de suspicion réciproque s’installant entre Paris et Alger.(20) Avec les grèves sociales de septembre 1988, suivies par l’explosion populaire d’octobre 1988 qui vont mettre fin au système du parti unique, l’Algérie s’ouvre au multipartisme au prix d’une répression sanglante, et un cycle se termine. La forte poussée de fièvre nationaliste à forte connotation islamo-arabiste antifrançaise, actionnée par le président Chadli et l’aile la plus réactionnaire du régime, n’aura servi à rien. Les tensions avec la France vont passer au second plan et le projet d’union avec la Libye tombe à l’eau. Le régime FLN, miné par des conflits internes, sera vite débordé sur sa droite extrême par les islamistes du Front islamique du salut (FIS) à qui cette même aile réactionnaire du régime était prête à remettre les clés de la maison Algérie après lui en avoir préparé le lit.
Années 1990, les rapports franco-algériens dans le collimateur du GIA
L’ouverture de l’Algérie au multipartisme et à la liberté de la presse à partir de 1989 et, surtout, la victoire du FIS aux élections locales de juin 1990, frappent comme un coup de tonnerre. Tout en encourageant le gouvernement réformateur de Mouloud Hamrouche à poursuivre sa politique de libéralisation de l’économie et de la vie politique, la France mitterrandienne reste attentive à l’émergence des islamistes comme nouvel acteur majeur dans un paysage politique complètement modifié. Des contacts discrets sont noués avec ces islamistes aux portes du pouvoir, d’autant que le président Chadli Bendjedid jouit de la confiance des socialistes français qui voient en lui un artisan possible d’un compromis avec les islamistes, puisque se disant prêt à gouverner avec le FIS si ce dernier remportait les élections législatives fixées à fin 1991. Mais, le 11 janvier 1992, en annulant les élections législatives, dont le premier tour avait été remporté par le FIS, frôlant la majorité absolue, et en poussant le président Chadli à démissionner, les artisans de ce coup de force — l’armée et des civils — soutenus par la société civile et une partie des forces politiques, dont Ben Bella, vont de fait empêcher l’instauration d’un État théocratique, avec l’aide de la frange la plus réactionnaire du FLN. L’annulation des élections, que François Mitterrand qualifiera trois jours après d’«acte pour le moins anormal», enjoignant le pouvoir algérien de «renouer au plus tôt les fils d’une vie démocratique qui s’amorçait»,(21) et la violence qui va progressivement embraser l’Algérie vont être le début d’une nouvelle brouille entre les deux pays qui va durer jusqu’en 1999. Les réserves et critiques françaises qui ne vont pas cesser, les propos du ministre de la Défense, Pierre Joxe, n’écartant pas la possibilité d’une intervention pour évacuer les ressortissants français en Algérie, les facilités accordées sur le sol français aux islamistes fuyant la répression font que la relation franco- algérienne va traverser un moment difficile.( 22) Selon Paul-Marie de la Gorce, instruction était donnée de ne pas trop s’engager avec les «putschistes» algériens. S’ensuit alors une période de gel, y compris sous la courte période de la présidence de Mohamed Boudiaf (assassiné en juin 1992).(23) Il faudra attendre janvier 1993, pour qu’un ministre de haut rang, le chef de la diplomatie Roland Dumas se rende à Alger, déclarant «être prêt à écouter les Algériens», et que la France était disposée à aider l’Algérie qui faisait face à une situation économique difficile et financière jugée catastrophique.(24) Il était trop tard, les Algériens, qui venaient de recevoir Jacques Chirac, pariaient désormais sur un retour de la droite aux affaires. Mais, à la décharge des Français, avec un gouvernement algérien dirigé par un Premier ministre, Belaïd Abdesselam, hostile par nationalisme étroit à la France, peu enclin à nouer de bons rapports afin de complaîre aux islamo-conservateurs, et qui attribuait les attentats, dont celui ciblant Air France et l’aéroport d’Alger en juillet 1992, à un complot «ourdi» par la France avec la complicité des «laïco-assimilationnistes », autrement dit les communistes, les progressistes et les démocrates algériens en général, prônant de surcroît une «économie de guerre» à la Ceausescu, il ne fallait pas s’attendre à une détente entre les deux pays.(25) À compter de la fin 1993, l’Algérie entre dans sa phase la plus délicate. Les assassinats de ressortissants français, qui ont débuté après le rapt des trois agents consulaires français en novembre 1993, l’attaque des gendarmes français assurant la sécurité d’une cité habitée par des coopérants français (cinq morts dont trois gendarmes) par le GIA (Groupe islamique armé) en juillet 1994, la prise en otage de l’Airbus d’Air France le 24 décembre 1994 par un commando du GIA vont rebattre les cartes dans les rapports entre les deux pays. La France est désormais dans la ligne de mire du GIA. La donne sécuritaire s’insinue dans la relation franco-algérienne. Paris est convaincu que l’État algérien est incapable d’assurer la sécurité des étrangers. Air France, suivie aussitôt par toutes les compagnies aériennes européennes, cesse d’assurer les vols en direction de l’Algérie. Les consulats, les centres culturels et les établissements scolaires français ferment. À leur tour, les entreprises françaises, imitées par les firmes européennes et asiatiques, ferment leurs bureaux et succursales et quittent le pays. Les ambassades occidentales, excepté celle des États-Unis, ferment également et transfèrent leurs activités consulaires à Tunis. Et humiliation supplémentaire, le service de délivrance des visas est transféré à Nantes. Le nombre de visas délivrés chute à moins de 50 000 contre près de 400 000 avant 1994, limitant ainsi les voyages entre les deux pays. La vague des attentats frappant Paris durant l’été 1995 et les voix de plus en plus nombreuses, surtout parmi la gauche socialiste et les Verts, accusant le pouvoir algérien de manipuler les groupes islamistes incitent le gouvernement français à ne pas trop s’engager envers des Algériens jugés de plus en plus nerveux. D’autant que François Mitterrand, en fin de mandat, ne fait rien pour dégeler la situation. Au contraire, il propose en février 1995 une conférence européenne sur la «crise algérienne», prenant pour base la plateforme de Rome signée par le FIS et des partis algériens dont le FLN, le FFS (socialistes), s’attirant les foudres du pouvoir algérien qui qualifie la proposition française de «grossière ingérence».(26) Sous la présidence de Jacques Chirac, qui a eu à gérer la vague d’attentats revendiqués par le GIA ayant frappé Paris durant l’été 1995, les relations restent empreintes de méfiance, surtout après le refus du président Zeroual de le rencontrer de manière non officielle en octobre 1995 comme le souhaitait l’Élysée. «L’Algérie n’a pas pour habitude d’assumer sa diplomatie en rasant les murs», expliquait la présidence algérienne(27). L’élection de Liamine Zeroual en novembre 1995, en dépit du GIA et d’Anouar Haddam qui assurent qu’ils empêcheront l’élection présidentielle, constitue un tournant. D’autant que ce premier scrutin présidentiel pluraliste depuis 1962 sonne comme un cinglant désaveu des thèses répandues dans la classe politique française, affirmant que le GIA et l’AIS (Armée islamique du salut) contrôlaient la population et que le boycott prôné par le FLN et le FFS d’Aït Ahmed serait largement suivi. Rabah Kébir en prend acte au nom du FIS, reconnaissant la légitimité de l’élection de M. Zeroual, tandis que les capitales occidentales, Paris et Washington en tête, décidaient de reconsidérer positivement leurs rapports avec l’Algérie, encourageant le président Zeroual à poursuivre la démocratisation promise. Sept mois après cette élection présidentielle, alors qu’a lieu un vaste débat public associant le pouvoir politique, tous les partis (excepté le FIS), les syndicats, les personnalités et acteurs de la société civile algérienne, sur le projet de Constitution et l’élection d’un parlement au suffrage universel, se produit en juin 1996 l’assassinat des moines du monastère de Tibhirine. Une partie des médias français l’attribue alors aux militaires algériens. Sur cette sombre toile de fond, le ministre des Affaires étrangères, Hervé de Charrette, se rend à Alger en août 1996 pour éviter que les rapports ne se tendent davantage avec un pays qui s’est vu imposer par les institutions financières internationales un Plan d’ajustement structurel (PAS). La France chiraquienne, sous forte pression médiatico-politique, opte alors pour une politique empreinte de prudence à l’égard d’un pouvoir algérien divisé sur la conduite à tenir à l’égard des islamistes.( 28) Avec les massacres de civils à grande échelle de la fin de l’été et de l’automne 1997 aux portes mêmes d’Alger, Jacques Chirac et le gouvernement de Lionel Jospin, confrontés à une incroyable campagne médiatique demandant une enquête internationale en raison des présomptions pesant sur la responsabilité du régime dans tout ou partie des violences en cours, sont sommés de se positionner. Hésitant sur la conduite à suivre, ils se bornent dans un premier temps à faire part de leurs «préoccupations». Toutefois, bien qu’estimant, à l’instar de Washington, que «le régime de Liamine Zeroual reste la moins mauvaise des options»(29), le Quai d’Orsay n’en rappelle pas moins «le droit légitime de la population algérienne à être protégée».(30) Aussi, la France penche-t-elle prudemment pour une internationalisation contrôlée de la crise algérienne en appuyant, par la voix d’Hubert Védrine, la proposition allemande d’envoi d’une «troïka» européenne à Alger, qui sera ensuite suivie par une mission du Parlement européen conduite par André Soulier et Daniel Cohn-Bendit, avant de soutenir le principe d’une commission d’enquête onusienne qui sera conduite par le socialiste Mario Soares, laquelle conclut que ce sont bien les islamistes qui ont commis les massacres de civils durant l’été et l’automne 1997. Il faudra attendre l’arrivée d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir en avril 1999, dans un contexte de reflux de la violence islamiste, pour voir un début de détente et de normalisation entre les deux pays.(31)
Bouteflika, la repentance et la sécurité régionale
En démissionnant de ses fonctions de président de la République en août 1998, Liamine Zeroual ouvre la voie à l’arrivée d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir en avril 1999.(32) L’élection de ce dernier est l’épisode d’une nouvelle passe d’armes quand, le 16 avril, prenant connaissance d’une déclaration d’Hubert Védrine, ministre des Affaires étrangères, émettant un doute sur son élection, le nouveau chef d’État algérien, jouant sur les ressorts d’un nationalisme à fleur de peau de nombreux Algériens, réplique vivement : «La France doit comprendre que l’Algérie n’est pas sa chasse gardée.»(33) Ou quand il feint de s’étonner que le président Chirac n’a «jamais trouvé une demi-journée à consacrer à l’Algérie » alors qu’il a visité, dit-il, la plupart des capitales arabes… Reste qu’Abdelaziz Bouteflika est sans doute le dirigeant algérien qui connaît le mieux la France, pour avoir rencontré, en tant que chef de la diplomatie algérienne, les présidents Charles de Gaulle, Georges Pompidou, Giscard d’Estaing et, en tant que chef d’État, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Hollande. Et ce, sans compter les nombreux ministres et responsables de partis de gauche et de droite. Et, c’est en France qu’il se soigne depuis qu’il est tombé malade en 2005. Le dialogue est vite renoué, Algériens et Français vont donc s’efforcer d’aplanir une brouille qui dure depuis sept ans : visite d’Hubert Védrine en juillet 1999 à Alger, la première depuis deux ans, rencontre entre Abdelaziz Bouteflika et Lionel Jospin le 21 septembre à New York, visite d’État d’Abdelaziz Bouteflika en France en juin 2000, où il se prononce pour «un partenariat d’exception» avant de se rendre à Verdun pour un hommage aux 25 000 soldats algériens morts en 1914-1918. Jacques Chirac visite à son tour l’Algérie en mars 2003, visite ponctuée par la signature d’un texte, «La déclaration d’Alger», au terme duquel les deux pays s’engagent à établir «un partenariat politique, économique et culturel renforcé», qualifié par les deux parties de «partenariat d’exception». Les services consulaires rouvrent leurs portes et le nombre de visas augmente, mais sans retrouver son niveau d’avant 1994, les échanges économiques et culturels vont s’intensifier, Air France reprend ses vols sur Alger, la réalisation du métro d’Alger et de l’aéroport international sont confiés aux Français… Mais la lune de miel ne va pas durer. Le traité d’amitié, «comparable au Traité de l’Élysée, conclu entre la France et l’Allemagne en 1963», voulu par Jacques Chirac, ne sera pas signé entre les deux pays. En cause, la loi du 23 février 2005 vantant les aspects positifs de la colonisation. Les Algériens conditionnent alors la signature d’un traité d’amitié à l’abrogation de cette loi scélérate. Ce ne sera pas tout à fait le cas.
Le président algérien, en besoin de se relégitimer pour un éventuel troisième mandat, exige désormais des «excuses» de la France pour les crimes commis pendant la colonisation. Le thème de la repentance s’invite désormais dans les rapports entre les deux pays, surtout sous la présidence de Nicolas Sarkozy, dont le positionnement sur la colonisation, l’entreprise de réhabilitation des anciens de l’OAS, la création d’un ministère de l’Identité nationale, sa stigmatisation des enfants d’immigrés d’origine surtout algérienne et son intention de réviser les accords sur la main-d’œuvre de 1968 passent mal. Il «n’est pas le bienvenu» en Algérie(34) où sa visite manque même d’être annulée(35). Elle aura lieu, mais sous haute surveillance. Mais à la place d’un traité d’amitié, il y aura une simple «convention de partenariat» entre les deux pays. Et ce n’est pas fini. L’intervention française en Libye, qui a abouti à la chute du régime de Kadhafi, divise les deux pays. Pour une fois, l’Algérie n’avait pas tort, et les faits lui ont donné raison, quand elle avait prévenu que l’intervention franco-britannique allait déstabiliser la région. Mais Nicolas Sarkozy en rajoute. «Dans un an l’Algérie, dans deux ans l’Iran», s’enthousiasme- t-il le 5 septembre à Tripoli, croyant que le régime algérien allait être à son tour balayé par la vague du Printemps arabe(36). Nouveau coup de froid. Jean-Pierre Raffarin, en mission commandée – il se rend à trois reprises à Alger –, parviendra à mettre la coopération à l’abri des aléas diplomatiques. De ce fait, l’élection de François Hollande est accueillie presque comme un soulagement par les autorités algériennes, y compris, une fois n’est pas coutume, par les forces démocratiques et progressistes et la société civile. Lui aussi veut tourner la page du passé avec un pays qu’il connaît bien, en jouant la carte de l’apaisement et en voulant imprimer une nouvelle dynamique aux relations francoalgériennes. L’hommage rendu aux victimes du 17 octobre 1961 et à la mémoire du mathématicien communiste Maurice Audin sur la place portant son nom à Alger, en décembre 2012, sont autant de marqueurs plaidant en sa faveur. D’autant qu’aucun de ses prédécesseurs ne l’avait fait. Sa relation avec l’Algérie intervient toutefois dans un contexte régional radicalement transformé, porteur de menaces potentielles pour les pays de la région, comme l’a montrée l’attaque du site gazier d’In Amenas par le groupe djihadiste de Mokhtar Belmokhtar en janvier 2013.(37) La relation franco-algérienne va donc intégrer cet élément nouveau qu’est la menace djihadiste en provenance de Libye et du Sahel et, partant, la sécurité régionale. Celle-ci va même prendre le pas sur le volet économique où la France, malgré la forte concurrence de la Chine (premier fournisseur de l’Algérie), conserve de solides positions sur le marché algérien : elle est son deuxième partenaire commercial, avec des échanges s’élevant à 10,5 milliards d’euros en 2016 et la 3e destination mondiale hors OCDE, avant les pays du Golfe ; elle est aussi son premier partenaire sur le continent africain avant le Maroc. Quelque 7 000 entreprises françaises exportent en Algérie et près de 500 y sont installées, dont de grands groupes comme Renault, Sanofi, Alsthom, Total, Peugeot, ainsi que des banques. Et puis Hollande a visité un pays ayant un niveau d’endettement extérieur faible, à peine 3% de son PIB, et disposant de réserves de change de plus de 150 milliards de dollars. Et il a su habilement éviter les sujets qui fâchent, comme le Sahara occidental. Malgré les réticences algériennes, Paris intervient au Mali pour stopper l’offensive djihadiste vers Bamako : informé quelques heures avant cette intervention, Alger donne son accord pour que l’aviation française traverse son espace aérien et fournit aux forces terrestres françaises un soutien logistique.(38) Mais la France de François Hollande, de concert avec l’Amérique de Barack Obama, ne s’arrête pas là : elle tente de persuader l’Algérie de s’engager militairement dans le Sahel et de rompre ainsi avec sa doctrine de non-engagement dans des systèmes multilatéraux qui hypothéqueraient sa liberté de décision. Une chose est sûre, malgré des différences d’appréciation sur la situation au Sahel et surtout sur la Syrie, jamais, assuret- on à Alger, les relations entre les deux pays n’ont connu une telle embellie. Pour Abdelaziz Bouteflika, confronté à une crise financière provoquée par la chute du baril de pétrole à compter de 2014, l’appui de la France valait certainement quelques concessions, et ce, malgré l’impair commis par Manuel Valls, twittant une photo en compagnie du chef de l’État algérien diminué par la maladie et donc pas à l’avantage de ce dernier, impair qui manque de tourner à l’incident diplomatique, alors que les Algériens étaient déjà remontés à propos d’un article du Monde sur les Panama Papers, mettant en cause le ministre de l’Industrie, Abdeslam Bouchouareb, illustré par une photo du président algérien(39). C’était jugé d’autant mal venu que François Hollande, quelques mois avant, en juin 2015, avait effectué une visite éclair à Alger, mû par le désir de l’Élysée de voir les Algériens s’impliquer militairement en Libye après la chute de Syrte aux mains de Daech et la menace que faisait peser ce dernier sur la Tunisie.(40) Et sans doute était-il préoccupé par l’état de santé du président algérien un an après sa réélection controversée.(41) Quelle sera la politique algérienne d’Emmanuel Macron ? À défaut d’une visite d’État au protocole très lourd, ce que ne pouvait assumer son homologue algérien en raison de sa maladie, Emmanuel Macron a effectué une courte visite à Alger, sans grande annonce, tenant des propos déjà entendus dans la bouche de ses prédécesseurs par les Algériens. Sur le passé colonial, passage obligé, il a plaidé pour la « réconciliation des mémoires» et il ne veut «ni déni ni repentance». Fermez le banc. En matière de coopération, même si l’Algérie reste, selon l’Élysée, un potentiel économique considérable avec pour l’heure un niveau d’endettement extérieur faible, la préoccupation majeure pour Emmanuel Macron – c’était l’un des buts de sa visite – reste la sécurité régionale (Libye, Sahel). À Alger, il en aurait brièvement discuté avec le chef d’état-major de l’armée algérienne et vice-ministre de la Défense, le général Gaïd Salah : Paris souhaiterait que l’Algérie, seul pays de la région disposant d’une capacité opérationnelle, intègre le G-5 Sahel, structure sur laquelle la France pense se décharger à terme en matière de lutte antiterroriste, lui permettant ainsi de se désengager du bourbier sahélien.(42) Déjà réticent à la présence de forces étrangères à ses frontières — en plus des Français, 800 militaires américains sont basés à Agades au Mali —, Alger voit d’un mauvais œil l’intrusion de l’Arabie Saoudite et des Émirats arabes unis qui, dans un premier temps, participeront au financement du G-5 Sahel à hauteur de 130 millions 0d’euros.(43) Enfin, autre préoccupation de l’Élysée qui l’empêche pour l’heure de définir sa politique algérienne, c’est l’incertitude liée à la maladie du président Bouteflika, dont la succession, au cas où il renoncerait à se présenter, est l’enjeu d’une sourde lutte au sein du pouvoir algérien, avec en toile de fond un contexte financier et économique difficile et un contexte régional qui reste potentiellement porteur de menaces. Pour l’heure, donc, c’est le «wait and see».
2) Redha Malek, L’Algérie à Évian, Seuil, 1994, p. 212. Le chef d’état-major de l’ALN, le colonel Boumediène, et ses adjoints étaient opposés à la signature de ces accords (voir M. Harbi, Le FLN mirage et réalités, Éditions Jeune Afrique, 1982).
3) Le programme de Tripoli adopté en juin 1962 par le CNRA.
4) Jusqu’en 1968, les Algériens étaient dispensés de carte de résidence et de travail.
5) Partie de la Mitidja et de la plaine du Chélif durant l’été 1962, l’occupation des fermes coloniales s’est par la suite propagée
à d’autres régions. Petites et moyennes entreprises ont également connu le même processus.
6) Malgré l’arabisation de l’école et de l’administration algériennes, le français est encore utilisé comme langue professionnelle
et de travail, ainsi que d’enseignement dans les disciplines scientifiques et techniques. Depuis la rentrée de 2003,
il est enseigné comme deuxième langue dès la deuxième année du primaire, au point que la langue française est plus implantée à l’ère actuelle
que durant la période coloniale.
7) Cité par Jean-François Daguzan in Les rapports franco-algériens, 1962-1992, Politique étrangère n°4 1993.
8) Le Monde du 13 mars 1964.
9) Voir René Gallissot, Henri Curiel, Le Mythe mesuré à l’histoire, Éditions Rive-neuve, 2009.
10) Pas moins de huit attaques aériennes françaises avaient été lancées contre les forces du Polisario qui menaçaient
l’armée mauritanienne entre novembre 1977 et mai 1978.
11) François Mitterrand a également été informé de cette libération par les Algériens.
12) Conférence de presse de Giscard d’Estaing, vidéo de l’Ina.
13) L’Humanité du 24 juin 2015, «Quand Giscard chassait l’Algérien».
14) Le Monde du 13 mai 1985.
15) Le Monde, cité.
16) Le Monde du 4 avril 1986.
17) Liberté (Algérie) du 1/02/2018.
18) El Moudjahid du 20 septembre 1988.
19) Le Monde du 6 septembre 1988.
20) Les services algériens ont été actifs dans la libération des otages français au Liban. En contrepartie, dit-on, Paris expulse 12 opposants
algériens proches de l’ex-président Ben Bella en octobre 1986 et ferme les yeux sur l’assassinat de l’opposant Ali
Mecili, membre du FFS, le 4 avril 1987.
21) Le Matin du 15 janvier 1992.
22) Sur cette question, voir Hassane Zerrouky, La Nébuleuse islamiste, éditions 1/Calmann-Levy, 2001.
23) «La France et le Maghreb», article de Paul Marie de la Gorce, Politique Étrangère n°4, 1995. Site Persée.
24) Les créanciers de l’Algérie, un consortium de 200 banques piloté par le Crédit lyonnais, exigeaient le paiement de 9 milliards de dollars au titre du service d’une dette de 24 milliards de dollars alors que les recettes algériennes excédaient à peine les 11 milliards de dollars.
25) Dans la bouche des islamo-conservateurs, le terme de «laïco-assimilationnistes» désignait tous ceux qui étaient opposés à tout compromis avec les islamistes radicaux.
26) L’Humanité du 6 février 1995.
27) La rencontre devait avoir lieu à New York en marge de l’Assemblée générale de l’ONU.
28) Alors que pour Liamine Zeroual «le dossier du FIS est clos», des cercles du pouvoir négociaient en sous-main avec l’AIS et une partie du FIS représentée par Rabah Kébir.
29) Libération du 27-28/12/1997.
30) Voir Le Matin du 16 octobre 1997 et El Watan du 6 janvier 1998.
31) Après la reddition de l’AIS (Armée islamique du salut) fin 1997, et l’écrasement du GIA par l’armée algérienne durant l’année 1998-1999, la violence baisse d’intensité.
32) Voir La Nébuleuse islamiste en France et en Algérie et mes écrits sur les raisons de cette démission dans l’Humanité et le Matin d’Algérie d’août-septembre 1998.
33) L’Humanité du 29 juillet 1999.
34) Voir l’article de H. Zerrouky, Le Matin, 29 novembre 2007. Le ministre des Moudjahidine (anciens combattants) et pratiquement toute la presse tonnaient contre le président français.
35) Le Matin, idem.
36) Soir d’Algérie, 19 juillet 2012.
37) Sur l’attaque du site gazier d’In Aménas, voir l’Humanité des 16 au 22 janvier 2013.
38) Selon plusieurs médias algériens, des avions militaires algériens gros porteurs C 130 et Illiouchine ont transporté du matériel militaire français au Mali.
42) Dépêches AFP du 14 et du 15 12/2017. À propos du G- 5 Sahel, une première réunion élargie regroupant la France, l’UE, les États-Unis, l’Arabie Saoudite et les Émirats a eu lieu à Paris le 13 décembre et une seconde est prévue fin février à Bruxelles. Le G5 Sahel est constitué du Mali, du Tchad, du Niger, du Burkina et de la Mauritanie.
43) L’Algérie est le seul pays, avec l’Irak et le Liban, à ne pas faire partie de la coalition antiterroriste lancée par Riyad en novembre dernier.
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