Bensaïd Aït Idder décoré par Mohammed VI |
Rencontre de marrakech sur le sahara occidental: Comment des partis algériens ont failli être piégés
On en sait davantage sur la surprenante initiative d’un centre de recherche marocain qui entend organiser à Marrakech une conférence sur le Sahara occidental. Des partis politiques algériens contactés par l’institut en question ont accepté de s’exprimer sur la question levant ainsi une partie du voile sur un sujet épineux.
Abla Chérif – Alger (Le Soir) – Explications : il y a près d’un mois, une délégation du centre d’études et de recherches Bensaïd Aït Idder se rend à Alger pour prendre part à la cérémonie du 40e jour du défunt Aït-Ahmed. En marge de cette visite, cette délégation s’entretient avec des responsables politiques algériens auxquels elle fait part de son intention d’organiser une conférence internationale.
Des invitations sont remises aux concernés. Les médias marocains s’emparent immédiatement de l’information et annoncent que des partis politiques algériens ont salué le projet du «forum portant sur le Sahara occidental présenté par le vieux militant marocain nationaliste Mohammed Bensaïd Aït Idder, membre du Parti socialiste unifié (PSU)».
La démarche est percue comme une «première» au sein de la classe politique algérienne connue pour ses positions en faveur de l’organisation d’un référendum pour l’autodétermination du peuple sahraoui. Dans le pays, on craint des tentatives de division sur la question.
Les noms du FLN, du RCD, de Talaï El-Houriyat du FFS et de Jil Djadid sont cités par le centre Bensaïd.
Voilà cependant ce que nous a révélé hier et sans la moindre hésitation M. Kheldoun, le chargé de communication du FLN. «Nous avons effectivement rencontré des membres de cette délégation à l’occasion du 40e jour du décès de Aït-Ahmed. Une invitation nous a été remise, mais il est question d’un congrès ouvert à toutes les questions relatives au droit de l’Homme, à l’UMA (Union du Maghreb arabe), et bien au milieu de tous ces sujets, celui du Sahara occidental. A aucun moment, il ne nous a été dit que cette conférence sera consacrée spécialement à cette question. Nous possédons d’ailleurs une copie de l’affiche.»
A la question de savoir si le FLN estimait avoir été victime d’un piège, M. Kheldoun répond «je vous ai dit ce qu’il en était, chacun peut faire la lecture qu’il veut». Pas de réponse, par contre lorsqu’il s’agit de savoir si son parti allait prendre part à cette conférence : «Je ne le sais pas, nous n’avons pas encore l’information». Le centre de recherche et d’études marocain a-t-il tenté de piéger nos responsables politiques en noyant le dossier sensible du Sahara occidental dans un thème global ? Tout porte à le croire. Et tout porte à croire aussi qu’une partie des informations rendues publiques par ce centre de recherches a également pour objectif de forcer la main à certaines formations politiques.
Le RCD dont le nom a été évoqué à plusieurs reprises dément ainsi carrément l’information d’avoir rencontré des membres de la délégation conduite par Bensaïd. «Nous étions absents à la cérémonie de recueillement du 40e jour en raison d’un calendrier chargé. Nous ne les avons ni rencontrés, ni avons été informés ni invités. Nous ne savons rien de cette question», affirme M. Maâzouz, chargé de communication du RCD.
La même réponse est obtenue au niveau de Jil Djadid dont le nom est également évoqué côté marocain. «Nous n’avons eu aucun contact et nous ne possédons aucune information à ce sujet», indique M. Sofiane Djillali. Pas d’éclairage cependant au niveau du parti de Benflis resté injoignable durant la journée d’hier.
Le FFS a été, quand à lui, très peu prolyxe sur le sujet. Au moment où nous les avons contactés, les responsables de ce parti se trouvaient en réunion. Le chargé de la presse a, cependant, confirmé que l’invitation leur avait été effectivement transmise et qu’elle se trouvait actuellement à l’étude. «Le parti, dit-il, s’exprimera au moment opportun sur la question».
La fondation Bensaïd s’est-elle adonnée à un jeu malsain destiné à porter secours à son roi au moment où il se trouve en perte de vitesse sur le dossier du Sahara occidental ? Les réponses de nos partis politiques sont à même d’apporter l’éclairage voulu.
A l’inverse, on pourrait croire également que ce centre de recherche, dirigé par un célèbre opposant à Hassan II, a été en fait utilisé comme couverture par Mohammed VI pour mener son projet.
Un projet qui inclut naturellement les dirigeants sahraouis officiellement invités eux aussi à prendre part à une conférence qui s’apparente à un véritable marché aux dupes…
Le Soir d’Algérie, 02/03/2016
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