Des experts ont tiré récemment la sonnette d’alarme sur le programme des centrales électriques mis au point par le groupe Sonelgaz. En dépit de ses difficultés, la société italienne Ansaldo continue de récolter de gros marchés en Algérie, tandis que sa rivale Siemens, qui a défié l’Etat en s’associant à un programme marocain sur les territoires occupés du Sahara occidental, continue, elle aussi, de prospérer sur les investissements de la Sonelgaz.
D’autres experts se penchent encore sur les risques environnementaux liés à la centrale électrique de Hamma, la seule au monde à fonctionner en milieu urbain.
Qui sera le prochain partenaire ?
Il y a quelques jours, le groupe italien Finmeccanica avait annoncé un contrat de 300 millions d’euros, arraché par sa filiale Ansaldo Energia pour la réalisation d’une centrale électrique à Hassi Messaoud, alors que cette société est l’objet de négociations sur son avenir. Depuis plus d’un an, c’est l’incertitude totale sur le nom du prochain acquéreur d’Ansaldo Energia. Mais la Sonelgaz continue malgré tout à lui attribuer des marchés de réalisation de centrales électriques. Après les centrales de Marsat El-Hadjadj et d’El-Hamma, la firme italienne Ansaldo avait remporté encore le marché relatif à la réalisation des centrales de Khenchela et de Batna, d’une capacité chacune de 300 mW. De même qu’elle a réussi à arracher le contrat de réalisation de la centrale électrique de M’sila d’une capacité de 500 mW. Ce ne sont surtout pas ses capacités techniques ou l’attraction de ses prix qui sont mis en cause, mais plutôt le risque de voir Ansaldo Energia changer de propriétaire alors que la réalisation de ces infrastructures nécessite un suivi et des opérations de maintenance à long terme. Le fonds d’investissement First Reserve a déjà racheté 45 % du capital d’Ansaldo Energia, mais l’actionnaire principal, Finmeccanica, compte trouver un autre acquéreur pour le reste des parts sociales de sa filiale Ansaldo. Il y a quelques mois encore, l’allemand Siemens était intéressé par cette opération, mais il a fini par se désister et laisser ainsi le doute planer sur l’avenir de cette société italienne dont dépendent beaucoup de centrales électriques en Algérie.
La cause sahraouie bafouée
Au début de l’année, la société allemande Siemens, qui avait de sérieuses chances d’être associée au vaste programme algérien, a décidé de faire son entrée dans le marécage sahraoui. Siemens a décidé donc de fournir des éoliennes et de l’assistance technique pour la construction du parc éolien de Foum El Oued sur les territoires occupés du Sahara occidental. Elle s’est associée avec le holding Nareva, détenu par des proches du roi Mohammed VI. A travers cette opération, Siemens s’était placée dans une situation de défi envers les autorités algériennes qui ont toujours exclu du marché national, les entreprises qui acceptent de composer avec le royaume marocain pour accaparer les richesses du peuple sahraoui. Au lieu d’exercer des pressions sur Siemens, la Sonelgaz continue de fermer les yeux, et permet ainsi au groupe allemand de récolter des sommes colossales sur le marché algérien. Le pire est que certaines entreprises étrangères deviennent également complices dans la démarche de Siemens sur le Sahara occidental. La Sonelgaz vient d’attribuer deux projets importants aux groupes sud-coréens Hyundai et Daewoo mais a omis de les «baliser». Il s’agit de la centrale électrique de Aïn Arnat pour un montant de 70 milliards de dinars et celle de Cap Djinet pour la somme 73.39 milliards de dinars. Le montant global de ces deux centrales avoisine donc les deux milliards de dollars. Les observateurs se demandent comment Siemens a été autorisée par la Sonelgaz à fournir les turbines au profit de ces deux projets et récolter ainsi presque le tiers du montant total. Le ministère de l’Energie, censé refléter la politique du gouvernement, ne semble pas concerné par les négociations entre Hyundai, Daewoo et Siemens sur le dos de la cause sahraouie. Par ailleurs, ces deux groupes devaient faire l’objet en principe d’une attention particulière de la part des autorités algériennes, en raison de leur implication dans des affaires de corruption. L’allemand Siemens a été accablé à plusieurs reprises dans des affaires de pots-de-vin à travers de nombreux pays alors que Daewoo Construction a été éclaboussée il y a quelques années dans une affaire de corruption dans le cadre du projet d’extension du port de Djendjen (Jijel).
Crime contre la nature
Une autre centrale électrique continue de susciter des débats, il s’agit évidemment de la centrale de Hamma, l’unique au monde à avoir été construite en plein centre-ville. Pour produire les 400 mW d’électricité, cette centrale dégage énormément de gaz chauds qui nuisent à l’environnement, notamment au Jardin d’essai. On ignore encore quel risque elle pourrait présenter pour les populations voisines. Pour contenir ce phénomène de pollution de l’environnement, Chakib Khelil avait consulté, en 2002, de nombreux experts algériens et abouti à une solution adéquate. Il fallait drainer ces gaz chauds vers une station voisine de dessalement d’eau de mer. Le cycle combiné des gaz devait chauffer l’eau de mer et le délester des sels minéraux. Par enchantement, Chakib Khelil finit par opter pour une station de dessalement d’eau de mer, mais pas en cycle combiné. Celle qui a construite sur le port d’Alger fonctionne selon le principe d’osmose inversée. Autrement dit, on a engagé un investissement qui n’a pas servi à contenir les gaz dégagés par la centrale électrique de Hamma. Et pour faire taire tout le monde, Chakib Khelil s’arrange pour que la station de dessalement d’eau de mer soit inaugurée en février 2008 par le président de la République…
Livraison prochaine de 24 turbines à gaz
Enfin, une bonne nouvelle. Une société américaine devra livrer prochainement 24 turbines mobiles à gaz pour la production de l’électricité au profit des régions du Sud-Est algérien et éviter les éventuelles perturbations lors des pics prévus pour l’été prochain, a-t-on appris de bonne source. Cette opération fait suite à un programme déjà réalisé l’année dernière, comprenant la fourniture de 6 turbines à gaz mobiles pour les localités de Tindouf, Beni Abbès et Tamanrasset. Ces turbines mobiles, qui sont en fait des petites stations de production d’électricité, ont permis, l’été dernier, de réduire les tensions sur les régions du Sud- Ouest et assuré un minimum de consommation d’énergie. Pour rappel, ce programme a été conçu, en 2012, entre la Compagnie de l’engineering de l’électricité et du gaz (CEEG Spa, une filiale du groupe Sonelgaz) et General Electric et a été entamé avec un segment partiel qui a consommé un montant de 184 millions de dollars et 133 millions de dinars, soit un total équivalent à 13,8 milliards de dinars.
Mokhtar Benzaki
Le Soir d’Algérie, 19/11/2012
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