Le président sahraoui, Mohamed Abdelaziz, a usé, dimanche soir à Aouserd, d’un ton guerrier pour exprimer la détermination du peuple sahraoui à arracher sa liberté.
De notre envoyé spécial
Vêtu d’un treillis militaire, Mohamed Abdelaziz a laissé de côté son habituel discours diplomatique, à l’occasion du 35e anniversaire du Conseil sahraoui. Cette fois, il a préféré s’adresser directement au Maroc, en lui réitérant que «la RASD est un choix irréversible et la République sahraouie vaincra». «Que le Maroc sache que ni ses blindés, ni son armée et ni sa répression ne nous font peur. Nous préférons vieillir et continuer notre combat dans les prisons du Makhzen que de fuir nos terres ou de vivre en exil», a-t-il asséné. Et d’ajouter : «Nous n’allons pas fuir Smara, El Ayoun, Tan Tan, Boudjdour et Aouserd, nous resterons sur nos terres et nous ne tomberons pas dans le piège du Makhzen», a-t-il encore affirmé. Continuant sur sa lancée, le SG du Front Polisario a estimé que «le chauvinisme aveugle marocain ne nous fait pas peur. Nos enfants, nos femmes, nos jeunes et nos vieux sont plus forts que l’armée ou la répression marocaine dans nos territoires occupés.»
Opération suicidaire
Evoquant la dernière attaque du camp de la liberté de Gdeim Izik, près d’El Ayoun, le SG du Front Polisario n’a pas hésité à comparer celle-ci à l’insurrection du 17 juillet 1970 à Zemla.«L’histoire se répète : à chaque fois que les Sahraouis se lèvent pour revendiquer leur droit, le Maroc fait usage des mêmes appareils répressifs», estime-t-il. Le Président sahraoui va encore plus loin en qualifiant les événements de Gdeim Izik d’«opération suicidaire». Ainsi, affirmera-t-il que «le 8 novembre est un tournant décisif pour le peuple sahraoui, le régime marocain est au banc des accusés».
Pour lui, désormais, le monde a su ce qui s’est passé réellement à Gdeim Izik, malgré l’embargo médiatique imposé à la ville d’El Ayoun. D’ailleurs, il n’a pas omis de rappeler le dernier rapport accablant de Human Rights Watch et la condamnation du Parlement européen sur ce qui est qualifié de tragédie de Gdeim Izik. Une tragédie dont on ignore encore le nombre de victimes vu l’embargo médiatique imposé par les forces de la répression à l’entrée d’El Ayoun. «On n’a pas encore le bilan officiel des événements de Gdeim Izik, mais ce qui est sûr, il y a eu des dizaines de morts, des centaines de blessés et de disparus», affirme
Abdelaziz.
Victoire
Le président sahraoui pense que «l’attaque sauvage du camp de la liberté est la preuve d’un échec du gouvernement et du colonialisme marocain.» Le roi multiplie, selon lui, ses «dérives» face à «un peuple qui ne reculera pas devant la répression», promet-il. «La ville d’El Ayoun, actuellement sous embargo médiatique, est pleine de prisons, mais la population d’El Ayoun est plus que jamais armée d’esprit de résistance et d’union», devait assurer le président Abdelaziz. Optimiste, il dit être convaincu que «les événements de Gdeim Izik vont nous donner un nouveau souffle à l’intifada ; le but du Maroc est de vider la ville d’El Ayoun de sa population, mais les Sahraouis vont rester malgré la répression.»
M. Abdelaziz est allé jusqu’à qualifier de «victoire» des Sahraouis, l’attaque du camp de la liberté. Le président sahraoui a, par ailleurs, estimé que la manifestation qu’a organisée Mohamed VI, dimanche, à Casablanca, pour dénoncer la position algérienne et celle de quelques partis de gauche espagnols d’un «échec». Pour lui, «le Maroc veut camoufler son échec par la tenue d’une telle manifestation en voulant laver son crime qu’il a commis à El Ayoun le 8 novembre dernier.»
Le président du Conseil national Sahraoui : «Le recours aux armes est une nécessité»
Intervenant à l’occasion d’une conférence de solidarité avec les victimes de Gdeim Izik, le président du Conseil national sahraoui, Khatri Adouh, a franchi allègrement la ligne rouge. «Le recours aux armes est une nécessité vu les circonstances actuelles, parce que le Maroc s’entête à la violation des droits de l’homme et de la torture dans les territoires occupés», a-t-il déclaré. Ce responsable n’a pas omis de saluer la dernière position du Parlement européen, condamnant la «dérive» marocaine à El Ayoun. Il a par ailleurs profité de l’occasion pour démentir les «dernières allégations» du colonisateur en ce qui concerne les retraits de soutien à la RASD de certains pays. «Contrairement à ce qu’a avancé le Maroc, les amis de la RASD sont restés les mêmes, aucun pays n’a retiré sa reconnaissance de la RASD», a tenu à rassurer Khatri Adouh. La célébration du 35e anniversaire du Conseil national sahraoui a été caractérisée par l’organisation d’une marche de solidarité avec les victimes du «camp de la liberté» et des activités culturelles. Un documentaire émouvant a été projeté pour témoigner de l’atrocité de la répression qu’ont réservée les forces d’occupation marocaine à une population sans défense, qui ne demande qu’à vivre dans la dignité et la liberté.
Rabah Boujemaa
El Watan, 30/11/2010
Soyez le premier à commenter