Ils étaient venus nombreux au siège du journal Echourouk. Le ministre de la Communication, Nacer Mehal, Rédha Malek. Me Miloud Brahimi et Me Mostefa Bouchachi, Mohamed Saïd,
Benbaïbèche étaient aussi présents pour rendre hommage à l’homme qui incarne la lutte opiniâtre et acharnée pour la consécration des droits de l’homme.
A la fin de cette cérémonie, M. Nacer Mehal et M. Fodil ont remis au Président tunisien un burnous, le blason du quotidien «Echourouk» et une épée datant de la période de la résistance populaire algérienne. Deux heures plus tard, à Djenane El Mithaq, celui qui, parlant de Ben Ali, se contente d’évoquer «le président déchu» ou «le criminel», a redit ce qu’il doit dans sa formation et son cheminement à «la révolution algérienne et au penseur Malek Bennabi ». La décennie noire que le peuple algérien a vécue «fut également sombre pour nous», a-t-il fait remarquer.
Dans la foulée, il saluera les journalistes algériens «qui ont soutenu leurs frères Tunisiens dans leur lutte pour la liberté».M. Marzouki a reconnu que son pays traverse des moments difficiles. Il ne perd pas pour autant son optimisme. La révolution tunisienne était à «l’épreuve» et à «la croisée des chemins». «Va-t-elle sombrer dans le chaos ou au contraire devenir un exemple pour les autres révolutions arabes ?», s’est-il interrogé après une remarquable intervention de l’écrivain Amine Zaoui. Au siège du journal Echourouk, celui-ci a plaidé pour la modernité, une vision et une lecture éclairées de la religion citant les intellectuels de Tunisie comme Messaâdi ou Tahar Haddad connus pour leur interprétation. Dans une courte intervention, revêtu d’un burnous offert par les responsables du journal, le Président tunisien s’est voulu rassurant. «Nous allons relever le défi pour atteindre les objectifs de la révolution en termes de dignité, de justice et de liberté».
Pour le Président Marzouki, les intellectuels en Tunisie qui «exercent aujourd’hui le pouvoir en Tunisie ont le devoir de relever ce défi et donner la preuve qu’ils méritent la confiance du peuple pour concrétiser ses aspirations et ses attentes». Les intellectuels «ne trahiront pas ces rêves». La révolution «n’est pas seulement l’amélioration du niveau de vie et des droits sociopolitiques mais un saut qualitatif dans la vie de l’Homme».
«L’ISLAM POLITIQUE N’EST PAS LA SOLUTION»
L’Algérie est, pour lui, «une grande sœur et il a mis sur le compte d’une manipulation médiatique de récentes déclarations sur l’interruption du processus électoral en 1992». Lui, qui a toujours pensé et affirmé que «l’Islam politique n’est pas la solution», n’en est pas à sa première déconvenue. La construction maghrébine a pris une large place dans ses réponses.
Le problème du Sahara occidental est une question «qui existe et qu’on ne peut ignorer car elle est douloureuse sur le plan humain». Il ne peut concevoir celleci sans une réconciliation entre le Maroc et l’Algérie. «On ne doit pour autant en faire un préalable pour la construction du Maghreb qui peut se déployer dans de nombreux domaines comme les infrastructures de base, le développement des zones frontalières».
La question est posée actuellement au niveau de l’ONU. «Une fois les relations améliorées et les frontières ouvertes, on procédera au lancement de projets communs d’où découlera un climat psychologique susceptible d’ouvrir les canaux de communication et de connaissance à même de créer des conditions politiques et psychologiques favorisant la résolution de ce conflit de manière à préserver l’honneur ainsi que les intérêts communs de tous», a-t-il notamment dit. Au terme de la tournée qu’il vient d’effectuer, les dirigeants des pays du Maghreb ont convenu de tenir un sommet maghrébin dans le courant de l’année. Le sommet sera, dira-t-il, sérieux et ses résultats palpables pour les peuples de la région car ceux-ci «ne veulent plus voir de ces rencontres où l’on se congratule pour se séparer sans résultats». Il a plaidé pour «la liberté de circuler, de s’installer, d’investir et de voter aux élections municipales». La rencontre se tiendra probablement en Tunisie «après examen des dossiers par les Etats». Interrogé sur le renvoi de l’ambassadeur de Syrie à Tunis, le Président Marzouki a indiqué que son pays a pris la décision de renvoyer l’ambassadeur du régime syrien, qui a «perdu toute légitimité après avoir usé de la violence contre son peuple».
Pour ce qui est de l’extradition du président Ben Ali en exil à Ryadh, il a déclaré : «nous sollicitons nos frères en Arabie Saoudite pour nous remettre ce criminel. Toutefois, nous ne ferons pas de cette demande une condition pour la continuité des relations entre nos deux pays». Selon lui, un «procès équitable» de l’exPrésident tunisien est «possible et offre toutes les garanties». Il insiste sur «la revendication légitime de la Tunisie à récupérer l’argent et les biens détournés par Ben Ali». Sur le sort réservé à l’ancien premier ministre libyen, El-Baghdadi, qui se trouve en Tunisie, il a indiqué que son pays ne procédera pas à son extradition tant que la Libye ne dispose pas d’un système stable et d’une justice indépendante.
H. Rachid
Horizons, 14/2/2012
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