par Noreddine Mezalla
Le président tunisien, Mohamed Moncef El-Marzouki, a été reçu comme il se doit par son homologue algérien, Abdelaziz Bouteflika, ce qui prouve encore une fois que l’Algérie cultive, par le geste, la politique de bon voisinage. Quels que soient les présidents accédant à la magistrature suprême, pourvu qu’ils n’aient pas d’intention hostile envers notre peuple. Contrairement au CNT libyen, l’opposition tunisienne, qui vient de gagner le pari de l’alternance par les urnes, n’a jamais montré d’animosité envers l’Algérie dans la tourmente du printemps arabe. Mieux encore, le nouvel homme fort de la Tunisie a déclaré qu’il ne souhaitait pas une intervention étrangère en Syrie, préférant que les pays règlent leurs crises souverainement. De petites phrases qui plaident pour une compatibilité des positions entre Tunis et Alger sur les questions fondamentales relevant de la géopolitique.
Malheureusement, l’optimiste Marzouki, homme de gauche qui a accepté la cohabitation avec les islamistes d’Ennahda, vient de perdre de sa clairvoyance en provoquant une rupture épistémologique dans son appréhension du Maghreb. Dans son euphorique ambition de conforter l’unité de cette région d’Afrique du Nord, Marzouki a voulu emprunter un raccourci dangereux qui heurtera au moins deux peuples, sans compter tous ceux qui se battent pour le droit et la justice dans ce monde. Voulant peut-être éluder une question qui dépasse ses épaules de «néoprésident», l’ex-défenseur des causes nobles a osé déclarer qu’on pourrait construire le Maghreb uni en contournant les sujets qui fâchent, faisant allusion à la problématique du Sahara occidental.
Si Bouteflika ne semble pas lui en avoir tenu rigueur, probablement pour ne pas gâcher la visite du frère tunisien et ne pas renoncer aux traditions d’hospitalité, les Algériens n’acquiesceront jamais à pareilles propositions de félonie. Chez nous, il est des principes et des valeurs non négociables, comme le soutien inconditionnel aux peuples encore colonisés. En Palestine ou au Sahara occidental. Que la petite Tunisie ait le vent en poupe, au lendemain de sa révolution, cela n’y changera rien. On ne bâtira pas un grand Maghreb par de petites manœuvres, sur le dos d’un peuple qui souffre, pour des calculs sans humanisme. A ce prix, l’UMA peut encore attendre.
Noreddine Mezalla
Le Jeune Indépendant, 13/2/2012
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