C’est fait, l’agence Standard & Poor’s a donné un coup de semonce à l’Etat français. Il perd son excellence en matière de gestion budgétaire, il perd le «AAA». La conséquence est qu’il devra payer plus cher ses emprunts. Les spécialistes disent que la France devra payer le double de ce que l’Allemagne paye au créancier. Parce que les prêteurs calculent leur exigence en fonction des appréciations des agences de notation. Déjà, avant cette mesure, l’Allemagne empruntait à 1,85% par an pour une obligation à 10 ans, quand un taux de 3,1% était appliqué à la France. Ce qu’il faut savoir à ce sujet c’est que les directives, en vigueur dans l’Union européenne, imposent aux Etats de n’emprunter qu’aux banques privées et quand, traditionnellement, ce sont leurs banques centrales qui étaient leurs prêteurs. La France, dans ce dernier cas, aurait bénéficié de taux moins contraignants et son budget n’aurait pas souffert d’un endettement aussi lourd. La baisse de la fiscalité, consécutive à la crise économique, a dévoilé le pot aux roses. Elle a dévoilé les dessous de la politique néolibérale imposée aux peuples, à leur insu. A ce titre, même si le peuple français a voté contre le projet de constitution européenne et contre cet article 104 du «Traité de Maastricht», repris dans l’article 123 du «Traité de Lisbonne», non soumis à référendum. Voici ce que stipule, en substance, cet article : «Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées «banques centrales nationales», d’accorder des découverts ou tout autre type de crédits aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres. L’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite». Ce fut l’acte qui a livré pieds et poings liés les pays signataires à la voracité des spéculateurs de la finance mondiale. Malheureusement, pour ceux qui ont cru bon de se livrer à une telle opération, l’effondrement du système à partir de 2008 a mis en lumière la magouille. Il leur sera difficile de retirer aux peuples, sans dégâts, les acquis sociaux. Pour ce qui est de la France, la perte du triple A, si le mode d’emprunt est maintenu, aura pour conséquence d’obliger à une aggravation de l’austérité, dans le double but d’honorer des dettes plus chères et plus lourdes et de récupérer la note d’excellence. Une gageure chargée de risques sociaux. Ce qui est remarquable est que les ténors du Parti dit socialiste s’attaquent plutôt au président de la République, Nicolas Sarkozy, qu’aux causes politiques et économiques réelles. Ils ne dénoncent pas le recours aux banques privées, ni l’ultralibéralisme qui a hypothéqué le développement économique et social, confirmant la symbiose de la classe politique qui occupe le pouvoir, en alternance, depuis plusieurs décennies. On ne trouve que de rares voix qui s’en prennent à la «guerre de la finances contre la France» et qui appellent la Banque centrale à «annoncer immédiatement qu’elle prêtera à la France à un taux très bas». Ainsi va la «démocratie», au-dessus des peuples, au profit de l’argent.
Les Débats, 17/1/2012
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