Catégorie : Monde

  • Pia Klemp et Carola Rackete : deux capitaines valeureuses

    Pia Klemp et Carola Rackete sont allemandes. Toutes les deux commandaient des bateaux chargés d’émigrés qu’elles tentaient de sauver. Deux valeureuses, aujourd’hui en état d’arrestation.

    Entendons-nous bien : non, les migrations en cours ne sont pas « un bienfait pour l’Europe » comme se plaisent à le proclamer certains inconscients illuminés. La vague migratoire actuelle est un fléau engendré par deux autres fléaux, les guerres et le dérèglement climatique dont nous, nations occidentales « favorisées », portons l’écrasante responsabilité. Les migrations sauvages de masse résultent toujours d’un déséquilibre planétaire grave.

    Oui, ces migrations de masse menacent de déséquilibre démographique les pays où se précipitent les migrants. Ces problèmes seraient sans doute moindre si les pays occidentaux s’entendaient pour réguler et répartir ce flux sauvage. Mais qu’attendre de pays malades, recroquevillés sur un lustre d’antan envolé ?

    On ne laisse pas des êtres humains se noyer dans des conditions atroces
    Reste qu’une fois ce constat d’échec établi sur le fléau migratoire, la priorité des priorités devrait être le sauvetage humanitaire des déracinés. On ne laisse pas des êtres humains se noyer dans des conditions atroces, d’où qu’ils viennent et quels qu’ils soient. Voilà pourquoi Pia Klemp et Carola Rackete sont des valeureuses de ces temps troublés.

    Jugée en Italie, Pia Klemp risque aujourd’hui vingt ans de prison et une amende de 15.000 euros pour chaque vie qu’elle aura sauvé. Vous entendez bien, une peine proportionnelle au nombre de sauvetages humains effectués !

    Ayant forcé en désespoir d’attente le blocus de la douane italienne à Lampedusa, Carola Rackete a été déclarée hors-la-loi, accusée de rébellion et assignée à résidence en attente de son jugement. Son bateau le Sea Watch 3, a été mis sous séquestre comme « bateau pirate ».

    Quelques lueurs d’espoirs

    Une fois de plus, entendons-nous bien : il n’est pas question de laisser les autres pays occidentaux profiter du problème pour régler leur conflit avec l’italien Salvini. Tous portent là encore, à charge égale, l’écrasante responsabilité de la situation, France comprise. Faut-il qu’on rappelle à nos autorités les tragédies à répétition de la vallée de la Roya ?

    Mais outre les actions courageuses de quelques héros des temps modernes comme Cédric Herrou, Pia Klemp ou Carola Rackete, quelques lueurs d’espoirs apparaissent à travers de fortes réactions populaires en faveur de ces derniers.

    Une pétition en faveur de Pia Klemp a recueilli quelques 80.000 soutiens. Deux cagnottes ouvertes pour permettre à Carola Rackete d’honorer ses frais de justice ont rassemblé en quelques jours, l’une la somme de 241.000 euros, l’autre presque 400.000 euros. Comme avec le soulèvement des Gilets jaunes, comme pour les soutiens spontanés au boxeur Dettinger, l’honneur est sauvé par les humains d’en bas.

    Chroniques de Yéti

    Tags : Italie, migration, subsahariens, droits de l’homme, Carola Rackete, Pia Klemp,

  • Carola Rackete, le symbole de la dignité,

    Un tribunal d’Agrigente a levé l’assignation à résidence de Carola Rackete, la capitaine allemande arrêtée ce week-end à Lampedusa après avoir accosté de force avec 41 migrants.

    Une juge italienne s’est prononcée, mardi 2 juillet, en faveur de la libération de Carola Rackete, la capitaine allemande du navire humanitaire Sea-Watch 3 arrêtée samedi pour avoir accosté de force dans la petite île de Lampedusa avec quarante et un migrants à bord.

    La juge chargée de l’enquête préliminaire a en effet indiqué aux médias italiens qu’un décret italien sur la sécurité n’était « pas applicable aux actions de sauvetage ».

    Le ministre italien de l’intérieur, Matteo Salvini, qui a vivement déploré la décision de la magistrature italienne, a précisé que la capitaine allemande allait faire l’objet d’une mesure d’expulsion vers l’Allemagne, car elle est « dangereuse pour la sécurité nationale ».

    La mesure d’éloignement du territoire italien, avec accompagnement à la frontière, doit encore être confirmée par les autorités judiciaires, a-t-il précisé.« Elle retournera dans son Allemagne, où ils ne seraient pas aussi tolérants avec une Italienne si elle devait attenter à la vie de policiers allemands », a commenté celui qui est aussi vice-premier ministre et patron de la Ligue (extrême droite). « L’Italie a relevé la tête : nous sommes fiers de défendre notre pays et d’être différents des autres petits leadeurs européens qui pensent pouvoir encore nous traiter comme leur colonie », a-t-il ajouté.

    DÉFENSE DES DROITS DE L’HOMME

    L’ONG Sea-Watch a, pour sa part, exprimé son soulagement dans un tweet : « Nous sommes soulagés que notre capitaine soit libre ! Il n’y avait aucune raison de l’arrêter, car elle était engagée dans la défense des droits de l’homme en Méditerranée et prenait ses responsabilités là où aucun gouvernement européen ne le faisait. »

    L’Allemande de 31 ans avait été arrêtée dans la nuit de vendredi à samedi, placée samedi matin aux arrêts domiciliaires à Lampedusa, puis transférée lundi matin à Agrigente, la ville de Sicile dont dépend la petite île italienne. Lundi, elle avait été entendue pendant trois heures par la juge chargée de vérifier la validité de son arrestation.

    Tags : Italie, migration, subsahariens, ONG, Sea Watch, Carola Rackete, Mateo Salvini,

  • Maroc : L’histoire de Lalla Salma revient en force avec la fugue de Haya de Jordanie

    La fuite de Haya de Jordanie, la sixième épouse de l’Emir de Dubaï, Mohamed Ben Rached Al Maktoum, rappelle l’histoire de Lalla Salma, la princesse marocaine disparue il y a près de 2 ans.

    Son absence a été remarquée lors de la compétition équestre Royal Ascot, un rendez-vous qu’elle n’a jamais marqué à cause de sa passion pour les chevaux et son amitié avec la Reine d’Angleterre. Celle de Lalla Salma a été remarquée lors du Prince Harry et son épouse ainsi que lors de la visite des Rois d’Espagne.

    Haya et Lalla Salma se sont effacées de la scène publique de la même manière. Si Haya a réussi à sortir de Dubaï et demander l’asile en Allemagne, les nouvelles de l’épouse du roi du Maroc sont loin d’être claires. Si elle est encore en vie, Mohammed VI lui a interdit de donner des signaux de vie.

    L’épisode de Haya de Jordanie a réssucité l’histoire presque oubliée de Salma Bennani, la femme qui a donné une nouvelle image à la monarchie marocaine mais qui a été obligée à vivre dans l’anonymat et la discrétion pour des raisons que les autorités marocaines ne veulent pas préciser. Un sujet dont le palais royal est le seul responsable.

    Mohammed VI a été le premier roi marocain à permettre à sa femme de paraître dans la presse nationale et internationale, mais il a été aussi le premier à annoncer son divorce dans des circonstantes très ambigues qui restent à éclaircir.

    Si l’Emir de Dubaï bataille pour le retour de son épouse, Mohammed VI semble préférer enterrer l’affaire dans le silence et l’énygme, ce qui prouve qu’il s’agit d’une question grave qui gêne au palais royal et dont personne n’ose en parler.

    La mère de Mohammed VI, Lalla Latifa, a épousé le garde du corps de son défunt mari, avec lequel elle gardait une liaison qui a poussé certains à pretendre que Mohamed Mediouri est le véritable père du roi actuel du Maroc.

    Selon d’autres sources, la maladie et l’orientation sexuelle du souverain marocain n’ont pas permis à Lalla Salma de mener la vie dont elle rêvait et qui semble être loin des contes de fées qu’on raconte sur les couples royaux et qui risque de sortir à la lumière avec l’histoire de la princesse jordanienne. Probablement, elle contribuera à dévoiler le sort de la princesse Cheikha Latifa, emprisonnée depuis sa deuxième tentative de fugue.

    Tags : Maroc, Lalla Salma, Mohammed VI, Haya de Jordanie, Dubaï, Emir,

  • L’honneur de désobéir : Carola Rackete, capitaine du Sea-Watch 3

    Gad Lerner

    Cette fois, Salvini se retrouve face à un os dur : Carola Rackete

    On en vient à se demander : mais que pensera la mère de Salvini de son fils? Quand, face à ce qui, quoiqu’on on en pense, reste un drame humain, son Matteo écrit : « Personne ne débarque, ils m’ont cassé les couilles. Que cette petite frimeuse se le tienne pour dit ».

    Face à cette énième exhibition génitale viriloïde pour égratigner la Capitaine du Sea-Watch 3, Carola Rackete, qui, elle, est prête à prendre un risque réel, cette jeune femme redonne à Salvini sa vraie dimension, celle d’un tout petit capitaine. Petite frimeuse ? On n’a pas plutôt affaire à un ministre matamore de café du commerce ?

    Comme dans les jeux vidéo dont il se délecte en pleine nuit, le reponsable de l’ordre public singe la parodie de la défense des frontières nationales en bloquant un bateau de 50 mètres de long avec 42 naufragés à son bord. Et puis il menace d’ériger des barrières physiques (flottantes ?) à l’imitation de ses modèles Orbán et Trump, ou au contraire (ce serait déjà mieux) d’arrêter d’identifier et d’enregistrer les migrants à leur débarquement, pour qu’ils puissent continuer leur voyage vers l’Europe du Nord, d’où, ce faisant, ils ne pourraient plus être renvoyés de force en Italie.

    Mettant le chapelet d’ordonnance dans sa poche, Salvini demande « le respect pour les prêtres » et se moque de l’archevêque de Turin, Cesare Nosiglia, coupable d’avoir offert l’hospitalité aux 42 naufragés ; il lui envoie dire qu’il utilise ses ressources pour 42 pauvres Italiens car de toute façon ceux-là (les migrants) ne débarquroent même pas à Noël.

    Oui, on se demande, sans vouloir lui manquer de respect, ce que la mère de Salvini pense dans son cœur de ce fils qui se réjouit de l’exhibition publique des moqueries et des méchancetés sur des gens qui souffrent. Notre ministre de la propagande est convaincu, à tort, que ceux qui applaudissent en ricanant à ses bravades sur les réseaux sociaux, représentent le sentiment commun de la nation. Il fait mal ses comptes.

    Même si nous admettons que les 9 millions de votes liguistes – ainsi que ceux des Frères d’Italie et une partie des berlusconiens – vivent comme une libération l’indifférence envers les rescapés des camps de prisonniers libyens, ce n’est également qu’une minorité en colère d’un pays de 60 millions d’habitants qui reste bien meilleur que l’image qu’en donne Salvini chaque soir sur les écrans de télévision.

    Il devra faire face à une Italie certainement intimidée, réduite au silence par l’acharnement avec lequel viennent liquidées les figures de référence qui prêchent l’humanitarisme et la solidarité, une Italie qui vit dans l’inconfort croissant la spirale de la violence verbale et du cynisme.

    La fable selon laquelle ceux qui pratiquent le sauvetage en mer sont « complices de trafiquants d’êtres humains », est un poison répandu depuis des années sans une seule preuve contre les ONG. Les complices des trafiquants d’êtres humains sont les hommes politiques de toutes les couleurs qui, à partir de la loi Bossi-Fini, qui interdit toute forme d’immigration légale, ont accordé aux organisations criminelles un monopole sur ces routes.

    Les complices des trafiquants d’êtres humains sont les dirigeants qui ont révoqué le patrouillage des eaux internationales par notre marine. Complicité d’autant plus odieuse qu’ ils prétendent l’avoir fait pour le bien des migrants qui meurent de plus en plus de soif et de faim, au lieu de se noyer, déchargés sur les pistes du Sahel et du Sahara, ou asservis dans des camps de concentration sous la garde des mêmes trafiquants.

    « Je suis responsable des 42 personnes sauvées en mer et elles n’en peuvent plus. Leur vie est plus importante que tout jeu politique ».

    Cette fois, Salvini se retrouve face à un os dur : Carola Rackete. Il sera difficile de propager que la commandante du Sea-Watch 3 est un rouage de la finance mondialiste ennemie du peuple italien, ou peut-être une aventurière bolchevique. La désobéissance civile par laquelle la capitaine a décidé de défier le tout petit capitaine et son décret de sécurité bis qui criminalise le sauvetage en mer, est la forme la plus classique d’hommage à la légalité substantielle, fondée sur le respect des règles internationales consacrées par le droit de la mer. Salvini prétend ne pas le savoir, mais pendant des semaines devant le port tunisien de Zarzis, le remorqueur Maridive 61 a été bloqué par les autorités locales avec 75 migrants à son bord, avant d’être autorisé à les débarquer.

    On est loin de « la Tunisie endroit sûr pour débarquer ». Quelqu’un croit-il vraiment que le problème des migrants sera résolu en les renvoyant en Afrique ? Bien sûr, il est vrai que le gouvernement jaune et vert a beau jeu de rappeler des manquements coupables des autres pays de l’UE, mais depuis quand les manquements des autres peuvent-ils justifier les nôtres ?

    Carola Rackete est une citoyenne européenne qui tente courageusement, à ses propres risques, de racheter le déshonneur des gouvernants de l’Union. De nous tous. Il faut le rappeler aux dirigeants du Parti démocrate qui se précipitent aujourd’hui à Lampedusa, mais dont le dernier gouvernement a inauguré l’œuvre de dénigrement des ONG qui a produit les dégâts qui font aujourd’hui l’objet de leur répulsion morale. Il y a des valeurs indérogeables : une jeune femme capable d’écouter les voix de ceux qui souffrent, a dû venir nous le rappeler, en pleine mer.

    Tlaxcala

    Tags : Carola, Rackete, Italie, Allemagne, migration, Sea Watch,

  • Maroc : coup d’Etat manqué contre Guillaume Soro

    Coup d’Etat manqué à Rabat (Deuxième partie)

    L’Humiliation : Échec et Mat

    Réveillé au petit matin le 14 juin 2019 de fort bonne humeur à Rabat, je m’attendais à ce qu’on m’informât de l’état d’évolution des préparatifs de notre session régionale Afrique de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie (APF). Mais, une sorte de silence suspect flottait dans l’air. Le Président Habib El Malki de la Chambre des Représentants du Maroc était de retour du Nigeria, m’avait-on assuré. Il aurait dû m’appeler déjà, à tout le moins, comme cela se fait lorsqu’on accueille un invité politique d’un pays étranger chez soi. Mais jusqu’à 11 heures voire 12 heures, rien ne semblait poindre à l’horizon. Vous avez dit bizarre ?

    Je m’interrogeai de plus en plus sur ce manque notoire de courtoisie inhabituelle en terre marocaine. Un heureux coup de fil vint m’informer que les secrétaires généraux parlementaire et administratif de l’APF (mes collègues et collaborateurs du Bureau de l’APF) le député Jacques Krabal et M. Emmanuel Maury seraient, quant à eux, déjà en concertation avec notre hôte et mon successeur Amadou Soumahoro.

    Diantre, de quelle concertation pouvait-il être question quand, en ma qualité de Premier Vice-Président de l’APF et en l’absence du Président François Paradis, je devais être aux commandes ? Que faisait-on de mes droits statutaires de membre du Bureau ? Bon sang, que devenait cette APF si à cheval sur les règles ? Une APF godillot ? Je ne pouvais comprendre.

    Je réussis in extremis à joindre le député Jacques Krabal, et lui posai la question :

    – Qu’est-ce qui se passe, c’est à ne rien comprendre ? Et le temps qui passe ?
    Certainement déjà contrarié, M. Krabal m’avoua que mon successeur posait des préalables inacceptables (nous l’allons voir tout à l’heure). En somme, je n’étais pas le bienvenu à la régionale Afrique de l’APF. L’hôte était élusif, visiblement embarrassé et vacillait pour ne pas dire tergiversait, ce qui n’arrangeait ni les affaires de M. Krabal, ni les miennes.
    En cette mi-journée du 14 juin 2019, je compris subitement qu’un air de coup d’Etat flottait et se précisait dangereusement dans le ciel de la Francophonie.

    J’imagine encore, rêvassant, le vaillant roi Hassan II quand il comprit un certain 16 août 1972 qu’il y’avait un danger mortel dans le ciel !

    Le cerveau tourne à mille tours de l’heure et l’adrénaline monte.

    Alors, je m’empressai de m’habiller, enfilant ainsi ma tenue de combat, je décidai de prendre les devants pour déjouer la machination. Je me rendis immédiatement au Bureau de la Chambre des Représentants du Maroc où je ne tardai point à me rendre compte que les principaux responsables de l’institution m’évitaient par toutes sortes de contorsions.

    -Puis-je parler à monsieur El Malki, Président de la Chambre des Représentants ou à un de ses adjoints ?

    • Euh, Monsieur Soro, M. Malki est en conciliation !

    • Avec qui?

    • …

    Les regards étaient fuyants. Ça sentait le roussi. Lui aussi, Habib El Malki pour qui j’avais tant d’estime en raison de mes liens avec son prédécesseur mon ami Rachid Talbi Alami était-il dans la conjuration ? Tu quoque mi fili ? La célèbre et sinistre phrase de Jules César quand il vit au nombre de ses assassins son propre fils Brutus me vint à l’esprit ! Une vraie forfaiture.

    Je ne pouvais plus compter sur le sieur El Malki, qui préférait avoir affaire à mes collaborateurs français du Bureau plutôt qu’au 1er Vice-président africain de l’APF ! Je m’interroge encore aujourd’hui : si j’avais été un 1er Vice-président suisse, canadien, ou belge quelle aurait été la conduite de M. El Malki ?

    Je me souviens, du temps où j’étais encore Premier Ministre, de l’inégalité de traitement qui existait entre un Premier Ministre africain et un Premier Ministre occidental. En effet, lorsqu’un Premier Ministre européen nous faisait l’insigne honneur de nous visiter dans nos pays, nous devions pointer à l’aéroport dès le matin et guetter le bruit des moteurs de l’avion jusqu’à son atterrissage. Nous devions rassembler le pauvre peuple pour chanter, danser et surtout applaudir pour témoigner et démontrer notre amour et notre attachement à sa personne. En revanche, quand nous allions en visite en Europe, nous étions reçus par un obscur agent du protocole des Affaires étrangères. J’avais toujours trouvé cela fort humiliant. Je ne sais pas si les choses ont changé. Il en va de même lorsque le plus petit chargé de mission européen venait à visiter nos pays. Le Président de la République et le Premier Ministre étaient mobilisés pour lui accorder une audience prioritaire. L’inverse est totalement impossible. Même nos ambassadeurs en Europe ne voient le premier magistrat des pays où ils sont affectés que le temps de la présentation de leurs lettres de créances. C’est un regrettable complexe d’infériorité que nous, africains, avons malheureusement intégré à nos coutumes diplomatiques.

    Comment comprendre autrement que nonobstant ma posture de premier responsable de la Francophonie présent sur le sol marocain, l’on m’informe que le Président de la Chambre des Représentants du Maroc a organisé des conciliabules en catimini avec d’autres, tout en prenant l’étrange soin de m’en exclure ? On reçoit par contre avec faste les représentants français, qui sont mes collaborateurs du Bureau de l’APF, comme au bon vieux temps de leur Coloniale. On organise des concertations dans mon dos, et comme de juste, c’est moi qui suis visé par tous ces conciliabules de comparses venus de partout.

    Que la nature humaine est étrange ! Je vis sauter dans leurs parachutes dorés et prêtés par le régime d’Abidjan, les uns après les autres, à la queue-leu-leu, la galerie de putschistes venus de pays que je ne citerai pas. Il faut dire qu’à mon insu, la nuit avait été longue. Les comploteurs avaient réussi à s’associer au Président de la Chambre des Représentants du Maroc, El Malki, pour fouler aux pieds les règles de la Francophonie et mes droits statutaires de Premier Vice-Président de l’APF.

    Décidément, le fameux gros téléphone et les liasses de billets d’Abidjan avaient produit des effets. Alourdie par les moyens de l’Etat, la délégation de putschistes venus d’Abidjan croyait enfin tenir le bon bout. Des parlementaires que j’avais longtemps considéré comme des amis francophones, sautaient des aéronefs ennemis et m’abandonnaient allègrement dans le Ciel de la Francophonie.

    Ce fut un spectacle ahurissant.

    Une députée ouest-africaine que je croyais fort bien connaître fut d’une telle fureur hostile envers moi lors du huis-clos, que je compris l’effet impressionnant de l’argent sur l’espèce humaine. Je comprenais encore moins la suffisance d’un autre Président de l’Assemblée Nationale d’un pays ami, devenu subitement amoureux fou de mon successeur. Tout aussi remuant, l’Ambassadeur de Côte d’Ivoire au Maroc, Idrissa Traoré, faisait des pieds et des mains pour le succès du putsch. Pauvre Côte d’Ivoire ! Voici donc les nègreries auxquelles notre diplomatie est réduite.

    Dans toute cette escadrille de complotistes, je fus également impressionné par M. Emmanuel Maury. On le voyait faire de grands gestes dans les couloirs, suggérant ma démission du poste de Premier Vice-Président de l’APF pour, dit-il, faciliter les choses au détriment des statuts de notre organisation.

    Mais, il y eut heureusement des raisons de ne pas désespérer. Car, malgré tout l’or du monde qu’on leur avait promis tout au long de la nuit, sans oublier en prime des carrières internationales brisées qu’on leur prédestinait, des parlementaires africains dignes résistèrent à la forfaiture de la Françafrique. Certains Présidents d’Assemblées nationales africaines se dressèrent contre les putschistes ! Je salue ces consciences vaillantes et libres !

    Ce qui s’est passé à Rabat relève de l’insolite et de l’humiliation. Humiliation pour toute la nation ivoirienne, humiliation pour les délégations ivoiriennes venues participer à l’Assemblée Régionale Afrique de l’APF à Rabat. Personnellement, j’en ai éprouvé une grande honte. Durant toute ma longue carrière aussi bien gouvernementale que parlementaire (2003-2019), je n’ai jamais connu ni vécu pareil déshonneur pour mon pays et pour ses représentants.

    Elu le 12 mars 2012 Président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire, je me suis attelé, dès ma prise de fonction, à travailler au rayonnement international de notre assemblée nationale. L’état de délabrement de notre institution était tel que j’ai dû délocaliser les travaux à Yamoussoukro. A cet instant, j’ai une pensée pieuse pour feu Maître Konaté Fakhy, alors Secrétaire Général de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire. Il fut un pilier de ce qu’il convient de nommer la Diplomatie parlementaire. En effet, c’est avec Me Fakhy que nous avons entrepris la harassante tâche de travailler à rétablir le rayonnement de notre institution parlementaire au plan international et à la réintégrer dans toutes les institutions et organisations interparlementaires dont elle avait été exclue.

    Notre première démarche fut de nous fixer l’objectif prioritaire de réintégrer notre parlement au sein de la grande famille des parlements francophones. Quelques mois plus tard, nous avions tant et si bien travaillé, que le Secrétaire Général parlementaire de l’époque, M. Jacques Legendre, a accepté de nous convier à la première réunion de l’APF, à Bruxelles au mois de juillet 2012. Nous étions alors une section suspendue mais nous avions obtenu, après négociations, le statut de membre observateur. Notre appétit sans cesse grandissant nous conduisit au cours des débats à faire un pari hardi, celui de batailler pour obtenir l’organisation, en 2013, de la 39è Assemblée générale de l’APF à Abidjan. C’était un pari risqué.

    Je pris attache avec l’actuel Président du Faso, SEM Roch Marc Christian Kaboré que je connaissais de longue date, alors président en exercice de l’APF, pour qu’il accepte de faire un lobbying pour le compte de la Côte d’Ivoire. Ce qu’il fit avec bonne volonté. Je dois préciser que j’en avais également discuté avec le Président Blaise Compaoré.

    Nous eûmes la plus agréable des surprises, lorsqu’à l’issue de cette plénière de Bruxelles, l’ensemble des sections internationales, dans une volonté d’aider la Côte d’Ivoire à se reconstruire, ont accepté à l’unanimité de nous confier l’organisation de la 39ème Assemblée générale à Abidjan.

    C’était une responsabilité importante et il nous fallait relever le défi. C’est à peu près 400 délégués, venus de plus de 80 pays que nous devions recevoir à Abidjan. Je peux vous dire que ce ne fut point une sinécure quand on a en mémoire la longue crise qui avait secoué le pays et les dégâts que l’Assemblée nationale avait subis. Les Ivoiriens se souviennent certainement qu’une partie de l’institution était calcinée et que l’autre partie tombait quasiment en ruines, faute d’entretien et de réhabilitation.

    Le Président d’institution que j’étais n’avait aucun bureau pour travailler et les députés n’étaient pas logés à meilleure enseigne. A partir de juillet 2012, des travaux d’Hercule furent engagés pour qu’un an après, notre institution puisse se parer de ses meilleurs atours pour accueillir dignement les invités étrangers. A la cérémonie solennelle d’ouverture de cette 39ème session de l’APF à l’hôtel Ivoire, le Secrétaire Général de la Francophonie, le président Abdou Diouf lui-même ainsi que le nouveau Président de Côte d’Ivoire Alassane Ouattara, ont rehaussé de leurs illustres personnalités, la cérémonie d’ouverture.

    Aucune section de l’APF ne voulait manquer ce rendez-vous du grand retour de la Côte d’Ivoire sur la scène parlementaire internationale. Dans une parfaite unanimité, l’Assemblée générale m’a adoubé et, ainsi, je fus élu au Bureau international en qualité de vice-président. Et depuis, ce fut une lune de miel avec l’APF. Muni de cette confiance, l’organisation de l’Assemblée Régionale Afrique de l’APF et la Conférence des Présidents d’Assemblée d’Afrique à Abidjan et Yamoussoukro nous ont été confiés. Je me souviens qu’à la Conférence des présidents, j’ai invité le Premier Ministre de la RDC M. Augustin Matata Ponyo, qui a effectué spécialement le déplacement de Kinshasa à Yamoussoukro pour y délivrer une conférence magistrale en présence de l’actuel Président du Faso SEM Kaboré.

    Les membres du bureau de l’APF ont considéré que cela relevait purement de l’exploit. A peine réintégrée, la Côte d’Ivoire occupait toute sa place, je dis bien toute sa place. C’est tout logiquement que 4 ans après, j’ai été élu à la 43ème session parlementaire au Luxembourg, 1er Vice-Président avec vocation à assumer les charges de Président de l’APF. C’est sur cette lancée, que nous étions lorsqu’en février 2019 j’ai été amené à rendre ma démission du poste de Président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire. C’est alors qu’a débuté pour moi et pour la section ivoirienne de l’APF, la litanie des malheurs.

    J’avoue que je ne m’attendais pas à un tel déferlement de haine et un tel degré d’acharnement de la part des hautes autorités de la Côte d’Ivoire et notamment de mon successeur au perchoir. Il était devenu évident que l’objectif des autorités ivoiriennes était de me broyer et de m’écraser, comme ils aiment à le dire eux-mêmes à longueur de journée. Après m’avoir arraché le tabouret de l’Assemblée nationale, ils s’acharnaient désormais à m’arracher la chaise de l’APF (accordons un peu plus d’égard à l’organisation internationale qu’est l’APF !). Leur préoccupation : empêcher par tous les moyens un fils de la Côte d’Ivoire, un Ivoirien, d’accéder au poste de président de l’APF, une organisation internationale. J’étais bien loin d’imaginer qu’alors qu’en public le Président Ouattara me donnait du « Guillaume Soro est mon fils », en privé il lâchait la bride à ses ouailles enragées pour me salir et essayer par tous les moyens de me couvrir de honte, d’humiliation.

    Imaginer qu’on veuille tellement « broyer » son propre fils qu’on est prêt à aller risquer d’humilier toute la Côte d’Ivoire à l’étranger et dans une organisation aussi réputée que l’APF, j’avoue que cela me paraissait inenvisageable. Vu que j’étais l’ivoirien le mieux placé pour accéder à la présidence de cette institution internationale, même si je n’étais pas RHDP et que j’avais démissionné de la présidence de l’Assemblée Nationale pour des raisons de bonne convenance, pour moi le Président de la République aurait pris de la hauteur et aurait agi afin d’éviter le gâchis et de protéger l’image de la Côte d’Ivoire à l’extérieur en taisant nos querelles internes, pour le bien de la diplomatie ivoirienne. C’est ce que fit à l’époque Laurent Gbagbo lorsqu’Essy Amara du PDCI était le candidat ivoirien le mieux placé pour occuper le Secrétariat général de l’Union africaine. Et les exemples sont légions. Les autorités ivoiriennes ont choisi la voie de la discorde et de l’humiliation en poussant un Amadou Soumahoro qui, de toutes les façons, n’aurait jamais eu la possibilité d’accéder à ce poste sans passer par la case départ qui consiste d’abord à intégrer le bureau de l’APF, ensuite à accéder plus tard au poste de 1er vice-président et, dernière étape, espérer enfin, prétendre un jour à la présidence de l’APF.

    La réalité est qu’aussitôt élu, mon successeur par une tournure abracadabrantesque, a pris un arrêté modifiant celui que j’avais signé accordant aux membres de la section ivoirienne de l’APF un mandat de quatre ans, ce qui correspondait à la durée de notre législature. Du fait que la section avait déjà été installée en début de législature, mon successeur ne pouvait plus interrompre les mandats de ses membres, qui représentaient l’ensemble de la coloration politique de notre assemblée nationale. Mon successeur n’entreprit aucune discussion avec moi-même sur ce sujet, et pis encore, au mépris du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale, il n’en informa aucun des membres de la section nationale de l’APF qui furent remplacés à leur propre insu. Cela contrevient aux principes de la continuité législative et aux règles de notre organisation. Les Organisation interparlementaires (OIP), généralement ne changent pas leurs sections en cours de législature. En prenant cet arrêté, il a pris le risque d’humilier l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire auprès des OIP. La gravité de ses faits et gestes est apparue au grand jour au vu du camouflet qui lui a été publiquement infligé par le parlement de la CEDEAO et de l’humiliation qui s’en est suivie également au parlement panafricain. Etait-ce une méconnaissance des textes de loi ou la rage de vouloir effacer les traces de Guillaume Soro ? Toujours est-il qu’une chasse à l’homme avait été engagée.

    Chers lecteurs, si mon successeur avait pris la peine avec sagesse de m’entreprendre, c’est sans hésitation que je lui aurais facilité l’accès à mon carnet d’adresses afin qu’il puisse continuer à maintenir le positionnement de notre parlement au sein des OIP. Je me serai même fait son défenseur acharné auprès de ces institutions, aucun sacrifice n’étant trop grand quand il s’agit de la paix et de l’image de la Côte d’Ivoire. Mais je crois savoir que l’enjeu était ailleurs. Les ouailles qui jactent dans les coulisses, prétendent que je voudrais occuper le poste de président de l’APF pour l’utiliser comme tremplin pour ma campagne présidentielle. Ce qui, vous le subodorez bien, était totalement inconcevable pour le RHDP.

    Disons-le tout net : l’élection présidentielle de 2020 s’est invitée dans le débat du rayonnement diplomatique international de la Côte d’Ivoire. Au mois d’avril 2019, une alerte m’est parvenue disant qu’il était hors de question pour les autorités ivoiriennes de me laisser gravir les marches vers la présidence de l’APF. On avait chargé mon successeur de me barrer la route à tout prix. J’étais loin d’imaginer ce lugubre scenario de coup d’Etat qui se profilait à l’horizon. Pourtant les textes de l’APF sont précis : il n’y a aucun lien de nécessité entre la présidence d’une assemblée nationale et le poste de premier vice-président. Les deux seules conditions prévues sont la qualité de parlementaire et la non-vacance du poste. Du moment où je suis parlementaire et n’ayant pas fait acte de démission audit poste, il était impossible de m’y remplacer.

    Lorsque la conférence des présidents de parlement de la région Afrique a été annoncée pour Ouagadougou, bien qu’étant le patron de la zone Afrique, j’ai demandé à mon adjoint au sein du bureau de l’APF de bien vouloir accepter de présider cette conférence. Le chargé de mission pour l’Afrique, le député Fofana Bassatigui, doté d’un mandat international, s’y est présenté mais se verra violemment récusé par mon successeur dans ce pays étranger. Des contraintes physiques ont même été déployées pour l’empêcher d’exercer ses prérogatives, mais il a réussi à accomplir sa mission. Malgré le désaveu de mon successeur à Ouagadougou, j’avais vraiment espéré que la sagesse prévaudrait à l’occasion de la Régionale Afrique prévue pour se tenir au Maroc. J’ai pris la précaution d’informer le bureau de l’APF que je participerai aux travaux de ladite régionale. Les autorités parlementaires marocaines furent informées de mon arrivée. Ce que je ne savais pas, c’est que le Président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire avait posé des conditions à la section hôte du Maroc :

    – 1 : que je n’assiste pas à la Régionale,

    – 2 : que le poste de 1er vice-président lui revienne.

    C’est donc avec sérénité que j’ai préparé mon voyage pour le Maroc en ignorant qu’un projet d’humiliation contre moi y avait été ourdi.

    Me voilà donc à Rabat, prêt pour participer à la Régionale que je devais coprésider. Et là, je découvre le complot dans toute son ampleur.

    Sachons-le, tous les présidents qui ont dirigé notre organisation, l’APF, ne sont pas forcément devenus présidents de leurs pays. Pour devenir Président de la République de son pays, il me semble que c’est la relation de confiance entre un peuple et un homme qui est déterminante. Citons quelques exemples. Aubin Minaku a bel et bien dirigé l’APF, il n’est pas devenu pour autant le Président de la RDC. En revanche, Roch Marc Christian Kaboré qui avait démissionné de la présidence de l’APF, lui, est devenu Président de son pays. Comment alors pouvait-on imaginer que devenir président de l’APF me donnerait de facto la présidence de la République de Côte d’Ivoire ?

    Le conciliabule interminable dans le bureau d’El Malki devenait gênant pour tous les participants et provoquait le blocage du démarrage de nos assises. Notre hôte s’est finalement résolu à convoquer les présidents d’Assemblée présents pour un huis clos afin d’essayer de résoudre l’embarras qui s’était emparé de lui. En matière de huis clos, les règles et pratiques universellement admises établissent que :

    – soit les deux parties au conflit sont exclues des conciliabules,

    – soit elles sont entendues concomitamment ou,

    – enfin, elles le sont chacune à tour de rôle.

    Après plus de deux heures de débat, un député marocain vint m’informer qu’une délégation du huis clos devait me faire rapport. Quand je suis entré, j’ai vu dans ladite salle les 03 Présidents des Assemblées Nationales de la Guinée Bissau, du Togo et du Gabon, ainsi que les Secrétaires généraux parlementaire et administratif de l’APF. Voici le message qu’ils avaient à charge de me soumettre. Mon successeur avait posé 03 conditions :

    – 1. que je ne copréside pas les travaux,

    – 2. que mon poste de 1er Vice-président lui soit octroyé

    – 3. que le chargé de mission de la région Afrique ne participe point aux travaux.

    Face à de telles exigences, les mandataires me firent savoir qu’en ce qui concerne le poste de 1er Vice-président, les sections à l’unanimité avaient reconnu leur incompétence à me décharger de mes fonctions. Pour ce qui est du deuxième point, ils ont également déclaré leur incompétence à relever le chargé de mission de ses fonctions. Pour ce qui est de la troisième exigence, celle de la coprésidence, ils marquèrent leur embarras. Amadou Soumahoro jurait sur tous ses grands dieux que si je coprésidais la réunion, la délégation ivoirienne ferait un esclandre et créerait un scandale dans ce pays ami. Pour ne pas gêner nos hôtes, surtout que tous les officiels étaient présents et qu’un scandale dans la salle serait préjudiciable à l’image de notre pays, et vu la gravité de la situation, j’ai concédé de ne pas coprésider la cérémonie et de laisser les travaux se dérouler. Par égards pour le ministre marocain des affaires africaines et tous les officiels qui étaient arrivés et que nos conciliabules interminables étaient en train de pénaliser (nous avions déjà pris deux heures de retard sur l’heure de la cérémonie officielle), le Président Habib El Malki est allé démarrer la cérémonie officielle. Sans attendre la fin de notre huis clos. Ce qui justifie mon absence dans la salle et l’absence des trois présidents à la cérémonie d’ouverture. J‘ai demandé au Chargé de mission Afrique de me représenter à la table de séance et d’assumer mes charges.

    Je me dois d’être honnête en vous disant que n’eût été l’expérience et le courage de certains Présidents d’Assemblées que je ne nommerais pas, une entorse grave à nos textes aurait pu se commettre. Les chefs de section étaient tous malheureux pour la Côte d’Ivoire. Les délégués étaient révoltés de voir mon successeur se comporter de la sorte, avec autant de hargne et de haine.

    J’ai tendance à penser que c’est l’arrogance et la trop grande envie de m’humilier à tout prix en terre étrangère qui ont révolté toutes les sections et ont porté sur ma personne la sympathie qu’on a pu constater à cette réunion. J’ai pris la décision de me retirer des travaux, mais je fus sans cesse consulté et le lendemain un second huis clos a décidé d’envoyer une mission d’évaluation en Côte d’Ivoire pour s’assurer de la faisabilité de l’Assemblée générale à Abidjan, façon diplomatique de régler le contentieux. Le Secrétaire général parlementaire et le Secrétaire général administratif étaient formels ; techniquement et administrativement leurs conclusions sont que ce sommet ne pouvait se tenir à Abidjan dans les conditions de cafouillage et d’adversité qu’ils ont pu constater.

    Et pourtant, nous aurions pu, nous ivoiriens, régler cette question positivement si mon successeur ne s’était pas montré aussi intraitable vis-à-vis de ma personne.

    Avant de clore ce récit, j’aimerais répondre en outre à quelques questions d’actualité pendantes. Et adresser des mots de reconnaissance citoyenne.

    Pourquoi avoir fait recours à des avocats du Barreau de Paris dans cette Affaire de l’APF ? J’ai recruté des avocats français parce que l’APF est une association de droit français et qui plus est, son siège se trouve se à Paris, en France. Pour une question de célérité et d’efficacité. En ce qui concerne la section nationale ivoirienne de l’APF, ce sont bel et bien des avocats ivoiriens qui seront retenus.

    Serais-je en train de m’accrocher au poste de président de l’Assemblée Parlementaire de la Francophonie ? Si j’ai démissionné du poste de Président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire, il me serait encore plus facile de le faire au niveau de l’APF. D’autant plus que ce poste n’est pas rémunéré et n’accorde aucune immunité diplomatique, contrairement à celui de PAN. Donc, qui peut le plus peut le moins. Mais je me bats au nom des principes et des valeurs. Il ne sera pas dit que par complaisance, j’ai violé et mis à mal le droit et la démocratie. Il y a des combats qu’on mène pour la postérité et pour l’humanité. Ce combat, je le mène pour pourfendre la Françafrique. Et établir que le non-droit ne doit pas être la règle des relations internationales. Si en Côte d’Ivoire, on peut encore piétiner nos textes, je ne m’y résoudrai point et je n’y souscrirai jamais. Je partirai de l’APF comme mes prédécesseurs, mais dignement.

    Certains disent allègrement que j’ai été expulsé par des policiers marocains ? Ce canular n’est qu’une autre incongruité pour faire du dilatoire. Dans aucun parlement du monde sauf erreur, la police n’a droit de cité dans l’enceinte de la maison du peuple. Sauf en dictature peut-être. Car alors, tout devient possible. J’ai, pour ma part, quitté les lieux à 18h30 dans ma voiture, librement.

    J’apprends que certains journaux prétendraient que je n’aurais pas été invité par la section hôte. Encore une grossière confusion de genres ! Les membres du Bureau mondial de l’APF n’ont pas à être invités : ils le sont d’office. A la Régionale du Cap-Vert par exemple, ni le président Chagnon, ni moi-même n’avions fait l’objet d’une invitation particulière. Mais étant les premiers responsables, nous avons signalé notre présence qui généralement est considérée en pareil cas comme un privilège par le pays hôte des travaux.

    Comment conclure ce propos sans saluer la formidable armada d’internautes citoyens qui, aux quatre coins de la Côte d’Ivoire et du monde, ont pris fait et cause pour notre combat pour la démocratie en francophonie ? Je salue la mobilisation de toutes ces consciences alertes, debout dans mon pays comme dans la diaspora, qui savent que par la solidarité de tous, se consolideront la liberté et la dignité de chacun d’entre nous !

    Ainsi donc, le coup d’Etat ourdi contre moi à Rabat a échoué, comble d’ironie, comme celui qui fut ourdi dans cette même ville autrefois contre Sa Majesté le Roi Hassan II échoua en 1972. Piteusement. Echec et mat! Rabat, ville bénie, comme protégée par la Providence contre les luttes stériles, m’a également porté bonheur.

    Chers lecteurs, la terre bénie de Rabat a toujours dit NON aux coups d’Etat. Je suis fort reconnaissant à Sa Majesté et à mes amis qui ont marqué de leur amitié le survivant que je suis. Je retiens aussi de cet épisode que le régime RHDP souffre manifestement du syndrome des ex-persécutés devenus persécuteurs. Comme s’il s’avérait incapable de sortir de la prison mentale de la haine et de l’aigreur qui paralysent l’intelligence de ceux qui ne gouvernent que pour nourrir leur frêle ego narcissique. On ne développe pas un pays avec l’esprit de vengeance ! Enfin, l’échec du coup d’Etat de Rabat contre mon engagement francophone indique bien que l’avenir appartient résolument aux démocrates, républicains, progressistes et humanistes africains véritables. Si nous tenons bon aujourd’hui comme hier, demain nous sourira, j’en suis convaincu.

    Guillaume Kigbafori SORO

    Tags : Côte d’Ivoire, Maroc, Guillaume Soro, Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara,

  • L’épouse de l’Emir de Dubaï en fuite et demande l’asile en Allemagne

    Tout le monde se demande où est la princesse Haya de Jordanie, la sixième épouse du vice-président et premier ministre des Émirats arabes unis et autorité suprême de Dubaï, Cheikh Mohammed Bin Rashid (69 ans).

    Selon des informations rapportées par The Daily Beast, Haya s’est échappée de sa cage dorée dans les émirats « il y a quelques semaines » et a emmené son fils avec elle, Zayed (7 ans) et sa fille Al Jalila (11 ans). Elle aurait bénéficié de l’aide

    La princesse aurait pu échapper à la sécurité grâce à l’aide d’un diplomate allemand. Une fois à Berlin, elle a l’asile et entamé la procédure de divorce. Mais son souhait est de s’installer à Londres, où elle se trouve actuellement cachée dans un endroit secret.

    Selon Le Daily Mail, la princesse se trouve déjà à Londres et elle porte dans ses bagages la somme de 34,6 millions d’euros pour entamer une nouvelle vie loin des palais royaux.

    Pour rappel, Haya est la sœur du roi jodanien. Mariée à l’Emir de Dubaï en 2004, elle n’a pas été vue dans la vie publique depuis le 20 mai ni dans les réseaux sociaux où elle était connue pour son activisme.

    A l’instar de la Lalla Salma du Maroc, l’absence de la princesse Haya lors de la compétition équestre Royal Ascot où l’Emir a rencontré la reine Elizabeth II, a soulevé les soupçons de la presse sur les raisons de cette absence.

    Ainsi, des médias arabes tels que Al Qods Al Araby ont relayé la nouvelle tout enn précisant qu’elle a évité de se rendre à Amman pour épargner son frère d’une crise diplomatique sûre. Selon le Daily Mail, les autorités allemandes « ont rejeté la demande de son mari de la renvoyer à Dubaï ».

    En l’absence de communication officielle, Mohammed Bin Rashid, homme politique et poète, comme on peut le voir sur son site personnel, a posté sur son compte Instagram un poème consacré à sa femme, dans lequel il l’accusait de «trahir la chose la plus précieuse». Et il lui a reproché: « Je t’ai octroyé confiance et espace … ta plus grande erreur était de mentir. »

    La fuite de Haya n’est pas la première d’un palais à Dubaï. En mars dernier, la princesse Sheikha Latifa, la fille de l’émir âgée de 33 ans, avait tenté de s’échapper à bord de son yacht à l’étranger avec l’aide d’Hervé Jaubert, un ancien espion français. Le bateau a été intercepté près des côtes indiennes et la princesse n’a pas pu réaliser son rêve de demander l’asile aux États-Unis, comme elle l’avait prévu. Peu de temps après l’incident, une vidéo de 40 minutes a été diffusée sur les réseaux sociaux, dans laquelle la jeune femme elle-même a commencé à dire: «Si vous regardez cette vidéo, ce n’est pas une si bonne chose. Ou je suis morte ou je suis dans une très, très mauvaise situation.  » Latifa a révélé qu’à l’âge de 16 ans, elle avait tenté de fuir et qu’elle avait été emprisonnée et tortuée pendant trois ans après sa capture.

    Neuf mois de silence

    Le gouvernement émirati n’a réglé la controverse qu’en décembre sur la «princesse bien-aimée» avec une série de photographies dans lesquelles il a été vu à côté de Mary Robinson, ancienne commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme. Ils étaient les premières images après neuf mois de silence et depuis lors, il n’ya eu aucune nouvelle de leur situation. Les images publiées par le ministère des Affaires étrangères sont arrivées quelques semaines après la diffusion par la BBC du documentaire « Escapar de Dubai, le mystère de la princesse disparue », dans lequel la chaîne britannique reconstruisait le plan raté et causait un profond malaise aux autorités de l’émirat.

    Deuxième disparition royale

    En mars 2018, la princesse Sheika Latifa s’est également échappée de Dubaï. Elle a été interceptée sur son yacht près des côtes indiennes, où elle avait l’intention de demander l’asile politique aux États-Unis. On ignorait où elle se trouve et quel est son état de santé jusqu’au mois de décembre dernier, lorsque le gouvernement émirati a publié cette image, où elle apparaît avec Mary Robinson, ancienne commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme.

    La fugue de Haya soulévera des questions sur la situation de Lalla Salma, l’épouse du roi du Maroc Mohammed VI, elle aussi disparue de la scène publique depuis bientôt 2 ans.

    Tags : Dubaï, Haya de Jordanie, Cheikh Mohammed Bin Rashid, Sheikha Latifa, Maroc, Mohammed VI, Lalla Salma,

  • L’Eco, nouvelle monnaie des pays de la CEDEAO à partir de janvier 2020

    La CEDEAO adopte Eco comme monnaie unique pour la sous-région

    À partir de janvier 2020, les pays de la sous-région ouest-africaine pourront utiliser une monnaie unique appelée ECO.

    La devise a été adoptée samedi par l’autorité des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO à Abuja, la capitale du Nigéria.

    Les dirigeants ouest-africains ont approuvé la monnaie lors de leur 55e session ordinaire et approuvé une feuille de route pour l’émission de la monnaie en janvier 2020. Il y avait une feuille de route pour faire en sorte que tous les pays remplissent les critères principaux d’adoption de la monnaie.

    Critères d’adoption

    Cela inclut les pays membres ayant un déficit budgétaire ne dépassant pas 3%; taux d’inflation annuel moyen inférieur à 10% avec un objectif à long terme ne dépassant pas 5% d’ici 2019.

    Les pays devaient également disposer de réserves brutes pouvant financer au moins trois mois d’importations.

    Les autres critères de convergence adoptés par la CEDEAO sont une dette publique ou un produit intérieur brut ne dépassant pas 70%.

    La question du déficit budgétaire des banques centrales ne doit pas dépasser 10% des recettes fiscales de l’année précédente et la variation du taux de change nominal de plus ou moins 10%.

    À la fin de la réunion d’Abuja, Mustapha Suleiman, secrétaire permanent du ministère des Affaires étrangères du Nigéria, a déclaré que les dirigeants régionaux avaient chargé la Commission de la CEDEAO de collaborer avec l’Agence monétaire ouest-africaine.

    La commission devrait également collaborer avec l’Institut monétaire de l’Afrique de l’Ouest et toutes les banques centrales pour définir un symbole de la monnaie unique.

    Des progrès significatifs

    Le président de la CEDEAO, Issoufou Mahamadou, a déclaré que la feuille de route révisée n’a aucune incidence sur la date d’émission de la monnaie unique en janvier 2020.

    En parlant de la date limite d’adoption, Mahamadou a déclaré: « Nous n’avons pas changé cela, mais nous poursuivrons l’évaluation d’ici là.

    « Nous allons voir que les pays qui sont prêts à lancer la monnaie unique et les pays qui ne sont pas prêts à adhérer au programme, car ils respectent les six critères de convergence. »

    La CEDEAO a une population combinée de 385 millions d’habitants et a été créée en 1975. Elle comprend le Bénin, le Burkina Faso, le Cap Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Côte d’Ivoire, le Libéria, le Mali, le Niger, le Nigéria, le Sénégal et la Sierra Leone. et du Togo.

    Huit de ces pays utilisent une monnaie appelée le franc CFA. Il s’agit du Bénin, du Burkina Faso, de la Guinée-Bissau, de la Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo.

    La décision actuelle d’adopter une monnaie est semblable à la décision prise par l’Union européenne d’adopter la monnaie unique appelée euro.

    Avec Citinewsbusiness, 30 juin 2019

    Tags : CEDEAO, ECOWAS, franc CFA, monnaie unique, ECO,

  • L’honneur de désobéir : Carola Rackete, capitaine du Sea-Watch 3

    Par Gad Lerner, Traduit par Fausto Giudice

    Cette fois, Salvini se retrouve face à un os dur : Carola Rackete

    On en vient à se demander : mais que pensera la mère de Salvini de son fils? Quand, face à ce qui, quoiqu’on on en pense, reste un drame humain, son Matteo écrit : « Personne ne débarque, ils m’ont cassé les couilles. Que cette petite frimeuse se le tienne pour dit ».

    Face à cette énième exhibition génitale viriloïde pour égratigner la Capitaine du Sea-Watch 3, Carola Rackete, qui, elle, est prête à prendre un risque réel, cette jeune femme redonne à Salvini sa vraie dimension, celle d’un tout petit capitaine. Petite frimeuse ? On n’a pas plutôt affaire à un ministre matamore de café du commerce ?

    Source: Tlaxcala

    Tags : Migration, Carola Rackete, Italie, Salvini, extrême droite,

  • Lettre ouverte de plusieurs associations, dont la LDH, au ministre de l’Intérieur, M. Castaner

    Paris, le 26 juin 2019

    Monsieur le ministre,

    Des hommes et des femmes s’automutilent ou tentent de se suicider dans les centres de rétention administrative (CRA). Au cours de ces quinze derniers mois, deux hommes se sont donné la mort dans ces lieux où l’administration enferme des personnes pour les expulser du territoire français. D’autres se révoltent ou expriment leur désespoir à travers des lettres publiques, des grèves de la faim, des émeutes ou des tentatives d’incendie. Ces actes qui se multiplient à une fréquence inédite sont le résultat d’une politique inacceptable qui a conduit à une situation extrêmement alarmante.

    Le gouvernement fait le choix d’utiliser l’enfermement en rétention comme outil d’une politique d’expulsion, banalisant la privation de liberté des personnes étrangères à travers des instructions aux préfet·e·s qui viennent aggraver celles de vos prédécesseurs. La disproportion des moyens utilisés au service de cette politique de plus en plus carcérale est inédite.

    Le nombre de places en rétention a ainsi augmenté de 25 % depuis début 2018 (+ 480 places) et vous prévoyez la construction de nouveaux CRA. Un tel développement de l’enfermement administratif ne s’était pas produit depuis la politique sécuritaire mise en œuvre par Nicolas Sarkozy il y a plus d’une décennie.

    La dernière loi Asile et Immigration de septembre 2018 a doublé la durée maximale de rétention et permet désormais d’enfermer toutes les personnes visées durant trois mois, ce qu’aucun gouvernement français n’avait jamais jusqu’à lors proposé. Or, les statistiques sont formelles : enfermer plus longtemps ne permet pas d’expulser plus. En revanche, être privé·e de liberté derrière des barbelés pendant 90 jours, c’est subir une machine à enfermer qui brise des vies, dans un environnement carcéral oppressant. Des enfants sont traumatisés par cette expérience, des personnes perdent leur emploi ou leur logement, des familles sont séparées, des malades voient leur prise en charge sanitaire interrompue ou amoindrie.

    Cette orientation conduit l’administration à maintenir fréquemment des personnes enfermées alors qu’il n’existe aucune perspective d’exécuter la mesure d’éloignement qui les frappe. Cela relève dès lors d’une politique punitive.

    Les taux d’occupation des centres de rétention administrative ont explosé, générant une promiscuité et des tensions insupportables, notamment pour les personnes les plus vulnérables. Ces dernières sont de plus en plus nombreuses derrière les grillages de ces lieux de privation de liberté : des jeunes majeur·e·s, des personnes victimes de la traite des êtres humains, ou plus largement marquées par un parcours migratoire de plus en plus dangereux, en raison notamment des barrières érigées par la France et l’Union européenne. Également des personnes fragilisées par une grande précarité vécue en France parfois durant de longues années, directement liée aux restrictions des politiques publiques apportées au droit d’asile et au droit au séjour, ainsi qu’aux insuffisances du dispositif d’accueil.

    Dans ces lieux de privation de liberté, le nombre de familles avec enfants a fortement augmenté. En 2018, 1 221 enfants ont subi ce traumatisme à Mayotte. En métropole, 208 enfants ont été enfermés, soit 8 fois plus qu’en 2013 (24 % avaient moins de 2 ans, 36 % de 2 à 6 ans et 26 % de 7 à 12 ans). Ce nombre a déjà été dépassé sur les 4 premiers mois de 2019.

    Quel que soit leur âge, tous et toutes subissent la violence de l’enfermement et de la rupture soudaine avec leur quotidien, leur école et leurs proches, et sont durablement traumatisé·e·s Rien ne peut justifier une telle pratique largement condamnée par le Défenseur des droits, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies et la Cour européenne des droits de l’homme, à travers six décisions sanctionnant, ces dernières années, les pratiques des autorités françaises.

    Les préfectures assument désormais de prononcer massivement des décisions d’enfermement et d’expulsion illégales. Au-delà de la situation des enfants, la possibilité pour les personnes enfermées de saisir la justice et de défendre leurs droits est limitée par l’urgence et par des garanties amoindries, plus encore en outre-mer en raison d’un régime dérogatoire. Malgré ce droit au rabais, les juridictions métropolitaines annulent plus de 40 % des procédures judiciaires ou des décisions administratives, ce qui traduit l’ampleur des violations des droits perpétrées et le caractère abusif de nombre de ces enfermements.

    A tout ceci s’ajoutent des atteintes graves au droit à la santé dénoncées par la Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté dans son avis du 17 décembre 2018 et par le Défenseur des droits dans son rapport du 13 mai 2019. Le financement et le pilotage des unités médicales dans les CRA sont insuffisants pour garantir l’accès aux soins et leur continuité. La protection légale contre l’expulsion des personnes les plus gravement malades n’est pas garantie.

    La prise en charge des troubles psychiques ne peut être assurée dans ces lieux qui, au contraire, les aggravent. Des personnes malades ou qui ont tenté de se suicider sont ainsi enfermées dans des « chambres de mise à l’écart » qui constituent un traitement inhumain et dégradant.

    Dans ce contexte alarmant, l’ensemble des acteurs intervenant dans les CRA y rencontre désormais des personnes bipolaires, schizophrènes, paranoïaques, dépressives, mutiques, prises de crises de délire, d’angoisse, de jour comme de nuit. Des personnes aux facultés très altérées sont enfermées alors que leurs pathologies sont parfaitement identifiées en amont par le secteur de la psychiatrie qui les avait prises en charge.

    La politique menée à l’égard des personnes étrangères est ainsi marquée par des discriminations de plus en plus violentes. Contrôles au faciès, accès dégradé à la justice, privation de liberté disproportionnée voire systématisée, accès aux soins défaillant, protection des plus vulnérables reléguée au second plan. Cette politique marque le renoncement au respect de droits fondamentaux et porte atteinte à la dignité des personnes. Ces personnes enfermées que les associations accompagnent dans les CRA se trouvent dans une situation de détresse et face à une violence institutionnelle démesurée qui nie leur humanité.

    Monsieur le ministre, nous vous demandons solennellement de :

    Faire cesser cette politique du tout enfermement qui conduit à la maltraitance de personnes étrangères ;

    Proscrire tout enfermement d’enfants en rétention ;

    Assurer la protection des personnes les plus vulnérables, parmi lesquelles les personnes malades ;

    Mettre un terme aux pratiques illégales de l’administration.

    Nous vous prions de croire, Monsieur le ministre, en l’assurance de nos respectueuses salutations.

    Christophe Deltombe, Président La Cimade, Philippe de Botton, Président, Médecins du Monde, Louis Gallois, Président, Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), Cécile Coudriou, Présidente, Amnesty International France, Vanina Rochiccioli, Présidente, GISTI, Sylvie Bukhari-de Pontual, Présidente, CCFD-Terre Solidaire, Hubert Trapet, Président, Emmaüs France, Laurence Roques, Présidente, Syndicat des avocats de France (SAF), Malik Salemkour, Président, Ligue des droits de l’Homme, Didier Fassin, Président, Comède, Rachid Lahlou, Président, Secours islamique, Flor Tercero, Présidente, ADDE, Jean-François Quantin, Co-président, MRAP, Bernadette Forhan, Présidente, ACAT, Katia Dubreuil, Présidente, Syndicat de la magistrature, Véronique Fayet, Présidente, Secours Catholique – Caritas France, Patrick Doutreligne, Président, Uniopss, Prudence RIFF, Co-présidente, Fasti, Géraldine Franck, Présidente, Le Collectif des morts de la rue, Bruno Morel, Directeur, Emmaüs Solidarité, Alexandre Moreau, Président, Anafé, Antoine Ermakoff, Président, Observatoire Citoyen du CRA de Palaiseau.

    Source : Solidarité Maroc

    Tags : France, Gilets Jaunes, Macron,

  • République Démocratique du Congo, Ituri: des crises sans précédents frappent les populations

    Aujourd’hui, l’organisation médicale internationale, Médecins Sans Frontières (MSF), réitère donc son appel

    GENEVA, Suisse, 28 juin 2019/ — Dans la province de l’Ituri, en République démocratique du Congo (RDC), Médecins Sans Frontières (MSF) est témoin depuis plusieurs mois de multiples crises humanitaires qui laissent des centaines de milliers de personnes en besoin urgent d’assistance. Tout récemment, des milliers de Congolais ont été amenés à fuir face aux nouvelles violences qui frappent les territoires de Djugu, Mahagi et de l’Irumu. En dépit des appels répétés aux organisations d’aide internationale pour une plus grande mobilisation, la majorité des personnes déplacées n’a toujours pas accès aux biens et services de première nécessité. Aujourd’hui, l’organisation médicale internationale, MSF, réitère donc son appel.

    « Ce n’est malheureusement pas la première fois que les besoins humanitaires sont si importants dans le pays », explique le Dr Moussa Ousman, chef de mission MSF en RDC. « Mais une telle combinaison entre des violences provoquant des déplacements majeurs de populations, une épidémie d’Ebola et une autre de rougeole, c’est sans précédent. »

    Sur le terrain, les équipes doivent aujourd’hui répondre à plusieurs crises, devant faire face à des déplacements massifs de populations dus à la violence dans un contexte épidémique qui cumule rougeole, Ebola et taux de prévalence de paludisme extrêmement élevé. L’épidémie d’Ebola actuellement en cours ne montre aucun signe de ralentissement et la rougeole semble s’étendre dans la région.

    Les violences en Ituri sévissent depuis décembre 2017 et depuis plus de 18 mois, une grande partie de la population a besoin de manière urgente d’aide humanitaire. Depuis octobre 2018, MSF a mené trois enquêtes de mortalité dans les sites et les villages des zones de santé de Drodro, Nizi et Angumu. Toutes font état de taux de mortalité bien supérieurs aux seuils d’urgence.

    « Les enquêtes font apparaître que les gens meurent principalement de maladies évitables comme le paludisme, la rougeole ou les diarrhées », poursuit le Dr Ousman. « C’est très inquiétant. D’autant plus que pendant une épidémie d’Ebola, on n’a jamais pu jusqu’à présent mener de campagne de vaccination contre la rougeole. Cependant, avec le ministère de la Santé, nous réfléchissons à des stratégies et des moyens innovants pour mettre en œuvre des réponses adaptées. »

    MSF appuie les autorités sanitaires locales dans la dispense de soins médicaux et la réponse aux besoins indispensables à la survie de ces personnes : approvisionnement en eau potable, distribution de produits de première nécessité, douches et latrines dans les sites de Drodro, Nizi et Bunia où sont installés les personnes déplacées.

    La situation demande toutefois une mobilisation humanitaire médicale qui s’inscrive dans la durée, afin de venir en aide aux déplacés et faire face à l’épidémie de rougeole ainsi qu’au pic saisonnier de paludisme. Le nouveau pic de violence entre les communautés de juin 2019 a en outre provoqué des déplacements massifs de populations, majoritairement composées de femmes et d’enfants, augmentant ainsi considérablement les besoins.

    Face à la complexité de la situation, l’organisation médicale internationale MSF appelle à une mobilisation immédiate et consistante de l’assistance humanitaire, et qui s’inscrive dans la durée, afin non seulement d’éviter de nouvelles pertes humaines mais aussi d’offrir de meilleures conditions de vie à toutes ces personnes forcées de fuir.

    Distribué par APO Group pour Médecins sans frontières (MSF).

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