Catégorie : presse

  • Algérie : Emploi, quelle stratégie?

    Si l’Algérie a réalisé de nombreuses avancées sur les plans économique et social, il n’en demeure pas moins que la crise actuelle a eu un impact négatif sur l’emploi. Quelle stratégie de l’emploi pour faire face au défi de taille que constitue le chômage ? Sans doute, pour le gouvernement actuel, il s’agit d’un des plus importants défis à relever.

    Le marché du travail est soumis à des déséquilibres et des pressions croissants, sur fond de montée de l’activité sous des statuts précaires, d’ascension du secteur informel ainsi que d’accroissement du chômage avec comme corollaire la montée de la pauvreté.

    Même si les disparités selon le genre sont structurelles et antérieures à la crise, les jeunes et les femmes sont les premières victimes de cette fragilisation. Des centaines de milliers de jeunes et de femmes ne sont actuellement ni au travail, ni à l’école, ni en formation mais également de jeunes entrepreneurs en herbe, sont en attente de véritables débouchés.

    Aussi, le dossier de l’emploi est au cœur des problèmes économiques nécessitant une prise en charge rapide et efficace, notamment en matière de formation pour des jeunes peu qualifiés et de soutien aux jeunes entrepreneurs à la recherche de débouchés économiques.

    La formation permettra de renforcer les compétences des jeunes à la recherche d’emploi dans un environnement favorable. Le secteur privé et les autorités publiques sont appelés, aujourd’hui plus que jamais, d’impartir aux jeunes les compétences et les informations dont ils ont besoin pour accéder à ces débouchés et maximiser les opportunités. Il s’agit surtout de stimuler la création d’emplois dans un environnement entrepreneurial et soutenir les possibilités de création d’entreprises par des jeunes dans les filières à fort potentiel.

    D’après les spécialistes, les politiques macro-économiques à venir, vont modifier profondément les structures de l’économie algérienne. Les mutations toucheront le marché du travail et, au sein de celui-ci, le rôle et la place des femmes et des jeunes. Année économiquement difficile, 2020 le sera véritablement, notamment sur le marché du travail.

    Seule une diversification accrue de l’économie par des investissements importants, notamment dans le secteur du BTPH, permettront de pallier le problème du chômage. De tous temps, les chiffres décevants de l’emploi, traduisent en réalité une très faible diversification de l’économie.

    Le sous-emploi et la faible participation des femmes et des jeunes au marché du travail, traduisent aussi la gravité de la situation. A vrai dire, la reprise économique devrait d’abord se traduire par des créations d’emplois.

    Jeunesse d’Algérie

    Tags : Algérie, jeunesse, emploi, travail,

  • Ouverture lundi à Pau du sommet du G5 Sahel

    Le président de la Commission européenne Charles Michel, le président de la Commission de l’UA (Union africaine) Moussa Faki Mahamat ainsi que le secrétaire général de l’ONU Antonio Gutteres seront également présents pour participer aux discussions.
    Lassaad Ben Ahmed | 12.01.2020
    AA / France / Fawzia Azzouz
    Le président français Emmanuel Macron réunira lundi à Pau (sud-ouest), les dirigeants des pays du G5 Sahel pour évoquer la coopération sécuritaire dans la région, à un moment où la présence française dans le Sahel africain est très contestée.
    Le sommet regroupera le Président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta, le Président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré, le Président de la République du Niger, Mahamadou Issoufou, le Président de la République islamique de Mauritanie, Mohamed Ould Ghazouani et le Président de la République du Tchad, Idriss Déby Itno.
    Tags : Sahel, G-5, France, Barkhane, 
  • Al Sarraj et Haftar à Mouscou pour signer l’accord du cessez-le-feu

    Le ministère russe confirme que la Libye Sarraj et Haftar auront des entretiens lundi à Moscou

    Le principal sujet à l’ordre du jour des pourparlers est le règlement en Libye, la coopération en Syrie et les développements au Moyen-Orient.

    MOSCOU, 13 janvier. / TASS /. Les deux personnalités politiques clés de la Libye – le Premier ministre du gouvernement d’accord national (GNA) Fayez al-Sarraj et le commandant de l’armée nationale libyenne (LNA) Khalifa Haftar participeront à des pourparlers tenus sous les auspices des autorités russe et turque des affaires étrangères et de la défense Les ministères à Moscou lundi, a déclaré lundi au ministère russe des Affaires étrangères TASS.

    « Dans le cadre de la mise en œuvre de l’initiative des présidents russe et turc annoncée à l’issue d’un sommet à Istanbul, des contacts inter-libyens se tiendront aujourd’hui à Moscou sous les auspices des ministres russe et turc des Affaires étrangères et de la Défense », a souligné l’agence diplomatique. « Ces contacts devraient être suivis par Sarraj, Haftar et des représentants d’autres partis libyens. »

    La capitale russe devrait accueillir des négociations entre le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le ministre de la Défense Sergei Shoigu avec leurs homologues turcs Mevlut Cavusoglu et Hulusi Akar. Le principal sujet à l’ordre du jour des pourparlers est le règlement en Libye, la coopération en Syrie et les développements au Moyen-Orient dans un contexte de détérioration autour de l’Iran.

    Dimanche soir, le portail d’information Akhbar Libya 24 a annoncé que Sarraj et Haftar devraient se rendre à Moscou lundi. Comme annoncé par le président du Haut Conseil d’État libyen Khalid al-Mishri, le GNA et le LNA signeront un accord de cessez-le-feu dans la capitale russe. Al-Mishri a ajouté qu’il se rendrait à Moscou aux côtés de Sarraj. Le président de la Chambre des représentants libyenne, Aguila Saleh Issa, se rend également à Moscou.

    TASS

    Tags : Libye, Al Sarraj, Haftar, Turquie, Russie,

  • L’Algérie, un rempart contre un scénario-catastrophe

    Le ballet diplomatique centré sur le règlement de la crise libyenne se poursuit jeudi à Alger avec l’arrivée des chefs de la diplomatie égyptienne et italienne, Sameh Choukri et Luigi Di Maio.

    En début d’après-midi, le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, a reçu le ministre égyptien porteur d’un message du président Abdel Fattah Al Sissi.

    Sameh Choukri devrait avoir un tête à tête avec son homologue algérien, Sabri Boukadoum autour des derniers développements survenus sur la scène libyenne.Peu auparavant, Sabri Boukadoum a eu des discussions avec le ministre italien, Luigi Di Maio.

    La crise libyenne, la coordination avec Rome est « très bonne », a déclaré M. Boukadoum à l’issue de ses discussions avec M. Di Maio, tout en insistant sur un retour à la table des négociations avec « le soutien de la communauté internationale notamment celui des pays de la région ».

    « Tout le monde est d’accord pour un cessez-le-feu en Libye », a indiqué de son côté Luigi Di Maio. Alger multiplie depuis quelques jours les initiatives diplomatiques pour parvenir à un cessez-le-feu en Libye en crise, alors que la bataille pour la prise de la capitale libyenne Tripoli s’intensifie entre les deux camps rivaux, le Gouvernement d’Union nationale (GNA) et les troupes du général à la retraite Khalifa Haftar.

    Soucieuse de rester à « équidistance » des deux camps, Alger a rejeté toute ingérence étrangère en Libye et a exhorté toutes « les parties libyennes à retourner rapidement à la table des négociations ».

    Lundi, en recevant le chef du GNA, Fayez El Serraj, le président Abdelmadjid Tebboune a eu à réitérer « l’attachement de l’Algérie à préserver la région de toute ingérence étrangère » au moment où la Turquie a décidé de déployer des troupes en Libye « en soutien » au GNA dans la bataille de Tripoli.

    F.Z

    La Tribune des Lecteurs, 10 jan 2020

    Tags : Algérie, Libye, Haftar, Tripoli,

  • Pourquoi la France a kidnappé la monnaie de l’Afrique de l’Ouest (l’Eco)

    Par Jibrin Ibrahim*

    Le motif politique du mouvement Eco est de veiller à ce que le Nigéria soit définitivement tenu à l’écart de la monnaie. Comme le professeur Ibrahim Gambari l’a toujours dit, la France s’est toujours définie comme le principal bloc de pouvoir en Afrique et a donc toujours considéré l’autodéfinition du Nigéria comme une puissance africaine comme une menace pour ses intérêts.

    Samedi dernier, la France, par l’intermédiaire de son caniche le plus fidèle d’Afrique de l’Ouest, Alasane Ouattara, a kidnappé la monnaie ouest-africaine qui devait être lancée l’année prochaine pour les 15 pays de la région. Lors d’une conférence de presse à Abidjan, les présidents Macron et Ouattara ont annoncé que les huit pays ouest-africains utilisant la devise franc CFA adopteraient l’Eco comme nouvelle monnaie l’année prochaine. L’annonce a été faite le jour où la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) se réunissait pour une adoption finale de l’Eco, également décidée pour 2020. La décision française met fin à la lutte de 30 ans de la CEDEAO pour établir une monnaie régionale pour promouvoir le commerce et le développement. Ce que la France a fait, c’est qu’elle assume la responsabilité d’établir et même d’imprimer la nouvelle monnaie et met les autres pays de la région devant le fait accompli. La France garde également la nouvelle monnaie attachée à l’euro et l’aligne donc sur son intérêt colonial, comme elle l’a toujours fait avec le CFA. Cela signifie que les sept autres pays ouest-africains ne peuvent adhérer qu’aux conditions fixées par la France. L’implication est que le Nigeria est essentiellement tenu à l’écart de la monnaie parce que le pays n’acceptera pas les conditionnalités établies par la France.

    Le long retard dans la création de l’Eco est dû à l’incapacité des 15 pays de la CEDEAO à répondre aux critères de convergence qu’ils se sont fixés. C’est que le taux d’inflation de moins de 5 pour cent est maintenu. Le déficit budgétaire ne dépasse pas 3% du PIB et chaque pays dispose de suffisamment de réserves de change pour couvrir au moins trois mois d’importations. Le problème est maintenant qu’après avoir échoué à remplir ces conditions au cours des deux dernières décennies, les huit pays ont maintenant adopté la monnaie sans les respecter. Cela signifie que l’économie a été mise de côté pour des raisons politiques. Trois facteurs politiques ont motivé la décision française de prendre en charge le bébé dont la CEDEAO a eu beaucoup de mal à accoucher.

    … La France est devenue très impopulaire au Sahel en raison de la croyance répandue qu’elle prétendait combattre les jihadistes en public tout en les soutenant en secret. Les gens disent qu’avec sa vaste gamme de drones, d’avions et de couverture satellite, comment les convois de centaines de terroristes peuvent-ils parcourir des centaines de kilomètres et attaquer des soldats sans aucun avertissement des Français.

    La première raison est qu’au cours des cinq dernières années, une campagne couronnée de succès a continué de fustiger le franc CFA comme instrument par lequel la France maintient un contrôle total sur les affaires économiques de ses colonies – l’argument étant que la décolonisation économique n’a jamais eu lieu. Les pays francophones doivent conserver en permanence 50% de leurs réserves de change auprès du Trésor français et ils ne peuvent pas effectuer de transactions internationales sans passer par Paris. Il y a eu des manifestations selon lesquelles les membres du conseil d’administration français de la Banque centrale ouest-africaine doivent être révoqués, c’est pourquoi la France a finalement accepté de ne pas avoir de représentants directs à l’Eco Central Bank. Ce que la France essaie de faire maintenant, c’est d’argumenter que le franc CFA « colonial » établi est maintenant mort et que l’Eco est une nouvelle monnaie qui n’est pas contrôlée par les Français. C’est le plus gros mensonge de l’année.

    La deuxième raison politique est liée aux récents développements de la guerre contre le terrorisme au Sahel. On se souviendra que le 11 janvier 2013, des avions de combat français ont attaqué des convois djihadistes qui avançaient sur Bamako, la capitale du Mali. Les djihadistes contrôlaient déjà les deux tiers du territoire malien, après avoir vaincu et expulsé avec succès l’armée malienne du nord du Mali. Initialement, les trois groupes djihadistes impliqués, à savoir: Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), sa branche The Movement for the Uneness of Jihad (MUJAO par son acronyme français) et Ansar Dine étaient convaincus qu’ils reprendraient Bamako mais les Français sont avorté leur rêve. J’ai visité le Mali peu de temps après et la France était très populaire dans le pays, les gens ordinaires arborant des drapeaux français dans leurs maisons et leurs voitures.

    En cette dixième année de la bataille contre Boko Haram, dans laquelle la France est un acteur majeur avec des troupes, des avions et des drones sur le terrain, comprendre le rôle de la France en Afrique de l’Ouest est très important et j’espère que nous aurons un groupe de travail solide suivant les problèmes.

    Au cours des dernières années, cependant, la France est devenue très impopulaire au Sahel en raison de la croyance répandue qu’elle prétendait combattre les jihadistes en public tout en les soutenant en secret. Les gens disent qu’avec sa vaste gamme de drones, d’avions et de couverture satellite, comment les convois de centaines de terroristes peuvent-ils parcourir des centaines de kilomètres et attaquer des soldats sans aucun avertissement des Français. Ces attaques se sont produites avec une régularité croissante et un effet dévastateur. Le président Macron est très en colère que les Sahéliens critiquent son pays, qu’il ait ordonné aux présidents des cinq pays sahéliens de se rendre à Pau, dans le sud de la France, pour qu’on les prévienne de ne pas avoir convaincu leurs citoyens que la France est un bon ami. Une réunion, qui devait se tenir en décembre, a été reportée au mois de janvier suite au massacre de 71 soldats au Niger par des djihadistes. La France utilise donc le lancement de l’Eco-monnaie comme un truc de relations publiques pour reconstruire son image battue.

    Le troisième motif politique de la démarche Eco est de veiller à ce que le Nigéria soit définitivement tenu à l’écart de la monnaie. Comme le professeur Ibrahim Gambari l’a toujours dit, la France s’est toujours définie comme le principal bloc de pouvoir en Afrique et a donc toujours considéré l’autodéfinition du Nigéria comme une puissance africaine comme une menace pour ses intérêts. Il est donc surprenant que le Nigeria, qui est la principale cible de cette action française, soit restée silencieuse sur ce qui se passe. Pendant ce temps, les Français tentent de séduire le Ghana pour rejoindre l’Eco, afin d’isoler complètement le Nigeria. Le fait que le Nigeria ait fermé ses frontières avec ses trois voisins francophones a également créé des conditions pour pousser les pays francophones à rejoindre ce complot contre le Nigeria. En cette dixième année de la bataille contre Boko Haram, dans laquelle la France est un acteur majeur avec des troupes, des avions et des drones sur le terrain, comprendre le rôle de la France en Afrique de l’Ouest est très important et j’espère que nous aurons un groupe de travail solide suivant les problèmes.

    *Professeur de consultance / expert en science politique et développement, Jibrin Ibrahim est membre principal du Center for Democracy and Development et président du comité de rédaction de PREMIUM TIMES.

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    Tags : Afrique, France, Eco, Franc CFA, FCFA, colonialisme, afrique de l’Ouest, Nigeria, Boko Haram,

  • Interview d’Alain Juillet : « Les néocons français vont souvent plus loin que les Américains »

    INTERVIEW EXCLUSIVE : Ex-numéro 2 de la DGSE, ancien haut responsable chargé de l’intelligence économique au sein du SGDN, actuellement senior advisor au sein du cabinet Orrick Rambaud Martel, Alain Juillet nous fait l’honneur d’être le premier expert à répondre aux questions de Deep-News.media. Éminent spécialiste du Renseignement, ayant des décennies d’expérience dans ce domaine, Alain Juillet a le mérite de ne pas avoir la langue dans sa poche. Son franc-parler sur les questions les plus sensibles est en parfaite adéquation avec la philosophie de Deep-News.media. Nous avons donc le plaisir de vous dévoiler cette première interview décapante, tout en vous signalant que d’autres personnalités tout aussi intéressantes répondront à nos questions dans les prochaines semaines.

    Maxime Chaix : Dans The Economist, le Président Macron a reconnu que les récentes guerres de changement de régime soutenues par les néoconservateurs et les partisans du droit d’ingérence avaient engendré des catastrophes. En août dernier, il avait mis en garde ce qu’il a nommé l’« État profond » contre toute tentative de blocage de ses initiatives de rapprochement avec la Russie. Plus récemment, il a fustigé l’OTAN dans sa forme actuelle, évoquant sa « mort cérébrale » à la suite de l’intervention turque au Nord-Est de la Syrie. Quel regard portez-vous sur ces déclarations?

    Alain Juillet : On ne peut pas reprocher au Président Macron de dire une vérité gênante : toutes les guerres que les États-Unis et nous-mêmes avons mené au nom du droit d’ingérence et de la mise en place de la démocratie à l’occidentale ce sont révélées catastrophiques par rapport à nos objectifs : la Libye, le Kosovo, l’Irak, la Syrie en sont la démonstration. Après la chute du mur de Berlin et la disparition du bloc soviétique, l’OTAN a changé de périmètre et d’objectifs et ne répond plus à nos besoins car c’est une alliance avec des visions stratégiques différentes entre les anciens pays de l’Est devenus européens, la Turquie, et les pays du Sud qui, à part la France et l’Angleterre, ne veulent pas assurer leur part des dépenses comme l’a rappelé le Président Trump. Les États-Unis veulent une OTAN aux ordres pour mener la politique américaine. Les pays du Nord veulent une alliance défensive contre la Russie. Les autres la considèrent comme une armée supranationale qui évite de s’impliquer dans un effort de défense. Quand le Président Macron parle de se rapprocher de la Russie, il ne fait que reprendre l’idée du Général de Gaulle d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural. Il reprend également celle du Président Mitterrand, qui avait bien compris ce qui allait se passer après la chute du mur de Berlin. Elle est évidemment combattue par l’Allemagne, les pays du Nord de l’Europe et les néoconservateurs français, qui vont souvent plus loin que les Américains.

    MC : En 2016, dans une interview à Paris Match, vous aviez déclaré que l’État français s’était fait « manipuler en aidant des gens, prétendument rebelles, alors qu’en réalité il s’agissait d’équipes d’al-Qaïda poussées par des pays du Golfe [en Syrie]. » Vous aviez ajouté que nos services de renseignement faisaient remonter la présence d’al-Qaïda dans cette rébellion à nos dirigeants politiques, qui ne les ont pas écoutés. Comment peut-on expliquer un tel aveuglement, d’autant plus que nos services spéciaux coopéraient en Syrie avec la Turquie et les puissances du Golfe, qui étaient accusées de financer et de soutenir différents groupes djihadistes ?

    AJ : Lorsque l’on remonte au début de l’histoire de la guerre en Syrie, on voit qu’elle a été le résultat du croisement de trois problèmes très différents : la migration vers les villes de la population rurale qui n’avait pas été anticipée et a créé de gros problèmes sociaux dans les zones périphériques des grandes villes ; la volonté étrangère de mettre au pouvoir les Frères Musulmans dans le cadre d’un « printemps arabe » à la syrienne, comme cela avait été fait en Tunisie, en Égypte et en Turquie ; et la décision de Bachar el-Assad de choisir le projet de gazoduc iranien au détriment du gazoduc qatari. 1 Le premier a réellement généré des rebelles, les deux autres inspirés de l’étranger ont armé des combattants dont la suite de l’histoire a montré que la grande majorité était des islamistes. Là-dessus se sont greffés des combattants irakiens venus de la zone sunnite qui ont été très vite fédérés par Daech. Au début, on a parlé d’une « Armée Syrienne Libre » alors qu’elle ne représentait qu’une faible partie des combattants. Or, cette fable permettait aux Occidentaux, dans le cadre de l’opération Timber Sycamore, d’injecter du matériel militaire en quantité sans se poser de questions vis-à-vis des katibas dont chacun savait qu’elles étaient financées ou aidées par la Turquie, l’Arabie saoudite et d’autres puissances du Golfe.

    Les services de renseignement comme la diplomatie ne connaissaient que partiellement la situation. En effet, ils n’avaient plus de contact avec les loyalistes et recevaient par leurs alliés du Moyen-Orient des informations tendancieuses. Pour ceux qui connaissaient la situation réelle, il est évident que les services étant mal renseignés, ils ont donc mal informé l’État. On a pu l’observer quand le Président Obama – qui avait des informations de meilleure qualité –, refusa de suivre le Président Hollande après l’attaque chimique de la Ghouta en août 2013, ou quand la Russie est entrée en guerre deux ans plus tard. La question à laquelle les historiens devront répondre sera de savoir si les informations reçues par les services étaient incomplètes, ou si c’est le système et ses dirigeants qui ne voulaient pas voir la réalité en face pour d’autres raisons.

    MC : Depuis avril 2015, un nombre restreint de journalistes français – dont Régis Soubrouillard, Georges Malbrunot et Claude Angeli –, ont dénoncé la cobelligérance de la France au Yémen, soit le fait que nos services de renseignement épauleraient l’Arabie saoudite et les Émirats Arabes Unis dans leur offensive. De son côté, l’État français nie toute implication directe dans ce conflit, alors que les journalistes en question ne se sont jamais rétractés. Selon vous, la France est-elle directement engagée dans la guerre au Yémen (renseignement satellitaire, aide au ciblage, appui des troupes émiraties par nos Forces spéciales…) ? Ou s’agit-il d’un soutien exclusivement matériel en faveur de l’Arabie saoudite et des Émirats via nos ventes d’armes ?

    AJ : Il faut s’entendre sur les mots. La France ne s’est pas engagée militairement au Yémen. Elle l’affirme et jusqu’à maintenant personne n’a pu faire la preuve du contraire sur le terrain, y compris les journalistes dont vous parlez. Par contre, ayant vendu du matériel militaire à l’Arabie saoudite et aux Émirats, elle doit assurer la formation des personnels locaux et la maintenance lourde sur une longue période, avec des effectifs dédiés à cet effet. Dans ce cadre, si l’Arabie met ses canons à la frontière et tire sur des objectifs au Yémen, on est obligé de reconnaître que le matériel est utilisé pour faire la guerre – mais n’est-ce pas la destination de ce type d’armes ? Par contre, cela ne permet pas de dire que les Français font la guerre. De même pour le renseignement satellitaire : former des opérationnels à l’utilisation de ce type de matériel dans des situations réelles fait partie du contrat, mais former n’est pas agir. 2 Derrière, se pose le problème des ventes d’armes à des pays étrangers et ce qu’ils en font à chaque fois qu’il y a un conflit armé.

    MC : Un nombre croissant d’experts estiment que la France est en train de s’enliser au Mali. Dans le même temps, plusieurs sources m’ont fait état de la présence d’anciens combattants du djihad syrien aux côtés des groupes armés terroristes locaux. Entre 2013 et 2016, certains officiers français avaient même affirmé que le Qatar et l’Arabie saoudite finançaient plusieurs milices djihadistes au Mali (Mujao, Ansar Dine…). En clair, nos alliés du Golfe sont-ils engagés dans une guerre par proxy contre la France au Mali, voire dans l’ensemble du Sahel ?

    AJ : Il est certain que l’opération Barkhane n’arrive pas à régler avec 4 500 hommes un problème qui s’étend sur une zone plus grande que l’Europe du Sud. Au départ, dans le Nord du Mali, le gros des djihadistes venait d’Algérie, d’où ils avaient été chassés, et ils s’appuyaient sur une population touareg, majoritairement en opposition avec le pouvoir central, qui voulait pour certains l’autonomie et d’autres l’indépendance. La Libye et les pays du Golfe ont encouragé cette volonté par des aides diverses tandis que nous apportions une aide militaire quand il fallait une solution politique. Notez qu’Iyad Ag Ghali, chef d’Ansar Dine, a été ambassadeur du Mali en Arable saoudite et en est revenu chef rebelle islamiste. Les difficultés en Syrie ont amené des combattants du djihad syrien à se joindre aux katibas locales et ce phénomène s’amplifie. Par contre, le soutien des pays du Golfe en leur faveur diminue du fait de leur nouvelle politique internationale. On ne peut pas dire qu’ils sont contre la France, mais ils voient d’un bon oeil le développement du salafisme dans la zone sahélienne, avec l’espoir de voir l’arrivée de gouvernements amis dans la zone.

    MC : En Libye, l’on peut observer l’un des plus grands désastres de la politique étrangère française de cette dernière décennie. Or, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy, le colonel Kadhafi s’était rapproché de la France avant ce conflit. Comment expliquez-vous un tel revirement ?

    AJ : La France était proche de Bachar el-Assad à l’époque du président Chirac, et ce jusqu’à l’attentat contre le Premier Ministre Hariri au Liban. Le changement de politique a été la conséquence d’un événement majeur. En Libye, il n’y a rien eu de tel car les tensions sont récurrentes entre la région de Benghazi et le pouvoir central, comme d’ailleurs avec les autres tribus libyennes que Kadhafi contrôlait tant bien que mal. Personne ne comprend pourquoi la situation réelle du moment justifiait une intervention qui n’avait jamais été faite auparavant. Comme il est impossible de croire que c’est Bernard-Henri Lévy qui a convaincu le Président français, il s’est passé autre chose que l’on découvrira un jour ou l’autre. L’une des clés est sans doute la présence confirmée de katibas djihadistes financées par le Qatar lors du lancement de l’opération militaire. Au-delà du pourquoi de l’intervention militaire, et de sa finalité qui nous a brouillés avec la Russie, il reste que cette campagne fut une victoire militaire sans grand risque qui s’est achevée en désastre politique, car rien n’avait été prévu pour la suite. Nous en payons les conséquences au Sahel, où le pillage des arsenaux militaires libyens a permis d’équiper les djihadistes et groupes touareg ou peuls avec l’armement récupéré.

    MC : Dans le monde occidental, l’approche de la lutte antiterroriste à l’étranger semble être quasi-exclusivement militaire. Or, l’on peut observer que, dans des pays tels que l’Afghanistan ou le Mali, ces opérations ne réduisent pas nécessairement la menace terroriste. Selon vous, existe-t-il d’autres moyens non-militaires de combattre l’expansion du djihadisme ? Par exemple, avons-nous des moyens de pression suffisants vis-à-vis de nos alliés du Golfe pour les dissuader de financer l’islamisme global ?

    AJ : C’est le coeur du problème. Les pays du Golfe, à commencer par l’Arabie saoudite, ont commencé à financer le djihadisme quand ils sont devenus très riches grâce aux cours du pétrole. Après la lutte contre les Russes en Afghanistan, la deuxième étape significative a été l’arrivée des groupes de moudjahidines islamistes dans les Balkans pour défendre et appuyer les populations musulmanes contre les Serbes à la fin des années 1990. À cette époque, l’OTAN n’y voyait pas d’objections. Il a fallu le 11-Septembre pour que les Américains et leurs alliés prennent conscience du risque que ces groupes représentaient par leur prosélytisme et leur application de la Charia. On a alors commencé à lutter contre leur développement avec une intensité variable selon les pays et les intérêts politico-économiques, si l’on se rappelle du choix des Frères Musulmans pour porter le « printemps arabe » ou l’appui aux groupes armés syriens qui se sont révélés djihadistes. L’action militaire peut freiner ou stabiliser l’expansion islamiste, mais la vraie solution est de tarir les sources de financements venant du Moyen-Orient, d’investir dans le développement des régions pauvres soumises à la pression djihadiste, et de faire la promotion d’un Islam « normal » comme il est pratiqué en Indonésie, pays qui compte le plus de musulmans dans le monde. Ceci exige du temps, des moyens et de la volonté.

    Notes de la rédaction :

    1. Selon nous, et bien qu’il le cite dans la suite de sa réponse, Alain Juillet a oublié dans cette liste un quatrième facteur déterminant dans la guerre en Syrie : la volonté saoudienne de renverser Bachar el-Assad par tous les moyens, et ce pour contrer l’influence iranienne grandissante au Levant. Ainsi, comme l’a dévoilé le New York Times en janvier 2016, l’Arabie saoudite a été le principal financeur de l’opération de changement de régime coordonnée par la CIA contre Assad, une campagne qui faisait partie d’un « plus vaste effort de plusieurs milliards de dollars impliquant l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie » – trois États pourtant accusés par des hauts responsables américains d’avoir soutenu la nébuleuse djihadiste au Moyen-Orient, dont l’« État Islamique » (Daech). Pour plus de détails sur cette opération, nous vous recommandons le livre La guerre de l’ombre en Syrie, publié en mars 2019 aux éditions Erick Bonnier.

    2. Nous émettons des réserves sur cette réponse d’Alain Juillet, sachant que l’ambassadeur français au Yémen – qui a certes nié la présence d’officiers français dans la « war room » cogérée par la « coalition arabe », les États-Unis et la Grande-Bretagne –, a néanmoins confirmé que la France fournissait du renseignement satellitaire à l’Arabie saoudite et aux Émirats Arabes Unis dans le cadre de leur offensive yéménite. En outre, ni Claude Angeli, ni Georges Malbrunot, qui sont des journalistes chevronnés, n’ont démenti leurs révélations sur la cobelligérance de l’État français au Yémen. Comme l’avait souligné en avril dernier l’expert des questions de défense Jean-Dominique Merchet, « la guerre, ce n’est pas de savoir la nationalité de l’obus qui va tuer quelqu’un, c’est tout un système de renseignement, de logistique et de formation et c’est ce système qui fait la guerre. Enfin, il est clair que la France participe à ce système saoudien et émirati, en leur fournissant des équipements, de l’information et du renseignement et donc nous sommes engagés, nous avons une part de responsabilité. » Bien que l’on n’en connaisse pas les détails, la cobelligérance française dans ce que Jean-Yves Le Drian a appelé la « sale guerre » du Yémen nous semble être avérée, d’autant plus que nos propres sources dans les milieux de la Défense et du Renseignement nous l’ont unanimement confirmée.

    Source : Deep News Media, 6 jan 2020

    Tags : France, Afrique, françafrique, Franc CFA, FCFA, Barkhane, Sahel, Mali, Niger,

  • L’œuvre négative du néocolonialisme français et Européen en Afrique. Les Accords de Partenariat Économique (APE) : De la Françafrique à l’Eurafrique

    Saïd Bouamama

    Au moment où se « négocient » les indépendances des colonies françaises d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Ouest, la France met en place « un système de coopération » c’est-à-dire souligne le juriste Guy Feuer « un ensemble organisé et articulé d’éléments plus ou moins interdépendants[i] ». Le « traité de coopération et de défense » que la France signe formellement avec ses colonies est bâtit selon une architecture et un contenu unique. Il inclut l’ensemble des domaines de coopération (zone Franc, coopération commerciale et douanière, coopération culturelle, coopération militaire, etc.). Ce système s’impose en bloc pour l’ancienne colonie comme le souligne de manière paternaliste le premier ministre Michel Debré le 15 juillet 1960 s’adressant au futur président de l’État gabonais : « On donne l’indépendance à condition que l’État s’engage une fois indépendant à respecter les accords de coopération signés antérieurement : il y a deux systèmes qui entrent en vigueur en même temps : l’indépendance et les accords de coopération. L’un ne va pas sans l’autre[ii]. »

    La nature néocoloniale de ces accords sera explicitement reconnue par le président Giscard d’Estaing 15 ans plus tard lors d’une interview concernant le sommet Franco-Africain du 10 mai 1976 : « Il faut enlever au concept de coopération la notion d’impérialisme sous toutes ses formes[iii]. » Il est vrai que cet aveu se faisait dans un contexte de combat de nombreux pays du tiers-monde pour un « nouvel ordre économique mondial ». Après avoir traité dans notre livraison précédente la partie consacrée à la zone Franc de ces accords de coopération, penchons-nous sur le volet commercial, économique et douanier.

    La « coopération » est la continuation de la colonisation par d’autres moyens[iv]

    « L’histoire des accords franco-africains et malgaches ne se sépare pas de celles du groupe de Brazzaville, de l’UAM et de l’OCAM[v] » rappelle le juriste Guy Feuer. Le groupe de Brazzaville est constitués par 11 Etats francophones en décembre 1960 « de tendance modérée très favorable à la coopération avec la France[vi] » souligne l’historien burkinabé Yakouba Zerbo. Ces Etats constitueront l’Union Africaine et Malgache (UAM) en septembre 1961 qui se transforme en Organisation Commune Africaine et Malgache (OCAM) en février 1965. Ces regroupements apparaissent en réponse et en contrepoids des États africains dénonçant le néocolonialisme qui se regroupent au sein du groupe de Casablanca en janvier 1961[vii]. L’affrontement est immédiat entre les deux groupes sur la question de l’indépendance de l’Algérie, les membres du groupe de Brazzaville soutenant leur ancien colonisateur dans l’enceinte des Nations Unies alors que ceux du groupe de Casablanca soutiennent les nationalistes algériens. C’est dans ce contexte marqué par la guerre d’Algérie et par l’émergence d’une Afrique progressiste que s’élaborent les accords de coopération. Le leader Ghanéen Kwame Nkrumah décrit comme suit cette période de transition :

    L’impérialisme quand il se trouve en face de peuples militants des anciens territoires coloniaux d’Asie, d’Afrique, des Caraïbes et d’Amérique Latine, change de tactique. Sans hésitation, il se débarrasse de ses drapeaux et même de certains de ses représentants les plus haïs. Ceci veut dire, proclame-t-il, qu’il « donne » l’indépendance à ses anciens sujets, et que cette indépendance sera suivie d’une « aide » accordée à leur développement. Sous le couvert de phrases de ce genre, il met pourtant au point d’innombrables méthodes pour réaliser les objectifs qu’il atteignait naguère grâce au simple colonialisme. C’est l’ensemble de ces tentatives pour perpétuer le colonialisme sous couvert de « liberté » que l’on appelle néo-colonialisme[viii].

    La coopération envisagée n’est donc que la poursuite de la dépendance sous de nouveaux atours. Les responsables politiques de l’époque ne s’en cache d’ailleurs pas à commencer par le premier ministre que nous avons cité plus haut et par le Général De Gaulle. Celui-ci revient sur les objectifs de la « coopération » dans une série d’intervention du début de la décennie 60. Ces allocutions télévisées que l’on peut voir sur le Web en consultant le site de l’INA (conférence de presse du 11 avril 1961[ix], conférence de presse du 31 janvier 1964[x], allocution du 16 avril 1964[xi], etc.) répète une même série d’arguments : fierté de l’œuvre accomplie dans les colonies, nécessité de poursuivre l’œuvre civilisatrice, changement d’époque rendant nécessaire la décolonisation, coopération comme relais pour garder des zones d’influences politiques et économiques face aux concurrents, etc. La coopération gaulliste est bien un projet de maintien de la dépendance dans une forme moins décrédibilisée et moins délégitimée que la colonisation directe.

    Il suffit de jeter un regard sur un de ces accords (copie conforme des autres) pour saisir les mécanismes de cette dépendance maintenue sur les plans économiques, commercial et douanier. En voici quelques exemples :

    L’accès aux minerais stratégiques : les accords signés entre la Centrafrique, le Congo, le Tchad et la France prévoit une annexe aux « matières premières et produits stratégiques » qui sont précisées comme suit : les hydrocarbures liquides ou gazeux, l’uranium, le thorium, le lithium, le béryllium, l’hélium. L’annexe énonce dans son article 4 :
    La République Centrafricaine, la République du Congo et la République du Tchad réserveront à la satisfaction des besoins de leur consommation intérieure les matières premières et produits stratégiques obtenus sur leurs territoires. Elles accordent à la République française une préférence pour l’acquisition du surplus et s’approvisionnent par priorité auprès d’elle en ces matières et produits. Elles facilitent leurs stockages pour les besoins de la défense commune et lorsque les intérêts de cette défense l’exigent, elles prennent les mesures nécessaires pour limiter ou interdire leur exportation à destination d’autre pays[xii].

    Dans un langage moins euphémisé ces lignes se traduisent comme suit : les matières premières stratégiques de ces pays sont réservées à la France.

    L’accès aux marchés : les mêmes accords prévoient un accès privilégiés aux marchés africains pour la France libellé comme suit dans l’article 12 :
    Les parties contractantes conviennent de maintenir leurs relations économiques dans le cadre d’un régime préférentiel réciproque dont les modalités d’application pourront être précisées par accords spéciaux. Ce régime préférentiel a pour objet d’assurer à chacune des débouchés privilégiés ; notamment dans le domaine commercial et tertiaire ainsi que dans celui des organisations de marchés.

    Dans un langage plus transparent cet énoncé peut se traduire comme suit : Les exportations de produits agricoles et miniers des pays africains sont réservées à la France et l’accès aux marchés africains est prioritairement accordé aux entreprises françaises. En outre l’article 13 du même accord prévoit l’exonération des droits de douane pour les parties contractantes. « Dès le début d’âpres critiques se sont fait entendre en Afrique même mais également en France et ailleurs « rappelle le juriste international Guy Feuer en précisant comme suit ces critiques : « Les milieux contestataires considéraient ces accords comme un pur instrument d’exploitation[xiii]. » Les quelques exemples cités suffisent à illustrer que ces critiques n’étaient pas exagérées. « Les accords bilatéraux de coopération concernent beaucoup moins les États africains que les grands groupes industriels français, ainsi que leurs centaines de filiales travaillant sur place en Afrique » résume l’anthropologue congolais Patrice Yengo[xiv].

    Le temps des sommets de la « famille franco-afrocaine »

    Au moment où De Gaulle prépare activement la transition du colonialisme au néocolonialisme l’économie française comme celles des autres State industrialisés d’Europe est également en pleine transition vers une concentration et une monopolisation sans précédent. Le leader marocain Mehdi Ben Barka (futur organisateur de la Conférence de solidarité des peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine de janvier 1966) y voit même, à côté de la lutte des peuples, une des causes de la décolonisation préparée et du néocolonialisme :

    Cette orientation [néocoloniale] n’est pas un simple choix dans le domaine de la politique extérieure ; elle est l’expression d’un changement profond dans les structures du capitalisme occidental. Du moment qu’après la Seconde Guerre Mondiale, l’Europe occidentale par l’aide Marshall et une interpénétration de plus en plus grande avec l’économie américaine, s’est éloignée de la structure du 19e siècle, pour s’adapter au capitalisme américaine, il était normal qu’elle adopte également les relations des Etats-Unis avec le monde ; en un mot qu’elle ait aussi son « Amérique Latine[xv].

    Autrement dit le néocolonialisme marque le passage définitif à l’économie monopolistique avec sa domination par de grands groupes industriels et financiers et ses multinationales. L’évolution de la « coopération » suivra celle de cette monopolisation activement accompagnée par De Gaulle, Pompidou puis Giscard. L’accompagnement étatique se concrétise dès le Vème plan gaulliste (1966-70) qui se donne explicitement pour but la « constitution ou le renforcement d’un petit nombre d’entreprise ou de groupe de taille internationale capable d’affronter les groupes étrangers[xvi]». Si De Gaulle enclenche le processus de monopolisation, ses successeurs l’accélèrent.

    La période est celle d’une contestation des accords franco-africains qui s’exprime « sous des formes diverses, et quelques fois violentes, en Mauritanie, au Congo, au Cameroun, au Niger, etc.[xvii]. » Une rénovation s’impose. Elle sera l’occasion d’un véritable tournant de la coopération vers l’ultralibéralisme articulé aux politiques de soutien à l’émergence de grands groupes industriels et financiers français. Le VIème plan (1971-1975) dont l’objectif est résumé comme suit par le président de la République Georges Pompidou : « donner à l’économie française sa dimension internationale en réalisant des ententes internationales et des créations d’entreprises de taille mondiale[xviii] ». Giscard poursuivra dans la même direction : « La volonté de promouvoir l’investissement des entreprises françaises à l’étranger s’est cependant renforcée sous Valéry Giscard d’Estaing[xix] » résume le chercheur en sciences politiques Daniel Bach.

    Les conséquences sur la « coopération » avec l’Afrique sont énormes sur le plan de ladite « aide au développement : Il ne s’agit plus officiellement d’aider au développement mais d’aider des projets rentables ; il n’est plus question d’une aide essentiellement publique mais « d’associer les capitaux privés » ; le lien n’est plus pensé de manière bilatérale mais au contraire les pays africains sont incités à recourir à la banque mondiale et au FMI ; du soutien à des États inféodés, on passe à une incitation à la privatisation du secteur public ; le « soutien au développement » est abandonné au profit de « l’économie productive » ; etc. Bref le « libre-échange » avec son lot de privatisations, d’endettements, de développement inégal dans chacun des pays (entre un « secteur rentable » et des régions « inutiles »), de spoliation des terres au profit des grosses entreprises agro-exportatrices, etc., s’installe. Giscard d’Estaing symbolise cette transition vers une coopération visant une rentabilité à court terme. Le projet n’est plus seulement de maintenir une dépendance globale mais de maximiser le profit à court terme rappelle Daniel Bach :

    Durant le septennat de V. Giscard d’Estaing, le grand dessein dans lequel on prétendait inscrire la politique de coopération […] reste souvent marginalisé au profit de préoccupations économiques immédiates. Le projet contenu dans le rapport Abelin[xx] laissait transparaître la vision d’une coopération bilatérale intimement liée au développement des activités de l’industrie française à l’étranger. Cette conception inscrite dans l’un des rapports du VIIème plan sera reprise avec une vigueur nouvelle à partir de 1978 […] En février 1979, lorsque V. Giscard d’Estaing se rend au Cameroun, il est officiellement souligné que la coopération doit être « d’intérêt réciproque » mais « aussi de préférence s’effectuer dans les secteurs où une activation économique est souhaitable pour la France. Le gouvernement français va confier à un groupe d’experts la mission de rechercher « sans que soient remises en cause les autres finalités de la coopération » comment les fonds publics pourraient concourir plus efficacement au succès de la politique d’exportation[xxi].

    Non seulement la dépendance antérieure n’a pas disparue mais elle s’est accrue au cours de cette ère de « libre-échange ». Le poids accru des multinationales françaises et européennes a approfondi la scission entre une Afrique « utile » vers laquelle se dirige « l’aide » et une Afrique « inutile » qui sombre dans l’implosion et la déstructuration sociale. A l’intérieur même de chaque pays la fragmentation entre des zones « utiles » recevant les investissements et les zones « inutiles » s’est accélérée et a renforcée les sources de conflits liées aux mécontentements des régions délaissées. La destruction des capacités d’intervention des États africains est porteuse d’un chaos qui ne gêne pas les affaires pourvu que les zones « utiles » soient protégées au besoin par l’armée française. Il faut avoir en tête ce processus de mise en dépendance néocoloniale puis son approfondissement dans la décennie 70 pour éclairer la question des migrations contemporaines. Il en est de même pour les multiples conflits et guerres qui secouent l’ancien empire colonial français.

    Une telle aggravation de la situation n’est possible qu’avec un accompagnement politique. Ce rôle sera dévolu aux fameux sommets franco-africains (du premier à Paris en 1973 au dernier en 2017 à Bamako) qui ont été des espaces d’impositions des décisions et orientations de Paris et Bruxelles. Ces espaces sont également des lieux de gestion des insatisfactions, contestations et revendications inévitables du fait de la régression massive imposée. La sociologue sénégalaise Sow Fatou résume comme suit la représentation qu’ont les peuples africains de ces sommets : « De ces sommets on retiendra que les tête-à-tête de la France avec ses anciennes colonies furent longtemps perçus, par les populations africaines et de nombreux analystes de la politique africaine, comme des réunions de syndicats de chefs d’États africains, sous son égide[xxii]. » Certes les contestations africaines n’ont pas manquées mais globalement les décisions stratégiques de Paris s’imposent du fait de la dépendance économique, politique et militaire d’une part et du fait des menaces françaises d’autre part. Donnons quelques exemples : approbation de la décision française de se débarrasser de Bokassa devenu trop encombrant après 13 ans de soutien ininterrompus au sommet de Kigali de 1979 ; Consécration de la légitimité d’Hissène Habré après son coup d’État contre Goukouni Wede au sommet de Kinshasa de 1982; aval donné à la nouvelle stratégie militaire française c’est-à-dire à la création du RECAMP (Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix) par le sommet de Biarritz en 1994, etc.

    L’écrivain camerounais Mongo Beti fustige ces sommets comme outils du néocolonialisme à l’occasion de celui de Yaoundé en 2001 :

    Quel avantage nos populations tirent-elles d’un sommet franco-africain comme celui-ci ? Absolument aucun, bien au contraire. […] Toute l’affaire a pour but de célébrer Paul Biya, grand ami de Jacques Chirac, plus que jamais en mal de reconnaissance. […] La France a imposée depuis plus de 40 ans aux innocentes populations africaines des dictateurs féroces qui, en servant ses intérêts, ont été l’instrument d’une révoltante exploitation des ressources humaines et matérielles de notre continent[xxiii].

    Les sommets ne se contentent pas de ce rôle. Ils constituent également un contrepoids à l’OUA et une pression sur elle. Pour ce faire, ils ont été ouverts aux autres pays africains que ceux de l’ancien empire colonial français. On passe en effet de 7 chefs d’États au sommet de Paris en 1973 à 53 au sommet de Bamako en 2017. Le soupçon et la critique de vouloir se substituer à l’organisation africaine est tellement fréquente que Mitterrand est contraint de préciser au sommet de Kinshasa de 1982 que le sommet franco-africain « n’est ni une institution, ni une organisation. Elle n’entend se substituer à personne, notamment à l’Oua. Nous n’en avons ni le mandat ni l’intention… C’est aux Africains qu’il appartient de se déterminer eux-mêmes, au niveau privilégié de l’OUA[xxiv]. »

    De la Françafrique à l’Eurafrique

    Le tournant giscardien en matière de coopération se réalise dans le contexte de construction de la communauté européenne et de la montée en puissance du FMI et de la Banque mondiale comme instrument des États-Unis. Le modèle gaulliste d’un face à face entre chaque pays et la France cède le pas au multilatéralisme. Paris compte gagner ainsi pour ses multinationales l’accès aux pays anglophones et lusophones en échange d’une fonction de gendarme pour l’ensemble des pays européens d’une part et plus largement encore pour l’ensemble des puissances occidentales. Bien sûr ce compromis n’est pas exempt de contradictions d’intérêts mais il forme la texture de la coopération avec l’Afrique de Giscard à aujourd’hui. « Le néocolonialisme certes a mis fin partiellement à la politique de « chasse-gardée » du colonialisme traditionnel […] Cette ouverture ne met pas en cause la prépondérance au moins relative de la France en matière d’investissements et de commerces extérieurs ; elle a pour contrepartie le « redéploiement » français dans des pays qui n’appartenaient pas à sa zone d’influence[xxv] » résume l’historien et géographe Jean Suret-Canale.

    Le projet de constituer de grands groupes industriels et financiers de De Gaulle à Giscard s’inscrit dans la logique de la construction européenne. Dès sa gestation, avant même toute concrétisation, ce projet était en lien avec les colonies. Aimé Césaire dénoncait déjà en 1954 « l’Eurafrique » :

    Le colonialisme n’est point mort. Il excelle pour se survivre, à renouveler ses formes ; après les temps brutaux de la politique de domination, on a vu les temps plus hypocrites, mais non moins néfastes de la politique dite d’Association ou d’Union. Maintenant, nous assistons à la politique dite d’intégration, celle qui se donne pour but la constitution de l’Eurafrique. Mais de quelques masques que s’affuble le colonialisme, il reste nocif. Pour ne parler que de sa dernière trouvaille, l’Eurafrique, il est clair que ce serait la substitution au vieux colonialisme national d’un nouveau colonialisme plus virulent encore, un colonialisme international, dont le soldat allemand serait le gendarme vigilant[xxvi].

    L’analyse de Césaire a un caractère visionnaire impressionnant car elle est datée d’avant le traité de Rome de 1957. La seule erreur est que le soldat n’est pas allemand mais français même s’il défend désormais également les intérêts des multinationales allemandes. Le traité de Rome créant la Communauté Économique Européenne (CEE) comporte explicitement une dimension africaine. Son article 131 précise : « Les États membres conviennent d’associer à la Communauté les pays et territoires non européens entretenant avec la Belgique, la France, l’Italie, et les Pays-Bas des relations particulières. » Son article 132 révèle le véritable but : « Les États membres appliquent à leurs échanges commerciaux avec les pays et territoires le régime qu’ils s’accordent entre eux en vertu du présent traité[xxvii]. » Il s’agit bien comme le disait Césaire d’un projet de néocolonialisme européen.

    Les indépendances néocoloniales confirmeront cette « association » entre la CEE et 18 anciennes colonies africaines sous la forme des « accords de Yaoundé » de juillet 1963 renouvelés en 1969. Le contexte et le rapport de force de la période expliquent le contenu de ces accords qui, sur plusieurs aspects prennent en compte les intérêts des pays africains. Le contexte est celui d’une montée des luttes contre le néocolonialisme se traduisant par le groupe de Casablanca, par les conférences panafricaines et afro-asiatiques, par le groupe des non-alignés, par la conférence tricontinentale en 1966, etc. L’intervention militaire et l’ingérence suffisent de moins en moins à cantonner cette poussée. S’attacher structurellement les pays restés dans le giron des anciennes puissances coloniales devient une nécessité. Le second élément est le projet européen en pleine guerre froide avec l’ambition de constituer un troisième pôle, face aux USA et à l’URSS, roulant pour son propre compte.

    Pour ce faire, il faut « garantir l’approvisionnement de l’Europe en certaines matières premières tout en sécurisant les débouchés des anciennes colonies […] et pérenniser le rôle central exercé par quelques firmes européennes dans le commerce avec ces pays [xxviii]» résume l’économiste congolais Gildas Walter Gnanga. L’Europe n’est d’ailleurs pas la seule à tenter d’utiliser l’aide et la coopération dans le cadre de la guerre froide. A la même période l’URSS offre des prêts à long terme et à bas taux d’intérêts à ses alliés. Les USA créent pour leur part sous le couvert de la Banque mondiale l’International Development Association (IDA) en janvier 1960 dont l’objectif est également de proposer des prêts à taux faibles avec une échéance de 25 à 40 ans. La coopération est devenue un « instrument de propagande dans le cadre de la guerre froide » résume l’historien Guia Migani[xxix] ».

    En raison de ce contexte, les conventions de Yaoundé 1 (1963- 1969) et 2 (1969- 1974) prennent en compte les intérêts des pays africain : Les droits et taxes de douanes frappant les produits africains sur les marchés européens sont supprimés alors qu’ils sont maintenus pour les autres pays; en sens inverses les États africains s’engagent à ouvrir leur marché avec exemption des droits de douanes mais seulement « progressivement » et compte tenu « des impératifs de leurs économies » ; un fond européen de 730 millions de dollars est créé (le Fond Européen de Développement- FED) consacré aux infrastructure de transports, sociales et culturelles ou à la diversification des cultures afin de contrecarrer la monoproduction ; il est complété par un fond de 170 millions de dollars pour des prêts à « conditions spéciales » ou avec « bonifications d’intérêts » ; des prix garantis pour certains produits ; etc.

    Malgré leur caractère positif pour les États africain, les conventions de Yaoundé ne signifient pas la rupture avec la dépendance et encore moins la mise en place de rapports égalitaires. Bruxelles oriente en effet son aide vers les secteurs agricoles et miniers correspondant à ses besoins avec comme effet ce que le journaliste Tibor Mende appelle dès la fin de la décennie une « recolonisation[xxx] ». A l’issue de la décennie 60 les économies des pays africains signataires sont encore plus dépendantes, plus extraverties, plus mono-productrice. Même le très europhile et très peu contestataire ministre de l’économie ivoirienne est contraint de le constater en ces termes en 1969 :

    L’aide globale dont ont bénéficié les dix-huit est inférieure à la perte subie par ces pays, par suite de la dégradation des cours mondiaux. D’autre part, l’essentiel de l’aide reçue est destinée au développement agricole et plus précisément à l’agriculture d’exportation. Ainsi tant que durera la détérioration des termes de l’échange[xxxi], les économies africaines continueront à se perpétuer sur des bases contradictoires. D’un côté les économies bénéficient d’une aide, de l’autre elles sont pénalisées pour avoir tiré le fruit de cette aide[xxxii].

    L’adhésion du Royaume Uni à la Communauté Européenne met à l’ordre du jour l’extension du partenariat européen aux anciennes colonies anglaises. Un nouveau cycle de négociation s’ouvre sur fond d’un bilan négatif de la part des pays africains. La convention de Lomé 1 signé en 1975 avec 46 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) est comme les conventions précédentes riches d’avancées sur le papier qui seront rapidement démenties dans la mise en pratique. La logique reste la même que pour les accords de Yaoundé dans un processus à trois temps désormais rodé : reconnaissance verbale des revendications des pays africains, traduction en mesures prometteuses dans les accords, dévitalisation de ces mesures par la maitrise des orientations des aides d’une part et de l’écoulement des surplus agricole européen à des prix subventionnés sur le marché africain d’autre part. La mise en place d’un fond de stabilisation des recettes d’exportation (le STABEX) visant à compenser les pertes du prix des matières agricoles est la grande avancée sur le papier de Lomé 1 concernant 48 produits de base. Un fond similaire pour les produits miniers est institué par les accords dits « Lomé 2 » (signé avec 57 États la convention couvre la période 1979- 1984) le Sysmin (le Système de Développement du potentiel minier) pour huit produits miniers.

    La convention Lomé 3 concerne désormais dix États européens et 65 États ACP dont tous les États d’Afrique subsaharienne à l’exception de l’Afrique du Sud et de la Namibie toujours occupée par l’Afrique du Sud. La logique est identique à celle de Lomé deux mais avec une modification de taille : Au prétexte de se concentrer sur la « sécurité alimentaire », cette convention initie le système dit de « concentration » contraignant chaque État à choisir un secteur prioritaire sur lequel est concentré l’aide. La conséquence en est le renforcement encore plus fort sur l’agriculture d’exportation et l’abandon des perspectives de développement industriel. La convention de Lomé 4 (elle touche 70 pays ACP pour la période 1989- 1999) met l’action sur la « promotion des droits de l’homme, de la démocratie et de la bonne gouvernance » initiant ainsi des conditionnalités politiques pour accéder à l’aide. En outre elle impose le concept « d’ajustement structurel » défendu par le FMI et la banque mondiale en stipulant explicitement que les pays qui s’y soumettent auront « automatiquement droit à ces nouveaux fond d’appuis[xxxiii] »

    Indéniablement le principe d’une compensation de la baisse des prix agricole sur le marché mondial (STABEX) (et à une moindre mesure des prix de matières minières – SYSMIN) est celui qui explique l’augmentation du nombre de pays ACP signataires. Les multinationales disposent, en effet, de nombreux moyens pour pousser à la baisse les prix des produits agricoles et les minerais. Ce principe apparaît en conséquence comme la reconnaissance et la prise en compte de l’inégalité structurelle du marché mondial et en particulier de la dégradation continue des termes de l’échange. Cependant par de multiples biais ce principe équitable a été mis au service d’un accroissement de la dépendance :

    Encouragement de la monoculture d’exportation : La garantie STABEX n’est possible que pour les produits agricoles constituant au moins 6 % des recettes d’exportations. Alors que les économies africaines ont besoin d’une diversification pour être moins dépendantes du marché mondial, la concentration sur un ou quelques secteurs est encouragée. Logiquement se sont les pays les plus riches et les plus exportateurs qui ont le plus bénéficié de l’aide : Côte d’Ivoire, Sénégal, Niger.
    Entrave à l’industrialisation de transformation : Le système ne fonctionne pas pour les produits transformés alors que les pays africains ont besoin de ces industrie de transformation parce qu’elles sont créatrices d’emplois mais aussi parce que les variations des prix des produits transformées sont considérablement moindre que celles des produits bruts ;
    Le mensonge sur la « sécurité alimentaire » : Par définition l’agriculture vivrière est éliminée du STABEX pensé uniquement pour les variations de prix des produits exportés. Il s’agit objectivement d’une incitation à privilégier l’agriculture d’exportation au détriment d’une agriculture centrée sur l’autosuffisance alimentaire ;
    Des moyens contradictoires avec l’objectif de compensation : Les montants affectés au STABEX comme au SYSMIN sont sans commune mesure avec les pertes subies par la baisse des prix sur le marché mondial. Ainsi par exemple le montant du STABEX est de 180 millions d’écus en 1981 alors que la baisse des prix sur le marché mondial s’est traduite par une perte de 450 millions. Seule 52 % des demandes de cette année ont pu être satisfaites et l’année 81 est encore pire avec seulement 40 % des demandes satisfaites.
    L’ensemble de ces facteurs et mécanismes conduisent le juriste luxembourgeois Marc Elvinger à poser le bilan suivant :

    Bien que constituant un peu le fleuron de la politique de coopération de la CEE en ce qu’il peut sembler réaliser un pas en direction de la mise en place d’un nouvel ordre économique international, le Stabex est susceptible d’encourir de graves critiques pouvant aller jusqu’à l’accuser de n’être au contraire qu’un instrument au service de la pérennisation du pacte colonial. […] Dans ces conditions, la question se pose bien sûr de savoir si le Stabex ne constitue pas un piège en faisant miroiter la possibilité de ne pas avoir à modifier radicalement la division du travail Nord-Sud en en aménageant quelque peu les modalités, alors que, au bout du compte, il s’ avère même impuissant a ce faire en temps de crise importante. […] Bien que le Sysmin et le Stabex diffèrent de façon importante dans leur mode de fonctionnement, l’essentiel des critiques adressées au Stabex pourrait être repris à propos du Sysmin, en ajoutant que le principal moteur de la mise en place du Sysmin semble bel et bien avoir été le souci de la préservation de l’outil de production minier ACP au profit de la sécurité d’approvisionnement minier de la Communauté[xxxiv].

    Le « baiser de la mort » de l’Europe à l’Afrique

    Les négociations qui s’ouvrent à l’issue de la convention Lomé IV se déroulent dans un monde considérablement modifié. La guerre froide à définitivement pris fin avec la disparition de l’URSS en 1991 et avec elle le besoin de « préserver » les alliés africains. De l’intérieur comme de l’extérieur de l’Union Européenne, les critiques se multiplient sur la « violation » de la concurrence que constituerait les accords de Lomé. A l’interne les critiques proviennent essentiellement de l’Allemagne qui a gagné en poids au sein de l’Union Européenne depuis sa réunification. De l’extérieur se sont plusieurs pays d’Amérique Latine et les multinationales états-uniennes qui y sont installées qui dénoncent dès 1993 une « concurrence déloyale » et une « discrimination » dans ce qui est appelé « la crise de la banane ». L’enjeu en termes de profit est immense puisque l’Union Européenne est devenue depuis 1995 le premier importateur de bananes au monde. « Contesté à l’intérieur même de la Communauté par l’Allemagne (grand importateur de bananes latino-américaines) ce règlement [Règlement de l’UE adopté en 1993[xxxv]] fut surtout attaqué au sein du GATT par des pays d’Amérique latine » résument la juriste Catherine Hagueneau-Moizard et l’économiste Thierry Montalieu[xxxvi].

    L’ensemble des pays européens étant signataire de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (General Agreement on Tariffs and Trade ou GATT[xxxvii]) c’est celui-ci qui sera invoqué pour contraindre l’Union Européenne à modifier les règles de ses échanges avec les pays ACP :

    Dès 1993, un panel (organe du GATT chargé d’arbitrer les conflits commerciaux) avait constaté que les exemptions de droit de douane résultant des Accords de Lomé étaient contraires aux règles selon lesquelles, d’une part, les opérateurs nationaux ne doivent pas être favorisés (règle du traitement national, article III du GATT) et, d’autre part, l’ensemble des opérateurs doivent bénéficier du traitement le plus favorable (clause de la nation la plus favorisée, article 1er du GATT). La Communauté négocia alors une dérogation lui permettant de maintenir ses exemptions jusqu’en février 2000, date à laquelle le dernier Accord de Lomé devait prendre fin[xxxviii].

    La transformation du GATT en une Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995 renforce encore les critiques. Les États-Unis saisissent l’Organe de Règlement des Conflits (ORD) qui condamne à deux reprises l’UE en 1997 et 1998 pour « discrimination au détriment des pays tiers ». C’est dans ce contexte que s’ouvrent les négociations à l’issue de la convention de Lomé en 2000. Les accords de Cotonou (signés avec 77 pays ACP) qui en découlent sont à bien des égards une rupture, une régression lourde de conséquences pour les peuples africains et une atteinte supplémentaire aux souverainetés nationales. L’article premier de ces accords souligne ainsi que l’objectif n’est plus seulement le « développement » mais « l’intégration progressive dans l’économie mondiale ». Les exemptions douanières sont maintenues jusqu’en 2007 en raison d’une dérogation de l’OMC, la période transitoire devant se traduire par la signature « d’Accords de Partenariats Economiques […] compatible avec les règles de l’OMC » (article 36 et 37). L’article 96 pose en outre des conditionnalités politiques libellées comme suit : « les droits de l’homme, les principes démocratiques et l’État de droit[xxxix]. »

    Le ton de l’accord et les termes utilisés réintroduisent explicitement une relation de tutorat qui n’est pas sans rappeler la fameuse « mission civilisatrice » de la colonisation. D’une part l’Europe se dédouane entièrement de la situation catastrophique de nombreux pays africains et se pose d’autre part en tuteur de ces pays. « L’accord de Cotonou véhicule une image à la fois négative et restrictive de l’Afrique : gaspillage, incompétence, corruption, absence d’État de droit, pauvreté et retard à rattraper. Cela sert à justifier la perte d’automaticité de l’aide européenne, le renforcement des conditionnalités économiques et politiques, et les procédures de sanctions prévues comme la suspension des fonds[xl] » explique le sociologue Raphaël Ntambue Tshimbulu.

    Les accords de Cotonou prévoient la mise en place d’Accords de Partenariat Économique avec 6 régions du groupe ACP (les Caraïbes, l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique de l’Est, l’Afrique Australe, l’Afrique Centrale et le Pacifique). Au passage le découpage régional de l’Union Africaine est jeté à la poubelle au profit d’un autre décidé par les seuls européens. Progressivement on ne parlera plus que des APE et de moins en moins du dispositif de Cotonou dans lequel ils sont censés s’insérer. Ce constat signifie que les objectifs de libéralisation du commerce ont pris explicitement le pas sur ceux concernant le « développement » ou l’amélioration des conditions d’existence des populations.

    Quant au contenu des APE, il s’agit tout simplement d’ouvrir entièrement le marché africain à terme en supprimant l’ensemble des droits de douane. Le petit producteur d’oignons local est ainsi mis en concurrence directe avec la multinationale exportant des oignons. « Les APE prévoient en effet la suppression des droits de douane sur trois quarts des exportations de l’Union, tandis que celle-ci continuera à importer d’Afrique de l’Ouest la totalité de ses produits qui sont déjà en franchise de droits. Un marché de dupes[xli] » résume l’économiste Jacques Berthelot. Ce dernier caractérise ces accords comme un « baiser de la mort de l’Europe à l’Afrique ». Un autre économiste, Jean Christophe Defraigne, complète : « Il s’agit donc de créer plusieurs zones de libre-échange au sein du groupe ACP, ce qui devrait permettre aux multinationales européennes d’opérer plus efficacement au niveau régional[xlii]. »

    Les conséquences à terme de ces accords ultra-libéraux sont catastrophiques. L’ONG belge, « Centre National de Coopération au Développement (CNCD) », les évaluent comme suit :

    Une ouverture des économies entraînera une perte estimée entre 26 et 38 % des recettes douanières à l’horizon 2022. Ouverture à sens unique, d’ailleurs: l’Afrique n’a rien, ou presque, à exporter, sinon des matières premières (agricoles, pétrolières, métallurgiques), dont elle dépossède ses propres générations futures pour un bénéfice quasi nul. L’inverse n’est pas vrai. Les investissements étrangers connaissent, en Afrique, un « retour sur investissement » record (40 %), ce qui fait de la région « une manne féconde pour les prédateurs[xliii].

    Les futurs drames africains et les futures traversées meurtrières de la méditerranée qui en découleront inéluctablement sont en gestation dans ces accords ultralibéraux prétendant mettre en concurrence « libre et non faussée » des producteurs locaux et des multinationales.

    Résistances africaines

    Malgré leur dépendance étroite, la plupart des pays africains ont d’abord refusé le marché de dupe et ce d’autant plus qu’un mouvement militant s’organisait contre les APE. A échéance de la période transitoire des accords de Cotonou (2008), quasiment aucun pays africains n’avait signé les accords. Le sommet Europe-Afrique de Lisbonne de décembre 2007 voit même se constituer une fronde des Etats africains. Le sociologue Malgache Jean-Claude Rabeherifara résume comme suit les raisons de cette unité inédite depuis longtemps :

    La majorité des 53 États africains, à l’exception de quelques pays à revenus intermédiaires, ont en fait refusé de signer les APE car la conscience des pièges de pillage et de mise sous tutelle (« de recolonisation » disent certains analystes plus clairement !) qu’ils déploient est de plus en plus largement partagée dans les populations. Les États et gouvernements – fussent-ils des chantres du libéralisme – ne sont pas prêt de se mettre à dos des frondes populaires attendues, autrement dit à scier la branche sur laquelle ils sont assis[xliv].

    La riposte européenne ne tarda pas et pris une double forme. La première est celle de la menace à la baisse de l’aide au développement pour les pays refusant de signer les accords et le chantage à la réintroduction de droits de douanes pour leurs exportations vers l’Europe. La seconde fut celle de la division en ouvrant à des accords bilatéraux alors que les APE étaient censés être de dimension régionale. Les pressions européennes feront céder la plupart des États africains. Ainsi en juillet 2014 étaient signé coup sur coup un APE avec les États de l’Afrique de l’Ouest, un autre avec les États d’Afrique australe et un dernier avec le Cameroun seul. De manière significative Alassane Ouattara a joué un rôle de premier plan pour emporter la décision des États de l’Afrique de l’Ouest. Rappelons qu’il vint au pouvoir en 2011 dans la dynamique d’une intervention militaire française aboutissant à la destitution scandaleuse de Laurent Gbagbo. En 2016 c’est au tour de l’Afrique de l’Est de signer l’accord. Pressions, menaces, divisions, chantage à l’isolement et si nécessaire l’épée de Damoclès d’une intervention militaire, ont conduit à faire céder les États récalcitrants.

    Heureusement la résistance est également portée par des mouvements populaires : le réseau « Third World Network Africa » et le congrès des Syndicats du Ghana ; la Plate-forme des organisations de la société civile de l’Afrique de l’Ouest sur l’accord de Cotonou (Poscao), le Réseau des organisations paysannes et de producteurs de l’Afrique de l’Ouest (Roppa), la Coalition nationale « Non aux APE » et la plate-forme « France Dégage » pour l’Afrique de l’Ouest ; le Forum des Petits Exploitants Agricoles au Kenya ; etc.

    Les premiers effets se sont fait sentir au Sénégal avec l’arrivée du groupe Auchan en 2015 qui a comme conséquence la mise en danger du petit commerce sénégalais. La plate-forme « France Dégage » et l’Union nationale des Commerçants et Industriels du Sénégal (UNACOIS) appellent à la mobilisation en soulignant le lien entre le développement de la grande distribution et les APE : « Ils veulent ainsi, que le gouvernement leur dise quel étude d’impact il a fait en signant les Accords de partenariat économique (Ape). Ils prônent la protection du commerce sénégalais d’abord avant la promotion de l’économie étrangère et française précisément[xlv]. »

    Ces mouvements sont encore largement insuffisants pour faire basculer le rapport des forces. Cependant l’audience de ces luttes ne peut que grandir au fur et à mesure que les APE déploieront leurs effets désastreux. Les progressistes d’Europe sont aussi interpellés par la situation crée par la violence économique des APE. Le rapport des forces dépend aussi de leur capacité à se mobiliser en soutien aux luttes que développeront inéluctablement les peuples africains.

    [i] Guy Feuer, La révision des accords de coopération franco-africains et franco-malgaches, Annuaire Français de Droit International, n° 19, 1973, p. 720.

    [ii] Michel Debré, Lettre adressée à Léon Mba datée du 15 juillet 1960, cité in Alfred Grosser, La politique extérieure de la Vème République, Fondation Nationale des Science Politiques, Paris, 1965, p. 74.

    [iii]Philippe Decraene, interview de Valérie Giscard d’Estaing, Le Monde du 4 mai 1976, http://discours.vie-publique.fr/notices/767033608.html, consulté le 14 juillet 2018 à 16 h 15.

    [iv] Nous paraphrasons le théoricien de la guerre Carl Von Clausewitz qui donne à celle-ci la définition suivante encore d’actualité : « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ».

    [v] Ibid, p. 720.

    [vi] Yakouba Zerbo, La problématique de l’unité africaine (1958-1963), Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 212, 2003/4, p. 120.

    [vii] Ce groupe réunit le Ghana, la Guinée, l’Algérie, le Mali, le Maroc et la République Arabe Unie.

    [viii] Kwame Nkrumah, Le Néo-colonialisme. Dernier stade de l’impérialisme, Présence Africaine, Paris, 2009 (1965), p. 245.

    [ix] Conférence de presse du 11 avril 1961, https://fresques.ina.fr/de-gaulle/fiche-media/Gaulle00218/conference-de-presse-du-11-avril-1961.html, consulté le 14 juillet 2018 à 16 h30.

    [x] Conférence de presse du 31 janvier 1964, http://www.gaullisme.fr/2014/08/08/conference-de-presse-du-31-janvier-1964/, consulté le 14 juillet 2018 à 18. 30.

    [xi] Conférence de presse du 16 avril 1964, https://fresques.ina.fr/de-gaulle/fiche-media/Gaulle00232/allocution-du-16-avril-1964.html, consulté le 14 juillet 2018 à 20 h 00.

    [xii] Accord particuliers conclus les 11, 13 et 15 août 1960 entre le gouvernement de la république française, de la république centrafricaine, de la république du Congo, et du Tchad, Annexe concernant les matières premières et produits stratégiques, http://wabeafrikaezingocentrafrique2009.over-blog.com/2016/09/les-accords-de-cooperation-rca-france-de-1960-signes-par-dacko-enfin-retrouves-et-exposes-par-des-patriotes-centrafricains.html, consulté le 15 juillet 2018 à 10. 02.

    [xiii] Guy Feuer, La révision des accords de coopération franco-africains et franco-malgaches, op. cit., p. 721.

    [xiv] Patrice Yengo, Au cœur de la domination : Etat franco-africain, système de réseaux et criminalisation du politique, in Collectif, Résistances et dissidences. L’Afrique (centrale) des droits de l’homme, Rupture-Solidarité, n° 4, tome 2, 2002, p. 200.

    [xv] Mehdi Ben Barka, Option révolutionnaire au Maroc, in Ecrits politiques 1957-1965, Paris, Syllepse, 1999, pp. 229-230.

    [xvi] Cinquième plan de développement économique et social (1966-1970), Volume 1, Imprimerie des journaux officiels, Paris, novembre 1965, p. 68.

    [xvii] Yves Goussault, L’évolution de la coopération franco-africaine, Aujourd’hui l’Afrique, n° 8, 1977, p. 4.

    [xviii] Cité in Martin Verlet, redéploiement, intégration et politique de crise de l’impérialisme français, in L’impérialisme français aujourd’hui, Editions sociales, Paris, 1977, p. 15.

    [xix] Daniel Bach, La politique extérieure de Valéry Giscard d’Estaing, Presses de la Fondation Nationale de Sciences Politiques, Paris, 1985, p. 416.

    [xx] Ce rapport daté de 1975 prend pour prétexte la crise mondiale pour justifier une réforme importante de la coopération en faveur des multinationales françaises et européennes.

    [xxi] Daniel Bach, La politique africaine de V. Giscard d’Estaing : contraintes historiques et nouveaux espaces économiques, Travaux et documents n° 6, Centre d’Etude d’Afrique Noire de Bordeaux, 1984, pp. 22-23.

    [xxii] Fatou Sow, Langues, identités et enjeux de la recherche féministe, in Fatou Sow (dir.), La recherche féministe francophone. Langue, identités et enjeux, Karthala, Paris, 2009, p. 13.

    [xxiii] Mongo Betti, Billets d’Afrique, octobre 2000.

    [xxiv] Les 22 premières conférences des chefs d’Etats de France et d’Afrique, https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/B0100_-fiche22sommets.pdf, consulté le 16 juillet 2018 à 17 h 55.

    [xxv] Jean Suret-Canale, Dix ans de politique française en Afrique (1974-1984), Aujourd’hui l’Afrique, n° 30, 1985, p. 6.

    [xxvi] Aimé Césaire, Le colonialisme n’est pas mort, La Nouvelle Critique, n° 51, janvier 1954, p. 28.

    [xxvii] James D. Thwaites, La mondialisation, Presses de l’Université de Laval, 2004, p. 280.

    [xxviii] Gildas Walter Gnanga, Les Accords de Partenariat Economiques (APE) et les enjeux pour la CEMAC, Institut sous régional de statistique et d’économie appliquée, Yaoundé, 2008, p. 5.

    [xxix] Guia Migani, La France et l’Afrique subsaharienne, 1957-1963 : histoire d’une décolonisation entre idéaux eurafricains et politique de puissance, Bruxelles, Peter Lang, 2008, p. 207.

    [xxx] Tibor Mende, De l’aide à la recolonisation, Seuil, Paris, 1972.

    [xxxi] Pour une explication de ce que signifie l’expression « termes de l’échange » voir notre article précédent consacré au Franc CFA.

    [xxxii] Konan Bédié, La dégradation des cours des produits tropicaux et l’action de la Communauté, Revue du marché Commun, n° 123, mai 1969, p. 225.

    [xxxiii] Daniel Bach, Un ancrage à la dérive : la convention de Lomé, Revue Tiers-Monde, n° 136, 1993, p. 750.

    [xxxiv] Marc Elvinger, De Yaoundé à Lomé IV, Forum für Politik, Gesellschaft und Kultur, n° 106, novembre 1988, pp. 10-11.

    [xxxv] Ce règlement exonère les bananes ACP de droits de douane et fixe ceux-ci à 100 écus la tonne pour les autres provenances.

    [xxxvi] Catherine Hagueneau-Moizard et Thierry Montalieu, L’évolution du partenariat UE-ACP de Lomé à Cotonou : de l’exception à la normalisation, Mondes en développement, n° 128, 2004/4, p. 70

    [xxxvii] L’accord signé par 23 pays en 1947 vise à libéraliser les échanges en ayant comme objectif de diminuer puis de supprimer les tarifs douaniers. Ainsi par exemple les tarifs douaniers moyens sur les produits industriels passent de 40 % en 1947 à 5 % en 1993. Ce qui sera appelé cinquante ans plus tard « mondialisation » trouve son origine dans cet accord enlevant aux Etats un des outils de la souveraineté économique.

    [xxxviii] Catherine Hagueneau-Moizard et Thierry Montalieu, L’évolution du partenariat UE-ACP de Lomé à Cotonou : de l’exception à la normalisation, op. cit., p. 70.

    [xxxix] Accord de partenariat entre les membres du groupe des Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, 23 juin 2000, JO n° L317 du 15 décembre 2000, https://wallex.wallonie.be/PdfLoader.php?type=doc&linkpdf=8369-7516-45, consulté le 19 juillet 2018 à 10 h 15.

    [xl] Raphaël Ntambue Tshimbulu, L’Union Européenne sous le feu de la critique, Le Monde Diplomatique, Juin 2002, p. 18.

    [xli] Jacques Berthelot, Le baiser de la mort, de l’Europe à l’Afrique, Le Monde Diplomatique, Septembre 2014, p. 12.

    [xlii] Jean-Christophe Defraigne, Introduction à l’économie européenne, De Boeck, Louvain-la-Neuve, 2013, p. 364.

    [xliii] Erik Rydberg, Les APE : visées commerciales de l’Union européenne, Les Cahiers de la Coopération Internationale, n° 11, mai 2009, p. 11.

    [xliv] Jean-Claude Rabeherifara, APE : Sursaut africain au sommet de Lisbonne, Aujourd’hui l’Afrique, n° 107, mars 2008, p. 3.

    [xlv] Rama Gueye, L’économie sénégalaise en danger avec Auchan et les APE : la Plateforme « France Dégage » lance l’alerte, Dakar midi, https://www.dakarmidi.net/actualite/leconomie-senegalaise-danger-auchan-ape-plateforme-france-degage-lance-lalerte/, consulté le 20 juillet 2018 à 17 h 30.

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  • Mali: des manifestants veulent le départ des militaires étrangers du pays

    Mali – Niger : IBK et Issoufou acculés par les manifestations contre la France
    Ça devait arriver, ce n’était qu’une question de temps. Les africains se sont révoltés contre le pillage de la France et ses pions africains. Leur révolte est d’autant plus justifiée du fait que les populations du Sahel ne voient aucun progrès dans la situation sécuritaire et la force Barkhane n’a prouvé aucune efficacité dans la lutte contre la menace terroriste. Pire encore, la situation va de mal en pire, notamment depuis que le débat sur le France CFA et la présence de l’armée française en Afrique est devenu quotidien.

    Vendredi dernier, la population de Bamako est de nouveau sortie pour revendiquer le départdes troupes militaires étrangères du territoire malien. À l’appel d’associations et de partis politiques notamment, les manifestants se sont regroupés devant le monument de l’Indépendance de Bamako. De nombreux drapeaux maliens étaient visibles. Des responsables de la société civile et de la classe politique malienne étaient également présents.

    Banderoles, drapeaux et des slogans à gogo la Place de l’Indépendance de Bamako. Des citoyens décidés à chasser les derniers vestiges de la colonisation française. Une colonisation maintenue par des dirigeants sans aucune dignité et qui ne pensent qu’à remplir leurs poches au détriment de la misère d’une population meurtrie par les souffrances.

    Macky Sall, IBK, Alassane Ouattara doivent comprendre qu’il est temps de réagir en défense des intérêts des peuples et non des métropoles.

    Tags : Mali, Niger, France, Barkhane, Françafrique, Sahel, terrorisme,

  • Notre présence au Sahel est moins souhaitée que par le passé (Florence Parly)

    Présence de la France au Sahel : « Nous avons besoin de clarifications » de la part des pays du Sahel, estime Florence Parly

    La ministre des Armées était l’invitée de France Inter samedi matin.

    Un sommet international du G5 Sahel se tiendra lundi 13 janvier à Pau, en présence d’Emmanuel Macron et de ses homologues du Burkina Faso, du Mali, du Niger, du Tchad et de la Mauritanie. « Il s’est développée au cours des dernières semaines une sorte de narrative qui peut laisser penser que la présence de la France [au Sahel] n’est plus autant souhaitée que par le passé, et c’est cela qu’il nous faut clarifier », a affirmé sur France Inter samedi 11 janvier, la ministre française des Armées, Florence Parly. Elle a ainsi appelé à une « clarification » de la part des gouvernements des pays du Sahel.

    « La France souhaite pouvoir poursuivre la lutte contre le terrorisme au Sahel mais à la condition bien sûr que cela soit souhaité et demandé par les pays concernés », a précisé Florence Parly. L’opération Serval, rebaptisée Barkhane a débuté en 2014 et aujourd’hui 4 500 militaires français sont déployés contre le jihadisme dans ces pays. « Ce sont des pays souverains : lorsque nous sommes intervenus en 2013, c’était à la demande du Mali. Si nous sommes présents aujourd’hui, c’est à la demande des gouvernements. Si la mission de l’ONU, la Minusma, est présente, c’est évidemment à la demande des gouvernements », a expliqué la ministre des Armées.

    Je n’ai absolument pas l’intention de porter au pilori tel ou tel, mais force est de constater que dans l’environnement politique, dans le milieu politique de ces pays, il y a des voix qui s’expriment et parfois ces voix ne sont pas contredites par les dirigeants.
    Florence Parly

    Florence Parly a regretté sur France Inter qu’il existe « un certain nombre de déclarations qui sont sans ambiguïté sur le fait que la France pourrait se satisfaire d’une situation sécuritaire qui ne progresse pas ». Sans donner d’exemples concrets, la ministre a dénoncé ces déclarations : « C’est tout à fait mensonger et en tant que ministre des Armées je ne peux évidemment pas accepter que de tels propos puissent être tenus dans la mesure où 41 de nos soldats ont donné leur vie. »

    France TV Info, 11 jan 2020

    Tags : France, Barkhane, Sahel, Mali, Niger, Burkina Faso, terrorisme,

  • Mauritanie : La banque Bouamatou ouvre deux nouveaux sièges à Nouadhibou

    La Générale Banque de Mauritanie (GBM), propriété de l’homme d’affaires vivant en exil depuis des années, Mohamed Ould Bouamatou, a ouvert deux nouveaux sièges dans la capitale économique Nouadhibou.

    La Directrice Générale de la GBM Leila Bouamatou, fille de l’homme d’affaires Ould Bouamatou, a évoqué à l’occasion de la cérémonie d’inauguration desdits sièges, ce qu’elle a appelé « les dures, injustes et arbitraires mesures de tout genre» imposées à son institution , après les performances considérables réalisées par la banque avant 2012, lorsque la GBM a obtenu 30% des marchés du secteur halieutique au niveau de Nouadhibou.

    L’inauguration en question s’est déroulée en présence des staffs des deux nouveaux sièges de la banque au niveau de la capitale économique, des autorités administratives et municipales, des élus et des acteurs économiques des secteurs publics et privés.

    Le ministre des pêches et de l’économie maritime avait adressé quelques semaines auparavant, une lettre au Directeur Général de la Société Mauritanienne de Commercialisation du Poisson (CMSP), l’informant de la levée du département de l’embargo de traiter avec la GBM.

    Le ministre indique dans ledit courrier, avoir reçu, au cours d’une visite de travail et d’information effectuée à Nouadhibou, des plaintes d’acteurs du secteur de la pêche, relatives à ce qu’ils appellent des préjudices subis, consécutifs, selon leurs témoignages, à la décision de la SMCP leur interdisant de traiter avec la banque de Bouamatou.

    Centre Essahraa

    Tags : Mauritanie, Mohamed Ould Bouamatou, Banque Ould Bouamatou, Mohamed Ould Abdelaziz,