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  • Algérie : Il était une fois le 17 octobre 1961

    Le 17 octobre 1961, 49 ans de silence sur l’impunité du dernier crime coloniale
    Encore un épisode regrettable inscrit au front de la France officielle. Indélébile, tatoué d’une encre permanente, éternelle tant qu’elle persiste à l’ignorer comme elle continue à ignorer toutes les exactions commises depuis des lustres. La Seine en témoigne. Les rues et ruelles de Paris en parlent toutes les nuits. Les jours, les spectres maléfiques s’effacent comme des vampires craignant la lumière. La vérité est l’éclat qui aveugle l’obscurantisme. La France est victime du coté sombre de son histoire. Paradoxes intemporelles ou gloires et déboires qui la nanisent face à la nostalgique grandeur de cette nation des droits de l’homme. Serait-elle en phase de perdre ses vraies valeurs et ses idéaux au point de refuser de faire son mea culpa. Reconnaître ses crimes s’est se repentir et s’en excuser c’est grandir. Notre religion nous exige de pardonner à ceux qui s’excusent et non à ceux qui s’entêtent à reconduire l’erreur et persistent à cacher la vérité.
    Le 17 octobre 1961, faute d’être une date mémorable, elle attire aujourd’hui regrettablement plus de guêpes que d’abeilles. La loi de la jungle continue d’instaurer ses mœurs enrobées d’amnésies généralisées et, comme leitmotiv, elle préside au rappel. Juste pour le rappel !, même s’il constitue un bien fait pour les croyants. Cependant, à y bien méditer sur le sort de ceux précipités injustement vers les bords de la Seine, noyés, incarcérés et torturés, par une horde sauvage déchainée, il y a lieu de s’indigner devant le mutisme ambiant et, pire encore, face au verbiage infécond, plus dangereux que l’insolence d’un ignorant. Des espaces sont envahis pour célébrer cette date. Elle est commémorée sur des tribunes envahies par les épigones d’une société civile désabusée, en mal de notoriété politique. Juste pour se refaire une virginité sur le dos des victimes. Arrêtant ce second massacre. Celui de Papon et ses sbires suffit pour être déjà une plaie saillante qui témoigne de la déchéance d’un Etat incapable de restituer le droit des concitoyens victimes de la barbarie. D’intenter ne serait-ce qu’un procès posthume contre les criminels qui ont enfreint toutes les règles des droits de l’homme en massacrant à leur guise des citoyens franco-musulmans. C’est ce suffixe qui les dérangeait. Cette arabité, cet islam et cette amazighité qu’il ne cesse de manipuler pour envenimer l’atmosphère d’une nation indépendante. Sans pour autant ignorer l’appel du peuple au droit à son autodétermination et à sa liberté.
    Le 17 octobre conclu en réalité la série macabre des massacres coloniaux perpétrés contre des populations civiles désarmées depuis l’invasion des territoires algériens. Des enfumages aux razzias, de l’éventrement des femmes et aux tueries des enfants, des massacres massifs aux exterminations des tribus, du génocide de mai aux déportés de la Nouvelle-Calédonie, des guillotinés aux veuves et orphelins de novembre, sans pour autant occulter les spoliations des biens, l’expropriation des terres, le vol des trésors de la Casbah et de Tlemcen, la destruction des monuments, le déracinement, l’acculturation et l’ethnocide absout par l’étendard du positivisme coloniale, la religion des missionnaires, celle des moines de Tibhirine et des bienfaiteurs de la Kabylie et des monts de chenoua. 
    Le réveil occasionnel…
    En berne toute l’année des voix s’élèvent occasionnellement pour exhiber leurs chétifs bicéphales tentant de remémorer ou commémorer à la manière locale une date qui reste dans les annales de l’histoire franco-algérienne une honte inscrite à l’encre indélébile. Un crime contre l’humanité qui clôture en faite le chapelet macabre des exactions commises tous le long de la tragique nuit colonial. Mais cette fois-ci les événements se sont transposés sur le sol français. L’intelligentsia algérienne, pour la plus part absente, ne trouve en fait aucune démarche probante à cette réverbération désolante et répétitive sur un sujet qui mérite plus d’engagement et de conviction. Même les « politiques », et en particulier les apprentis sorciers, excellant dans l’art de la reculade à main levée et à la révérence majestueusement exécutée à leur dame « la doulce France ». Ils n’hésitent nullement à se dressant en objecteurs de conscience, s’ils ont en une, pour la ménager tout en essayant ardemment de lui miroiter leur docilité et leur adhésion aux principes imposés et déjà annoncés par la président de la république français, Nicolas Sarkozy, lors de son passage en Algérie. Tourner la page et regarder vers l’avenir. Lui qui se déclare incompétent quant conduite de ses aïeux, alors qu’il a été un des artisans de la loi du 23 février 2005. Les notre, affaiblis par leur instinct de conservation, s’évertuent à chercher des subterfuges et coller faussement au concept cher au défunt Houari Boumediene : « Tournant la page et ne la déchirons pas ». Une trouvaille instrumentalisée à des fins indignes. Trouvez mieux, messieurs les repentis, pour nous convaincre de vos fausses manouvres. La jeunesse algérienne est attentive à vos sarcasmes. Elle n’a nullement l’intention de céder un neurone de sa mémoire, un iota de ses revendications pour faire fléchir la France coloniale. Car, il ne s’agit pas de faire la démonstration du réel ou du vari ou faux virtuel. On a beau raconter inlassablement les événements. Corriger peut-être, certains détails nécessaires. L’essentiel est de confirmer et affirmer le crime, aboutir à son jugement et châtier les criminels quelques soit leurs statuts. Les bourreaux ont déjà fait le boulot et ils en sont fiers. Ils l’ont à mantes reprises déclaré au vu et au su de tous. Qui ignore aujourd’hui que Mitterrand a été un des donneurs d’ordre. Qui des généraux auxquels on a accordé des stèles, des monuments et des honneurs, se déclare n’avoir exécuté que les ordres et obéir en gentilshommes désabusés ses supérieurs. 
    Dans les faits…
    Fort d’une population de 135 000 adhérents sur un total de 300 000 résidents en France, soit un taux de 45 %, le FLN pouvait compter sur l’apport conséquent de cette masse pour porter la guerre sur le territoire français. C’est au cœur de l’Europe où la revendication algérienne avait déjà gagné l’écho international, que tout dérapage français ne pouvait que nuire à sa réputation. Il fallait une démonstration de choc à la mesure de la répression permanente dont il était victime sur l’ensemble du territoire coloniale. D’autant plus qu’affaibli dans les maquis algériens suite aux opérations jumelles, le FLN devait consolider sa position à un moment ou les pourparlers s’engager dans une impasse. La question de la souveraineté sur le Sahara, qui constituait le frein momentané à toutes formes de rapprochement pacifique, étant tranchée, le FLN répondra favorablement à la reprise des négociations.
    Bien structurée, notamment à Paris avec plus de 90 000 adhérents, la Fédération de France qui avait servi un moment comme la principale trésorerie de la cause, devait, selon l’esprit des dirigeants, apporter son soutien pratique à la guerre d’indépendance. Une contribution qui s’est soldée par un massacre collectif commis par la France coloniale et un bilan d’affrontement regrettable entre les frères ennemis (FLN-MNA). Car, il est utile de rappeler que le FLN faisait à ce moment précis face à un double front. Ce qui ne pouvait être qu’a l’avantage de l’armée coloniale qui souffler ardemment sur la braise pour capoter les engagements politiques de part et d’autre. Neuf mois séparaient ces crimes des suffrages en faveur de l’indépendance. Quant à l’entrée de Papon en scène des opérations, elles les précédaient de presque quatre ans. Préfet bigame, il avait été sélectionné en 1958 par ses supérieurs pour son savoir faire dans l’art de la répression, ayant pour principale mission de nettoyer Paris de ses perturbateurs. Etant un potentat du pouvoir, on lui colla la sale besogne et on en fera un parfait bouc émissaire pour s’amender à leur tour de toutes formes d’accusations criminelles. Le FLN multipliait ses actions contre la police, incendiant les raffineries de Marseille et la banque, la riposte ne devait être que plus féroce. Des restrictions sont imposées à la population musulmane. Un couvre feu sélectif paralysait les actions nocturnes et guerrières du FLN. Le 17 octobre sera ainsi le théâtre de cette tension exacerbée. On voulant briser l’embargo, imprudemment le FLN mettre dans la gueule du loup ces militants en particulier les civiles. Ouvriers, femmes et enfants, manifestant certes pacifiquement, subirent le même sort que leurs frères de 1945. Un autre crime contre l’humanité venait enrichir le tableau positif de la colonisation.
    De l’affaire au procès Papon…
    Au passé pétainiste et pour des raisons purement électoralistes Mitterrand n’hésita à aucun moment s’allier les juifs. Soutenu par le canard enchainé, il ouvrît le bal et déclencha vers 1981 une affaire dite Papon. Ce dernier avait également servi sous le régime de Vichy jusqu’en 1942. Responsable des déportations, il devient ainsi objet de marchandage pour gagner les cœurs et les voix de la communauté juives en France qui comptait 1% d’électeurs. Sans rentrer dans les détails, l’affaire Papon dénudait en fait les scandales de l’Etat français dans toute sa grandeur depuis la deuxième guerre mondiale. Il mettait en lumière les malveillances des hommes du pouvoir, qui agissaient à l’encontre des principes fondateurs de la commune. Une attitude qui persiste jusqu’à l’heure. François Mitterrand, Valérie Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, trois concurrents au poste de Président de la république, dans les années 80/90, se disputaient le personnage principal. Ce scandale politique entrouvrira les multiples dérapages relatifs aux injustices commises contre les communautés qualifiées autrefois d’indigènes. Il servira à noyer le poisson dans l’eau. D’une affaire préfabriquée les vérités feront progressivement surface. Il reviendra à l’honneur de Jacques Chirac d’avoir exceller dans la démesure. L’affaire Papon deviendra le Procès. Des déportations de juifs aux massacres du 17 octobre 1961, en passant par d’autres scandales aussi terrifiants que désolants. La persévérance et la capacité de nuisance du peuple juif feront en sorte que Papon sera jugé et condamné à 10 ans de prison ferme. En fuite, il refusa de reconnaitre la justice française pour sa tendance politique. Il sera capturé par la police suisse en 1999, Interné à la santé, il se considéra prisonnier politique jusqu’à sa mort. De nombreux ouvrages ont été consacrés aux évènements dés les premières années des massacres. Elles seront enrichies par d’autres textes relatifs aux procès intentés contre ce tortionnaire, traitant notamment des questions relatives à la responsabilité directe de l’Etat français. 
    En Algérie…c’est l’amnésie totale
    En Algérie rien ne semble faire la différence depuis l’indépendance. Silence et inertie totale sur tous les fronts. Les ardeurs se réveillent occasionnellement pour marquer l’événement comme si par un instinct presque naturel nous sommes prédisposés à accepter notre sort d’indigène. Un diagnostic psychopathologique s’impose pour tirer au clair l’état de santé mentale de l’algérien type. Et en particulier, les recalés des classes pour regagner la classe politique et des pseudo-intellectuelles. Les événements du 17 octobre ont été mille fois narrés. Du moins, il semblerait selon certains analystes de salons qu’une certaine prise de conscience a bourgeonné dés les années quatre vingt. Depuis, nous avons eu droit, chaque année commémorative, aux mêmes configurations. Figures et témoins incontournables, les mêmes scènes autour de la seine, un timing à point à la télévision algérienne, des sonorités radiophonique en chaine, reliant depuis peu les locales. Seule la presse écrite a le mérite, de nous livrer souvent des analyses probantes. Des contributions inédites œuvres d’auteurs méconnues. Sommes-nous arrivés par tout ce tintamarre inutile injustement. Surement pas. Nous sommes encore pétrifié à méditer sur le bienfondé de notre cause. Certains ont déjà tranché, ils s’autorisent même le droit de décider à la place du peuple. La dernière sortie du RND qui n’est surement pas une surprise en témoigne. Son secrétaire général, en chef d’orchestre chevronné, a déjà composé le refrain. Quand on n’a pas de suite dans les idées vaut mieux se taire et laisser place à ceux qui disposent de capacité de synthèse. La France doit reconnaitre ses crimes et s’en absoudre. Comme, elle doit s’en excuser pour avoir elle-même demandé à l’Allemagne de le faire pour si peu. La proportion est taille, 132 ans pour 5, la sentence n’en sera que plus lourde. On ne peut être plus royaliste que le Roi. Si les français, du moins les officiels, accordent leur violent avant de se prononcer sur des sujets aussi sensibles que la mémoire, pour la simple raison que l’électorat est à cheval sur le moindre détail, veillant scrupuleusement sur les exploits comme sur les erreurs de chaque formation dans la perspective d’améliorer les conditions de coexistence communautaire d’une nation et la préservation de sa notoriété et sa mémoire. Les notre pensent que les jeux sont fait. Grâce à l’administration, ils peuvent s’assurer une pérennité dorée en espérant ne plus avoir besoin d’électeurs. Les fausses ambitions sont illusoires et l’avenir nous donnera raison…
    La presse a été éloquente cette semaine. Le maire de paris s’est prononcé sur le crime. Il le dénonce et considère que : « les massacres du 17 octobre sont un acte de barbarie et que l’Etat français doit reconnaitre ». Voici un homme qui bouscule la demeure et chamboule le décor et l’ambiance intérieure. Du coté de chez nous, un mutisme total, une peur bleu, un recul tragique. Hors du temps et des stratégies gagnantes, ils se bousculent devant le portillon pour offrir les meilleures garanties à l’ex-colonisateur pour lui permettre de nous livrer ses ordures technico-économiques. Cela s’appel le dégel des relations bilatérales. Cependant, si de ce coté on tente de dégeler, la France profite des circonstances pour installer ses nouvelles mines anti-personnelles. Elle floue le traitement de la question du sahel et s’entête à nous imposer son projet de l’UPM. Elle glorifie le colonialisme en inaugurant la fondation relative à « l’écriture de l’histoire de la guerre d’Algérie et les batailles de la Tunisie et du Maroc », sans gène, ni complexe ou entrave et encore moins d’égard à la sensibilité bilatérale, ni à la diplomatie moderne. Elle persiste dans son obstination à refuser même de reconnaitre les faits. C’est ce que nous méritons peut-être ?
    Il y a eu crime contre l’humanité et puis
    On peut s’évertuer d’avoir porté la guerre sur le territoire français. Un acte de bravoure, même s’il comporte ses imperfections et ses dérapages, qui ont couté la vie à de nombreux innocents, (seule l’histoire nous éclairera un jour à ce sujet), a été possible au temps où il y avait hommes et des vrais. Abnégation, sacrifice et nationalisme pure et dur pour l’honneur de la partie. La dégringolade visiblement regrettable sur les valeurs d’antan, nécessaires pourtant en ces temps de réconciliation, nous entraine vers un avenir incertain. La rente, la corruption, les passes-doits, la ségrégation régionaliste, la centralisation à outrance, les lapidations des biens de la communauté chèrement acquis et bien d’autres nouvelles mœurs qui s’imposent actuellement comme valeurs d’échanges et mode de production nous font craindre le pire.
    Sommes-nous comptable de cette régression béante qu’affichent nos apprentis boulitique sur la scène nationale ? Ils se donnent des airs de spécialistes en historiographie. Et pire encore, à peine élus sur des sièges éjectables, ils se donnent le droit de décider à la place du peuple des suites à donner quant à la qualité de nos relations avec la France. Il faudrait du moins dévoiler ses références pour s’autoriser un tel statut. Etre algérien, c’est avant tous être un bon musulman et défendre les principes fondamentaux de notre religion. A défaut, avoir un esprit démocratique, épris de respect à autrui est salutaire. Car, il ne faut pas oublier que nous vivons en communauté.
    Un lourd contentieux nous impose la promiscuité, bon gré malgré nous avec la France. Sans aucun esprit revanchard ni chauvin, on distingue le bon grain de l’ivraie. Cependant, des crimes ont été commis. Des crimes contre l’humanité, selon le concept propre et cher à la France (). Celui du 17 a été reconnu par tous. Il doit être jugeait et les criminels condamnés. D’autant plus que nulle entrave ne nous empêche d’intenter un vrai procès. L’expérience de la Fondation est méritoire et enrichissante, mais elle ne suffit pas pour faire justice. Le crime n’est pas amnistié, il est imprescriptible. Aujourd’hui nous sommes face à un double affront. Le refus de la France de reconnaitre ses crimes, une justice raciste et sélective, une attitude déloyale positivant le colonialisme. Et une totale inertie, recule et mystère et boules de gomme de la part de notre junte politique. Dieu en est témoin et l’histoire jugera les actes de chacun.
    « Allah ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures. Car Allah aime les équitables. Allah vous défend seulement de prendre pour alliés ceux qui vous ont combattus pour la religion, chassés de vos demeures et ont aidé à votre expulsion. »(). A méditer….
    M.Boukherissa Kheiredine
    Président de la Fondation du 8 mai 45 
  • Oeuvre positive et impôt colonial : Le credo des races qui se prétendent supérieures

                     

    «Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde» (Aimé                              Césaire, Discours sur le colonialisme)

    Encore une fois, l’actualité nous rattrape. Nous avons beau faire les civilisés en taisant nos douleurs ancestrales pour être politiquement corrects. Il n’empêche que ce vernis saute à la première réminiscence. Il s’agit cette fois d’un cri du cœur qui est celui du procès du colonialisme, encore et toujours. On apprend que 14 pays africains – les anciennes AOF et AEF fruit d’un imaginaire Empire français – ont été contraints par la France à payer l’impôt colonial pour les avantages de l’esclavage et de la colonisation. Nous voyons donc que la colonisation dans ce qu’elle a de positif comme oeuvre, n’est pas sortie de l’imaginaire délirant de quelques nostalgériques – nostalgiques de l’Algérie française- mais que la certitude d’appartenir à la race des seigneurs a un substrat plus profond.
    La double peine: massacres de masse et impôt colonial post-indépendance
    Il est pour le moins admis que le colon en fait, qui est venu tuer, piller, voler s’est enrichi honteusement – il n’est que de se souvenir du hold-up de la Casbah d’Alger- magistralement décrit par Pierre Péan – on y apprend en effet, que 200 millions de francs or ont été dérobés par les généraux de l’Armée d’Afrique qui eurent à se disputer le butin avec leurs troupiers, mais pas seulement, il y eut aussi des agioteurs qui s’enrichirent à vil prix, l’Algérie était à vendre et on dit que la richesse de la maison Sellière serait due en partie à la rapine du trésor d’Alger. On apprend par la même qu’il soumet à la double peine les anciennes colonies en leur demandant de rembourser les constructions réalisées pour son propre confort et qu »il revend au prix fort après usage.
    Dans cet ordre, Mawuna Remarque Koutonin écrit: «Le saviez-vous? 14 pays africains contraints par la France à payer l’impôt colonial pour les ´´avantages´´ de l’esclavage et de la colonisation. Le saviez-vous? Aujourd’hui encore, beaucoup de pays africains continuent de payer un impôt colonial en France, et ce malgré l’indépendance! (…) Lorsque Sékou Touré de Guinée décida en 1958 de sortir de l’Empire colonial français, et opta alors pour l’indépendance du pays, l’élite coloniale française à Paris s’est indignée, et dans un acte de fureur historique, demanda à son administration alors en place en Guinée de détruire, dans tout le pays, ce qui représentait, à leur yeux, les avantages de la colonisation français.» (1)
    «Trois mille Français quittèrent le pays, en prenant tous leurs biens et détruisant tout ce qui ne pouvait être déplacé: les écoles, les crèches, les bâtiments de l’administration publique furent détruits, les voitures, les livres, les médicaments, les instruments de l’institut de recherche, les tracteurs ont été écrasés et sabotés et les nourritures entreposées furent brûlées ou empoisonnées». (1)
    L’auteur nous apprend que les dirigeants de pays nouvellement indépendants ne pouvaient sortir des griffes de l’ancien colonisateur. Ils durent mettre en place une sorte de néo-colonialisme à distance sans les anciens colonisateurs: «Pour les pays nouvellement indépendant il fallut trouver des compromis avec la France. Sylvanus Olympio, le premier président de la République du Togo, un petit pays d’Afrique de l’Ouest, trouva une solution susceptible de calmer les Français: ne voulant pas continuer à subir une domination française, il refusa de signer le pacte de la colonisation proposé par De Gaulle, mais accepta en contrepartie de payer une dette annuelle à la France pour les soi-disant avantages obtenus lors de la colonisation française. Ce furent les seules conditions de la France pour ne pas détruire le pays avant de partir. Toutefois, le montant estimé par la France était si grand que le remboursement de la soi-disant «dette coloniale» était proche de 40% du budget du pays en 1963. Dès lors, la situation financière du Togo tout juste indépendant fut très instable, et afin de se sortir de cette situation, Olympio décida de sortir du système monétaire mis en place par la France coloniale le Fcfa (franc des colonies françaises d’Afrique), et créa la monnaie du pays. Le 13 Janvier 1963, trois jours après, qu’il ait commencé à imprimer les nouveaux billets, une escouade de soldats (soutenus par la France) s’empara et tua le premier président élu de l’Afrique indépendante: Olympio fut exécuté par un ex-Légionnaire français, le sergent de l’armée, Etienne Gnassingbé qui, au passage, reçut à ce moment une prime de 612 dollars de l’ambassade française locale pour le succès de sa mission.» (1)
    «En fait, au cours des 50 dernières années, un total de 67 coups d’Etat qui se sont passés dans 26 pays en Afrique, 16 de ces pays sont des ex- colonies françaises, ce qui signifie que 61% des coups d’Etat en Afrique ont été initiés dans d’anciennes colonies françaises. En ce moment même où j’écris cet article, 14 pays africains sont obligés par la France, à travers le pacte colonial, de mettre 85% de leurs réserves à la Banque centrale de France sous le contrôle du ministère des Finances français. Jusqu’à maintenant, en 2014, le Togo et environ 13 autres pays africains doivent encore payer la dette coloniale en France.»
    Le pacte de colonisation que l’on ne peut pas refuser
    Voici, conclut l’auteur, le bréviaire des 11 principales composantes de la poursuite du pacte de colonisation depuis les années 1950: Les pays nouvellement «indépendants» doivent payer pour l’infrastructure construite par la France dans le pays pendant la colonisation. Les pays africains doivent déposer leurs réserves monétaires nationales en France à la Banque centrale. En bref, plus de 80% des réserves de change de ces pays africains sont déposées dans les «comptes d’opérations» contrôlés par le Trésor français. La finalité reste: les pays africains n’ont pas accès à cet argent. La France leur permet d’accéder à seulement 15% de leur argent par an. S’ils ont besoin de plus, les pays africains doivent emprunter, à des taux commerciaux, sur les 65% de leur argent détenu au Trésor français. L’ancien président français, Jacques Chirac, a récemment parlé de l’argent des pays africains dans les banques en France. ´´Nous devons être honnêtes et reconnaître qu’une grande partie de l’argent dans nos banques vient précisément de l’exploitation du continent africain.» A titre de comparaison historique, la France a fait payer à Haïti l’équivalent moderne de 21 milliards de dollars de 1804 à 1947 (près d’un siècle et demi) pour les pertes causées aux marchands d’esclaves français suite à l’abolition de l’esclavage et à la libération des esclaves haïtiens.»
    En rançonnant la première République noire de 180 millions de Francs or, ramenés par la suite à 90 millions (17 milliards d’euros!) La grande fortune de la France vient en droite ligne du commerce triangulaire, l’esclavage. Les villes comme Nantes ont un passé tristement colonial dans le commerce du bois d’ébène. C’est le commerce des humains qui a permis de lancer l’industrialisation, les chantiers navals, l’acier. Sans l’esclavage, la France ne serait qu’un pays parmi les autres plus qu’un pays parmi d’autres.
    Le discours de Dakar symptomatique de l’appartenance à une race supérieure
    Relisons ensemble le discours de Dakar de Sarkozy du 26 juillet 2007, pour comprendre cette suffisance post-coloniale représentée par la «Françafrique», la France à fric dirions-nous pour être en phase avec la réalité du calvaire africain. Le président français déclare notamment que la colonisation fut une faute tout en estimant que le «drame de l’Afrique» vient du fait que «l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire. […] Le problème de l’Afrique, c’est qu’elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l’enfance. […] Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès». (2)
    «Je ne suis pas venu, poursuit Nicolas Sarkozy, nier les fautes ni les crimes car il y a eu des fautes et il y a eu des crimes. Il y a eu la traite négrière, il y a eu l’esclavage, les hommes, les femmes, les enfants achetés et vendus comme des marchandises. Et ce crime ne fut pas seulement un crime contre les Africains, ce fut un crime contre l’homme, ce fut un crime contre l’humanité toute entière. (…) Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. (…) Jamais l’homme ne s’élance vers l’avenir. Jamais il ne lui vient à l’idée de sortir de la répétition pour s’inventer un destin (… ) Le défi de l’Afrique, c’est d’entrer davantage dans l’histoire). (2)
    M. Sarkozy ne s’est jamais interrogé sur le fait que si les Africains, les Algériens, n’ont pas été brutalement envahis, pillés tués, perturbés dans leur identité, ils auraient peut-être rattrapé le train du progrès. La France a empêché par tous les moyens les Africains de rentrer dans l’Histoire.
    La révolte de 1871 en Algérie: meurtres, pillages, bagne et imposition de sanctions
    Un autre exemple des méfaits de la colonisation est celui qui a eu lieu en Algérie, sans être exhaustif, nous rapportons le tragique de l’insurrection de 1871 du bachagha Mokrani:
    «La répression lit-on est très sévère et se traduit, une fois matée l’insurrection, par des internements de plus de 200 et en Nouvelle-Calédonie (on parle des «Algériens du Pacifique») mais aussi par d’importantes confiscations de terres, qui ensuite ont obligé de nombreux Kabyles à s’expatrier. La Kabylie se vit infliger une amende de 36 millions de francs or. Meurtrie, plongée dans le dénuement le plus total, la population vécut alors une véritable tragédie, dont la mémoire fut transmise de génération en génération par la littérature et la poésie orale.» (3)
    «Malheureusement, le bilan des pertes algériennes en vies humaines ne cesse de s’alourdir depuis la fin de l’insurrection, pratiquement en juillet 1871. Cela explique la politique de la terre brûlée menée par les autorités coloniales qui ont recours à la liquidation physique pratiquée de sang-froid dans les douars et mechtas. Les peines prononcées dans les différentes phases des procès sont lourdes dans la mesure où la plupart des accusés sont condamnés à mort et la peine est exécutée pour bon nombre d’entre eux. Les autres ont vu leur peine commuée en détention à vie avec déportation comme Cheikh Al Haddad et son fils Aziz eu égard à leur rang: ils sont médaillés de la Légion d’honneur. Boumezrag est capturé, jugé et condamné à mort, mais verra sa peine commuée en travaux forcés à perpétuité et sera déporté en Nouvelle-Calédonie. Boumezrag, Aziz et M’hand Al Haddad figurent parmi les quelque 500 Algériens déportés en Nouvelle-Calédonie. Ils sont embarqués le 10 mars 1873 à bord des vaisseaux Calvados et de La Loire du port de Brest, en Bretagne. Après cinq mois de navigation, ils arrivent à Nouméa, la capitale de la Nouvelle-Calédonie, le 17 septembre de la même année. Des dizaines d’entre eux sont morts au cours du voyage, faute de nourriture et de soins. Le régime des déportés est des plus durs. Leurs bourreaux excellent dans l’art de l’asservissement et l’humiliation.» (3)
    «A cette insurrection essentiellement politique dans ses causes et dans ses grandes lignes, il aurait fallu une répression politique appliquée par le gouvernement, une répression ne s’inspirant que de la raison d’État, des intérêts de la colonisation et des nécessités du milieu indigène. Cette répression, indiquée dès les débuts par plusieurs officiers des affaires indigènes, aurait pu être: 1° – La déportation à vie, en Océanie, des unités familiales les plus compromises dans chacune des tribus insurgées. 2° – La confiscation des biens de ces familles. 3° – Une contribution de guerre payable en terre ou en argent et garantie jusqu’à complète libération par le séquestre apposé sur les terres des tribus compromises.»(3)
    «Ce furent, lit-on dans la même contribution, les tribunaux qui eurent la tâche ingrate de déterminer les peines encourues par les individus. De sorte que les mêmes gens furent traités, à la fois et simultanément, comme des belligérants vaincus, comme des sujets algériens, et comme des Français. Comme belligérants vaincus, ils se virent imposer par le gouverneur général, sur les propositions des chefs militaires, une amende de guerre de 36,582,298 francs, chiffre calculé d’après le nombre de fusils, le nombre de feux ou le quantum des impôts, et arbitrairement fixé en raison de la résistance faite à nos troupes ou même à nos agents administratifs: car, chose singulière et que personne ne releva. Cette contribution de guerre fut infligée à des tribus sahariennes et à des gens de l’Aorès et du Souf qui n’avaient jamais tiré un coup de fusil contre nous, mais qui étaient restés en état d’insoumission, quand personne n’était là pour les commander. Comme indigènes algériens, les insurgés furent frappés administrativement en vertu de la législation spéciale sur le séquestre, et ils durent payer, en terre ou en argent, une somme uniformément fixée à la valeur du cinquième de leur capital immobilier. Les individus les plus compromis, virent la totalité de leurs biens mobiliers et immobiliers confisqués, De ce chef, les insurgés payèrent environ 26,629,953 francs, qui furent représentés par des payements en argent jusqu’à concurrence de 7,933,860 francs, et par l’abandon de 446,406 hectares estimés a 18,696,093 francs.» (3)
    Au total, 100.000 Algériens morts, saisie des terres, émigration de beaucoup d’Algériens (surtout vers la Syrie), déportation d’une partie des révoltés, et parution de l’infâme code de l’indigénat en 1881, mais ceci est une autre histoire
    On ne peut parler justement des déportés sans citer quelques paroles douloureuses de la chanson interprétée magistralement par Akli Yahyaten – que Dieu lui prête longue vie – pour avoir su nous faire vibrer:
    «Aw ki dawni le tribunal jadarmiya kbaar wisghaar aa wissensla tewzen qantar darbouni aam wa n´haar 3ala dakhla haffouli raas wa aataouni zawra ou payas goulou lommi matebkeesh yal menfi waldek rabbi mayy khalleesh.»
    « Quand ils m’ont trainé au tribunal, les gendarmes en nombre, avec une chaine pesant un quintal, ils m’ont condamné à un an et un jour de déportation. A l’entrée, ils m’ont rasé la tête et m’ont donné une couverture et une paillasse. Dites à ma mère de ne pas pleurer, ton fils déporté ne sera pas abandonné par Dieu »
    Cette supplique revendique deux repères: la religion et la mère. Cette mère, dernier lien ombilical qui lui reste et qu´il doit tenter de rassurer. Cette mère est en fait, notre mère, cette Algérie souffrante de voir ses meilleurs fils lui être arrachés pour l´inconnu et sans espoir de retour. Nous sommes assurément des nains juchés sur les épaules de ces géants qui ont commencé le combat libérateur- il faut s´en convaincre – dès l´arrivée de l´envahisseur. (4)
    L´un des dossiers les plus pertinents que l´Algérie se doit de s´approprier est celui de la mémoire. Sans vouloir verser dans la concurrence victimaire, en Algérie nous avons trop tendance à pardonner par incompétence par crainte d´être mal vu, par paresse et surtout par méconnaissance de cette mémoire en miettes suite à un tsunami qui a eu lieu un certain jour de débarquement, le 14 juin 1830, sur une plage de Sidi Fredj. J´ai souvenance d´avoir vu, il y a quelques années, une délégation de petits descendants-Laïfa et les autres- des déportés de 1871. Ils étaient venus de Nouvelle-Calédonie à près de 20.000 km se ressourcer dans cette Algérie mythique que leur ont chantée leurs parents, de père en fils. J´avais naïvement demandé à ce qu´on mette en place une bibliothèque virtuelle pour consolider un lien de plus en plus ténu depuis près de 140 ans. Je ne suis pas sûr d´avoir été entendu.» (4)
    En définitive La déportation coloniale plonge ses racines dans le XV siècle avec la traite des Noirs et l’esclavage. La France qui a proclamé en 2001, crime contre l’humanité l’esclavage et la traite négrière (loi Taubira) s’est rendu coupable d’une justice à deux vitesses . Elle a commis un crime contre l’humanité à l’endroit des déportés algériens et de tous les autres déportés ? Mieux Ce crime est encore plus odieux puisque la loi d’amnistie de de 1880 exclut du champ d’application les déportés algériens en Nouvelle Calédonie . C’est aussi cela l’œuvre positive de la France en Algérie
    En définitive, le cri de Césaire retentit encore: il rappelle le caractère proprement inhumain de la colonisation à ceux qui sont aujourd’hui tentés d’en comptabiliser les «aspects positifs.»
    2.http://fr.wikipedia.org/wiki/Discours_de_Dakar
    Professeur Chems Eddine Chitour
    Ecole Polytechnique enp-edu.dz
    Tags : Algérie, France, colonisation, impôt colonial, 
  • L’aveu éloquent des objectifs expansionnistes du Maroc

    En vertu des accords illicites de Madrid du 14 novembre 1975, le Maroc a accepté de partager le territoire du Sahara Occidental avec la Mauritanie. Lors du partage du cadeau, la Mauritanie sest approprié la région méridionale connue sous le nom de Rio de Oro dont Dakhla est le chef-lieu et le Maroc s’est réservé la partie utile de Saguia El Hamra, riche en phosphates et poissons. N’est-ce pas là un aveu éloquent des objectifs expansionnistes du Maroc ?
    La question de l’intégrité territoriale n’était qu’un bluff destiné à embrigader le peuple marocain dans une aventure meurtrière. Si le Sahara occidental était marocain, pourquoi Rabat ne l’a-t-il pas défendu contre l’occupation espagnole ? Pourquoi les autorités marocaines ne lèvent pas le petit doigt pour défendre la marocanité des deux villes der Ceuta et Melilla qui se trouvent pourtant sur le territoire marocain ?
    Au lieu de chercher à chasser les colonisateurs espagnols, le Maroc fait tout le contraire. Il a accepté de jouer le rôle de gendarme en défendant les deux villes contre les assauts des migrants subsahariens qui rêvent d’arriver en Europe. Cela partie des closes de l’Accord Tripartie de Madrid : Le Maroc a troqué la souveraineté de ses deux villes contre un peuple qu’il a écrasé dans le but de piller ses ressources et en partager avec ses sponsors français.
    Idem pour la région de Tindouf et Béchar. Si elles étaient marocaines, pourquoi le Maroc ne les a-t-il pas arrachés à la France ? La réponse est là : la monarchie marocaine a fait de la lâcheté et la trahison son principe de base et ce depuis la nuit des temps. L’Histoire est riche en enseignements qu’il est nécessaire et utile de méditer. L’Emir Abdelkader n’a-t-il pas été lâché par le roi Abderrahmane lorsque ce dernier a rompu son engagement de fournir des hommes à l’Emir pour renforcer la résistance à l’occupation coloniale.
    L’unité et l’union des peuples d’Afrique du Nord, ont toujours été le rêve des Maghrébins. Aucune occupation n’a réussi à tuer ce rêve. L’Etoile nord africaine en était la première manifestation et expression politique dès les années vingt. Là aussi, les convoitises coloniales et la cupidité des Rois, a sapé cet élan de solidarité et d’unité révolutionnaire contre la France coloniale. Pourtant, pendant la Guerre de libération algérienne, les Maghrébins sans exception, ont soutenu activement la dynamique algérienne. Le Roi Mohamed V en a même fait sa priorité majeure. Mohamed V aurait même conseillé Hassen II, avant sa mort, de ne pas tenter le diable avec l’Algérie. Mais Hassen II a fait le contraire au lendemain de l’indépendance d’une Algérie exsangue, fatiguée et amoindrie.
    Tags : Algérie, Maroc, Sahara Occidental, Front Polisario, 
  • France-Algérie : Un complot tissé de fils blancs

    RETOUR SUR LE DOCUMENTAIRE FRANÇAIS SUR L’ALGERIE : Un complot tissé de fils blancs
    La décision, ferme, d’Alger de rappeler son ambassadeur à Paris pour consultations, est on ne peut plus motivée. Après coup, en effet, il s’avère que ce « reportage » avait été secrètement concocté par des officines proches des décideurs français dans le seul but de nuire à l’Algérie et à ses institutions.
    La réaction d’Alger, somme toute attendue et justifiée, ne s’est guère fait attendre à la suite de la diffusion, par une chaîne publique française, d’un reportage portant gravement, et gratuitement, atteinte au pays et à certaines de ses institutions. L’Algérie, en effet, a décidé mercredi soir de rappeler « immédiatement » pour consultations son ambassadeur en France, suite au caractère récurrent de programmes diffusés par des chaînes de télévision publiques françaises qui sont des « attaques contre le peuple algérien et ses institutions, dont l’Armée nationale populaire ». C’est ce qu’a indiqué un communiqué du ministère des Affaires étrangères. 
    « Le caractère récurrent de programmes diffusés par des chaînes de télévision publiques françaises, dont les derniers en date sur France 5 et la Chaîne Parlementaire, le 26 mai 2020, en apparence spontanés et sous le prétexte de la liberté d’expression, sont en fait des attaques contre le peuple Algérien et ses institutions, dont l’ANP et sa composante, la digne héritière de l’Armée de libération nationale (ALN) », ajoute la même source. « Cet activisme où l’inimitié le dispute à la rancœur, dévoile les intentions malveillantes et durables de certains milieux qui ne souhaitent pas l’avènement de relations apaisées entre l’Algérie et la France, après 58 ans d’indépendance, et ce dans le respect mutuel et l’équilibre des intérêts qui ne sauraient faire l’objet de concession ou de marchandage », ajoute le communiqué. « Pour ces raisons, l’Algérie a décidé de rappeler immédiatement pour consultations son ambassadeur en France », conclut le communiqué du MAE.
    Loin d’être un acte innocent, l’on se trouve bel et bien face à un complot soigneusement ourdi dans le but manifeste de nuire à notre pays. Nous apprenons, en effet, que le sieur Mustapha Kessous n’est en réalité qu’un simple journaliste de service, qui a été seulement chargé de réaliser des interviews en Algérie et surtout pour crédibiliser le produit aux yeux l’opinion publique. Il n’a été qu’un pion, un instrument, comme l’avaient été les malheureux jeunes écervelés interviewés par lui. En effet, il n’a été associé ni au montage, ni à la vente du documentaire pour France 5, et encore moins au choix de la date de sa programmation. 
    Tout a été planifié à Paris par une boite privée chargée par un lobby bien connu pour défendre les intérêts de la France et surtout pour réaliser des reportages et des documentaires sur des pays en conflit ou en désaccord avec le Quai d’Orsay. Le tout financé par l’argent public du contribuable français et à travers des télévisions publiques françaises. Et dans ce cas, France 5 n’est que le diffuseur et n’est pas responsable du contenu. 
    Le documentaire en question est produit par une société très connue sur la place de Paris spécialisée dans le documentaire d’investigation à travers le monde. La société s’appelle « Premières lignes ». Elle est dirigée par deux professionnels du doc politique, Paul Moreira, ex rédacteur en chef du Vrai Journal sur CANAL+, Et Luc Hermann, journaliste réalisateur et rédacteur en chef à CNN et CANAL+. 
    Ces personnages, loin d’être des enfants de chœur, ont donc manigancé leur coup en se servant du « petit bicot de service » à qui siérait parfaitement cette strophe d’Aragon « Je le croyais libre sur un fil d’acier / Quand tout équilibre vient du balancier ».
    Ali Oussi
    Tags : Algérie, France, presse française, documentaire, France 5,
  • Confidentiel: Qui est derrière la production du doc diffusé sur France 5 ?

    DIA-28 mai 2020: Si toute l’Algérie connait le nom du réalisateur du documentaire controversé « Algérie mon amour » diffusé sur France 5 (Mustapha Kessous (en revanche personne ne connait les commanditaires de cette production, qui est en train de refroidir les relations entre l’Algérie et la France. Mustapha Kessous n’est en réalité qu’un simple journaliste de service, qui a été seulement chargé de réaliser des interviews en Algérie et surtout pour crédibiliser le produit aux yeux des médias algériens (Un reportage sur l’Algérie réalisé par un algérien).
    Mustapha Kessous qui est définitivement grillé en Algérie, n’était en fait qu’un pion dans l’échiquier. Il n’a pas été associé ni au montage, ni à la vente du documentaire pour France 5, ni bénéficié de l’aide du CNC et encore moins du choix de la date de sa programmation. Tout a été planifié à Paris, par une boite privée chargée par un lobby bien connu pour défendre les intérêts de la France et surtout pour réaliser des reportages et des documentaires sur des pays en conflit ou en désaccord avec le Quai d’Orsay. Le tout financé par l’argent public du contribuable français et à travers des télévisions publiques françaises. Et dans ce cas, France 5 n’est que le diffuseur et n’est pas responsable du contenu. 
    Le documentaire en question est produit par une société très connue sur la place de Paris, spécialisée dans le documentaire d’investigation à travers le monde. La société s’appelle « Premières lignes », dirigée par deux professionnels du doc politique. 
    Les dirigeants de Premières Lignes sont deux pionniers de l’investigation télévisée en France: Paul Moreira, journaliste réalisateur maintes fois primé, ex rédacteur en chef du Vrai Journal (CAPA) sur CANAL+ jusqu’en 1999, puis fondateur de 90 Minutes, le magazine d’investigation de référence de CANAL+. Et Luc Hermann, journaliste réalisateur et rédacteur en chef, avec une longue expérience à CNN et CANAL+.
    Paul Moreira, connait bien l’Algérie pour lui avoir consacré plusieurs reportages très controversés à l’époque de la campagne du « qui tue qui ». 
    Le 3 Mars 2003, il supervise et présente pour le compte du magazine « 90 minutes » de Canal +, une série de reportages sur l’Algérie dans le cadre du voyage du président Chirac en Algérie. Ses reportages sont réalisés par un personnage clé dans la campagne du « qui tue qui » et des campagnes haineuses contre le régime d’Alger à l’époque: Jean Batiste Rivoire. C’est notamment lui qui avait semé le doute dans l’affaire des moines de Tibhirine. 
    Parmi les reportages, un sujet est consacré aux conditions de l’implantation du groupe sud coréen Daewoo en Algérie en 1986. Un autre a été consacré à « la corruption au quotidien » en Algérie. Selon ce reportage, les fonds destinés à financer la construction de logements sociaux ont servi à acheter des chalets de luxe en provenance des Etats-Unis pour les dignitaires du régime en 1993.
    Autre documentaire très controversé « Khalifa, l’étrange milliardaire », le magazine d’investigation s’interroge sur la fortune de Rafik Khalifa et ses liens supposés avec le pouvoir militaire algérien, notamment avec Larbi Belkheir, l’homme le plus puissant et influant de l’époque. Le journaliste français s’attaque surtout à Khalifa Tv créée en septembre 2002, à Cannes. La télévision algérienne privée avait contre-attaqué en diffusant , en même temps un documentaire sur le malaise à Canal+ après la venue de Vivendi à l’époque de Jean-Marie Messier. Mais ce doc n’avait pas le même impact que les reportages réalisés sur l’Algérie et qui avaient à l’époque et comme aujourd’hui, refroidi les relations diplomatiques entre Paris et Alger. 
    Paul Moreira tout comme Jean Batiste Rivoire avaient une dent contre l’Algérie ou plutôt contre son régime et ne ratent pas une seule occasion pour tirer sur Alger. Dans ce tweet publié en janvier dernier, Paul Moreira dénonçait déjà la répression contre les manifestants à Alger. C’est à partir de cette opération qu’a commencé à germer une idée sur un doc intra-muros sur le hirak. Le reste de l’histoire on la connait. 
    Source : DIA-Algérie, 29 mai 2020
    Tags : Algérie, France, France 5, presse française, 
  • Guerre d’Algérie et crimes d’État : l’exigence de la reconnaissance

    C’était le 19 mars 2016. Pour la première fois un président de la République a commémoré le cessez-le-feu consécutif aux accords d’Evian signés le 18 mars 1962 entre le gouvernement français et le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Après plus de sept ans de guerre, le conflit s’achevait enfin. De même la colonisation française imposée depuis cent trente-deux ans aux populations de ce territoire conquis par la terreur, les massacres de civils, les razzias et les nombreuses destructions de villages et d’oasis commis par les militaires.
    Un bilan terrible, toujours incomplet
    Telles étaient, dans les années 1840, les pratiques des colonnes infernales de l’armée d’Afrique conduite par le général Bugeaud et ses officiers de sinistres mémoires : Lamoricière, Pélissier et Saint-Arnaud, notamment. Ainsi « pacifiés », comme on l’écrivait déjà, les « indigènes » furent ensuite soumis au « talon de fer » des autorités françaises, des lois d’exception – l’internement administratif et la responsabilité collective – et du code de l’indigénat. Les « Arabes », des citoyens français ? Non, « sujets français » assujettis à des dispositions répressives discriminatoires, expression du racisme de l’État colonial, et privés, qui plus est, des droits et libertés démocratiques élémentaires jusqu’en 1945.
    Quant à la dernière guerre d’Algérie, elle laisse derrière elle des centaines de milliers de victimes algériennes et plus de deux millions de civils, hommes, femmes et enfants, déportés dans des camps de « regroupement » organisés et contrôlés par l’armée. Si ajoute « l’exode vers les villes » soit un total d’au moins « trois millions » de personnes qui se trouvent « hors de leur résidence habituelle ». « La moitié de la population rurale » de l’époque, estiment Pierre Bourdieu et Abdelmalek Sayad qui ajoutent : « ce déplacement […] est parmi les plus brutaux qu’ait connus l’histoire ».
    Bilan terrible, assurément, mais toujours incomplet. On ne saurait oublier les milliers d’exécutions sommaires, les tortures infligées aux combattants du FLN ou supposés tels, en Algérie comme dans la capitale, ainsi que l’a montré Paulette Péju dans son ouvrage Les Harkis à Paris, et les disparus, tous victimes du terrorisme d’État. Plus de 3 000 pour la seule bataille d’Alger, selon le préfet de police de l’époque, Paul Teitgen, qui démissionna le 17 septembre 1957 pour protester contre ces pratiques. Celles-là mêmes que favorisait la loi sur les pouvoirs spéciaux votée 12 mars 1956 par les députés socialistes et communistes, notamment, et co-signée par le ministre d’État, garde des sceaux, chargé de la Justice, François Mitterrand.
    La France et son passé colonial en Algérie. Quel état des lieux ? 
    Cinquante-quatre ans après la fin de cette guerre longtemps sans nom, sans autre nom du moins que celui « d’événements », comme l’ont dit pendant des décennies de bonnes âmes politiques soucieuses de défendre ce qu’elles prétendaient être « le prestige » et « l’honneur » de la France, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre perpétrés alors doivent être enfin reconnus par le chef de l’État. Aujourd’hui cette histoire est écrite et grâce aux travaux multiples de celles et ceux qui ont étudié la colonisation de l’Algérie, les méthodes employées pour faire de ce territoire une colonie de peuplement, et les agissements de l’armée française à la suite du déclenchement de l’insurrection le 1er novembre 1954.
    Une histoire écrite qui doit être reconnue
    Alors que les lois d’amnistie empêchent le jugement des coupables, qui sont toujours moins nombreux en raison du temps écoulé, cette reconnaissance est la seule façon de rendre justice aux victimes algériennes du conflit et à leurs descendants dont beaucoup sont citoyen-ne-s français. Responsable et coupable, l’État leur doit cette réparation symbolique liée à une histoire singulière qui, souvent, a douloureusement et durablement affecté le « roman » familial de ces femmes et de ces hommes. Plus encore, faire droit à cette reconnaissance, exigée depuis longtemps par de nombreuses associations et quelques organisations politiques, c’est mettre un terme à une discrimination mémorielle et commémorielle qui n’a que trop duré, et qui s’ajoute à toutes celles que les mêmes subissent encore dans leur vie personnelle et professionnelle.
    En ce domaine, et contrairement à une mythologie nationale-républicaine entretenue par de nombreux dirigeants politiques, de droite comme de gauche, la France se distingue par une rare persévérance dans le déni de son très lourd passé colonial. Qu’on en juge. En 2002, le premier ministre de Nouvelle-Zélande, Helen Clark reconnaît les exactions commises contre le peuple de Samoa entre 1914 et 1962. En 2006, les autorités canadiennes font de même à l’endroit des Amérindiens et accordent 2 millions de dollars aux enfants de ces populations arrachés à leur famille. En 2008, le premier ministre australien rappelle le sort terrible réservé aux peuples aborigènes. En juin 2013, William Hague, ministre des Affaires étrangères de la Grande-Bretagne, déclare :
    Le gouvernement britannique regrette sincèrement que ces abus aient eu lieu et aient entaché la progression du Kenya vers l’indépendance. La torture et les mauvais traitements sont des atteintes odieuses à la dignité de l’homme que nous condamnons sans réserve.
    De plus, 5 228 victimes obtiennent 23,5 millions d’euros au titre des réparations et les autorités britanniques s’engagent à soutenir la construction d’un mémorial à Nairobi.
    Ce bref détour par plusieurs pays étrangers permet de prendre la juste mesure de la situation française caractérisée, au mieux, par la pusillanimité de quelques déclarations, au pire, par la réitération de discours apologétiques de la colonisation. Jusqu’à quand Monsieur le Président ? La réponse vous appartient…
    …mais il est plus que probable que c’est trop tard en ce qui vous concerne… et il est plus que certain qu’il ne faut rien espérer d’un futur président de la République en provenance de la droite et encore moins de l’extrême-droite… La France refusant de reconnaître ses crimes d’Etat du temps de son Empire devrait en rester ainsi encore longtemps et peut-être définitivement… nous n’aurons jamais connu « le changement c’est maintenant ». 
    Tags : France, Algérie, crimes de guerre, Guerre d’Algérie, colonisation, 
  • Acculé, le Maroc active le cyber-terrorisme contre l’Algérie

    Le pouvoir au Maroc traverse une mauvaise passe. Au niveau interne, le manque de moyens de lutte contre la pandémie a poussé les autorités marocaines à abandonner leurs sujets coincés à l’étranger et la répression qui s’abat contre la presse et les réseaux sociaux.
    Au niveau extérieur, le dossier du Sahara Occidental se trouve embourbé dans les dunes du désert à un moment où les relations avec la France semblent traverser une période critique et le renforcement du soutien de l’Algérie au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et indépendance. Position exprimée par le chef de la diplomatie algérienne à l’occasion de la Journée d’Afrique.
    Acculé, le Makhzen riposte avec les moyens habituels : le terrorisme. Cette fois-ci, un terrorisme limite au monde cybernétique.
    En effet, ses hackers se sont mobilisés contre le voisin de l’Est en piratant pour la deuxième fois le site Le Midi Libre et pour la première fois le site web du ministère de la santé de la population et de la réforme hospitalière. Ce dernier n’est plus n’est plus accessible depuis ce matin, il a été piraté par un hacker non identifié surnommé « ox souhail ». Jusqu’à maintenant, aucun communiqué n’a été avancé par les autorités concernées concernant cet acte qui cible l’un des sites les plus sensibles pendant cette période difficile que traverse le pays v face à la propagation de la pandémie du Coronavirus Covid-19.
    Tags : Maroc, Algérie, Sahara Occidental, hacking, piraterie, hackers, 
  • Algérie – Crimes coloniaux : l’autre 8 mai 1945

    – Commission d’enquête « Tubert »: un goût d’inachevé 
    Le rapport de la commission d’enquête « Tubert », sur les massacres du 8 mai 1945 dans le Nord-constantinois, demeure, à ce jour, l’unique source d’importance sur ce qui s’est réellement passé durant ces événements, malgré que les rédacteurs du rapport d’enquête avait déploré le fait que la commission n’avait pas pu mener « concrètement » sa mission.
    Ainsi, 73 ans après les événements sanglants ayant foudroyé des populations algériennes entières dans les villes et villages des régions de Guelma, Kherrata et Sétif, la vérité historique demeure partiellement connue, au regard des entraves vécues par la Commission d’enquête officielle, nommée le 18 mai par le général Charles de Gaulle et conduite par le général de gendarmerie, Paul Tubert, lors de son déplacement en Algérie.
    Jeté pour longtemps dans les oubliettes, le contenu du rapport de la commission Tubert sur les événements, préfacé par l’historien Jean-Pierre Peyroulou, a été révélé, il y a quelques années, grâce au site électronique de la Ligue française des droits de l’Homme.
    Si le rapport n’a consacré que peu d’espace à la « férocité » de la répression contre les Algériens, il dresse, néanmoins, un tableau sur la situation qui prévalait avant le début des massacres et l’atmosphère « insurrectionnelle » qui régnait en Algérie où « le désir d’émancipation s’était clairement exprimé depuis la remise en 1943 par Ferhat Abbas du Manifeste du peuple algérien aux autorités françaises.
    Le rapport de la commission Tubert, qui avait mis l’accent sur le refus des réformes par les colons, a pu, cependant, cerner le climat psychologique qui prévalait en Algérie avant les événements.
    Il a illustré, en outre, le mobile patriotique des manifestations par la demande de libération de Messali Hadj (leader du mouvement national et dirigeant du PPA).
    « (…) La commission a constaté que bon nombre de manifestations se sont déroulées en Algérie les 1er et 8 mai. Toutes ces manifestations étaient à caractère exclusivement politique et avaient pour but de réclamer la libération de Messali et l’indépendance de l’Algérie », lit-on dans ce rapport.
    Les rédacteurs de ce document ont, à la fin du rapport, suggéré « la présence de troupes mobiles (…) pour ramener la confiance et empêcher la formation de groupes armés échappant à tout contrôle et la définition, avec netteté et sincérité, des programmes politiques et économiques que les pouvoirs publics (autorités coloniales) décideront d’appliquer en Algérie ».
    Le rapport ne pouvait prétendre cerner l’ensemble des événements, en raison des « tergiversations » du gouverneur général d’Alger, Chataigneau, obligeant, selon le document, la commission à recourir aux informations confiées par un nombre de personnalités à Alger et aux renseignements recueillis à Sétif durant la journée du 25 mai 1945.
    L’historien Peyroulou qui écrivait que la commission n’avait pas pu se rendre à Guelma où « les massacres de civils se poursuivaient » au-delà de la date de l’arrivée de la commission Tubert à Alger, a relevé qu’elle (commission) avait fait du « sur-place à Alger » du 19 au 25 mai.
    Une répression menée jusqu’au 25 juin
    « Pourquoi la commission n’est-t-elle pas allée à Guelma? Non seulement parce que le général de Gaulle voulait absolument sauver un représentant de la résistance en Algérie, André Achiary, l’un des organisateurs de la milice européenne, mais aussi parce qu’à Guelma, la répression menée par cette milice officiellement dissoute, se poursuivait toujours dans les faits. Elle s’est poursuivie jusqu’au 25 juin », avait expliqué l’historien Peyroulou dans sa préface.
    En effet, et selon cet historien, qui a consacré un ouvrage sur les événements de mai 1945 à Guelma, « la répression s’est poursuivie jusqu’au 25 juin, jour où le ministre de l’Intérieur Tixier arriva à Guelma. Il y eut 4 morts ce jour-là. Ce furent les derniers. Quand il repartit, les meurtres cessèrent ».
    « En somme, on promena Tubert et la nomination de la commission +Tubert+ fut une menace qu’agita le gouvernement provisoire pour faire cesser la répression.
    Mais celui-ci n’avait aucune intention de le laisser constater effectivement l’ampleur de la répression », écrivait encore Peyroulou.
    S’agissant du devenir de cette commission, il a souligné que « le rapport fut oublié. Il ne fut pas diffusé. De toute façon, après la révolte de Madagascar, et une fois la guerre d’Indochine entamée, l’épisode du 8 mai 1945 dans la région de Constantine n’intéressait plus personne en France ».
    La commission avait cessé de travailler officiellement le samedi 26 mai au soir, « dès qu’elle reçut des instructions de revenir à Alger », précise le rapport.
    Le général de gendarmerie Tubert, résistant contre l’occupation allemande en France, était depuis 1943, membre du Comité central provisoire de la Ligue des droits de l’Homme et membre de l’Assemblée consultative provisoire à la fin de la deuxième Guerre mondiale.
    Il a été nommé à la tête de la commission d’enquête sur les événements du 8 mai 1945 en Algérie, par le général de Gaulle à la demande du ministre de l’Intérieur Tixier.
    Les crimes coloniaux toujours pas reconnus par la France
    Cinq décennies après l’indépendance, les crimes coloniaux ne sont toujours pas reconnus par la France officielle, alors que l’Algérie commémore mardi le 73e anniversaire des événements du 8 mai 1945, où plus de 45.000 Algériens ont été massacrés dans une vague de répression sanglante perpétrée par les forces coloniales contre une population qui réclamait son droit légitime à la liberté et à l’indépendance.
    Les massacres du 8 mai 1945 étaient une démonstration du caractère génocidaire de la France coloniale à travers ses crimes des plus abominables et inhumains commis à l’égard du peuple algérien.
    Des personnes désarmées abattues à bout portant, exécutions sommaires, d’autres transportées dans des camions pour être jetées dans des ravins,alors que d’autres sont emmenées en dehors des villes pour être exécutées.
    Leurs corps brûlés sont ensuite enterrés dans des fosses communes. Des fours à chaux étaient, également, utilisés par l’armée française pour se débarrasser des cadavres des victimes, tandis que les bombardements et tous types d’exactions se poursuivaient.
    Malgré les appels à la repentance, le volet mémoriel entre l’Algérie et la France reste toujours d’actualité, et demeure un point d’achoppement pour l’essor des relations bilatérales, même si des avancées ont été enregistrées ces derniers temps.
    Le président français, Emmanuel Macron, s’est contenté d’utiliser l’expression de « crime contre l’humanité » à propos de la colonisation, une expression qu’il a employée lors de sa visite à Alger lorsqu’il était candidat à la présidentielle.
    « Mes convictions sur ce point n’ont pas changé depuis que j’ai été élu président de la République », avait-il affirmé lors de sa dernière visite à Alger en décembre 2017, ajoutant: « Je suis d’une génération de Français pour qui les crimes de la colonisation européenne sont incontestables et font partie de notre histoire ». Il a estimé qu’il ne faut pas s’ »enfermer » dans ce passé mais « construire un avenir commun et une espérance ».
    Pour le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, il y a une « question d’âge du président Macron et une question d’époque, parce qu’il ne faut pas, à chaque visite présidentielle, revenir sans arrêt sur le passé ».
    D’après Le Drian, « il faut dire que ce passé a eu lieu, que ce passé était douloureux, parfois dramatique, et dire aussi qu’entre nos deux pays, il y a une chance historique de collaborer ensemble ».
    Dans le même sillage, l’ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, a noté, récemment, que le dossier mémoriel entre les deux pays « avance discrètement ou parfois trop discrètement, mais il avance ».
    Pour sa part, l’Algérie, par la voix de son ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, la France « reconnaîtra tôt au tard », les crimes qu’elle a commis pendant 132 ans de colonisation, mettant en avant le droit des générations montantes de tout savoir sur les pratiques répressives des politiques coloniales.
    La vérité sur ces pratiques reste toutefois inaccessible aux Algériens, a-t-il relevé, précisant que « seulement 2 % de la totalité des archives, qui sont un bien et un droit de l’Algérie, ont été restitués par la France ».
    Pour le ministre des Moudjahidine, ce dossier reste en suspens aux côtés de ceux inhérents aux disparus pendant la guerre d’indépendance et aux indemnisations des victimes des essais nucléaires dans le Sahara.

    Tags : Algérie, France, crimes, colonisation, répression, mémoire, 
  • Etude / 55 ans de rapports entre l’Algérie et la France

    Par Hassane Zerrouky (*)
    Satisfaisant à un rituel bien établi depuis François Mitterrand après l’élection d’un nouveau président de la République, Emmanuel Macron se rend le 6 décembre à Alger pour une courte visite de «travail et d’amitié» d’une dizaine d’heures. Sauf que, cette fois-ci, sans doute pour marquer sa différence avec ses prédécesseurs, il est le premier chef d’État français à débuter une visite au Maghreb par le Maroc (17 juin) et non par l’Algérie. Ce qui n’a pas manqué de provoquer quelques froncements de sourcils côté algérien, alors que, pour la première fois depuis 1962, les relations entre les deux pays, souvent marquées par de réelles tensions, étaient dans une phase d’apaisement. Candidat à la présidence de la République, Emmanuel Macron a agréablement surpris les Algériens en qualifiant, sur une télé privée algérienne, le colonialisme de «crime contre l’humanité». Un propos vite atténué une fois installé à l’Élysée, assurant dans un entretien accordé à deux quotidiens algériens – El Watan (francophone) et El Khabar (arabophone) – qu’il ne voulait pas être «l’otage » du passé. Mais voilà, une fois à Alger, il est vite rattrapé par le passé colonial, quand, lors d’un bain de foule dans la rue Ben-M’hidi (ex-rue d’Isly à Alger), il est interpellé sur ce sujet par un jeune Algérois. L’échange est vif et musclé : les images des deux hommes, amplifiées sur les réseaux sociaux, vues par des millions d’Algériens, illustrent bien la difficulté d’une normalisation apaisée des relations, débarrassées du poids du passé. Tourner la page, comme si de rien n’était, est un exercice qui risque de s’avérer bien compliqué «lorsque l’on en connaît la toile de fond historique». En effet, «les Algériens ont plus qu’aucun autre peuple de la région souffert de la domination coloniale, soulignait l’historien Gilbert Meynier. Nulle part ailleurs, il n’y eut conquête aussi atroce, dépossession des terres et confiscation à une telle échelle des meilleurs sols, domination coloniale aussi bouleversante ; et, in fine, une guerre de libération aussi meurtrière que traumatisante».(1) Tandis qu’en France, pour des raisons opposées, la droite et l’extrême droite n’hésitent pas à réveiller ce lourd passif parce que les harkis et les nostalgiques de l’Algérie française constituent un vrai vivier électoral.


    Le pari impossible des Accords d’Évian

    Les Accords d’Évian, signés le 18 mars 1962, mettant fin à sept ans et demi de guerre et à une domination coloniale de 132 ans, fixant le cadre politico-juridique de la coopération et des relations entre l’Algérie et la France, auraient dû autoriser tous les espoirs si l’Algérie indépendante n’avait pas été soumise à des conditions limitant sa souveraineté. «La coopération avec la France limite certes notre indépendance économique ; les troupes françaises continueront de stationner sur notre territoire. Mais la coopération que nous avons définie avec la France ne revêt aucune forme institutionnelle […] La révolution algérienne n’est pas terminée ; l’indépendance n’est qu’une étape», prévenait le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).(2) «La coopération telle qu’elle ressort des accords (d’Évian) implique le maintien des liens de dépendance dans les domaines économique et culturel», avertissait le programme de Tripoli adopté par le Conseil national de la révolution algérienne (CNRA) fin juin 1962.(3) Parmi les conditions imposées au nouvel État algérien : des garanties concernant les intérêts économiques français (exploitation pétrolière notamment), les droits acquis pour les personnes physiques et morales, le maintien de l’Algérie dans la zone franc, les droits culturels. De plus, la France conserverait l’usage de la base navale de Mers el-Kébir pour un bail d’une durée de quinze ans renouvelable, les sites et installations nucléaires au Sahara pour cinq ans et bénéficierait de facilités de liaisons aériennes militaires pour une même durée de cinq années sur des aérodromes algériens. En contrepartie, Paris assurerait une assistance technique, culturelle et financière d’un montant d’un milliard de francs par an, équivalant à celle en vigueur avant l’indépendance algérienne et les immigrés algériens bénéficieraient d’un statut privilégié relativement favorable par rapport aux autres nationalités.(4) En ce qui concerne le million de «Français d’Algérie», ils se voyaient garantir des droits politiques, sociaux et civiques – la jouissance de leurs biens, le droit d’administrer les quartiers d’Alger, d’Oran et d’autres villes où les Européens étaient numériquement majoritaires et de créer leurs propres associations. Ces accords qui dessinaient les contours d’un État multiculturel étroitement lié à la France, comme le voulait le général De Gaulle, vont être vidés de leur contenu par l’OAS (Organisation de l’armée secrète). En pratiquant une politique de «terre brûlée » – destruction et sabotage des infrastructures socio-économiques, culturelles et éducatives – et meurtrière à l’endroit des Algériens et des Européens tentés par le vivre-ensemble, l’organisation fasciste provoque le départ massif des Européens d’Algérie craignant des représailles du FLN. Ce qui fait que le pari de la réconciliation entre Algériens et Européens sur lequel reposait une partie de cet édifice politicojuridique signé à Évian devenait de fait caduc. Côté algérien, le premier gouvernement de l’Algérie indépendante dirigé par Ben Bella, issu d’un conflit au sein du FLN ayant pour enjeu le pouvoir, se réfère au programme de Tripoli dont les orientations socialisantes et anti-impérialistes allaient nécessairement à l’encontre de l’esprit des Accords d’Évian. C’est le cas lorsqu’il décide d’entériner par décret dès novembre 1962 l’occupation, par des collectifs de travailleurs constitués en comités de gestion, des grandes fermes coloniales et des entreprises industrielles et commerciales abandonnées par leurs propriétaires européens : c’est le début de l’autogestion socialiste qui sera institutionnalisée par les décrets de mars 1963(5). Et ce, alors que les Accords d’Évian prévoyaient, dans le cas d’une réforme agraire, le rachat négocié des terres coloniales. Ce processus autogestionnaire couplé aux demandes de révision des clauses militaires des Accords d’Évian, exprimées par le gouvernement Ben Bella qui, par ailleurs, a commencé à nouer des relations avec les pays socialistes d’Europe et d’Asie, l’Égypte de Nasser et Cuba, dans un contexte d’ascension du Mouvement de libération des peuples, allait nécessairement provoquer de premières frictions entre les deux pays, moins de deux ans à peine après l’accession de l’Algérie à l’indépendance. Paris prend des mesures de rétorsion : l’aide financière est maintenue, mais diminuée de quelque 200 millions de francs représentant le montant de l’indemnisation des colons expropriés par l’État algérien. Bon an mal an, la coopération se poursuit, notamment dans le domaine culturel : Paris tient à ce que le français reste langue de travail et d’enseignement, d’autant que le premier gouvernement algérien a engagé un effort de scolarisation et d’éducation visant à réduire l’analphabétisme qui touchait en 1962 plus de 80% de la population.(6) Toutefois, une chose était sûre : l’Algérie ne faisait pas mystère de son intention de récupérer la totalité des richesses minières et pétrolières. Ce n’était qu’une question de timing. Le général De Gaulle, pas dupe des intentions algériennes, savait qu’il serait difficile de faire respecter la totalité des engagements pris à Évian. Aussi avait-il recommandé de maintenir la coopération avec l’Algérie quelles qu’en soient les «péripéties »(7). Selon Le Monde, il voulait démontrer qu’il était «possible de réussir avec l’Algérie ce que les États-Unis n’ont pas su faire avec Cuba».(8) Mais à l’évidence, ses successeurs, Valéry Giscard d’Estaing en particulier, n’étaient pas sur la même longueur d’onde.


    Nationalisation des hydrocarbures et tournant giscardien

    Avec l’arrivée de Houari Boumediene au pouvoir, succédant à Ben Bella après l’avoir renversé le 19 juin 1965, l’Algérie affiche clairement sa volonté d’entamer la dernière étape de la décolonisation en procédant à une série de nationalisations durant les années 1966-1968 — mines, banques, commerce extérieur, industries — suivie, cinq années plus tard, le 24 février 1971, par la nationalisation des hydrocarbures. Avec la création de la compagnie pétrolière Sonatrach, en décembre 1963, puis la création, en 1965, avec l’aide de l’URSS, de l’Institut algérien du pétrole (IAP) pour former des techniciens et des ingénieurs, il était évident que les autorités algériennes, engagées dans un ambitieux plan de développement (1971-1974), voulaient se donner les moyens de leur politique. Et de ce fait, la récupération et le contrôle des ressources naturelles revêtaient une importance stratégique. La nationalisation des hydrocarbures le 24 février 1971, que seuls le PCF et le PSU avaient soutenue, provoque la première crise majeure entre les deux pays : mise en quarantaine du pétrole algérien, menaces de poursuites judiciaires à l’endroit d’acheteurs éventuels du «pétrole rouge», fermeture de l’usine de montage Renault-Algérie, cessation d’achat du vin algérien, le tout assorti d’une menace de révision de l’accord de 1968 sur la main-d’œuvre en France. S’ensuit alors une flambée raciste – «chassons les fellaghas qui nous prennent notre pétrole» – avec mort d’hommes, culminant, deux ans plus tard, le 2 avril 1973, par un attentat à la bombe visant le consulat algérien de Marseille, faisant plusieurs morts et blessés. La multiplication des actes racistes conduit, le 19 septembre 1973, le président Boumediene à suspendre «jusqu’à nouvel ordre» l’émigration algérienne vers la France, alors contingentée à raison de 35 000 personnes par an. Les relations entre les deux pays sont alors à un niveau critique. Avec la nomination de Michel Jobert à la tête de la diplomatie française en avril 1973, les relations entre les deux pays connaissent un début d’apaisement. Il sera de courte durée. Un an plus tard, avec l’arrivée au pouvoir de Giscard d’Estaing, connu pour ses liens avec les milieux de l’extrême droite «Algérie française» et qui n’a pas pu se faire à l’idée d’une Algérie indépendante, la politique française à l’égard d’Alger va subir une inflexion porteuse de nouvelles tensions. Or, en avril 1975, Giscard d’Estaing surprend en étant le premier président français à se rendre en Algérie. Sa visite, toutefois, n’aboutit à aucun résultat. Pourtant, Houari Boumediene, tout nationaliste sourcilleux qu’il était, était disposé à une coopération avec la France. Il n’en sera rien. Les années Giscard, souligne René Galissot, sont celles de «l’alliance triangulaire» France-États- Unis-Maroc face à ce qui est considéré comme «le triangle adverse» Algérie-URSSPolisario. Une «alliance» sur fond de poursuite d’actes racistes souvent meurtriers contre les Algériens en France, de préparation par le Maroc de la «marche verte», qui lui permettra, avec le concours de l’armée française et de l’Espagne franquiste, d’occuper le Sahara occidental en 1975.(9) Prenant ainsi le parti du Maroc, la France giscardienne prétexte la capture de cinq techniciens français par le Polisario et la menace que fait peser ce dernier sur la Mauritanie pour intervenir militairement — c’est l’opération Lamentin — contre les forces sahraouies.(10) Paris accuse de plus l’Algérie de complicités avec les ravisseurs. Alger redoute alors une guerre impliquant la France aux côtés du Maroc.
    Cuba met rapidement à la disposition de l’Algérie une assistance militaire. Renouant avec un atlantisme avec lequel De Gaulle avait rompu, Giscard d’Estaing, qui voyait déjà d’un mauvais œil le positionnement de l’Algérie sur la scène internationale avec l’aide aux mouvements de libération africain, arabe et latino-américain et le rapprochement avec les pays socialistes d’Europe et d’Asie et Cuba, est encore plus irrité quand il apprend, le 27 décembre 1977, la libération des techniciens français de la bouche de Georges Marchais de retour d’Alger où il avait été reçu par le président algérien.(11) Et le fait que l’Algérie regarde avec sympathie communistes et socialistes français alliés autour d’un programme de gouvernement ne va naturellement guère contribuer à faire baisser la tension. Elle va même franchir un nouveau palier quand, le 9 février 1978, Giscard d’Estaing demande la révision des Accords d’Évian pour les remplacer par «un nouveau cadre juridique» plus adapté «à la situation actuelle».(12) Pire, évoquant «l’importance de la population algérienne en France», il entendait mettre en place une politique fondée sur le retour volontaire, voire forcé, de quelque 500 000 Algériens, à raison de 100 000 par an, malgré l’opposition de Raymond Barre et Simone Veil, retour volontaire que l’historien Patrick Weil qualifiera de «déportation».(13) S’il a fini par y renoncer, il a maintenu un quota de retour de 35 000 par an pour les 400 000 Algériens installés en France après le 5 juillet 1962. Quant aux relations économiques, déjà en berne depuis la crise de 1971, elles le resteront jusqu’à l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981.


    La gauche au pouvoir, espoirs et désenchantements

    Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, suivie par la visite de François Mitterrand à Alger (30 novembre-1er décembre 1981), les rapports entre les deux pays connaissent leur première embellie depuis 1962. Un climat de confiance s’instaure, que le ministre des Affaires étrangères, Claude Cheysson, qualifie de «coup de passion». On parle alors de politique de «codéveloppement» entre le Nord et le Sud. La gauche socialiste enterre le projet de renvoi massif des immigrés algériens, régularise plus de 15 000 Algériens en situation irrégulière, les visites ministérielles se multiplient, des accords économiques sont signés — la France acceptant même que le prix du gaz soit indexé sur le prix du baril. Bien plus, Mitterrand apprécie le nouveau président algérien, Chadli Bendjedid, en train de rompre graduellement avec la voie socialiste de développement de son prédécesseur, Houari Boumediene, décédé prématurément à l’âge de 46 ans en décembre 1977, et qui prend peu à peu ses distances avec l’URSS et le camp progressiste (Alger n’a pas soutenu la candidature du Nicaragua à la tête du Mouvement des non-alignés), avant d’opérer en cours de mandat un recentrage de l’État autour des valeurs araboislamiques. «Le coup de passion» sera pourtant de courte durée. Politique de rigueur oblige, Paris demande la révision des accords sur le prix du gaz, et ce, au moment même où Alger subissait de plein fouet la chute du prix du baril (40 à 8 dollars). De plus, selon Le Monde, «le remplacement de M. Mauroy par M. Fabius» au poste de Premier ministre, «et celui de M. Cheysson par M. Dumas (Affaires étrangères) n’ont pas réjoui Alger».(14) La visite officielle à Rabat le 27 avril 1985 de Laurent Fabius, assurant qu’il tenait à visiter le Maroc avant l’Algérie(15), «l’attirance » de F. Mitterrand pour la monarchie marocaine(16) et le fait que, selon Hubert Védrine, sur le Sahara occidental, «il a été plus ouvert au Maroc»(17), compliquent encore la relation franco-algérienne. Le changement de majorité intervenu en France en mars 1986 ne modifiera pas la situation. Pour satisfaire son électorat de droite, le nouveau Premier ministre, Jacques Chirac, veut durcir les conditions d’entrée et de séjour des Algériens. Prétextant la vague d’attentats ayant frappé Paris en 1986, l’exécutif chiraquien instaure un visa d’entrée aux non-Européens. Alger réplique en instaurant la réciprocité. Les échanges entre les deux pays connaissent un tassement (elles ont baissé de 15 milliards de francs par rapport aux années précédentes). La France, premier créancier de l’Algérie, multiplie les pressions, veut la contraindre à aligner le prix du gaz sur les cours du marché forcément en baisse. La question des enfants de couples mixtes devient une nouvelle source de discorde : près de 300 enfants étaient retenus par leurs pères (divorcés) en Algérie suite à des décisions de justice d’inspiration islamiste accordant la garde de l’enfant au père. Même la visite de François Mitterrand à Alger en mars 1987 – il se préparait à entrer en lice pour un second mandat – ne peut débloquer la situation. Faute d’accord sur les prix, les négociations sur le gaz commencées en juillet 1986 sont rompues en novembre 1987. Et comme Alger, tournée désormais vers un projet d’union avec Tripoli (Libye), considérait que le gaz est, selon le Premier ministre islamo-conservateur Abedelhamid Brahimi, le nerf de la coopération, les projets d’usines Renault et Peugeot sont gelés au profit du constructeur italien Fiat et des instructions sont données aux entreprises algériennes pour chercher des partenaires autres que français. Pire, au nom de l’arabisation de l’administration, des entreprises et du système éducatif, la coopération technique et culturelle est réduite au minimum : il est ainsi mis fin aux contrats de milliers d’enseignants, ingénieurs et cadres français ou d’autres nationalités étrangères exerçant en Algérie. Même les réfugiés chiliens et latino-américains, victimes collatérales de cette fièvre araboislamiste et nationaliste, sont poussés vers la sortie. Comme si cela ne suffisait pas, s’y ajoute la décision de l’Algérie de récupérer les lycées français, avec interdiction d’accès aux élèves algériens, y compris aux enfants de couples mixtes, à compter de la rentrée scolaire 1988- 1989. Dans un violent discours prononcé le 19 septembre 1988, moins de deux semaines après la visite de Roland Dumas, dépêché par François Mitterrand pour tenter de mettre fin à l’étiolement des relations entre les deux pays et jeter les bases d’une coopération renouvelée, le président Chadli Bendjedid considère la récupération des lycées français comme une «question de souveraineté nationale, sacrée et non négociable».(18) En vérité, «cette affaire ne concerne que quelques centaines d’enfants à Alger […] Elle est l’un des symptômes d’un contentieux beaucoup plus large qui oppose, au sein du parti (FLN), un nationalisme rigide, en l’occurrence partisan d’une arabisation totale de l’enseignement, aux tenants d’une politique de libéralisation et d’ouverture».(19) Seule la coopération sécuritaire semble échapper au climat de suspicion réciproque s’installant entre Paris et Alger.(20) Avec les grèves sociales de septembre 1988, suivies par l’explosion populaire d’octobre 1988 qui vont mettre fin au système du parti unique, l’Algérie s’ouvre au multipartisme au prix d’une répression sanglante, et un cycle se termine. La forte poussée de fièvre nationaliste à forte connotation islamo-arabiste antifrançaise, actionnée par le président Chadli et l’aile la plus réactionnaire du régime, n’aura servi à rien. Les tensions avec la France vont passer au second plan et le projet d’union avec la Libye tombe à l’eau. Le régime FLN, miné par des conflits internes, sera vite débordé sur sa droite extrême par les islamistes du Front islamique du salut (FIS) à qui cette même aile réactionnaire du régime était prête à remettre les clés de la maison Algérie après lui en avoir préparé le lit.

    Années 1990, les rapports franco-algériens dans le collimateur du GIA 
    L’ouverture de l’Algérie au multipartisme et à la liberté de la presse à partir de 1989 et, surtout, la victoire du FIS aux élections locales de juin 1990, frappent comme un coup de tonnerre. Tout en encourageant le gouvernement réformateur de Mouloud Hamrouche à poursuivre sa politique de libéralisation de l’économie et de la vie politique, la France mitterrandienne reste attentive à l’émergence des islamistes comme nouvel acteur majeur dans un paysage politique complètement modifié. Des contacts discrets sont noués avec ces islamistes aux portes du pouvoir, d’autant que le président Chadli Bendjedid jouit de la confiance des socialistes français qui voient en lui un artisan possible d’un compromis avec les islamistes, puisque se disant prêt à gouverner avec le FIS si ce dernier remportait les élections législatives fixées à fin 1991. Mais, le 11 janvier 1992, en annulant les élections législatives, dont le premier tour avait été remporté par le FIS, frôlant la majorité absolue, et en poussant le président Chadli à démissionner, les artisans de ce coup de force — l’armée et des civils — soutenus par la société civile et une partie des forces politiques, dont Ben Bella, vont de fait empêcher l’instauration d’un État théocratique, avec l’aide de la frange la plus réactionnaire du FLN. L’annulation des élections, que François Mitterrand qualifiera trois jours après d’«acte pour le moins anormal», enjoignant le pouvoir algérien de «renouer au plus tôt les fils d’une vie démocratique qui s’amorçait»,(21) et la violence qui va progressivement embraser l’Algérie vont être le début d’une nouvelle brouille entre les deux pays qui va durer jusqu’en 1999. Les réserves et critiques françaises qui ne vont pas cesser, les propos du ministre de la Défense, Pierre Joxe, n’écartant pas la possibilité d’une intervention pour évacuer les ressortissants français en Algérie, les facilités accordées sur le sol français aux islamistes fuyant la répression font que la relation franco- algérienne va traverser un moment difficile.( 22) Selon Paul-Marie de la Gorce, instruction était donnée de ne pas trop s’engager avec les «putschistes» algériens. S’ensuit alors une période de gel, y compris sous la courte période de la présidence de Mohamed Boudiaf (assassiné en juin 1992).(23) Il faudra attendre janvier 1993, pour qu’un ministre de haut rang, le chef de la diplomatie Roland Dumas se rende à Alger, déclarant «être prêt à écouter les Algériens», et que la France était disposée à aider l’Algérie qui faisait face à une situation économique difficile et financière jugée catastrophique.(24) Il était trop tard, les Algériens, qui venaient de recevoir Jacques Chirac, pariaient désormais sur un retour de la droite aux affaires. Mais, à la décharge des Français, avec un gouvernement algérien dirigé par un Premier ministre, Belaïd Abdesselam, hostile par nationalisme étroit à la France, peu enclin à nouer de bons rapports afin de complaîre aux islamo-conservateurs, et qui attribuait les attentats, dont celui ciblant Air France et l’aéroport d’Alger en juillet 1992, à un complot «ourdi» par la France avec la complicité des «laïco-assimilationnistes », autrement dit les communistes, les progressistes et les démocrates algériens en général, prônant de surcroît une «économie de guerre» à la Ceausescu, il ne fallait pas s’attendre à une détente entre les deux pays.(25) À compter de la fin 1993, l’Algérie entre dans sa phase la plus délicate. Les assassinats de ressortissants français, qui ont débuté après le rapt des trois agents consulaires français en novembre 1993, l’attaque des gendarmes français assurant la sécurité d’une cité habitée par des coopérants français (cinq morts dont trois gendarmes) par le GIA (Groupe islamique armé) en juillet 1994, la prise en otage de l’Airbus d’Air France le 24 décembre 1994 par un commando du GIA vont rebattre les cartes dans les rapports entre les deux pays. La France est désormais dans la ligne de mire du GIA. La donne sécuritaire s’insinue dans la relation franco-algérienne. Paris est convaincu que l’État algérien est incapable d’assurer la sécurité des étrangers. Air France, suivie aussitôt par toutes les compagnies aériennes européennes, cesse d’assurer les vols en direction de l’Algérie. Les consulats, les centres culturels et les établissements scolaires français ferment. À leur tour, les entreprises françaises, imitées par les firmes européennes et asiatiques, ferment leurs bureaux et succursales et quittent le pays. Les ambassades occidentales, excepté celle des États-Unis, ferment également et transfèrent leurs activités consulaires à Tunis. Et humiliation supplémentaire, le service de délivrance des visas est transféré à Nantes. Le nombre de visas délivrés chute à moins de 50 000 contre près de 400 000 avant 1994, limitant ainsi les voyages entre les deux pays. La vague des attentats frappant Paris durant l’été 1995 et les voix de plus en plus nombreuses, surtout parmi la gauche socialiste et les Verts, accusant le pouvoir algérien de manipuler les groupes islamistes incitent le gouvernement français à ne pas trop s’engager envers des Algériens jugés de plus en plus nerveux. D’autant que François Mitterrand, en fin de mandat, ne fait rien pour dégeler la situation. Au contraire, il propose en février 1995 une conférence européenne sur la «crise algérienne», prenant pour base la plateforme de Rome signée par le FIS et des partis algériens dont le FLN, le FFS (socialistes), s’attirant les foudres du pouvoir algérien qui qualifie la proposition française de «grossière ingérence».(26) Sous la présidence de Jacques Chirac, qui a eu à gérer la vague d’attentats revendiqués par le GIA ayant frappé Paris durant l’été 1995, les relations restent empreintes de méfiance, surtout après le refus du président Zeroual de le rencontrer de manière non officielle en octobre 1995 comme le souhaitait l’Élysée. «L’Algérie n’a pas pour habitude d’assumer sa diplomatie en rasant les murs», expliquait la présidence algérienne(27). L’élection de Liamine Zeroual en novembre 1995, en dépit du GIA et d’Anouar Haddam qui assurent qu’ils empêcheront l’élection présidentielle, constitue un tournant. D’autant que ce premier scrutin présidentiel pluraliste depuis 1962 sonne comme un cinglant désaveu des thèses répandues dans la classe politique française, affirmant que le GIA et l’AIS (Armée islamique du salut) contrôlaient la population et que le boycott prôné par le FLN et le FFS d’Aït Ahmed serait largement suivi. Rabah Kébir en prend acte au nom du FIS, reconnaissant la légitimité de l’élection de M. Zeroual, tandis que les capitales occidentales, Paris et Washington en tête, décidaient de reconsidérer positivement leurs rapports avec l’Algérie, encourageant le président Zeroual à poursuivre la démocratisation promise. Sept mois après cette élection présidentielle, alors qu’a lieu un vaste débat public associant le pouvoir politique, tous les partis (excepté le FIS), les syndicats, les personnalités et acteurs de la société civile algérienne, sur le projet de Constitution et l’élection d’un parlement au suffrage universel, se produit en juin 1996 l’assassinat des moines du monastère de Tibhirine. Une partie des médias français l’attribue alors aux militaires algériens. Sur cette sombre toile de fond, le ministre des Affaires étrangères, Hervé de Charrette, se rend à Alger en août 1996 pour éviter que les rapports ne se tendent davantage avec un pays qui s’est vu imposer par les institutions financières internationales un Plan d’ajustement structurel (PAS). La France chiraquienne, sous forte pression médiatico-politique, opte alors pour une politique empreinte de prudence à l’égard d’un pouvoir algérien divisé sur la conduite à tenir à l’égard des islamistes.( 28) Avec les massacres de civils à grande échelle de la fin de l’été et de l’automne 1997 aux portes mêmes d’Alger, Jacques Chirac et le gouvernement de Lionel Jospin, confrontés à une incroyable campagne médiatique demandant une enquête internationale en raison des présomptions pesant sur la responsabilité du régime dans tout ou partie des violences en cours, sont sommés de se positionner. Hésitant sur la conduite à suivre, ils se bornent dans un premier temps à faire part de leurs «préoccupations». Toutefois, bien qu’estimant, à l’instar de Washington, que «le régime de Liamine Zeroual reste la moins mauvaise des options»(29), le Quai d’Orsay n’en rappelle pas moins «le droit légitime de la population algérienne à être protégée».(30) Aussi, la France penche-t-elle prudemment pour une internationalisation contrôlée de la crise algérienne en appuyant, par la voix d’Hubert Védrine, la proposition allemande d’envoi d’une «troïka» européenne à Alger, qui sera ensuite suivie par une mission du Parlement européen conduite par André Soulier et Daniel Cohn-Bendit, avant de soutenir le principe d’une commission d’enquête onusienne qui sera conduite par le socialiste Mario Soares, laquelle conclut que ce sont bien les islamistes qui ont commis les massacres de civils durant l’été et l’automne 1997. Il faudra attendre l’arrivée d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir en avril 1999, dans un contexte de reflux de la violence islamiste, pour voir un début de détente et de normalisation entre les deux pays.(31)


    Bouteflika, la repentance et la sécurité régionale 

    En démissionnant de ses fonctions de président de la République en août 1998, Liamine Zeroual ouvre la voie à l’arrivée d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir en avril 1999.(32) L’élection de ce dernier est l’épisode d’une nouvelle passe d’armes quand, le 16 avril, prenant connaissance d’une déclaration d’Hubert Védrine, ministre des Affaires étrangères, émettant un doute sur son élection, le nouveau chef d’État algérien, jouant sur les ressorts d’un nationalisme à fleur de peau de nombreux Algériens, réplique vivement : «La France doit comprendre que l’Algérie n’est pas sa chasse gardée.»(33) Ou quand il feint de s’étonner que le président Chirac n’a «jamais trouvé une demi-journée à consacrer à l’Algérie » alors qu’il a visité, dit-il, la plupart des capitales arabes… Reste qu’Abdelaziz Bouteflika est sans doute le dirigeant algérien qui connaît le mieux la France, pour avoir rencontré, en tant que chef de la diplomatie algérienne, les présidents Charles de Gaulle, Georges Pompidou, Giscard d’Estaing et, en tant que chef d’État, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, François Hollande. Et ce, sans compter les nombreux ministres et responsables de partis de gauche et de droite. Et, c’est en France qu’il se soigne depuis qu’il est tombé malade en 2005. Le dialogue est vite renoué, Algériens et Français vont donc s’efforcer d’aplanir une brouille qui dure depuis sept ans : visite d’Hubert Védrine en juillet 1999 à Alger, la première depuis deux ans, rencontre entre Abdelaziz Bouteflika et Lionel Jospin le 21 septembre à New York, visite d’État d’Abdelaziz Bouteflika en France en juin 2000, où il se prononce pour «un partenariat d’exception» avant de se rendre à Verdun pour un hommage aux 25 000 soldats algériens morts en 1914-1918. Jacques Chirac visite à son tour l’Algérie en mars 2003, visite ponctuée par la signature d’un texte, «La déclaration d’Alger», au terme duquel les deux pays s’engagent à établir «un partenariat politique, économique et culturel renforcé», qualifié par les deux parties de «partenariat d’exception». Les services consulaires rouvrent leurs portes et le nombre de visas augmente, mais sans retrouver son niveau d’avant 1994, les échanges économiques et culturels vont s’intensifier, Air France reprend ses vols sur Alger, la réalisation du métro d’Alger et de l’aéroport international sont confiés aux Français… Mais la lune de miel ne va pas durer. Le traité d’amitié, «comparable au Traité de l’Élysée, conclu entre la France et l’Allemagne en 1963», voulu par Jacques Chirac, ne sera pas signé entre les deux pays. En cause, la loi du 23 février 2005 vantant les aspects positifs de la colonisation. Les Algériens conditionnent alors la signature d’un traité d’amitié à l’abrogation de cette loi scélérate. Ce ne sera pas tout à fait le cas.
    Le président algérien, en besoin de se relégitimer pour un éventuel troisième mandat, exige désormais des «excuses» de la France pour les crimes commis pendant la colonisation. Le thème de la repentance s’invite désormais dans les rapports entre les deux pays, surtout sous la présidence de Nicolas Sarkozy, dont le positionnement sur la colonisation, l’entreprise de réhabilitation des anciens de l’OAS, la création d’un ministère de l’Identité nationale, sa stigmatisation des enfants d’immigrés d’origine surtout algérienne et son intention de réviser les accords sur la main-d’œuvre de 1968 passent mal. Il «n’est pas le bienvenu» en Algérie(34) où sa visite manque même d’être annulée(35). Elle aura lieu, mais sous haute surveillance. Mais à la place d’un traité d’amitié, il y aura une simple «convention de partenariat» entre les deux pays. Et ce n’est pas fini. L’intervention française en Libye, qui a abouti à la chute du régime de Kadhafi, divise les deux pays. Pour une fois, l’Algérie n’avait pas tort, et les faits lui ont donné raison, quand elle avait prévenu que l’intervention franco-britannique allait déstabiliser la région. Mais Nicolas Sarkozy en rajoute. «Dans un an l’Algérie, dans deux ans l’Iran», s’enthousiasme- t-il le 5 septembre à Tripoli, croyant que le régime algérien allait être à son tour balayé par la vague du Printemps arabe(36). Nouveau coup de froid. Jean-Pierre Raffarin, en mission commandée – il se rend à trois reprises à Alger –, parviendra à mettre la coopération à l’abri des aléas diplomatiques. De ce fait, l’élection de François Hollande est accueillie presque comme un soulagement par les autorités algériennes, y compris, une fois n’est pas coutume, par les forces démocratiques et progressistes et la société civile. Lui aussi veut tourner la page du passé avec un pays qu’il connaît bien, en jouant la carte de l’apaisement et en voulant imprimer une nouvelle dynamique aux relations francoalgériennes. L’hommage rendu aux victimes du 17 octobre 1961 et à la mémoire du mathématicien communiste Maurice Audin sur la place portant son nom à Alger, en décembre 2012, sont autant de marqueurs plaidant en sa faveur. D’autant qu’aucun de ses prédécesseurs ne l’avait fait. Sa relation avec l’Algérie intervient toutefois dans un contexte régional radicalement transformé, porteur de menaces potentielles pour les pays de la région, comme l’a montrée l’attaque du site gazier d’In Amenas par le groupe djihadiste de Mokhtar Belmokhtar en janvier 2013.(37) La relation franco-algérienne va donc intégrer cet élément nouveau qu’est la menace djihadiste en provenance de Libye et du Sahel et, partant, la sécurité régionale. Celle-ci va même prendre le pas sur le volet économique où la France, malgré la forte concurrence de la Chine (premier fournisseur de l’Algérie), conserve de solides positions sur le marché algérien : elle est son deuxième partenaire commercial, avec des échanges s’élevant à 10,5 milliards d’euros en 2016 et la 3e destination mondiale hors OCDE, avant les pays du Golfe ; elle est aussi son premier partenaire sur le continent africain avant le Maroc. Quelque 7 000 entreprises françaises exportent en Algérie et près de 500 y sont installées, dont de grands groupes comme Renault, Sanofi, Alsthom, Total, Peugeot, ainsi que des banques. Et puis Hollande a visité un pays ayant un niveau d’endettement extérieur faible, à peine 3% de son PIB, et disposant de réserves de change de plus de 150 milliards de dollars. Et il a su habilement éviter les sujets qui fâchent, comme le Sahara occidental. Malgré les réticences algériennes, Paris intervient au Mali pour stopper l’offensive djihadiste vers Bamako : informé quelques heures avant cette intervention, Alger donne son accord pour que l’aviation française traverse son espace aérien et fournit aux forces terrestres françaises un soutien logistique.(38) Mais la France de François Hollande, de concert avec l’Amérique de Barack Obama, ne s’arrête pas là : elle tente de persuader l’Algérie de s’engager militairement dans le Sahel et de rompre ainsi avec sa doctrine de non-engagement dans des systèmes multilatéraux qui hypothéqueraient sa liberté de décision. Une chose est sûre, malgré des différences d’appréciation sur la situation au Sahel et surtout sur la Syrie, jamais, assuret- on à Alger, les relations entre les deux pays n’ont connu une telle embellie. Pour Abdelaziz Bouteflika, confronté à une crise financière provoquée par la chute du baril de pétrole à compter de 2014, l’appui de la France valait certainement quelques concessions, et ce, malgré l’impair commis par Manuel Valls, twittant une photo en compagnie du chef de l’État algérien diminué par la maladie et donc pas à l’avantage de ce dernier, impair qui manque de tourner à l’incident diplomatique, alors que les Algériens étaient déjà remontés à propos d’un article du Monde sur les Panama Papers, mettant en cause le ministre de l’Industrie, Abdeslam Bouchouareb, illustré par une photo du président algérien(39). C’était jugé d’autant mal venu que François Hollande, quelques mois avant, en juin 2015, avait effectué une visite éclair à Alger, mû par le désir de l’Élysée de voir les Algériens s’impliquer militairement en Libye après la chute de Syrte aux mains de Daech et la menace que faisait peser ce dernier sur la Tunisie.(40) Et sans doute était-il préoccupé par l’état de santé du président algérien un an après sa réélection controversée.(41) Quelle sera la politique algérienne d’Emmanuel Macron ? À défaut d’une visite d’État au protocole très lourd, ce que ne pouvait assumer son homologue algérien en raison de sa maladie, Emmanuel Macron a effectué une courte visite à Alger, sans grande annonce, tenant des propos déjà entendus dans la bouche de ses prédécesseurs par les Algériens. Sur le passé colonial, passage obligé, il a plaidé pour la « réconciliation des mémoires» et il ne veut «ni déni ni repentance». Fermez le banc. En matière de coopération, même si l’Algérie reste, selon l’Élysée, un potentiel économique considérable avec pour l’heure un niveau d’endettement extérieur faible, la préoccupation majeure pour Emmanuel Macron – c’était l’un des buts de sa visite – reste la sécurité régionale (Libye, Sahel). À Alger, il en aurait brièvement discuté avec le chef d’état-major de l’armée algérienne et vice-ministre de la Défense, le général Gaïd Salah : Paris souhaiterait que l’Algérie, seul pays de la région disposant d’une capacité opérationnelle, intègre le G-5 Sahel, structure sur laquelle la France pense se décharger à terme en matière de lutte antiterroriste, lui permettant ainsi de se désengager du bourbier sahélien.(42) Déjà réticent à la présence de forces étrangères à ses frontières — en plus des Français, 800 militaires américains sont basés à Agades au Mali —, Alger voit d’un mauvais œil l’intrusion de l’Arabie Saoudite et des Émirats arabes unis qui, dans un premier temps, participeront au financement du G-5 Sahel à hauteur de 130 millions 0d’euros.(43) Enfin, autre préoccupation de l’Élysée qui l’empêche pour l’heure de définir sa politique algérienne, c’est l’incertitude liée à la maladie du président Bouteflika, dont la succession, au cas où il renoncerait à se présenter, est l’enjeu d’une sourde lutte au sein du pouvoir algérien, avec en toile de fond un contexte financier et économique difficile et un contexte régional qui reste potentiellement porteur de menaces. Pour l’heure, donc, c’est le «wait and see».

    H. Z.
    (*) Hassane Zerrouky, journaliste
    Etude parue dans Recherches Internationnales


    1) Gilbert Meynier, Questions internationales, n° 81, juillet-septembre 2016, Documentation française.
    2) Redha Malek, L’Algérie à Évian, Seuil, 1994, p. 212. Le chef d’état-major de l’ALN, le colonel Boumediène, et ses adjoints étaient opposés à la signature de ces accords (voir M. Harbi, Le FLN mirage et réalités, Éditions Jeune Afrique, 1982).
    3) Le programme de Tripoli adopté en juin 1962 par le CNRA.
    4) Jusqu’en 1968, les Algériens étaient dispensés de carte de résidence et de travail.
    5) Partie de la Mitidja et de la plaine du Chélif durant l’été 1962, l’occupation des fermes coloniales s’est par la suite propagée
    à d’autres régions. Petites et moyennes entreprises ont également connu le même processus.
    6) Malgré l’arabisation de l’école et de l’administration algériennes, le français est encore utilisé comme langue professionnelle
    et de travail, ainsi que d’enseignement dans les disciplines scientifiques et techniques. Depuis la rentrée de 2003,
    il est enseigné comme deuxième langue dès la deuxième année du primaire, au point que la langue française est plus implantée à l’ère actuelle
    que durant la période coloniale.
    7) Cité par Jean-François Daguzan in Les rapports franco-algériens, 1962-1992, Politique étrangère n°4 1993.
    8) Le Monde du 13 mars 1964.
    9) Voir René Gallissot, Henri Curiel, Le Mythe mesuré à l’histoire, Éditions Rive-neuve, 2009.
    10) Pas moins de huit attaques aériennes françaises avaient été lancées contre les forces du Polisario qui menaçaient
    l’armée mauritanienne entre novembre 1977 et mai 1978.
    11) François Mitterrand a également été informé de cette libération par les Algériens.
    12) Conférence de presse de Giscard d’Estaing, vidéo de l’Ina.
    13) L’Humanité du 24 juin 2015, «Quand Giscard chassait l’Algérien».
    14) Le Monde du 13 mai 1985.
    15) Le Monde, cité.
    16) Le Monde du 4 avril 1986.
    17) Liberté (Algérie) du 1/02/2018.
    18) El Moudjahid du 20 septembre 1988.
    19) Le Monde du 6 septembre 1988.
    20) Les services algériens ont été actifs dans la libération des otages français au Liban. En contrepartie, dit-on, Paris expulse 12 opposants
    algériens proches de l’ex-président Ben Bella en octobre 1986 et ferme les yeux sur l’assassinat de l’opposant Ali
    Mecili, membre du FFS, le 4 avril 1987.

    21) Le Matin du 15 janvier 1992.
    22) Sur cette question, voir Hassane Zerrouky, La Nébuleuse islamiste, éditions 1/Calmann-Levy, 2001.
    23) «La France et le Maghreb», article de Paul Marie de la Gorce, Politique Étrangère n°4, 1995. Site Persée.
    24) Les créanciers de l’Algérie, un consortium de 200 banques piloté par le Crédit lyonnais, exigeaient le paiement de 9 milliards de dollars au titre du service d’une dette de 24 milliards de dollars alors que les recettes algériennes excédaient à peine les 11 milliards de dollars.
    25) Dans la bouche des islamo-conservateurs, le terme de «laïco-assimilationnistes» désignait tous ceux qui étaient opposés à tout compromis avec les islamistes radicaux.
    26) L’Humanité du 6 février 1995.
    27) La rencontre devait avoir lieu à New York en marge de l’Assemblée générale de l’ONU.
    28) Alors que pour Liamine Zeroual «le dossier du FIS est clos», des cercles du pouvoir négociaient en sous-main avec l’AIS et une partie du FIS représentée par Rabah Kébir.
    29) Libération du 27-28/12/1997.
    30) Voir Le Matin du 16 octobre 1997 et El Watan du 6 janvier 1998.
    31) Après la reddition de l’AIS (Armée islamique du salut) fin 1997, et l’écrasement du GIA par l’armée algérienne durant l’année 1998-1999, la violence baisse d’intensité.
    32) Voir La Nébuleuse islamiste en France et en Algérie et mes écrits sur les raisons de cette démission dans l’Humanité et le Matin d’Algérie d’août-septembre 1998.
    33) L’Humanité du 29 juillet 1999.
    34) Voir l’article de H. Zerrouky, Le Matin, 29 novembre 2007. Le ministre des Moudjahidine (anciens combattants) et pratiquement toute la presse tonnaient contre le président français.
    35) Le Matin, idem.
    36) Soir d’Algérie, 19 juillet 2012.
    37) Sur l’attaque du site gazier d’In Aménas, voir l’Humanité des 16 au 22 janvier 2013.
    38) Selon plusieurs médias algériens, des avions militaires algériens gros porteurs C 130 et Illiouchine ont transporté du matériel militaire français au Mali.
    39) Le Soir d’Algérie du 28 avril 2016.
    40) L’Humanité du 26 février 2015.
    41) Voir Recherches internationales n°99, avril-juin 2014.
    42) Dépêches AFP du 14 et du 15 12/2017. À propos du G- 5 Sahel, une première réunion élargie regroupant la France, l’UE, les États-Unis, l’Arabie Saoudite et les Émirats a eu lieu à Paris le 13 décembre et une seconde est prévue fin février à Bruxelles. Le G5 Sahel est constitué du Mali, du Tchad, du Niger, du Burkina et de la Mauritanie.
    43) L’Algérie est le seul pays, avec l’Irak et le Liban, à ne pas faire partie de la coalition antiterroriste lancée par Riyad en novembre dernier.
    Le Soir d’Algérie

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  • Maroc : La connexion sioniste de Mohammed VI

    UNE DIZAINE DE MINISTRES D’ORIGINE MAROCAINE RETENUS DANS LE NOUVEAU GOUVERNEMENT SIONISTE : La preuve par les chiffres

    Un pareil choix, loin d’être aléatoire, trahit au contraire les penchants pro-israéliens du Makhzen, pourtant dirigé par un homme qui usurpe indument le pompeux titre de « commandeur des croyants ».

    Finalement, et après une attente qui aura duré plus d’une année, sur fond d’une crise profonde et à plusieurs facettes, l’entité sioniste a fini par se doter d’un gouvernement. Mais, la composition de celui-ci fait irrésistiblement penser à cet adage qui veut que la montagne accouche d’une souris. Cet Exécutif, que l’on subodore éphémère, comme ceux qui l’ont précédé puisque Netanyahu ne devrait en assurer la direction que durant 18 mois, a mis à nu la coupable, mais secrète, proximité qui a toujours existé entre cette entité d’essence néonazie et le Maroc, dont la politique colonialiste déployée au Sahara occidental n’a rien à envier à celle des criminels sionistes dans les territoires occupés palestiniens. La communauté juive sépharade d’origine marocaine, en effet, a obtenu d’importants « maroquins » dans le nouveau cabinet de Netanyahu. Le site « Maghreb Confidentiel » parle, lui, de pas moins d’une dizaine de portefeuilles ministériels revenus à cette « catégorie ethnique ».

    À titre d’exemple, la formation religieuse Shass, traditionnellement sépharade, a hérité du ministère de l’Intérieur et Développement du Néguev et de la Galilée, confié à Arié Dery, né le 17 février 1959 à Meknès. Dans les rangs de la droite du Likoud, il est relevé la présence d’Amir Ohana désigné ministre à la Sécurité. Dans le précédent cabinet Netanyahu, il avait dirigé le département de la Justice. Ouvertement homosexuel, Ohana est né en 1976 à Beersheva au sein d’une famille juive marocaine. Toujours au Likoud, Miri Regev, elle aussi née au Maroc, est propulsée à la tête du département des Transports. Au ministère du Renforcement communautaire figure Mme Orly Lévy-Abécassis du Parti Gesher (Pont), créé en 1996 par son père David Levy. Ce dernier avait occupé le poste de ministre des Affaires étrangères (6 juillet 1999 – 4 août 2000), traditionnellement chasse gardée des juifs ashkénazes. Natif de Rabat, en 1937, il avait déjà effectué une visite officielle au royaume en janvier 2000 pour aborder le processus de paix au Moyen-Orient avec son homologue Mohamed Benaïssa, ainsi que André Azoulay. D’autres ministres d’origine marocaine figurent sur la photo de famille du nouveau cabinet Netanyahu, tels Raphy Peretz (Parti Foyer juif), ministre du Patrimoine, Neirav Cohen (Parti Bleu-Blanc) à l’Egalité sociale et David Amsallem (Likoud) chargé des Relations avec le Parlement (Knesset).

    De pareils choix, loin d’être le fruit du hasard, trahissent au contraire la grande proximité doctrinale qui a toujours existé entre Rabat et l’entité sioniste. Pour finir de s’en convaincre du reste, il suffit juste de rappeler que la construction du tristement mur de la honte au Sahara occidental n’a été rendue possible qu’avec le complice concours des hommes du génie de « Tsahal »…

    Kamel Zaidi

    Le Courrier d’Algérie, 20 mai 2020