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  • Mali : Les confidences de Tiéman Hubert Coulibaly au Maroc

    A

    Monsieur Le Ministre

    Objet : Compte-rendu de l’entrevue de M. le Ministre avec son homologue malien M. Tiéman Hubert Coulibaly.

    M. le Ministre a reçu le 2 mai 2013 son homologue malien S.E.M. Tiéman Hubert Coulibaly. Durant cette entrevue le ministre malien a exprimé sa grande joie d’être au Maroc et son intime conviction que les échanges qu’il a eus pendant cette visite seront l’occasion pour permettre aux deux pays de travailler et construire un meilleur avenir.

    – Situation au Mali :

    Le ministre malien a décrit la situation dans son pays comme s’orientant vers de plus en plus de paix et de sécurité. L’option militaire se poursuit avec succès et ouvre, désormais, la voie à une normalisation politique à travers l’instauration d’un dialogue politique entre les différentes composantes maliennes. La feuille de route, établie dans ce sens, prévoit des échéances électorales présidentielles et législatives qui seront organisées à partir du mois de juillet prochain. Ce rendez-vous électoral va consacrer, selon le haut responsable malien, le retour à la normalité.

    En réponse M. le Ministre a rappelé la position du Maroc vis-à-vis de l’évolution de la situation au Mali et sa disponibilité à contribuer à l’instauration de conditions optimales pour permettre à la coopération bilatérale d’entamer un nouvel élan et permettre la prospection de nouvelles perspectives par le biais de la coopération tripartite.

    – Relations bilatérales :

    M. le Ministre a accepté l’invitation que lui a adressée son hôte malien. La tenue de la Grande Commission Mixte Maroco-Malienne à Bamako, à une date qui sera définie en commun accord, sera l’occasion de passer à une page opérationnelle et écrire une nouvelle page de l’histoire des relations entre les deux pays frères et amis. Le responsable malien a exprimé à ce sujet sa conviction de l’instauration d’un axe Bamako-Rabat se projetant vers l’avenir. Les secteurs du logement social, de l’agriculture, de la santé, de la condition de la femme, de la formation seront les domaines qui feront l’objet d’une attention particulière des experts des deux pays dans la préparation de la Grande Commission Mixte Maroco-Malienne.

    – Question nationale :

    M. le Ministre a rappelé l’attachement du Maroc à la légalité internationale qui a été une nouvelle fois confirmée par la résolution 2099 du Conseil de Sécurité qui a rappelé à cette occasion sur la recherche d’une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable du conflit.

    L’attention du haut responsable malien a été attirée notamment sur l’obligation de recensement par le Haut Commissariat aux Réfugiés des réfugiés à Tindouf.

    Le ministre malien a rétorqué en s’adressant à M. le Ministre en disant : « vous êtes dans votre Sahara, nous vous voulons dans votre Sahara » et a réitéré la position du Mali en considérant que son accueil au Maroc est « un accueil d’un ami qui croit à l’intégrité du Maroc ».

    S’agissant des récentes tentatives du commissaire de l’Union Africaine (UA) Mme Nkosazana Dlamini-Zuma, M. le Ministre a fait savoir à son hôte que le Maroc s’oppose à ce que le sujet du Sahara soit réouvert au niveau de l’UA, l’évolution du dossier étant désormais aux mains du Conseil de Sécurité des Nation Unies et de son Secrétaire Général. Ces tentatives d’ingérence de l’UA ne feront que nuire au travail accompli au niveau de l’instance onusienne. En réponse le ministre malien a affirmé que le Conseil de Sécurité ne s’est jamais dessaisi d’une affaire au profit d’une organisation régionale, en précisant que ces nouvelles tentatives vont mettre à mal la cohérence au niveau de l’UA. Le ministre malien s’est dit rester convaincu que ses homologues africains trouveront dans un courrier que pourrait leur adresser M. le Ministre une raison de se constituer en front d’opposition à ces tentatives initiées, selon lui, par la Zambie.

    Source : Maroc Leaks, 9 fév 2020

    Tags : Maroc, Mali, Sahara Occidental, Union Africaine, UA, Algérie, Tiéman Hubert Coulibaly,

  • Jusqu’à 1973, le Maroc soutenait l’autodétermination au Sahara (Le Monde diplomatique)

    Fardeau pour l’Espagne, casse-tête pour l’ONU – Le Sahara occidental suscite les convoitises de ses voisins

    Le Sahara occidental sous domination espagnole sera-t-il une « nouvelle Palestine » comme certains l’ont hâtivement avancé ou un « nouveau Katanga » ? En tout cas, le problème est complexe ; il risque de provoquer une crise grave dans la région et la façon dont il sera résolu modifiera le visage du Maghreb.

    Ces « quelques arpents de sable », convoités par le Maroc et par la Mauritanie tandis que l’Algérie, qui ne revendique rien, soutient le F. POLISARIO (Front populaire pour la libération de Seguiet-El-Hamra et du Rio-de-Oro), partisan de l’indépendance pure et simple, sont devenus un fardeau pour l’Espagne, un casse-tête pour l’ONU, un sujet épineux pour l’O.U.A. et la Ligue arabe, et un objet de préoccupations pour les intérêts occidentaux qui y ont fait des investissements. Des mouvements de libération affirment que le sort du Sahara occidental ne laisse pas les Etats-Unis et l’OTAN indifférents parce qu’il est lié à l’avenir des îles Canaries. De leur côté, les Africains se sentent menacés du fait que l’archipel risque de plus en plus de devenir une puissante base américaine.

    Il suffit de regarder la carte pour constater que les frontières établies par les puissances coloniales sont d’une perfection géométrique bien théorique pour les nomades qui, de tout temps, ont suivi des zones de parcours à la recherche de pâturages, sans se soucier de ces « lignes conventionnelles » artificiellement tracées. Le territoire – 284 000 kilomètres carrés – est divisé en deux grandes zones : Seguiet-El-Hamra au nord, avec El Aïoun comme capitale, et le Rio-de-Oro (Ouadi-El-Dhahab en arabe) au sud, dont l’agglomération principale est Villa-Cisneros.

    La population est formée d’une vingtaine de tribus qui se rattachent à quatre grands groupes : les Reguibat, les Tekna, les Maquils et les Ouled Delim. Combien sont-ils ? Les Espagnols, qui ont procédé l’an dernier à un recensement, avancent le chiffre de soixante-dix mille à quatre-vingt mille, mais ils admettent qu’ils n’ont pu, évidemment, comptabiliser les Sahraouis qui se sont réfugiés dans les pays limitrophes et ceux qui y nomadisent. Des dirigeants du F. POLISARIO estiment, quant à eux, que le chiffre oscille entre deux cent cinquante mille et trois cent mille (1).

    Se serait-on avisé de l’importance de ce désert, position stratégique mise à part, si l’Espagne n’avait commencé à exploiter en 1963 les fabuleux gisements de phosphates (découverts en 1947) de Seguiet-El-Hamra ? Longs de 75 kilomètres sur 1 à 15 kilomètres de large, ils s’étendent sur 250 kilomètres carrés. Les réserves, réparties en cinq zones, sont évaluées à 10 milliards de tonnes. Celle de Bou-Kraa, où l’extraction se fait à ciel ouvert, renferme 1,7 milliard de tonnes exploitées par l’ENMINSA (Empressa Nacional Mineras del Sahara). Fondée en 1962, elle fut rebaptisée, en 1969, Fosfatos de Bu-Craa lorsque son capital a été porté à 5 milliards de pesetas et qu’elle a associé à son entreprise des intérêts occidentaux, notamment américains, allemands et français.

    Le sous-sol recèle également du fer, du cuivre, de l’uranium et du gaz. Au large de la côte se trouve un des plus riches réservoirs de poissons du monde et la nappe pétrolifère sous-marine ne serait pas négligeable. Les sociétés pétrolières se montrent discrètes sur les résultats obtenus ou minimisent les réserves. Selon le M.P.A.I.A.C. (Mouvement pour l’autodétermination et l’indépendance de l’archipel canarien), les forages commencés en 1959-1960 auraient été prometteurs. Toutefois, à l’époque, priorité aurait été donnée au brut libyen dont l’extraction était moins onéreuse, « le Sahara atlantique étant conservé comme réserve stratégique ». Fait troublant, c’est en 1969 – année du renversement du roi Idriss et de l’accession au pouvoir du colonel Kadhafi – que les sociétés éprouvent de nouveau un penchant pour le Sahara, et l’Union Carbide Petroleum conclut, en juillet 1970, un contrat de deux ans avec Madrid, renouvelé depuis, pour des forages en mer ; le permis est octroyé pour une zone de 1 600 000 hectares à une de ses filiales espagnoles qui s’engageait à investir 147 millions de pesetas. Des filiales de la Standard Oil, de la Gulf Oil et d’autres « sœurs » du cartel se sont aussi mises sur les rangs.

    Si le Maroc, dépourvu de pétrole mais premier exportateur mondial de phosphates, récupérait le Sahara occidental, sa puissance serait considérablement accrue. Si la Mauritanie, moins bien lotie, voyait tout ou partie de ce territoire lui revenir, ses capacités économiques en seraient d’autant renforcées. En revanche, un Sahara indépendant, républicain et non aligné aurait tendance à se tourner vers l’Algérie, à moins que les trois voisins ne s’entendent pour aider le jeune Etat à se structurer et à exploiter ses richesses. Le jeu de l’Espagne a consisté à organiser une indépendance qui se fasse dans sa mouvance ; ses espoirs s’étant estompés, il semble qu’elle s’accommoderait d’un régime non aligné qui, tout en lui retirant les bases militaires, maintiendrait avec elle une coopération économique et culturelle.

    « Droits historiques » et autodétermination

    L’enjeu est de taille. Quant à la complexité du dossier, elle ne s’explique que dans sa perspective historique. Puissance coloniale en Mauritanie et en Algérie, la France avait obtenu entière liberté d’action au Maroc par la convention du 8 avril 1904 signée avec la Grande-Bretagne ; le 3 octobre suivant, elle concluait une convention secrète avec Madrid reconnaissant les prétentions espagnoles sur le Rio-de-Oro et Seguiet-El-Hamra. Toutefois, ce n’est qu’en 1934-1935 que l’Espagne, de connivence avec Paris, qui s’inquiétait de la résistance des Berbères du Haut-Atlas, réussit à occuper la totalité du territoire, transformé en province par la loi du 19 avril 1961.

    En 1956, Si Allal El Fassi, leader de l’Istiqlal, qui avait précédemment élaboré une carte du « grand Maroc » s’étendant jusqu’au Sénégal et au Niger, proclame les droits de son pays sur la région occupée par l’Espagne. Le roi Mohammed V donne un caractère officiel à cette revendication le 25 février 1958 en affirmant, dans un discours prononcé à M’hamid, dans le Sud, sa volonté « de poursuivre son action pour la restitution du Sahara au Maroc ». Quelques dates vont alors jalonner le contentieux saharien (2).

    Le 1er avril 1958, Madrid signe l’accord de Cintra, qui restitue à Rabat la zone de Tekna, située entre le cap Juby et l’oued Draa. Mais, le 28 novembre de la même année, la République islamique de Mauritanie est proclamée au sein de la Communauté française, et, deux ans plus tard jour pour jour, elle accède à l’indépendance. Coup dur pour le gouvernement et les partis politiques marocains qui reprochent à la France d’avoir créé un Etat factice en amputant le Maroc d’un territoire qui a fait partie de l’empire chérifien et qui lui a donné certains de ses plus prestigieux monarques. En octobre 1963, un conflit oppose Rabat et Alger au sujet de Tindouf, et l’opposition marocaine ne s’est jamais consolée depuis de ce que la souveraineté algérienne se soit étendue à cette région. Le roi Hassan II finit cependant par admettre les réalités : le 15 janvier 1969, il signe avec le président Boumediène un traité de fraternité et de bon voisinage qui met officiellement fin au litige, puis il invite le président Ould Daddah au « sommet » islamique de septembre à Rabat, ce qui revient à reconnaître la Mauritanie, l’Algérie ayant joué un rôle non négligeable pour favoriser cette réconciliation.

    Entre-temps, le 6 juillet 1963, Hassan II avait eu avec le général Franco, sur l’aérodrome madrilène de Barajas, une entrevue qui détendit l’atmosphère et permit, après de longues et laborieuses négociations, la signature, le 4 janvier 1969, du traité de Fès, par lequel l’Espagne rétrocédait au Maroc l’enclave d’Ifni. Parallèlement, le Sahara occidental faisait régulièrement l’objet de résolutions à l’ONU, à l’O.U.A. et au sein du mouvement des non-alignés. Hassan II et M. Boumediène décident, lors d’une visite à Tlemcen le 27 mai 1970, de se concerter avec M. Ould Daddah. Les trois chefs d’Etat se rencontrent à Nouadhibou (14 septembre 1970) et à Agadir (24 juillet 1973), tandis que leurs ministres des affaires étrangères siègent à Alger (5 janvier 1972) et à Nouakchott (9 mai 1973). Dans toutes ces instances, le principe de l’autodétermination est proclamé ; la résolution 1514, intitulée Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et peuples coloniaux, et adoptée par l’ONU le 14 décembre 1960, sert de référence.

    D’une façon plus précise, en 1966, l’Assemblée générale de l’ONU « réaffirme le droit inaliénable des peuples d’Ifni et du Sahara espagnol à l’autodétermination conformément à la résolution 1514 ». Le 16 décembre 1969, elle « invite à nouveau la puissance administrante à arrêter le plus tôt possible, en conformité avec les aspirations de la population autochtone du Sahara dit espagnol, et en consultation avec les gouvernements marocain et mauritanien et toute autre partie intéressée (3), les modalités de l’organisation d’un référendum tenu sous les auspices de l’ONU afin de permettre à la population autochtone du territoire d’exercer librement son droit à l’autodétermination… »

    De même, le communiqué publié à Agadir déclare :« Les trois chefs d’Etat ont consacré une attention particulière à l’évolution de la question du Sahara encore sous domination espagnole. Ils ont réaffirmé leur attachement indéfectible au principe de l’autodétermination et leur souci de veiller à l’application de ce principe dans un cadre qui garantit aux habitants du Sahara l’expression libre et authentique de leur volonté conformément aux déclarations des Nations unies dans ce domaine. »

    La solidarité maghrébine à l’épreuve

    Les textes sont clairs et le règlement de l’affaire paraît relativement simple. D’où vient alors l’inquiétude brusquement éprouvée par les Marocains au printemps 1974 ? Les partis de l’opposition, principalement l’Istiqlal, l’U.S.F.P. (Union socialiste des forces populaires) et le P.P.S. (Parti du progrès et du socialisme) de M. Ali Yatta, qui ont mal accepté de « perdre » la Mauritanie et la région de Tindouf, craignent de voir le Sahara occidental leur échapper à son tour. En effet, des mouvements favorables à l’indépendance se manifestent, tandis que l’Espagne, qui a modifié sa tactique, donne l’impression de vouloir accélérer son départ. Elle entend organiser, avant la fin de l’année, un référendum qui aboutirait, selon Rabat, à mettre en place un régime fantoche manipulé par Madrid. L’opposition presse le roi d’agir. La récupération du « Sahara spolié » leur permet de se rapprocher en faisant « l’union sacrée » : le souverain dépêche ses ministres et les chefs de parti comme émissaires à travers le monde pour exposer la thèse marocaine. Ils font valoir que le Maroc a des droits historiques sur le territoire sahraoui et que, si la population est consultée, l’alternative proposée devrait être : maintien sous la « férule du colonialisme » espagnol ou retour à la mère patrie. Missions aux résultats mitigés, les capitales visitées ne souhaitant pas se brouiller avec un des protagonistes en prenant trop nettement parti.

    La Mauritanie, qui ne dispose pas des moyens de ses deux voisins, se montre discrète et cherche à maintenir la balance égale entre Alger et Rabat tout en préservant ses intérêts. Elle finit cependant par élever la voix pour rappeler qu’elle aussi a des droits. Mais, plus que sur la terre, elle met l’accent sur les hommes : « Nous ne pourrons, quant à nous, montrer des camps de réfugiés (4), pour la bonne raison que ce sont les mêmes populations qui, de tout temps, ont habité de part et d’autre de cette frontière artificielle », déclare le président Ould Daddah. L’Algérie, de son côté, se contente de réaffirmer son hostilité au « colonialisme espagnol et son « attachement au principe de l’autodétermination ».

    Au cours de l’été, la presse marocaine s’en prend vivement à l’Algérie ; elle l’accuse de faillir à la solidarité maghrébine et de jouer un double jeu qui en fait l’alliée objective de l’Espagne. Alger évite d’alimenter la polémique et se contente de rappeler ses positions de principe par le truchement d’un article paru dans la République d’Oran. En privé, de hauts fonctionnaires font remarquer que c’est le Maroc qui a modifié son attitude en renonçant à la concertation tripartite et en donnant une interprétation unilatérale au principe et aux modalités de l’autodétermination. En outre, dit-on, le processus de décolonisation a été accéléré à la suite de la participation de l’Algérie à la concertation tripartite de Nouadhibou.

    Le Maroc va-t-il envahir le Sahara, où l’Espagne a envoyé des renforts et maintient cinquante-six mille hommes ? La question se pose quand Hassan II révèle, au cours d’une conférence de presse tenue le 17 septembre 1974, qu’il va demander à la Cour internationale de La Haye de dire le droit. Sa démarche réduit la tension et entraîne l’ajournement du référendum annoncé par l’Espagne à qui le roi tend la perche : ayant à l’esprit les précédents de Cintra, de Barajas et de Fès, le souverain, qui semble avoir donné quelques gages à Nouakchott, suggère à Madrid de régler directement cette affaire avec lui à l’amiable. Il laisse entendre que des arrangements sont possibles pour les bases militaires espagnoles au Sahara et pour l’exploitation en commun des phosphates. Madrid fait la sourde oreille.

    Un diable sort de sa boîte

    La tension remonte au printemps 1975, en particulier lorsque la mission d’enquête de l’ONU, présidée par M. Siméon Ake, représentant de la Côte-d’Ivoire à l’ONU, se rend fin mai-début juin en Espagne, au Sahara, au Maroc, en Algérie et en Mauritanie. Il se produit un coup de théâtre qui fait craindre au Maroc d’être coiffé au poteau malgré les points marqués au cours des mois écoulés : le F. POLISARIO, dont on connaissait vaguement l’existence mais qui n’avait guère fait parler de lui, sort de sa boîte comme un diable. La mission d’enquête se trouve à El-Aïoun ; le P.U.N.S. (Parti de l’unité nationale sahraouie), seul mouvement légalement reconnu et qui a la bénédiction de Madrid, décide de manifester. Or, à la grande surprise des autorités locales, les militants déploient des drapeaux du F. POLISARIO et se révèlent être de ses partisans. Quelques jours plus tard, lorsque la mission se rend à Tindouf, le Front lui présente quinze militaires espagnols faits prisonniers et une partie du matériel capturé. Enfin, en Mauritanie, une nouvelle manifestation se produit en faveur du Front.

    « Nous sommes l’émanation authentique du peuple sahraoui, nous a dit un de ses dirigeants. Si on nous a ignorés jusqu’ici, c’est parce que, tant Espagnols que Marocains, on fait le silence autour de nous. De plus, nous étions davantage préoccupés d’organiser la lutte que de mener une campagne publicitaire. Il faut que l’on sache toutefois que notre mouvement ne date pas d’aujourd’hui. »

    Dès 1968, explique-t-il, le Front de libération du Sahara (F.L.S.) (5) entame son action qui débouche, le 17 juin 1970, sur une grande manifestation à El-Aïoun. A l’époque, le mouvement se contente de réclamer l’autonomie interne, de contester l’autorité des cheikhs « aux ordres de l’Espagne » et les interventions étrangères, d’où qu’elles viennent. Les autorités réagissent : il y a des morts et des blessés ; quelque cinq cents personnes sont arrêtées, dont le chef du mouvement, M. Mohamed Sid Ibrahim Bassiri. Ce dernier, après des études de journalisme au Caire et à Damas, avait gagné Rabat en 1967 et y avait fondé un journal, Al Chihab (le Flambeau), avant d’aller animer le F.L.S.

    La répression du 17 juin conduit le F.L.S. à revoir sa stratégie. Il se transforme en mouvement embryonnaire de libération et, au cours des années 1971-1972, amasse des armes tout en se livrant à un travail de réflexion qui aboutit à la tenue, le 10 mai 1973, du Congrès constitutif du F. POLISARIO. Ce dernier élabore une plate-forme politique fondée sur l’indépendance et décide de passer à la lutte armée pour atteindre ses objectifs. Dix jours plus tard, il déclenche sa première opération contre le poste militaire de Khanga. Les maquisards arrêtent des soldats sahraouis servant dans l’armée espagnole, leur exposent les buts de la « Révolution du 20 mai » – qui a donné son nom au journal du Front – et les renvoient pour en témoigner.

    Le Front, qui ne dispose pas de beaucoup de matériel, déploie un intense effort de mobilisation politique et tient son deuxième congrès du 25 au 31 août 1974, en plein désert, sous des tentes gardées par des guérilleros. Un bureau politique est constitué. L’état-major du mouvement, composé de six membres, est divisé en deux directions chargées respectivement des affaires politiques et des opérations militaires. Le secrétaire général, que nous avons rencontré à Tindouf, s’appelle Ouali Mustapha Siyed, dit Lulei. Agé de vingt-huit ans, il serait né en Mauritanie, appartiendrait à la fraction Tahalat de la tribu des Reguibat et aurait étudié le droit au Maroc avant de rejoindre la clandestinité. Les autres cadres se recrutent parmi une centaine d’étudiants sortis des universités espagnoles – dont une dizaine d’ingénieurs et de médecins, – les militants formés dans la lutte ou dans d’autres pays et les déserteurs de l’armée espagnole.

    Les slogans lancés à El-Aïoun, puis à Tindouf, puis en Mauritanie par les Sahraouis résument parfaitement les tendances du Front : « Le F. POLISARIO est le seul représentant légitime du peuple sahraoul », « Non au paternalisme marocain et mauritanien », « Nous voulons l’indépendance complète », « République arabe sahraouie », « Un régime national républicain et non aligné. » En politique étrangère, les mots d’ordre affirment le soutien du Front aux révolutions palestinienne et vietnamienne, réclament la levée du blocus de Cuba et proclament : « Le golfe Arabique est arabe ». Le drapeau – trois bandes horizontales noire, blanche, verte, un triangle rouge près de la hampe et un croissant et une étoile rouges sur la bande médiane – est également significatif. Les différentes couleurs, le croissant et l’étoile sont une combinaison des pavillons des pays progressistes du Proche-Orient et du Maghreb tandis que le triangle rouge évoque celui des Palestiniens, précise un responsable.

    Quant au Programme d’action nationale adopté par le deuxième Congrès, il se propose, entre autres, de « réaliser l’unité nationale authentique », de « nationaliser les ressources minières », de « suivre une politique d’industrialisation », de favoriser le développement de l’agriculture et de l’élevage, de « protéger les ressources maritimes et d’annuler toutes les formes d’exploitation ». Le mémorandum adressé au comité de décolonisation de l’ONU démontre que les tribus ont toujours eu leur organisation propre, qu’elles ne se sont pas confondues avec les populations marocaine et algérienne, qu’elles n’ont jamais fait acte d’allégeance au souverain du royaume chérifien – ce qui est absolument exact (6) – et qu’elles ont opposé, depuis le seizième siècle, une vigoureuse résistance aux envahisseurs européens – Portugais, Espagnols et autres.

    Un des dirigeants à qui nous faisions remarquer que les arguments juridiques marocains paraissaient au moins aussi solides, nous a répondu : « Les droits historiques sur la terre sont un droit féodal qui ne vaut que s’il est entériné par le consensus populaire. Sinon, on nierait le droit des peuples à évoluer et à s’autodéterminer. Pourquoi, dès lors, l’Angleterre ne revendiquerait-elle pas l’Amérique, les Arabes le sud de l’Espagne, etc. C’est le peuple qui donne son identité au sol, non le contraire. » Il rejette également l’argument selon lequel le territoire, faiblement peuplé, ne serait pas viable. « L’autodétermination est un principe proclamé par l’ONU. Il ne peut y avoir deux poids et deux mesures ; des Etats moins riches et ayant moins d’habitants – comme les îles Maldives – ont bien accédé à l’indépendance. »

    Rappelle-t-on l’existence du F.L.U. (Front de libération et de l’unité), les dirigeants du F. POLISARIO affirment qu’il s’agit d’une « troisième force » constituée « principalement de militaires marocains détachés » qui n’auraient réussi jusqu’ici aucune opération d’envergure. L’argument est accueilli avec colère par les Marocains qui rétorquent avec raison qu’une partie de l’armée du Sud est composée d’anciens réfugiés sahraouis. Le F. POLISARIO, ajoutent-ils, bénéficie de la complaisance des autorités espagnoles, ce que nient les responsables du Front en rappelant que leurs militants sont pourchassés et emprisonnés ; ils précisent aussi que le secrétaire général du P.U.N.S. s’est réfugié au Maroc après avoir emporté la caisse de l’organisation. Quant au Morehob (Mouvement révolutionnaire des hommes bleus), il accuse tout simplement son chef d’être un « flic » dont le nom, Eduardo Moha, n’a rien de sahraoui et n’a pas rallié grand nombre de partisans. Le fait est que le comportement d’Eduardo Moha n’est pas limpide : il affirmait, début 1973, à Alger, qu’il avait eu des ennuis avec les autorités marocaines parce qu’il défendait l’indépendance du Sahara ; il disparut au moment du « sommet » des non-alignés, en septembre, après avoir emporté du matériel et contracté des emprunts, jamais remboursés, auprès de mouvements de libération. On l’a vu, depuis, dans diverses capitales arabes et occidentales, notamment à Bruxelles, et il a récemment refait surface à Rabat où il défend la thèse marocaine, pour le moment…

    Que la mission de l’ONU ait considéré le F. POLISARIO comme « partie au débat » et que M. Kurt Waldheim ait rencontré ses chefs n’ont fait qu’accroître l’irritation des Marocains et nourrir leur suspicion à l’égard d’Alger qu’ils accusent de « vouloir faire la Grande Algérie plutôt que le Grand Maghreb ».

    Sortant de son mutisme, le président Boumediène a longuement répondu dans le discours prononcé à l’occasion du dixième anniversaire de son accession au pouvoir, le 19 juin. Les thèses algériennes peuvent se résumer ainsi : l’Algérie n’a pas modifié son attitude et s’en tient aux principes qui l’ont toujours guidée. Elle a précisé à maintes reprises qu’elle établit une distinction entre les presides de Ceuta et Melilla, « partie intégrante du territoire marocain », et le Sahara occidental au sujet duquel elle ne formule d’ailleurs aucune revendication. Cependant, ayant une frontière commune avec lui, elle est considérée par l’ONU comme « partie intéressée » et elle s’est prononcée pour l’autodétermination. Pour les Algériens, cela signifie que les Sahraouis ont plusieurs choix possibles : demander leur rattachement au Maroc ou à la Mauritanie ; accepter le partage de leur territoire entre les deux ; opter pour l’indépendance. S’ils avaient voulu semer la zizanie dans la région, les Algériens n’auraient pas déployé des efforts pour réconcilier Rabat et Nouakchott et inciter la Mauritanie à adhérer au Maghreb. Fidèle à la lutte menée par le F.L.N., l’Algérie a aidé tous les mouvements de libération authentiques : il n’y avait pas de raison qu’elle refuse de répondre aux demandes du F. POLISARIO. L’argument selon lequel elle voudrait obtenir un couloir territorial ne tient pas : elle avait proposé l’exploitation en commun des gisements de fer de Gara-Djebilet et il était question que le minerai soit évacué par rail – tout comme l’oléoduc qui traverse la Tunisie évacue du pétrole, – le chemin le plus court vers l’Atlantique passant par le Maroc et non par le Sahara occidental. Les Marocains n’ayant pas donné suite au projet, M. Boumediène a voulu couper court aux spéculations en décidant qu’une ligne de chemin de fer reliera Gara-Djebilet à la Méditerranée.

    Dans l’intervalle, on apprend qu’un accord secret a été conclu après le « sommet » arabe de Rabat (octobre 1974) entre le Maroc et la Mauritanie, aux termes duquel les deux pays se seraient entendus pour se partager le Sahara occidental et exploiter en commun les gisements de phosphate de Seguiet-El-Hamra, zone qui serait placée sous la souveraineté de Rabat. Le président Bourguiba révèle publiquement à Tunis qu’il a personnellement conseillé à Hassan II et à Ould Daddah de s’entendre directement. Il précise qu’il n’y a pas lieu, selon lui, de procéder à un référendum au Sahara, « ni de créer un Etat indépendant qui serait sous l’influence de l’Espagne ou d’un Etat maghrébin ». Le président Senghor, du Sénégal, a fait une déclaration qui va dans le même sens. L’un et l’autre semblent craindre qu’un Sahara indépendant ne contribue à accroître le poids déjà grand de l’Algérie dans la région.

    Dans le même temps, une partie de la classe politique mauritanienne se pose des questions sur le danger d’un partage du Sahara ; certains n’hésitent d’ailleurs pas à condamner cette formule, et d’autres l’auraient dit en privé aux membres de la mission d’enquête de l’ONU. Ils font remarquer que le Maroc a reconnu leur pays à contrecœur et parce qu’il ne pouvait pas faire autrement, le Sahara occidental servant de zone tampon. Le jour où les deux Etats auront une frontière commune, le Maroc ne cherchera-t-il pas à récupérer le Rio-de-Oro, voire la Mauritanie ? « Le partage, disent-ils, nous donne un avantage dans l’immédiat, mais nous risquons d’être perdants à moyen terme. »

    Pour leur part, les dirigeants algériens réagissent vivement à l’accord secret (7). Retournant l’argument de ceux qui craignent le poids de l’Algérie, ils se demandent si, en coulisse, les Etats-Unis ne tirent pas les ficelles pour affaiblir le Maghreb en attisant des dissensions, isoler le gouvernement Boumediène et renforcer des régimes moins radicaux.

    « On ne peut dissocier, disent-ils, les agissements autour du Sahara de la position militante adoptée par l’Algérie dans le domaine de l’énergie. On cherche à porter des coups aux options socialistes de notre pays et à son non-alignement actif et réel. »

    Quoi qu’il en soit, quelques jours plus tard M. Bouteflika, ministre algérien des affaires étrangères, est envoyé en mission à Rabat pour détendre l’atmosphère. Il y réussit si bien que les diplomates s’interrogent : l’Algérie a-t-elle modifié ses positions, a-t-elle consenti un recul stratégique ou tout simplement tactique ? Quelques faits apportent des éléments de réponse. Le 10 juillet, deux des militaires espagnols faits prisonniers par le F. POLISARIO ont été remis, sous l’égide du Croissant Rouge algérien, aux autorités de Madrid et les dirigeants du Front venus pour la circonstance à Alger nous ont laissé entendre qu’ils continuent à bénéficier du soutien de l’Algérie. D’autre part, l’ambassadeur d’Algérie, M. Bedjaoui, a développé devant la Cour internationale de La Haye l’argumentation de son pays dans toute sa rigueur.

    Les Canaries, enjeu stratégique

    Les Espagnols affirment, de leur côté, qu’ils souhaitent une concertation avec les trois pays. N’ayant pas réussi, ils ont suggéré à l’ONU de l’organiser. Mais Madrid estime aussi que le F. POLISARIO est majoritaire sur les deux tiers du territoire et qu’il peut constituer un interlocuteur valable. « Nous serions prêts à avoir des conversations avec ses dirigeants, à condition qu’ils s’identifient », nous a dit un diplomate. « En attendant, a-t-il ajouté, nous ferons tout pour parvenir à une solution pacifique. Toutefois, nos moyens étant limités, si nous devions recevoir des coups de tous les côtés, nous demanderions à l’ONU de prendre la relève et d’envoyer éventuellement des casques bleus pour assurer le maintien de l’ordre jusqu’au référendum préconisé par l’Assemblée générale. »

    Pour le moment, aucune des parties intéressées ne se hasarde au moindre pronostic, le nombre d’inconnues étant trop grand. Les milieux diplomatiques n’excluent cependant pas l’hypothèse d’une confrontation. De toute façon, le problème de la « décolonisation » des territoires administrés par l’Espagne rebondira à l’Assemblée générale de l’ONU en septembre.

    Madrid affirme que Ceuta et Melilla ne sont pas négociables et que l’archipel des Canaries ne lui donne pas plus de souci que la Corse à la France. La situation pourrait bien changer. Le comité de libération de l’O.U.A., qui s’est réuni à Rabat du 9 au 15 juin, a décidé d’apporter un soutien accru et fort important au M.P.A.I.A.C. Son secrétaire général, M. Antonio Cubillo, un avocat installé à Alger, a toujours souligné que le problème du Sahara occidental était lié à celui des Canaries et il a fini par convaincre. La décision tendant à autoriser le mouvement à ouvrir une agence régionale au Maroc devrait être soumise à la prochaine réunion du comité de libération, les chefs d’Etat africains ayant pris conscience de l’importance stratégique de l’archipel que les Etats-Unis sont en train de transformer en base militaire. A partir des îles, qui servirent toujours de point d’appui à la colonisation espagnole, il est non seulement possible de neutraliser une offensive marocaine contre Ceuta et Melilla, mais aussi d’exercer un contrôle sur l’ensemble du Maghreb et de l’Afrique occidentale et équatoriale, affirme le M.P.A.I.A.C. Il a été entendu. En plus du Sahara occidental, la question des Canaries est désormais posée par l’O.U.A. Affaire à suivre.

    Paul Balta

    Auteur de La Méditerranée réinventée, La Découverte, Fondation René Seydoux, Paris, 1992.

    (1) Le mémorandum adressée par l’organisation au comité de décolonisation de l’ONU écrit cependant : « La population est d’environ sept cent cinquante mille habitants, sans les exilés ». Il semble, sans que cela soit clairement précisé, que le F. POLISARIO avance ce chiffre en y incluant les populations de territoires restitués au Maroc par l’Espagne, notamment la région de Tarfaya et peut-être aussi celle d’Ifni.

    (2) En 1957, des unités de l’Armée de libération marocaine avaient franchi Seguiet-El-Hamra et traversé le Rio-de-Oro, menaçant la frontière mauritanienne et refoulant les Espagnols sur une mince bande côtière. A la suite de cette alerte, la France, après avoir redressé la situation par l’opération « Ecouvillon », accélérait la constitution de l’Etat mauritanien tandis que l’Espagne s’apprêtait à rendre à Rabat la zone de Tarfaya pour assurer sa tranquillité dans le reste du Sahara.

    (3) Il s’agit de l’Algérie.

    (4) Le Monde des 23 mai, 3 et 6 juin 1975.

    (5) La création du P.U.N.S. est nettement postérieure.

    (6) Les Algériens font remarquer que ces actes d’allégeance étaient d’ordre spirituel et non politique, comme cela arrivait à l’époque dans le monde musulman où la notion d’Etat moderne n’existait pas encore.

    (7) Le Monde du 1er juillet.

    Le Monde diplomatique, août 1975

    Tags : Sahara Occidental, Maroc, Algérie, Mauritanie, ONU, autodétermination,

  • Maroc : Les milliards dépensés n’ont pas empêché l’Algérie de devenir le leader régional

    Mohammed VI et ses acolytes traversent actuellement l’un de ses pires moments. Ils ont de quoi déprimer, l’Algérie a été publiquement, officiellement et en haute voie la première puissance régionale et leader au Sahel et en Afrique du Nord.

    Depuis des années, le Maroc se bat en vue d’arracher ce titre. Pour cela, il comptait sur le soutien de la France. C’est grâce à Paris que Rabat a réussi à organiser le 17 décembre 2015 une réunion entre les belligérants libyens qui a abouti à la signature de l’Accord de Skhirat.

    La communauté internationale a octroyé le statut de puissance régionale pour plusieurs raisons :

    – Le gouvernement algérien a gagné la bataille contre les terroristes qui sévissait en Algérie et réussi le processus de réconciliation nationale

    – L’armée algérienne a été consolidée et équipée avec les armes les plus sophistiquées. Ses performances ont été mis à l’épreuve lors de l’opération de Tiguentourine.

    – Sa politique pacifiste et sa stricte neutralité par rapport aux conflits internationaux.

    – Son prestige et respect à l’échelle régionale, continentale et internationale.

    Alors que le poids et l’influence d’Alger ne cessait d’augmenter, le Maroc, malgré le soutien de la France et les milliards dépensés en lobbying, n’a pas réussi l’ascension fulgurante de celle qui fut depuis toujours « La Mecque des révolutionnaires ».

    Obsédées par les richesses du Sahara Occidental, les autorités marocaines ont tout misé sur le contrôle de ce territoire au point de conditionner leur diplomatie et leur politique interne à cette obsession. Elles n’ont pas hésité à brandir la menace de baisser la garde contre les mouvements migratoires. Pire encore, plusieurs pays suspectent l’implication de l’État Marocain dans les attentats terroristes qui ont secoué l’Europe au moment où celle-ci révisait ses positions par rapport aux accords commerciaux signés suite à l’avis prononcé par la Cour Européenne de Justice que la question. Le timing de ces attentats est beaucoup trop embarrassant pour Rabat.

    En vue d’obtenir le soutien de l’Occidental dans son agression contre le peuple sahraoui, le Maroc n’a pas hésité, au nom de la Guerre contre le communisme, à prendre part dans toutes les campagnes militaires de la France et des Etats-Unis que ce soit contre les irakiens, les yéménites, la Catangais… Ils ont tout donné en espérant que leurs alliés leur aideront à raffermir leur contrôle définitif du territoire sahraoui. Ils ont même fait du pays la première destination du tourisme sexuel. En Vain !

    Le communisme n’existe plus. L’Algérie est le leader dans la lutte antiterroriste. Il reste l’élément principal généré aujourd’hui par la crise financière : l’échange commercial. Là aussi, le Maroc n’y peut rien étant donné le manque flagrant de ressources. L’économie marocaine est morte et n’a rien à offrir à un monde capitaliste qui cherche à remonter la pointe. L’empathie idéologique a laissé place au gain économique.

    La plus grosse erreur des marocains est d’avoir estimé qu’ils pouvaient toujours se présenter en serviteur d’un Occident dont le principal souci actuel est économique.

    Tags : Algérie, Maroc, lobbying, terrorisme, guerre froide, Sahara Occidental, Front Polisario,

  • Avec la CAN de futsal, la FIFA encourage l’occupation du Sahara Occidental

    Cette semaine a commencé la Coupe d’Afrique des nations de futsal qui se déroule jusqu’au 7 février 2020. Sponsorisée par Total, cette CAN de futsal est organisée par le Maroc, vainqueur de la dernière édition.

    Loin d’être seulement une rencontre sportive, cet événement est un vrai message politique de la part du Maroc. En effet, la compétition se tient à Laâyoune, au Sahara occidental occupé. Depuis 1975, le Maroc revendique le territoire sahraoui et en occupe illégalement la plus grande partie.

    L’organisation de la CAN de futsal dans cette ville vise donc à illustrer et normaliser l’occupation marocaine, Laâyoune étant de plus revendiquée comme étant la capitale de la République arabe sahraouie démocratique (RASD).

    Cette situation a été contestée par l’Afrique du Sud et l’Algérie. Bien que non qualifiée pour la phase finale de la compétition, l’Algérie a exprimé son fort désaccord avec le lieu de celle-ci. Le Comité olympique algérien a dénoncé dans un communiqué le choix de Laâyoune, ville « ayant un statut de zone occupée, et ce, en violation des statuts de la CAF, de la FIFA, des principes de la Charte et des idéaux olympiques ainsi que de la charte de l’Union africaine », visant à « la normalisation de l’occupation du Sahara Occidental et à mettre la communauté africaine et internationale devant le fait accompli ».

    L’Afrique du Sud a, elle, renoncé à participer à la CAN en la boycottant, afin de respecter la position de son gouvernement et les résolutions de l’Union africaine sur le Sahara occidental. La nation australe a été remplacée par Maurice, qui, après avoir joué un match de la compétition, s’en est également retirée le 30 janvier.

    La FIFA a fait le choix d’ignorer délibérément la situation politique entre le Maroc et les indépendantistes du Front Polisario, et de considérer Laâyoune comme faisant partie du Maroc, niant l’occupation illégale du Sahara Occidental. Si, comme le relève le journal algérien El Watan, le président de la FIFA, Gianni Infantino, a préféré ne pas se rendre dans la ville occupée par crainte du scandale, il a par la suite affirmé dans un tweet en arabe que « Le tournoi Futsal CAN-2020 se déroulera du 28 janvier 2020 au 7 février 2020 dans la ville marocaine de Laâyoune ».

    La moralisation de la FIFA est décidément loin d’être achevée.

    Sabrina Chatouani

    Source: L’Avant-garde, 1 fév 2020

    Tags : Sahara Occidental, CAN, Futsal, FIFA, Maroc, Algérie, sport,

  • Algérie : Pas à pas…

    » L’Algérie, puissance locale incontournable, est toute désignée pour jouer un rôle majeur et essentiel dans ce sens. Ce ne saurait être le cas, en revanche, de la Turquie et de l’Egypte, tous deux partie prenante dans ce conflit. Quant à l’Allemagne, son influence géostratégique dans cette partie de la planète est quasi nulle. Celle des USA l’est un peu plus, mais reste quand même très faible « .

    Par Mohamed Abdoun 

    Comme il fallait s’y attendre, et comme il fallait le craindre surtout, la conférence internationale de Berlin sur la Libye n’a pas débouché sur grand-chose. Si les hostilités se sont arrêtées, depuis l’intervention de la Russie, et suite à une possible mais discrète médiation algérienne, le conflit continue de couver, et menace de reprendre à tout moment. Khalifa Haftar, qui se trouve à l’origine du début de ces hostilités, a refusé de signer l’accord de cessez-le-feu, de même que celui qui lui avait été proposé à Berlin en marge de ces travaux.

    Un laborieux travail de reconstruction, de rapprochement, de médiation, reste donc à accomplir avant que les armes ne se taisent pour de bon, et que la Libye renoue avec la paix, la quiétude et le bien-être social qui en faisait la fierté jadis. En fait le quasi-échec de la conférence de Berlin est lié à plusieurs facteurs. Et, pour en saisir les contours, il faudrait peut-être remonter jusqu’au » printemps libyen « , durant lequel la France aux premières lignes, et l’OTAN à sa suite, avaient pris pour prétexte une résolution onusienne visant à protéger les populations civiles pour neutraliser l’armée régulière, et même aider à assassiner, et à faire taire définitivement Kadhafi.

    L’Occident, chemin faisant, n’avait pas hésité à s’allier avec les terroristes locaux du GICL, mené par Abdelhamid Belhadj, faisant sienne cette maxime qui dit que les ennemis de mes ennemis sont forcément mes amis. Mal lui en a pris, puisque la suite a donné lieu à un véritable chaos, qui a déteint sur toute la bande sahélo-saharienne, déclenché une ravageuse guerre civile au Mali, et étendu l’hydre terroriste jusqu’au coeur de la Tunisie.

    Pendant ce temps, les tribus locales se sont scindées en autant de » principautés « , menées par d’impitoyables chefs de guerre. L’Algérie, qui aurait pu jouer un rôle majeur pour empêcher cette irrémédiable descente aux enfers, n’avait pas été écoutée d’abord lorsqu’elle refusait que l’OTAN s’immisce dans les affaires souveraines de la Libye d’abord, et avait été occupée par des » préoccupations internes » au moment où la situation avait atteint son point de non-retour en Libye.

    A présent, et si la solution doit plus que jamais être interne et propre aux Libyens, seuls des acteurs proches de ces derniers, sensibles à leurs préoccupations, et désirant autant qu’eux la paix et la stabilité peuvent les aider à y parvenir. L’Algérie, puissance locale incontournable est toute désignée pour jouer un rôle majeur et essentiel dans ce sens. Ce ne saurait être le cas, en revanche, de la Turquie et de l’Egypte, tous deux partie prenante dans ce conflit.

    Quant à l’Allemagne, son influence géostratégique dans cette partie de la planète est quasi-nulle. Celle des USA l’est un peu plus, mais reste quand même très faible. En fait, et pour faire court, cette profusion d’acteurs, puisque même la Russie, et la France qui continue de tirer les ficelles au vu et au su de tous, y sont également impliqués, c’est cette profusion d’acteurs qui ne permet, et ne permettra jamais, de trouver la moindre solution viable. Les intérêts des uns et des autres sont par trop divergents. Le plus grave c’est qu’ils ne vont jamais dans le sens des Libyens, ni dans celui des habitants du Maghreb arabe, dont nous autres Algériens. Il faudra donc beaucoup de temps, de doigté et de patience pour réparer tout ce que l’OTAN et la France ont cassé dans cette région.

    M.A.

    La Tribune des Lecteurs, 21 jan 2020

    Tags : Algérie, Libye, Russie, France, Turquie, Tripoli, Haftar,

  • Libye : à Berlin, l’ONU appelle à éviter une guerre totale et une escalade régionale

    Lors de la conférence internationale sur la Libye organisée dimanche à Berlin, le chef de l’ONU a appelé les Etats et les organisations régionales « à passer de la parole aux actes » pour mettre un terme au conflit « toujours plus profond et destructeur » dans ce pays d’Afrique du Nord.

    Plusieurs chefs d’Etats et d’organisations internationales, dont le Secrétaire général de l’ONU, sont dans la capitale allemande pour une raison urgente : arrêter la spirale descendante de la Libye.

    Il y a un an, les Libyens – avec le soutien de la communauté internationale – prenaient des mesures pleines d’espoir pour faire avancer le pays vers une solution politique. Les parties libyennes s’étaient mises d’accord pour organiser des élections parlementaires et présidentielle avant la fin de l’année 2019.

    « Ces espoirs ont été anéantis en avril », a rappelé le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, en référence à l’offensive des forces de Khalifa Haftar contre celles du gouvernement d’accord national de Fayez al-Sarraj reconnu par les Nations Unies.

    Dans la capitale allemande, M. Guterres a, de nouveau, rappelé qu’il ne peut y avoir de solution militaire en Libye. « Il est maintenant temps de prendre des mesures immédiates et décisives pour empêcher une guerre civile totale », a-t-il dit, avertissant qu’un tel conflit pourrait conduire à une « division permanente » du pays et à un « cauchemar humanitaire ».

    Depuis avril, le conflit autour de la capitale Tripoli a tué et blessé des milliers, dont des centaines de civils. « Le droit international humanitaire a été défié à maintes reprises », a dénoncé M. Guterres. Plus de 170.000 personnes ont été contraintes de quitter leur domicile. Plus de 220 écoles de la capitale libyenne sont fermées, privant 116.000 enfants de leur droit fondamental à l’éducation.

    Les migrants et les réfugiés en territoire libyen sont piégés dans des centres de détention situés à proximité des combats qui ne les épargnent pas et « continuent de souffrir dans des conditions horribles », a souligné l’ancien Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.

    Un risque d’escalade régionale et des répercussions du conflit au Sahel
    La Libye a été entraînée dans « un conflit toujours plus profond et destructeur avec un nombre croissant d’acteurs externes également impliqués », a également déploré le chef de l’ONU à Berlin, alertant que la communauté internationale est « clairement confrontée à un risque d’escalade régionale ».

    Pour les voisins immédiats de la Libye – le sud de la Méditerranée et la région du Sahel en particulier – les conséquences sont frappantes et palpables avec « plus de terrorisme, plus de trafic d’êtres humains, plus de trafic de drogues, d’armes et de personnes », a rappelé M. Guterres.

    « Nous ne gagnons pas la lutte contre le terrorisme sur le continent africain », a déclaré le Secrétaire général. « Il suffit de regarder le Sahel et le lac Tchad », a-t-il ajouté, en référence aux attaques meurtrières qui ont frappé le Burkina Faso, le Mali et le Niger depuis le début de l’année. « Je suis fermement convaincu que nous ne réussirons pas sans la paix et la stabilité en Libye ».

    Faire cesser les violations de l’embargo sur les armes
    Alors que la Libye devient le théâtre d’affrontement entre plusieurs Etats interposés, les Nations Unies ont réitéré leur appel à tous ceux qui sont « directement ou indirectement impliqués dans le conflit » à tout faire pour soutenir une cessation effective des hostilités et faire taire les armes.

    « Les violations incessantes et flagrantes de l’embargo sur les armes imposé par le Conseil de sécurité doivent cesser », a martelé le Secrétaire général.

    Le Communiqué de Berlin sur la Libye réitère des principes qui sont fondamentaux pour la préservation de la paix et de la sécurité internationales, tels que la souveraineté et la non-ingérence et le respect du droit international, y compris les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Il comprend également un mécanisme de suivi concret pour maintenir l’élan et suivre les progrès.

    « Nous devons passer des mots à l’action », a souligné M. Guterres. « Notre crédibilité en tant que communauté de nations est mise à l’épreuve ».

    ONU Info, 19 jan 2020

    Tags : Libye, conférence de Berlin, Algérie, Russie, Turquie, ONU, Tripoli,

  • Conférence de Berlin, une paix à inventer

    L’Allemagne, le pays organisateur, et l’ONU, son initiatrice, auront pris tout leur temps pour que la conférence de Berlin sur la Libye, qui s’ouvre demain, à défaut d’être un complet succès, du moins ne soit pas un retentissant échec, comme l’a été pour l’essentiel celle de Palerme, en novembre 2018, à quoi par ailleurs elle ressemble par bien des aspects. Il n’en reste pas moins qu’il a fallu attendre la dernière ligne droite pour que l’on ait une idée plus précise des participants.

    L’Algérie et la Tunisie n’y auraient probablement pas été invitées si la conférence s’était tenue en octobre dernier, comme prévu initialement. Non plus d’ailleurs Fayaz el-Serraj et Khalifa Hafter qui ne l’ont été qu’à la veille de sa tenue.

    A la différence de la conférence de Palerme, qui avait rassemblé tous les pays ayant voix au chapitre dans le conflit libyen, qu’ils soient ou non militairement impliqués, mais également les deux camps libyens, celle de Berlin avait été conçue à l’origine pour réunir les grands pays d’une part, et de l’autre, les parties prenantes étrangères au conflit.

    A Palerme il s’était agi pour les participants de faire pression sur les factions libyennes pour les amener à s’engager dans un processus de paix sous l’égide de l’ONU. A Berlin, la pression ne devait s’exercer que sur les pays alliés extérieurs des deux camps libyens. C’était eux que l’émissaire onusien voulait prioritairement convaincre d’arrêter d’entretenir la crise libyenne.

    Dans cet esprit, il estimait n’avoir besoin de la présence ni des pays comme l’Algérie et la Tunisie, qui en effet ne s’étaient alignées sur aucun camp libyen, ni même de celle des Libyens, en raison de leur trop grande dépendance vis-à-vis de leurs soutiens extérieurs. Pourquoi associer à la recherche de la paix des pays qui après tout ne sont pas en guerre en Libye, ou des parties libyennes qui elles ne peuvent rien décider par elles-mêmes?

    S’il y a une paix à forger dans ces conditions, ce serait exclusivement entre leurs alliés extérieurs les plus engagés à leurs côtés. Celle qui concernerait directement les Libyens viendrait par surcroît. Si Turcs et Qataris d’un côté, Egyptiens et Emiratis de l’autre, pour ne prendre qu’eux, cessaient de s’affronter par Libyens interposés, le retour de la paix entre ces derniers serait facile, s’était dit, avec beaucoup de bon sens, Ghassan Salamé.

    Sans l’intervention de l’Allemagne, le pays organisateur, la conférence de Berlin était donc partie pour différer notablement, à la fois par son objectif et par le nombre réduit de ses participants, de celle de Palerme. Ce sont les Allemands qui ont invité les parties dont Ghassan Salamé avaient pensé qu’elles ne seraient d’aucune utilité, les unes parce que justement elles n’étaient pas en guerre, et les autres parce qu’au contraire elles ne faisaient que ça, à la fois pour elles-mêmes et pour le compte d’autrui.

    Un autre aspect mérite d’être relevé qui ne risquait pas de faire son apparition la veille de la conférence de Palerme. La Turquie a attendu la veille de la conférence de Berlin pour annoncer l’envoi de soldats en Libye.

    Une conférence internationale s’apprête à s’ouvrir, et le président turc, qui probablement y sera présent en personne, ne trouve rien de mieux à faire que de parler de dépêcher son armée, dans ce pays même qu’il s’agit de tirer des griffes de la guerre ! Or Recep Tayyip Erdogan ne s’est pas contenté de faire cette annonce, mais a promis par la même occasion de donner une leçon mémorable au général Haftar, dans le cas où celui-ci continuerait de menacer le gouvernement de Tripoli. On se croirait revenu au 16e siècle, au temps de la conquête ottomane de Tripoli.

    Le Jour d’Algérie, 18 jan 202

    Tags : Algérie, Libye, Tunisie, Haftar, Turquie, Russie, Allemagne,

  • Le haschich marocain, source de financement du terrorisme au Sahel (document européen)

    Le Sahel est situé au carrefour de deux grands itinéraires de trafic de stupéfiants destinés à être acheminés vers l’Europe. À la suite des conflits en Libye et au Mali, l’acheminement d’armes dans la région a augmenté spectaculairement. La région devient de plus en plus un itinéraire majeur pour les trafiquants de stupéfiants.

    Deux itinéraires principaux coexistent dans le Sahel. Le premier itinéraire permet d’acheminer la cocaïne depuis l’Amérique du Sud jusqu’en Europe en passant par l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, et le deuxième itinéraire permet d’acheminer jusqu’en Libye le cannabis marocain qui transite ensuite jusqu’en Europe via les Balkans ou vers l’Est jusqu’à la Péninsule arabique. Le rôle de l’Algérie dans ces activités n’est pas clair mais est certainement important. Comme la frontière est fermée entre le Maroc et l’Algérie, le cannabis transite par des territoires du Sahel (la Mauritanie et le Mali) jusqu’en Libye.

    Le Sahel est situé au carrefour de deux grands itinéraires de trafic de stupéfiants destinés à être acheminés vers l’Europe. À la suite des conflits en Libye et au Mali, l’acheminement d’armes dans la région a augmenté spectaculairement. La région devient de plus en plus un itinéraire majeur pour les trafiquants de stupéfiants.

    Deux itinéraires principaux coexistent dans le Sahel. Le premier itinéraire permet d’acheminer la cocaïne depuis l’Amérique du Sud jusqu’en Europe en passant par l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, et le deuxième itinéraire permet d’acheminer jusqu’en Libye le cannabis marocain qui transite ensuite jusqu’en Europe via les Balkans ou vers l’Est jusqu’à la Péninsule arabique. Le rôle de l’Algérie dans ces activités n’est pas clair mais est certainement important. Comme la frontière est fermée entre le Maroc et l’Algérie, le cannabis transite par des territoires du Sahel (la Mauritanie et le Mali) jusqu’en Libye.

    Source : L’Algérie: un potentiel sous-exploité pour la coopération en matière de sécurité dans la région du Sahel

    tags : Algérie, Sahel, Mali, touaregs, Libye, trafic, cocaïne, cannabis,

  • Dossier Libye… L’Algérie fait référence

    Magnifique métaphore que celle d’un historique des grandes batailles du 20ème siècle: au cœur d’un conflit mondial, il avait surpris ses pairs en affirmant que «la guerre est une chose trop grave pour être confiée à des militaires». Une phrase qui se prête exactement au bourbier libyen, si proche de nos frontières.

    A une encablure d’un cessez-le-feu acquis par le maréchal Khalifa Haftar et Fayez El Sarradj, le militaire fait volte-face et s’en retourne sur le front pour apparemment mieux peser sur la balance des négociations. Sur un conseil américain par exemple ? Ou tergiverser tactiquement pour augmenter la pression dans les loges des politiques que le maréchal n’affectionne sûrement pas ? Dans tous les cas, le chef de l’Armée Nationale Libyenne, a dérouté les présidents russe et turc qui croyaient avoir convaincu l’officier dominateur dans l’est du pays de feu Kadhafi.

    Mieux, selon les observateurs, Haftar s’est propulsé en position de force, parce que non seulement rien ne précursait qu’il allait émarger l’accord de cessez-le-feu, mais encore et surtout, il avait annoncé la poursuite des combats par ses «forces armées» contre les «terroristes qui, selon lui, «s’étaient emparés de la capitale Tripoli». Comment, les architectes du sommet de Moscou pouvaient croire en l’accord de Khalifa Haftar de cesser les combats alors qu’il avait précisé, depuis Moscou, «qu’ils ne cesseraient pas avant l’éradication des groupes terroristes».

    Bizarre ! Ou Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan se sont fait biaisés en toute dernière minute par Haftar, ou ils doivent en ce moment ronger leurs nerfs sur une erreur stratégique de débutants. Le puzzle est inextricable. Encore plus quand on rappellera que depuis 2014, le Gouvernement d’Union National présidé par Fayez El-Sarradj et reconnu par les institutions internationales, subit les attaques du maréchal Haftar et de ses troupes, soutenus par l’Egypte, les Emirats Arabes Unis et l’Arabie Saoudite. Et si, acculé quotidiennement par les soldats de l’Est, Fayez El-Sarradj, s’en est voué à la Turquie pour l’envoi d’experts militaires, de troupes et d’équipements techniques, on comprendra que cette crise est profondément nourrie par des intérêts stratégiques et économiques évidents, de grande ampleur.

    Le «gibier» libyen focalise l’attention des plus grandes puissances. L’Italie, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne, dénoncent le déploiement militaire turc en Libye et interpellent Ankara. L’autre va-en-guerre tous terrains, Donald Trump, exprime son soutien au maréchal Haftar: le jeu international se précise. Ankara et Moscou ont compris que leurs intérêts communs consistent à éclipser l’Occident du dossier «Libye».

    L’Egypte qui influe souvent l’Union africaine sur la question libyenne, tente d’orienter les membres du Conseil de Sécurité. Pire, Recep Tayyip Erdogan croit pouvoir impliquer la Tunisie dans le chaos libyen. Ailleurs, les Libyens aussi, jettent de l’huile sur le feu: «Si Tripoli tombe, Tunis et Alger tomberont» tonnait Fathi Bachagha, le ministre de l’Intérieur de Fayez El-Sarradj, le 27 décembre dernier.

    Heureusement, l’Algérie ne se confond pas avec les amateurs de la politique et des visions hallucinées de la guerre. Forte de sa doctrine diplomatique, nous avons été les premiers dans la région à encourager les deux belligérants de la crise libyenne à signer le cessez-le-feu. Nous n’adhèrerons à aucune promesse politique que lorsque les armes se soient tues», avait annoncé le gouvernement.

    Forte de son expérience dans ce registre sensible, l’Algérie ne s’est jamais écartée de sa démarche plaidant depuis l’éclatement de ce bourbier, pour un règlement politique et pacifique.

    Comme dans tous les scénarios de Klimov, ce cinéaste visionnaire, notre position politique envers la grave situation qui prévaut à nos frontières est admirable. Le pays de la grande Révolution fait référence dans ce type de conjonctures.

    Par Fayçal Haffaf

    Ouest Tribune, 15 jan 2020

    Tags : Algérie, Libye, diplomatie, guerre, conflit, violence,

  • L’Algérie et la Tunisie, les deux grands absents à la Conférence de Berlin?

    Libye/Conférence de Berlin : Liste des invités et des exclus (encadré)

    AA / Mustafa Dalaa

    Le gouvernement allemand a officiellement annoncé la liste des États et des organisations internationales invités à participer à la conférence de Berlin sur la crise libyenne, au niveau des chefs d’État et de gouvernement, qui comprenait quelques amendements à la liste originale du groupe 5 + 5, excluant certains pays voisins en plus du Qatar, et les deux parties au conflit libyen Et l’Union africaine.

    ** Les pays et organisations suivants sont invités à la Conférence de Berlin, selon une déclaration du Conseil du gouvernement allemand, rapportée par le site Web  » Deutsche Welle »:

    1- Le Groupe des cinq membres permanents du Conseil de sécurité: les États-Unis d’Amérique, dont la participation du président Donald Trump n’a pas encore été confirmée, la Russie et la France qui soutiennent le général à la retraite Khalifa Haftar, ainsi que le Royaume Uni et la Chine.

    2- Pays régionaux: Outre l’Allemagne en tant que pays organisateur, la Turquie, l’Italie, ainsi que l’Égypte et les Émirats soutiens de Haftar, participeront à la conférence.

    3- Algérie: elle n’avait pas été conviée à la conférence malgré ses longues frontières avec la Libye (environ un millier de kilomètres) en raison de la crise qu’elle a connue après la démission du président Abdelaziz Bouteflika, le 2 avril, après des manifestations de masse contre sa candidature à un cinquième mandat présidentiel. Après l’élection du président Abdel Majid Tebboune, en décembre dernier, et son affirmation selon laquelle l’Algérie « restera active dans la crise libyenne, qu’on le veuille ou non », son pays a été invité à la conférence de Berlin avec le soutien de la Turquie et de la Russie, de l’envoyé des Nations Unies, Ghassan Salamé, ainsi que du gouvernement libyen.

    4- Congo: Invité de dernière minute, l’Union africaine ayant mandaté son président, Dennis Sassou Angesso, il y a trois ans, pour présider un comité de haut niveau sur la crise libyenne. Brazzaville cherche à accueillir, le 25 janvier, une réunion africaine consacrée à la crise libyenne, et c’est dans cette perspective que le ministre congolais des Affaires étrangères a visité plusieurs pays d’Afrique du Nord, dont l’Algérie, l’Égypte et la Mauritanie.

    5- Les parties au conflit en Libye: Plusieurs critiques ont été adressées à la conférence de Berlin pour ne pas avoir invité les deux parties au conflit libyen, premiers concernés par la résolution de la crise, mais il a été annoncé au dernier moment que Fayez al-Sarraj, président du Conseil présidentiel du gouvernement libyen internationalement reconnu, et le seigneur de guerre, Khalifa Haftar, ont été invités à participer à la conférence de Berlin.

    6- Organisations internationales: avec à leur tête les Nations Unies et leur mission en Libye, l’Union Européenne, l’Union Africaine, ainsi que la Ligue Arabe.

    ** Pays absents de la conférence de Berlin:

    1- Tunisie: Bien que ce soit le pays voisin le plus touché par la guerre en Libye, d’autant plus que les deux pays partagent près de 500 km de frontières, la Tunisie n’a pas été invitée à participer à la conférence, malgré l’insistance de la Turquie sur sa présence, et l’entretien de la chancelière allemande, Angela Merkel, avec le président tunisien, Kaïs Saïed, au cours duquel la chancelière a invité le président tunisien à visiter son pays sans participer à la conférence de Berlin, ce qui a incité l’ambassadeur de Tunisie à Berlin, Ahmed Blade, à exprimer « le grand étonnement et la surprise » de son pays face à la décision de « l’exclure » de la conférence.

    2- Qatar: Considéré parmi les pays qui soutiennent le gouvernement libyen d’entente nationale, et malgré l’insistance de la Turquie sur sa présence pour faire l’équilibre face aux pays soutenant Haftar et participant à la conférence de Berlin, le Qatar n’a pas été convié. Le ministre qatari des Affaires étrangères, Mohammed bin Abdul Rahman Al Thani, a expliqué que l’exclusion de son pays à de la participation à la conférence de Berlin peut être due à des considérations propres au pays hôte ou aux Nations Unies.

    Anadolou, 16 jan 2020

    Tags : Libye, Allemagne, Conférence de Berlin, Algérie, Tunisie, Turquie, Russie, France, Haftar, Tripoli,