«Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde» (Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme)
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Oeuvre positive et impôt colonial : Le credo des races qui se prétendent supérieures
Encore une fois, l’actualité nous rattrape. Nous avons beau faire les civilisés en taisant nos douleurs ancestrales pour être politiquement corrects. Il n’empêche que ce vernis saute à la première réminiscence. Il s’agit cette fois d’un cri du cœur qui est celui du procès du colonialisme, encore et toujours. On apprend que 14 pays africains – les anciennes AOF et AEF fruit d’un imaginaire Empire français – ont été contraints par la France à payer l’impôt colonial pour les avantages de l’esclavage et de la colonisation. Nous voyons donc que la colonisation dans ce qu’elle a de positif comme oeuvre, n’est pas sortie de l’imaginaire délirant de quelques nostalgériques – nostalgiques de l’Algérie française- mais que la certitude d’appartenir à la race des seigneurs a un substrat plus profond.La double peine: massacres de masse et impôt colonial post-indépendanceIl est pour le moins admis que le colon en fait, qui est venu tuer, piller, voler s’est enrichi honteusement – il n’est que de se souvenir du hold-up de la Casbah d’Alger- magistralement décrit par Pierre Péan – on y apprend en effet, que 200 millions de francs or ont été dérobés par les généraux de l’Armée d’Afrique qui eurent à se disputer le butin avec leurs troupiers, mais pas seulement, il y eut aussi des agioteurs qui s’enrichirent à vil prix, l’Algérie était à vendre et on dit que la richesse de la maison Sellière serait due en partie à la rapine du trésor d’Alger. On apprend par la même qu’il soumet à la double peine les anciennes colonies en leur demandant de rembourser les constructions réalisées pour son propre confort et qu »il revend au prix fort après usage.Dans cet ordre, Mawuna Remarque Koutonin écrit: «Le saviez-vous? 14 pays africains contraints par la France à payer l’impôt colonial pour les ´´avantages´´ de l’esclavage et de la colonisation. Le saviez-vous? Aujourd’hui encore, beaucoup de pays africains continuent de payer un impôt colonial en France, et ce malgré l’indépendance! (…) Lorsque Sékou Touré de Guinée décida en 1958 de sortir de l’Empire colonial français, et opta alors pour l’indépendance du pays, l’élite coloniale française à Paris s’est indignée, et dans un acte de fureur historique, demanda à son administration alors en place en Guinée de détruire, dans tout le pays, ce qui représentait, à leur yeux, les avantages de la colonisation français.» (1)«Trois mille Français quittèrent le pays, en prenant tous leurs biens et détruisant tout ce qui ne pouvait être déplacé: les écoles, les crèches, les bâtiments de l’administration publique furent détruits, les voitures, les livres, les médicaments, les instruments de l’institut de recherche, les tracteurs ont été écrasés et sabotés et les nourritures entreposées furent brûlées ou empoisonnées». (1)L’auteur nous apprend que les dirigeants de pays nouvellement indépendants ne pouvaient sortir des griffes de l’ancien colonisateur. Ils durent mettre en place une sorte de néo-colonialisme à distance sans les anciens colonisateurs: «Pour les pays nouvellement indépendant il fallut trouver des compromis avec la France. Sylvanus Olympio, le premier président de la République du Togo, un petit pays d’Afrique de l’Ouest, trouva une solution susceptible de calmer les Français: ne voulant pas continuer à subir une domination française, il refusa de signer le pacte de la colonisation proposé par De Gaulle, mais accepta en contrepartie de payer une dette annuelle à la France pour les soi-disant avantages obtenus lors de la colonisation française. Ce furent les seules conditions de la France pour ne pas détruire le pays avant de partir. Toutefois, le montant estimé par la France était si grand que le remboursement de la soi-disant «dette coloniale» était proche de 40% du budget du pays en 1963. Dès lors, la situation financière du Togo tout juste indépendant fut très instable, et afin de se sortir de cette situation, Olympio décida de sortir du système monétaire mis en place par la France coloniale le Fcfa (franc des colonies françaises d’Afrique), et créa la monnaie du pays. Le 13 Janvier 1963, trois jours après, qu’il ait commencé à imprimer les nouveaux billets, une escouade de soldats (soutenus par la France) s’empara et tua le premier président élu de l’Afrique indépendante: Olympio fut exécuté par un ex-Légionnaire français, le sergent de l’armée, Etienne Gnassingbé qui, au passage, reçut à ce moment une prime de 612 dollars de l’ambassade française locale pour le succès de sa mission.» (1)«En fait, au cours des 50 dernières années, un total de 67 coups d’Etat qui se sont passés dans 26 pays en Afrique, 16 de ces pays sont des ex- colonies françaises, ce qui signifie que 61% des coups d’Etat en Afrique ont été initiés dans d’anciennes colonies françaises. En ce moment même où j’écris cet article, 14 pays africains sont obligés par la France, à travers le pacte colonial, de mettre 85% de leurs réserves à la Banque centrale de France sous le contrôle du ministère des Finances français. Jusqu’à maintenant, en 2014, le Togo et environ 13 autres pays africains doivent encore payer la dette coloniale en France.»Le pacte de colonisation que l’on ne peut pas refuserVoici, conclut l’auteur, le bréviaire des 11 principales composantes de la poursuite du pacte de colonisation depuis les années 1950: Les pays nouvellement «indépendants» doivent payer pour l’infrastructure construite par la France dans le pays pendant la colonisation. Les pays africains doivent déposer leurs réserves monétaires nationales en France à la Banque centrale. En bref, plus de 80% des réserves de change de ces pays africains sont déposées dans les «comptes d’opérations» contrôlés par le Trésor français. La finalité reste: les pays africains n’ont pas accès à cet argent. La France leur permet d’accéder à seulement 15% de leur argent par an. S’ils ont besoin de plus, les pays africains doivent emprunter, à des taux commerciaux, sur les 65% de leur argent détenu au Trésor français. L’ancien président français, Jacques Chirac, a récemment parlé de l’argent des pays africains dans les banques en France. ´´Nous devons être honnêtes et reconnaître qu’une grande partie de l’argent dans nos banques vient précisément de l’exploitation du continent africain.» A titre de comparaison historique, la France a fait payer à Haïti l’équivalent moderne de 21 milliards de dollars de 1804 à 1947 (près d’un siècle et demi) pour les pertes causées aux marchands d’esclaves français suite à l’abolition de l’esclavage et à la libération des esclaves haïtiens.»En rançonnant la première République noire de 180 millions de Francs or, ramenés par la suite à 90 millions (17 milliards d’euros!) La grande fortune de la France vient en droite ligne du commerce triangulaire, l’esclavage. Les villes comme Nantes ont un passé tristement colonial dans le commerce du bois d’ébène. C’est le commerce des humains qui a permis de lancer l’industrialisation, les chantiers navals, l’acier. Sans l’esclavage, la France ne serait qu’un pays parmi les autres plus qu’un pays parmi d’autres.Le discours de Dakar symptomatique de l’appartenance à une race supérieureRelisons ensemble le discours de Dakar de Sarkozy du 26 juillet 2007, pour comprendre cette suffisance post-coloniale représentée par la «Françafrique», la France à fric dirions-nous pour être en phase avec la réalité du calvaire africain. Le président français déclare notamment que la colonisation fut une faute tout en estimant que le «drame de l’Afrique» vient du fait que «l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire. […] Le problème de l’Afrique, c’est qu’elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l’enfance. […] Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès». (2)«Je ne suis pas venu, poursuit Nicolas Sarkozy, nier les fautes ni les crimes car il y a eu des fautes et il y a eu des crimes. Il y a eu la traite négrière, il y a eu l’esclavage, les hommes, les femmes, les enfants achetés et vendus comme des marchandises. Et ce crime ne fut pas seulement un crime contre les Africains, ce fut un crime contre l’homme, ce fut un crime contre l’humanité toute entière. (…) Le drame de l’Afrique, c’est que l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire. (…) Jamais l’homme ne s’élance vers l’avenir. Jamais il ne lui vient à l’idée de sortir de la répétition pour s’inventer un destin (… ) Le défi de l’Afrique, c’est d’entrer davantage dans l’histoire). (2)M. Sarkozy ne s’est jamais interrogé sur le fait que si les Africains, les Algériens, n’ont pas été brutalement envahis, pillés tués, perturbés dans leur identité, ils auraient peut-être rattrapé le train du progrès. La France a empêché par tous les moyens les Africains de rentrer dans l’Histoire.La révolte de 1871 en Algérie: meurtres, pillages, bagne et imposition de sanctionsUn autre exemple des méfaits de la colonisation est celui qui a eu lieu en Algérie, sans être exhaustif, nous rapportons le tragique de l’insurrection de 1871 du bachagha Mokrani:«La répression lit-on est très sévère et se traduit, une fois matée l’insurrection, par des internements de plus de 200 et en Nouvelle-Calédonie (on parle des «Algériens du Pacifique») mais aussi par d’importantes confiscations de terres, qui ensuite ont obligé de nombreux Kabyles à s’expatrier. La Kabylie se vit infliger une amende de 36 millions de francs or. Meurtrie, plongée dans le dénuement le plus total, la population vécut alors une véritable tragédie, dont la mémoire fut transmise de génération en génération par la littérature et la poésie orale.» (3)«Malheureusement, le bilan des pertes algériennes en vies humaines ne cesse de s’alourdir depuis la fin de l’insurrection, pratiquement en juillet 1871. Cela explique la politique de la terre brûlée menée par les autorités coloniales qui ont recours à la liquidation physique pratiquée de sang-froid dans les douars et mechtas. Les peines prononcées dans les différentes phases des procès sont lourdes dans la mesure où la plupart des accusés sont condamnés à mort et la peine est exécutée pour bon nombre d’entre eux. Les autres ont vu leur peine commuée en détention à vie avec déportation comme Cheikh Al Haddad et son fils Aziz eu égard à leur rang: ils sont médaillés de la Légion d’honneur. Boumezrag est capturé, jugé et condamné à mort, mais verra sa peine commuée en travaux forcés à perpétuité et sera déporté en Nouvelle-Calédonie. Boumezrag, Aziz et M’hand Al Haddad figurent parmi les quelque 500 Algériens déportés en Nouvelle-Calédonie. Ils sont embarqués le 10 mars 1873 à bord des vaisseaux Calvados et de La Loire du port de Brest, en Bretagne. Après cinq mois de navigation, ils arrivent à Nouméa, la capitale de la Nouvelle-Calédonie, le 17 septembre de la même année. Des dizaines d’entre eux sont morts au cours du voyage, faute de nourriture et de soins. Le régime des déportés est des plus durs. Leurs bourreaux excellent dans l’art de l’asservissement et l’humiliation.» (3)«A cette insurrection essentiellement politique dans ses causes et dans ses grandes lignes, il aurait fallu une répression politique appliquée par le gouvernement, une répression ne s’inspirant que de la raison d’État, des intérêts de la colonisation et des nécessités du milieu indigène. Cette répression, indiquée dès les débuts par plusieurs officiers des affaires indigènes, aurait pu être: 1° – La déportation à vie, en Océanie, des unités familiales les plus compromises dans chacune des tribus insurgées. 2° – La confiscation des biens de ces familles. 3° – Une contribution de guerre payable en terre ou en argent et garantie jusqu’à complète libération par le séquestre apposé sur les terres des tribus compromises.»(3)«Ce furent, lit-on dans la même contribution, les tribunaux qui eurent la tâche ingrate de déterminer les peines encourues par les individus. De sorte que les mêmes gens furent traités, à la fois et simultanément, comme des belligérants vaincus, comme des sujets algériens, et comme des Français. Comme belligérants vaincus, ils se virent imposer par le gouverneur général, sur les propositions des chefs militaires, une amende de guerre de 36,582,298 francs, chiffre calculé d’après le nombre de fusils, le nombre de feux ou le quantum des impôts, et arbitrairement fixé en raison de la résistance faite à nos troupes ou même à nos agents administratifs: car, chose singulière et que personne ne releva. Cette contribution de guerre fut infligée à des tribus sahariennes et à des gens de l’Aorès et du Souf qui n’avaient jamais tiré un coup de fusil contre nous, mais qui étaient restés en état d’insoumission, quand personne n’était là pour les commander. Comme indigènes algériens, les insurgés furent frappés administrativement en vertu de la législation spéciale sur le séquestre, et ils durent payer, en terre ou en argent, une somme uniformément fixée à la valeur du cinquième de leur capital immobilier. Les individus les plus compromis, virent la totalité de leurs biens mobiliers et immobiliers confisqués, De ce chef, les insurgés payèrent environ 26,629,953 francs, qui furent représentés par des payements en argent jusqu’à concurrence de 7,933,860 francs, et par l’abandon de 446,406 hectares estimés a 18,696,093 francs.» (3)Au total, 100.000 Algériens morts, saisie des terres, émigration de beaucoup d’Algériens (surtout vers la Syrie), déportation d’une partie des révoltés, et parution de l’infâme code de l’indigénat en 1881, mais ceci est une autre histoireOn ne peut parler justement des déportés sans citer quelques paroles douloureuses de la chanson interprétée magistralement par Akli Yahyaten – que Dieu lui prête longue vie – pour avoir su nous faire vibrer:«Aw ki dawni le tribunal jadarmiya kbaar wisghaar aa wissensla tewzen qantar darbouni aam wa n´haar 3ala dakhla haffouli raas wa aataouni zawra ou payas goulou lommi matebkeesh yal menfi waldek rabbi mayy khalleesh.»« Quand ils m’ont trainé au tribunal, les gendarmes en nombre, avec une chaine pesant un quintal, ils m’ont condamné à un an et un jour de déportation. A l’entrée, ils m’ont rasé la tête et m’ont donné une couverture et une paillasse. Dites à ma mère de ne pas pleurer, ton fils déporté ne sera pas abandonné par Dieu »Cette supplique revendique deux repères: la religion et la mère. Cette mère, dernier lien ombilical qui lui reste et qu´il doit tenter de rassurer. Cette mère est en fait, notre mère, cette Algérie souffrante de voir ses meilleurs fils lui être arrachés pour l´inconnu et sans espoir de retour. Nous sommes assurément des nains juchés sur les épaules de ces géants qui ont commencé le combat libérateur- il faut s´en convaincre – dès l´arrivée de l´envahisseur. (4)L´un des dossiers les plus pertinents que l´Algérie se doit de s´approprier est celui de la mémoire. Sans vouloir verser dans la concurrence victimaire, en Algérie nous avons trop tendance à pardonner par incompétence par crainte d´être mal vu, par paresse et surtout par méconnaissance de cette mémoire en miettes suite à un tsunami qui a eu lieu un certain jour de débarquement, le 14 juin 1830, sur une plage de Sidi Fredj. J´ai souvenance d´avoir vu, il y a quelques années, une délégation de petits descendants-Laïfa et les autres- des déportés de 1871. Ils étaient venus de Nouvelle-Calédonie à près de 20.000 km se ressourcer dans cette Algérie mythique que leur ont chantée leurs parents, de père en fils. J´avais naïvement demandé à ce qu´on mette en place une bibliothèque virtuelle pour consolider un lien de plus en plus ténu depuis près de 140 ans. Je ne suis pas sûr d´avoir été entendu.» (4)En définitive La déportation coloniale plonge ses racines dans le XV siècle avec la traite des Noirs et l’esclavage. La France qui a proclamé en 2001, crime contre l’humanité l’esclavage et la traite négrière (loi Taubira) s’est rendu coupable d’une justice à deux vitesses . Elle a commis un crime contre l’humanité à l’endroit des déportés algériens et de tous les autres déportés ? Mieux Ce crime est encore plus odieux puisque la loi d’amnistie de de 1880 exclut du champ d’application les déportés algériens en Nouvelle Calédonie . C’est aussi cela l’œuvre positive de la France en AlgérieEn définitive, le cri de Césaire retentit encore: il rappelle le caractère proprement inhumain de la colonisation à ceux qui sont aujourd’hui tentés d’en comptabiliser les «aspects positifs.»1.Mawuna Remarque Koutonin http:// www.siliconafrica.com/france-colonial-tax/http://www.mondialisation.ca/le-saviez-vous-14-pays-africains-contrain…2.http://fr.wikipedia.org/wiki/Discours_de_DakarProfesseur Chems Eddine ChitourEcole Polytechnique enp-edu.dzTags : Algérie, France, colonisation, impôt colonial, -
Guerre d’Algérie et crimes d’État : l’exigence de la reconnaissance
C’était le 19 mars 2016. Pour la première fois un président de la République a commémoré le cessez-le-feu consécutif aux accords d’Evian signés le 18 mars 1962 entre le gouvernement français et le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Après plus de sept ans de guerre, le conflit s’achevait enfin. De même la colonisation française imposée depuis cent trente-deux ans aux populations de ce territoire conquis par la terreur, les massacres de civils, les razzias et les nombreuses destructions de villages et d’oasis commis par les militaires.Un bilan terrible, toujours incompletTelles étaient, dans les années 1840, les pratiques des colonnes infernales de l’armée d’Afrique conduite par le général Bugeaud et ses officiers de sinistres mémoires : Lamoricière, Pélissier et Saint-Arnaud, notamment. Ainsi « pacifiés », comme on l’écrivait déjà, les « indigènes » furent ensuite soumis au « talon de fer » des autorités françaises, des lois d’exception – l’internement administratif et la responsabilité collective – et du code de l’indigénat. Les « Arabes », des citoyens français ? Non, « sujets français » assujettis à des dispositions répressives discriminatoires, expression du racisme de l’État colonial, et privés, qui plus est, des droits et libertés démocratiques élémentaires jusqu’en 1945.Quant à la dernière guerre d’Algérie, elle laisse derrière elle des centaines de milliers de victimes algériennes et plus de deux millions de civils, hommes, femmes et enfants, déportés dans des camps de « regroupement » organisés et contrôlés par l’armée. Si ajoute « l’exode vers les villes » soit un total d’au moins « trois millions » de personnes qui se trouvent « hors de leur résidence habituelle ». « La moitié de la population rurale » de l’époque, estiment Pierre Bourdieu et Abdelmalek Sayad qui ajoutent : « ce déplacement […] est parmi les plus brutaux qu’ait connus l’histoire ».Bilan terrible, assurément, mais toujours incomplet. On ne saurait oublier les milliers d’exécutions sommaires, les tortures infligées aux combattants du FLN ou supposés tels, en Algérie comme dans la capitale, ainsi que l’a montré Paulette Péju dans son ouvrage Les Harkis à Paris, et les disparus, tous victimes du terrorisme d’État. Plus de 3 000 pour la seule bataille d’Alger, selon le préfet de police de l’époque, Paul Teitgen, qui démissionna le 17 septembre 1957 pour protester contre ces pratiques. Celles-là mêmes que favorisait la loi sur les pouvoirs spéciaux votée 12 mars 1956 par les députés socialistes et communistes, notamment, et co-signée par le ministre d’État, garde des sceaux, chargé de la Justice, François Mitterrand.La France et son passé colonial en Algérie. Quel état des lieux ?Cinquante-quatre ans après la fin de cette guerre longtemps sans nom, sans autre nom du moins que celui « d’événements », comme l’ont dit pendant des décennies de bonnes âmes politiques soucieuses de défendre ce qu’elles prétendaient être « le prestige » et « l’honneur » de la France, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre perpétrés alors doivent être enfin reconnus par le chef de l’État. Aujourd’hui cette histoire est écrite et grâce aux travaux multiples de celles et ceux qui ont étudié la colonisation de l’Algérie, les méthodes employées pour faire de ce territoire une colonie de peuplement, et les agissements de l’armée française à la suite du déclenchement de l’insurrection le 1er novembre 1954.Une histoire écrite qui doit être reconnueAlors que les lois d’amnistie empêchent le jugement des coupables, qui sont toujours moins nombreux en raison du temps écoulé, cette reconnaissance est la seule façon de rendre justice aux victimes algériennes du conflit et à leurs descendants dont beaucoup sont citoyen-ne-s français. Responsable et coupable, l’État leur doit cette réparation symbolique liée à une histoire singulière qui, souvent, a douloureusement et durablement affecté le « roman » familial de ces femmes et de ces hommes. Plus encore, faire droit à cette reconnaissance, exigée depuis longtemps par de nombreuses associations et quelques organisations politiques, c’est mettre un terme à une discrimination mémorielle et commémorielle qui n’a que trop duré, et qui s’ajoute à toutes celles que les mêmes subissent encore dans leur vie personnelle et professionnelle.En ce domaine, et contrairement à une mythologie nationale-républicaine entretenue par de nombreux dirigeants politiques, de droite comme de gauche, la France se distingue par une rare persévérance dans le déni de son très lourd passé colonial. Qu’on en juge. En 2002, le premier ministre de Nouvelle-Zélande, Helen Clark reconnaît les exactions commises contre le peuple de Samoa entre 1914 et 1962. En 2006, les autorités canadiennes font de même à l’endroit des Amérindiens et accordent 2 millions de dollars aux enfants de ces populations arrachés à leur famille. En 2008, le premier ministre australien rappelle le sort terrible réservé aux peuples aborigènes. En juin 2013, William Hague, ministre des Affaires étrangères de la Grande-Bretagne, déclare :Le gouvernement britannique regrette sincèrement que ces abus aient eu lieu et aient entaché la progression du Kenya vers l’indépendance. La torture et les mauvais traitements sont des atteintes odieuses à la dignité de l’homme que nous condamnons sans réserve.De plus, 5 228 victimes obtiennent 23,5 millions d’euros au titre des réparations et les autorités britanniques s’engagent à soutenir la construction d’un mémorial à Nairobi.Ce bref détour par plusieurs pays étrangers permet de prendre la juste mesure de la situation française caractérisée, au mieux, par la pusillanimité de quelques déclarations, au pire, par la réitération de discours apologétiques de la colonisation. Jusqu’à quand Monsieur le Président ? La réponse vous appartient……mais il est plus que probable que c’est trop tard en ce qui vous concerne… et il est plus que certain qu’il ne faut rien espérer d’un futur président de la République en provenance de la droite et encore moins de l’extrême-droite… La France refusant de reconnaître ses crimes d’Etat du temps de son Empire devrait en rester ainsi encore longtemps et peut-être définitivement… nous n’aurons jamais connu « le changement c’est maintenant ».Tags : France, Algérie, crimes de guerre, Guerre d’Algérie, colonisation, -
Crimes coloniaux : La France a tué 12 millions d’algériens
COLONISATION DE L’algérie Par la france
Crimes contre l’humanité et génocides : Pas 5, mais 12 millions de victimes !
La polémique née après la rencontre Erdogan – Tebboune et qui a frisé l’incident diplomatique à propos du nombre de victimes de la colonisation pose un réel problème de mémoire puisqu’à ce jour il n’existe pas d’étude précise sur le nombre de morts durant les 132 ans de colonisation française. Selon M. Tebboune «la France a massacré plus de 5 millions d’Algériens en 130 ans». (Daily Sabah du 29 janvier 2020).
Un nombre d’habitants volontairement réduit pour cacher l’horreur
Par sentiment de culpabilité, les auteurs français affirment unanimement que la population algérienne ne dépassait pas 3 millions en 1830. Cette affirmation ne repose sur aucun critère objectif sinon à crédibiliser les recensements de populations effectués dans la 2ème moitié du XIXème siècle. Les auteurs algériens sont en droit alors de s’interroger : comment un peuple si peu nombreux et dispersé sur un immense territoire a-t-il pu résister, trois siècles durant, à plus de 80 agressions venant de l’étranger ? La disparition des archives de la Casbah, relatives notamment aux impôts, aux agglomérations et aux Mahalla (zones rurales et tribus), a-t-elle vraiment été une fatalité ? Hamdan Khodja, très au fait du sujet, parlait de 10 millions d’habitants dans son livre «Le Miroir» paru à Paris en 1833. Le Bey de Constantine estimait en 1831 à cinq millions le nombre de la population de sa province. Le général Desmichels qui gouvernait Oran, estimait en 1834 la population de cette région à 2 millions d’habitants. Le général Bugeaud, gouverneur militaire, estimait la population à 8 millions en 1840 avant de parler de 4 millions en 1845 ! Quel que soit le chiffre avancé, on constate qu’il a diminué lors du 1er recensement de 1856 qui donnait une population globale de 2,3 millions d’habitants. En 1876, soit 20 ans plus tard, cette population n’avait augmenté que de 6% (la population algérienne a été multipliée par 2 entre 1962 et 1978) ? Où est donc passé le «manque à gagner» ?
Crimes contre l’humanité et génocides
Les exactions coloniales de différents degrés comprenant des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et des génocides, bien que l’agression soit elle-même un crime, ont été pour beaucoup dans la disparition de pans entiers de la population algérienne.
Bugeaud a écrit les pages les plus sanglantes de la colonisation. Il a fait régner le régime du sabre. C’est le responsable des enfumades, le père des hordes infernales, des razzias, de la terre brûlée… Son culte du détail et de la minutie d’exécution de tant de crimes fait de lui le père des génocidaires de l’armée coloniale. Les six colonnes infernales, qui comprenaient 83.000 hommes en 1842, 90.000 en 1844 et 108.000 en 1846, étaient chargées «d’empêcher (les Arabes) de semer, de récolter, de pâturer…», en un mot, de faire une politique de la terre brûlée. Le général Bugeaud a d’ailleurs expliqué lui-même pourquoi une force aussi considérable était nécessaire dans ce pays, alors que l’Italie par exemple avait pu être conquise avec une armée de 30.000 hommes… «Ce n’est que par leur multiplication [razzias] et en prenant les tribus les unes après les autres, que nous sommes parvenus à vaincre les Arabes». (Vignon L., La France en Algérie, Hachette Ed, Paris, 1893, p. 21). Bugeaud a défini lui-même son action : «C’est la guerre continue jusqu’à l’extermination». La politique des razzias incitait les militaires au viol, au pillage, au meurtre, à la destruction…
Aux razzias ont succédé des crimes aussi abjects : massacre de la Zaâtcha, le 26 novembre 1849 commis par plus de 8.000 soldats français. Tous les hommes du village âgés de plus de 15 ans ont été pendus publiquement dans les décombres «pour l’exemple». (Garrot, Histoire générale de l’Algérie, impr. P. Crescenzo, 1910, pp. 885-886). Un journaliste français Baudicour qui a assisté à la prise de la Zaâtcha rapportera : «Les zouaves, dans l’enivrement de leur victoire, se précipitaient avec fureur sur les malheureuses créatures qui n’avaient pu fuir. Ici, un soldat amputait, en plaisantant, le sein d’une pauvre femme qui demandait comme grâce d’être achevée et expirait quelques instants après dans les souffrances ; là, un autre soldat prenait par les jambes un petit enfant et lui brisait la cervelle contre la muraille ; ailleurs c’était d’autres scènes qu’un être dégradé peut seul comprendre et qu’une bouche honnête ne peut raconter» (Dresch J., Ch-A. Julien, La question algérienne, les Editions de Minuit, Paris, 1958). Le massacre de Laghouat, le 2 décembre 1852, a vu pour la première fois dans l’histoire l’utilisation de gaz de combat contre les populations civiles. Le colonel Pein rapporte dans ses «Mémoires» : «Le carnage fut affreux ; les habitations, les tentes des étrangers dressées sur les places, les rues, les cours furent jonchées de cadavres. Une statistique faite à tête reposée et d’après les meilleurs renseignements, après la prise, constate le chiffre de 2.300 hommes, femmes ou enfants tués…» La pacification de la Kabylie en 1857 : «On avait tué femmes, enfants, vieillards». (cf. L. de Baudicour (1815-1853), La guerre et le gouvernement de l’Algérie, Paris, Sagnier et Bray, 1853, p. 371 ; Sur l’expédition en Kabylie). La répression d’El Mokrani de 1871, «La répression fut terrible, écrit Théodore Rinn, et, pour beaucoup, hors des proportions avec la culpabilité…» Le massacre d’El Amri en 1876 qui a subi le même sort que la Zaâtcha et Laghouat.
La répression des Aurès de 1879, la répression de l’insurrection de Bouamama dans le Sud oranais (1881-1883), la répression de l’insurrection d’Aïn Turki (actuelle Arioua, ex-Margueritte) en 1901, la répression des Béni Chougrane et Mascara (septembre-octobre 1914)…
L’histoire coloniale en Algérie est encombrée d’évènements tragiques. Si «la liste des excès, des humiliations, et même des crimes de guerre, est très longue», peut-on parler de génocide ? Certains historiens français pour ne citer que certains considérés comme anticolonialistes, tel le regretté Claude Liauzi ou Gilbert Meynier en 2005, le rejettent et accusent même ceux qui en parlent de «désinformation victimisante» ! Pourtant, le mot «extermination» a été utilisé de nombreuses fois par les suppôts du colonialisme. Ce mot était très explicite comme le montre le «Littré» de 1872, «exterminer» peut être considéré comme synonyme, de «chasser entièrement, faire périr entièrement», c’est-à-dire commettre un génocide. Il était pratiqué couramment au XIXème siècle : «L’idée d’extermination eut longtemps cours en Afrique [du Nord]» (Hippolyte Castille, Le général de Lamoricière, Sartorius F. E.d, Paris 1858, p. 13) C. de Feuillide dira à ce propos : «Quand nous occupâmes le Sahel, il fallut raser le sol et exterminer les races ; sans quoi, disaient ces hommes, on ne pourrait ni s’établir ni cultiver. On rasa, on extermina. (C. de Feuillide, L’Algérie française, p. 65, Plon Ed, Paris 1856).
Il existe de nombreux exemples de génocides : le massacre de Blida de novembre 1830 ordonné par Clauzel, commandant en chef de l’armée d’Afrique : «J’ai ordonné aux bataillons de détruire et de brûler tout ce qui se trouve sur leur passage». L’extermination de la tribu d’El Aouffia à Maison Carrée le 6 avril 1832 qui a fait 12.000 victimes. Les «enfumades» et les «emmurades» de la Dahra qui sont des «chambres à gaz» de fortune et dont seulement quatre épisodes sont connus car des directives ont été données aux militaires de taire leurs crimes. Bugeaud a donné à ses officiers l’ordre d’être «impitoyables». Il a précisé dans une note écrite datée du 11 juin 1845, à propos des habitants de la Dahra qui ont l’habitude, en cas de danger, de se réfugier dans des grottes : «Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac : fumez-les à outrance comme des renards» (Maspero F., L’honneur de Saint-Arnaud, p. 205, Casbah Ed., Alger, 2004). Des tribus entières ont disparu à jamais comme les Ouled Riah et les Sbéahs. Cynique, Tocqueville, l’un des théoriciens de la colonisation écrira quelque temps plus tard : «J’ai pu sans péril traverser avec vingt-cinq personnes le Dahra dont nous avons décimé la population, il y a six mois» (Lettre du 1er décembre 1846 adressée à Corcelles, in Oeuvres complètes, op.cit. t. XV, 1, p. 224, cité par le Cour Grandmaison). Des variantes aux enfumades vont se répéter au cours du XXème siècle avec les asphyxiés de Zéralda (1942), les fours à chaux de Guelma, Héliopolis et Belkheir en 1945, l’enfumade du douar Terchioui (1957), les caves ont souvent été utilisées comme dernière sépulture de nombreux militants et civils durant la Guerre de libération (1954-1962).
Les crimes contre l’humanité ne se sont pas manifestés uniquement par des tueries, des assassinats ou des exécutions sommaires, ils concernent également les lois iniques mises en place comme le Code de l’Indigénat qui a réduit la population autochtone à l’esclavage, l’internement des populations qui a été mis en place dès 1834, les punitions collectives qui ont commencé par le massacre des Aouffias en 1932, les amendes collectives, généralisées par Bugeaud en 1844, le séquestre des biens immobiliers, des terres et même des mosquées qui a commencé avec la confiscation des biens publics dits Beylik en 1833, le cantonnement des populations, leur regroupement au cours de la grande famine, la déportation des Algériens vers Calvi en Corse, puis dans le sud de la France, à Sète (1846) et dans les Iles Sainte Marguerite (1843), puis en NouvelleCalédonie (à partir de 1853) et en Guyane (1888), leur nombre total avoisine les 50.000 personnes dont des femmes et des enfants, la grande majorité est morte lors du transfert ou sur place…
Suite à leur conscription obligatoire, de jeunes Algériens se sont trouvés mêlés à différentes guerres menées par la France : guerre de Crimée (1853-56), guerre contre l’empire austro-hongrois en Italie (1859), guerre du Mexique (1861 à 1867), guerre franco-allemande de 1870, grande guerre (1914-1918) Seconde Guerre mondiale (1939-1945) et guerre d’Indochine (1946-1954). Les pertes ont été particulièrement lourdes lorsqu’on sait que les Algériens ont été utilisés comme chair à canon, elles sont estimées à plus de 100.000 morts et un nombre plus important de blessés et de handicapés à vie.
La colonisation de l’Algérie a été une période de non-droit avec des prisons surpeuplées, des camps d’internement appelés pudiquement d’hébergement gérés par les préfectures, des camps militaires clandestins, des laboratoires de torture… dont le nombre global dépassait les 400 et qui enfermaient plus de 150.000 personnes. Les rafles, les exécutions sommaires, les viols, la torture, les condamnations à mort avec des décapitions en chaîne, les attentats ciblés menés par la «main rouge», les mutilations, les cadavres exposés en public, les profanations de lieux de culte et de mausolées, la destruction de cimetières, l’exportation d’ossements humains…
Les crimes commis contre les populations civiles lors des évènements de Mai 1945 avec 45.000 morts ; les évènements du 20 Août 1955 avec 12.000 morts, les manifestations du 17 Octobre à Paris avec des centaines de morts.
Les essais nucléaires français en Algérie avec 4 explosions atmosphériques et 13 souterraines en plus des 57 essais plus réduits ont exposé directement plus de 2 millions d’Algériens à des radiations ionisantes. Les descendants de ces derniers vont continuer à payer indéfiniment un lourd tribut en maladies génétiques en cancers et en malformations. Les méfaits des expérimentations chimiques et balistiques de Hammaguir sont peu connus bien que celles-ci aient été menées jusqu’en 1986. La guerre de libération nationale a exacerbé l’agressivité du colonialisme et s’est terminée par un véritable holocauste commis par l’OAS. L’Algérie parle de 1,5 million de morts et la France reconnaît seulement 200.000 !
Victimes des épidémies, des famines et des camps de regroupement
L’occupation française de l’Algérie a aggravé durant le XIXème siècle la situation sanitaire et épidémiologique des populations algériennes. Les redoutables épidémies de peste des XVIIème et XVIIIème siècles ont été remplacées par la violence meurtrière du choléra, du typhus, de la syphilis, de la tuberculose, des famines… Il est aujourd’hui établi que de nombreuses infections ont été importées et propagées par l’armée française et les colons, certaines ont été réactivées et rendues très virulentes par une importation massive de réservoirs humains. Ainsi, les épidémies de choléra ont, en effet, été importées et diffusées par les militaires français, les plus importantes ont eu lieu en 1834, 1835, 1837, 1839, 1846, 1849, 1855, 1859, 1865, 1866, 1884 et 1893. Les Rickettsies, agents du typhus historique, ont été ramenées en Algérie avec le pou de corps humain, que des milliers de va-nu-pieds d’Europe portaient sur eux, au moment ils étaient envoyés pour coloniser l’Algérie. La syphilis a été réactivée à travers les nouveaux réservoirs ramenés en Algérie pour entretenir le moral des soldats mais également à travers les multitudes de centres de dépravation mis en place par les autorités militaires françaises au niveau des villes-garnisons. La tuberculose était pratiquement inconnue en Algérie à la veille de l’occupation, elle a été propagée par la main-d’œuvre algérienne appelée à soutenir l’effort industriel français, mais placée dans un état d’insalubrité, de promiscuité et de carence alimentaire tel qu’elle a contracté le bacille de Koch puis est revenue dans le pays pour mourir, essaimant à tout va le bacille meurtrier. Le paludisme reste une exception épidémiologique car s’il était bien présent avant l’occupation, son épidémiologie a littéralement explosé avec les bouleversements écologiques opérés par les autorités coloniales, l’anophèle (femelle du moustique), agent de transmission du parasite, s’est allié aux habitants pour retarder la colonisation du pays. Globalement, il n’est pas exagéré de dire que les épidémies ont tué plus d’un million et demi de personnes en Algérie durant l’occupation française. A titre de comparaison, Noin évalue à 1.450.000 décès, les ravages de la peste, du choléra et de la variole au cours de la deuxième moitié du XIXème siècle au Maroc (Noin, 1970). Les autres épidémies ayant eu de grands impacts, notamment la variole, la rougeole, la scarlatine, la dysenterie, la typhoïde… ne sont pas comptabilisées !
Les famines observées en Algérie durant l’occupation française ont, par leur envergure et le nombre de victimes occasionnées, été les plus meurtrières de l’histoire d’Algérie. La responsabilité de l’occupant dans les famines de 1838, de 1847, de la grande famine 1866-1868, de celles de 1891-1892 et de 1921-1922 est liée à la déstructuration de la société autochtone, à la dépossession des terres, à la confiscation des terres pastorales, à l’altération des pratiques sociales qui permettaient traditionnellement à la population de faire face aux calamités (dispersion des populations, constitution de silos de réserve [mtamers], développement de l’élevage, prêts sans intérêt [mouaouana], etc.). Ces famines ont été responsables au minimum d’un million et demi de victimes. La grande famine seule a tué plus d’un million de personnes. (Djilali Sari, Le désastre démographique, Sned Ed, Alger 1982)
Les camps de regroupement mis en place en dehors de tout cadre légal dès 1955, ont abrité plus de 2,5 millions jusqu’au 19 mars 1962. L’absence d’une hygiène minimale, des conditions d’habitat proches de celles des SDF et l’existence d’une sous-alimentation chronique ont été responsables d’une très forte mortalité dénoncée en 1957 par le rapport de Michel Rocard. Selon ce dernier, il y avait plus d’un décès par jour pour 1.000 habitants ce qui donne en 5 ans (mars 1957 à mars 1962) plus de 4,5 millions de victimes.
La colonisation de l’Algérie : un défi mémoriel pour la France
Emmanuel Macron qui est né en 1977 n’a pas le complexe des enfants de la guerre coloniale menée par son pays. Il avait qualifié lors de sa visite à Alger le 15 février 2017, durant sa campagne électorale que la colonisation française est «un crime contre l’humanité». Il y a quelques jours, il récidive considérant la colonisation de l’Algérie comme l’un des plus grands défis mémoriels pour la France : «La guerre d’Algérie est sans doute le plus dramatique» a-t-il déclaré. Il ajoute : « je pense qu’il a à peu près le même statut que la Shoah» (AFP/RP, 25 janvier 2020). En termes de responsabilité de la France, la colonisation de l’Algérie ne peut aucunement faire l’objet d’une comparaison avec la Shoah car d’une part le régime de Vichy ne représentait qu’une partie de la France et d’autre part ce qui a été commis contre les Algériens dépasse largement les 12 millions de victimes.
Mostefa Khiati
Professeur, chercheur
SOURCE : Le Quotidien d’Oran -
La brulure de la Dahra : Un sinistre épisode des crimes coloniaux
La brulure de la tribu des Ouled Riah, perpétrées par l’armée française du 18 au 20 juin 1845 dans les monts de Nekmaria, à l’extrême Est de Mostaganem, sont considérées comme un crime d’extermination d’une population qui a refusé de se soumettre à l’ordre colonial.
Cent soixante-quinze années sont passées après ce massacre ayant entrainé la mort de plus d’un millier de personnes, essentiellement des femmes, des vieux et des enfants, asphyxiées à l’intérieur de la grotte des Frariche, sur ordre du criminel Pelissier (1794-1864). Des études sur cette phase douloureuse de l’histoire nationale restent à approfondir pour dénoncer les actes criminels de ce sinistre personnage et rendre hommage aux victimes.
L’enseignant d’histoire contemporaine de l’université Ibn Khaldoun (Tiaret), le Pr. Mohamed Belil, rappelle qu’après avoir occupé les villes côtières du pays, la France coloniale a mené une politique de la terre brulée pour asseoir sa domination sur le reste du territoire national.
« Face à cette déferlante, les tribus locales n’avaient qu’un choix : se soumettre ou subir l’extermination », a-t-il ajouté, estimant qu’en ce mois de juin 1845, la France coloniale venait d’enterrer ses idées de liberté et sa prétendue mission civilisatrice en Algérie. Ses troupes armées avaient extermine une tribu entière et d’une effroyable manière dans le seul but d’étouffer toute résistance à ses plans expansionnistes et colonialistes.
Le même universitaire a poursuivi en précisant que « dans la métropole, le lobby militaire et colonialiste est parvenu à étouffer ces crimes et couvrir leurs auteurs en falsifiant la réalité révélée par plusieurs sources. Les auteurs de ces génocides ont été encouragés à poursuivre leurs menées dans d’autres régions. Ils ont eu même droit à des promotions ».
·Décoré et promu malgré ses crimes de guerre
Mohamed Belil a considéré que la période de gouvernance du Maréchal Bugeaud en Algérie, soit de 1840 à 1847 a été « la plus sombre et la plus meurtrière » eu égard aux massacres perpétrés durant ces huit années et à la politique de la terre brulée qualifiée de « pacification « . Ce sanguinaire avait mené une guerre impitoyable contre le chef de la résistance populaire algérienne, l’Emir Abdelkader.
« Le colonel Pellissier a été l’exécutant de la politique génocidaire de son chef Bugeaud en perpétrant des génocides sous le fallacieux prétexte de refus des tribus locales à se soumettre à l’ordre colonial et pour avoir fait preuve de résistance armée », a encore affirmé le même universitaire.
Il a rappelé que ce serviteur zélé du maréchal Bugeaud a été récompensé pour « services rendus » en accédant au grade de général, puis au poste de gouverneur général d’Algérie (en 1851 puis entre 1860 et 1864) avant d’être promu maréchal puis nommé ambassadeur à Londres.
De son coté, l’universitaire et historien Abdelkader Fadhel a estimé que ces enfumades constituent « un acte de traitrise » pour la classe politique et « un véritable scandale » pour les militaires, auteurs de ce crime perpétré contre les Ouled Riah et des membres de la tribu des Beni Zentis.
Le Pr. Fadhel a rappelé que la presse française avait dénoncé ces crimes et suscité l’indignation des intellectuels français et européens, à l’image du romancier Honoré de Balzac (1799-1850) qui a déclaré à un journal espagnol que « cet acte criminel ne peut être effacé des mémoires ».
De son côté, le voyageur Allemand Heinrich Maltzahn (1826-1874) avait décrit , dans son ouvrage « Trois années en Afrique du Nord », sa visite de la grotte des Frariche et mis en exergue « les actes barbares de Bugeaud et de ses officiers dont les pages sanglantes ont été très vite occultées.
« Cette attitude d’oubli et cette amnésie sont à même un crime flagrant contre la mémoire », a estimé le même universitaire.Tags : Algérie, France, colonisation, crimes de guerre,
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Algérie – Crimes coloniaux : l’autre 8 mai 1945
– Commission d’enquête « Tubert »: un goût d’inachevéLe rapport de la commission d’enquête « Tubert », sur les massacres du 8 mai 1945 dans le Nord-constantinois, demeure, à ce jour, l’unique source d’importance sur ce qui s’est réellement passé durant ces événements, malgré que les rédacteurs du rapport d’enquête avait déploré le fait que la commission n’avait pas pu mener « concrètement » sa mission.Ainsi, 73 ans après les événements sanglants ayant foudroyé des populations algériennes entières dans les villes et villages des régions de Guelma, Kherrata et Sétif, la vérité historique demeure partiellement connue, au regard des entraves vécues par la Commission d’enquête officielle, nommée le 18 mai par le général Charles de Gaulle et conduite par le général de gendarmerie, Paul Tubert, lors de son déplacement en Algérie.Jeté pour longtemps dans les oubliettes, le contenu du rapport de la commission Tubert sur les événements, préfacé par l’historien Jean-Pierre Peyroulou, a été révélé, il y a quelques années, grâce au site électronique de la Ligue française des droits de l’Homme.Si le rapport n’a consacré que peu d’espace à la « férocité » de la répression contre les Algériens, il dresse, néanmoins, un tableau sur la situation qui prévalait avant le début des massacres et l’atmosphère « insurrectionnelle » qui régnait en Algérie où « le désir d’émancipation s’était clairement exprimé depuis la remise en 1943 par Ferhat Abbas du Manifeste du peuple algérien aux autorités françaises.Le rapport de la commission Tubert, qui avait mis l’accent sur le refus des réformes par les colons, a pu, cependant, cerner le climat psychologique qui prévalait en Algérie avant les événements.Il a illustré, en outre, le mobile patriotique des manifestations par la demande de libération de Messali Hadj (leader du mouvement national et dirigeant du PPA).« (…) La commission a constaté que bon nombre de manifestations se sont déroulées en Algérie les 1er et 8 mai. Toutes ces manifestations étaient à caractère exclusivement politique et avaient pour but de réclamer la libération de Messali et l’indépendance de l’Algérie », lit-on dans ce rapport.Les rédacteurs de ce document ont, à la fin du rapport, suggéré « la présence de troupes mobiles (…) pour ramener la confiance et empêcher la formation de groupes armés échappant à tout contrôle et la définition, avec netteté et sincérité, des programmes politiques et économiques que les pouvoirs publics (autorités coloniales) décideront d’appliquer en Algérie ».Le rapport ne pouvait prétendre cerner l’ensemble des événements, en raison des « tergiversations » du gouverneur général d’Alger, Chataigneau, obligeant, selon le document, la commission à recourir aux informations confiées par un nombre de personnalités à Alger et aux renseignements recueillis à Sétif durant la journée du 25 mai 1945.L’historien Peyroulou qui écrivait que la commission n’avait pas pu se rendre à Guelma où « les massacres de civils se poursuivaient » au-delà de la date de l’arrivée de la commission Tubert à Alger, a relevé qu’elle (commission) avait fait du « sur-place à Alger » du 19 au 25 mai.Une répression menée jusqu’au 25 juin« Pourquoi la commission n’est-t-elle pas allée à Guelma? Non seulement parce que le général de Gaulle voulait absolument sauver un représentant de la résistance en Algérie, André Achiary, l’un des organisateurs de la milice européenne, mais aussi parce qu’à Guelma, la répression menée par cette milice officiellement dissoute, se poursuivait toujours dans les faits. Elle s’est poursuivie jusqu’au 25 juin », avait expliqué l’historien Peyroulou dans sa préface.En effet, et selon cet historien, qui a consacré un ouvrage sur les événements de mai 1945 à Guelma, « la répression s’est poursuivie jusqu’au 25 juin, jour où le ministre de l’Intérieur Tixier arriva à Guelma. Il y eut 4 morts ce jour-là. Ce furent les derniers. Quand il repartit, les meurtres cessèrent ».« En somme, on promena Tubert et la nomination de la commission +Tubert+ fut une menace qu’agita le gouvernement provisoire pour faire cesser la répression.Mais celui-ci n’avait aucune intention de le laisser constater effectivement l’ampleur de la répression », écrivait encore Peyroulou.S’agissant du devenir de cette commission, il a souligné que « le rapport fut oublié. Il ne fut pas diffusé. De toute façon, après la révolte de Madagascar, et une fois la guerre d’Indochine entamée, l’épisode du 8 mai 1945 dans la région de Constantine n’intéressait plus personne en France ».La commission avait cessé de travailler officiellement le samedi 26 mai au soir, « dès qu’elle reçut des instructions de revenir à Alger », précise le rapport.Le général de gendarmerie Tubert, résistant contre l’occupation allemande en France, était depuis 1943, membre du Comité central provisoire de la Ligue des droits de l’Homme et membre de l’Assemblée consultative provisoire à la fin de la deuxième Guerre mondiale.Il a été nommé à la tête de la commission d’enquête sur les événements du 8 mai 1945 en Algérie, par le général de Gaulle à la demande du ministre de l’Intérieur Tixier.Les crimes coloniaux toujours pas reconnus par la FranceCinq décennies après l’indépendance, les crimes coloniaux ne sont toujours pas reconnus par la France officielle, alors que l’Algérie commémore mardi le 73e anniversaire des événements du 8 mai 1945, où plus de 45.000 Algériens ont été massacrés dans une vague de répression sanglante perpétrée par les forces coloniales contre une population qui réclamait son droit légitime à la liberté et à l’indépendance.Les massacres du 8 mai 1945 étaient une démonstration du caractère génocidaire de la France coloniale à travers ses crimes des plus abominables et inhumains commis à l’égard du peuple algérien.Des personnes désarmées abattues à bout portant, exécutions sommaires, d’autres transportées dans des camions pour être jetées dans des ravins,alors que d’autres sont emmenées en dehors des villes pour être exécutées.Leurs corps brûlés sont ensuite enterrés dans des fosses communes. Des fours à chaux étaient, également, utilisés par l’armée française pour se débarrasser des cadavres des victimes, tandis que les bombardements et tous types d’exactions se poursuivaient.Malgré les appels à la repentance, le volet mémoriel entre l’Algérie et la France reste toujours d’actualité, et demeure un point d’achoppement pour l’essor des relations bilatérales, même si des avancées ont été enregistrées ces derniers temps.Le président français, Emmanuel Macron, s’est contenté d’utiliser l’expression de « crime contre l’humanité » à propos de la colonisation, une expression qu’il a employée lors de sa visite à Alger lorsqu’il était candidat à la présidentielle.« Mes convictions sur ce point n’ont pas changé depuis que j’ai été élu président de la République », avait-il affirmé lors de sa dernière visite à Alger en décembre 2017, ajoutant: « Je suis d’une génération de Français pour qui les crimes de la colonisation européenne sont incontestables et font partie de notre histoire ». Il a estimé qu’il ne faut pas s’ »enfermer » dans ce passé mais « construire un avenir commun et une espérance ».Pour le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, il y a une « question d’âge du président Macron et une question d’époque, parce qu’il ne faut pas, à chaque visite présidentielle, revenir sans arrêt sur le passé ».D’après Le Drian, « il faut dire que ce passé a eu lieu, que ce passé était douloureux, parfois dramatique, et dire aussi qu’entre nos deux pays, il y a une chance historique de collaborer ensemble ».Dans le même sillage, l’ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, a noté, récemment, que le dossier mémoriel entre les deux pays « avance discrètement ou parfois trop discrètement, mais il avance ».Pour sa part, l’Algérie, par la voix de son ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, la France « reconnaîtra tôt au tard », les crimes qu’elle a commis pendant 132 ans de colonisation, mettant en avant le droit des générations montantes de tout savoir sur les pratiques répressives des politiques coloniales.La vérité sur ces pratiques reste toutefois inaccessible aux Algériens, a-t-il relevé, précisant que « seulement 2 % de la totalité des archives, qui sont un bien et un droit de l’Algérie, ont été restitués par la France ».Pour le ministre des Moudjahidine, ce dossier reste en suspens aux côtés de ceux inhérents aux disparus pendant la guerre d’indépendance et aux indemnisations des victimes des essais nucléaires dans le Sahara.Tags : Algérie, France, crimes, colonisation, répression, mémoire, -
La Françafrique ou l’empire néocolonial français
La France a officiellement quitté le continent africain entre les années 1950 et 1960. À contrecœur, il doit accepter l’indépendance d’une vingtaine de colonies qui ne veulent plus se maintenir sous les directives de Paris. Cependant, malgré l’évaporation de ses possessions continentales, la France a réussi à sauver une superstructure politique, économique et culturelle qu’elle entretient encore un demi-siècle plus tard.Au 21e siècle, l’Afrique française, et par extension une grande partie du continent, n’a pas réussi à résoudre les problèmes structurels qui la hantent depuis la vague de décolonisation. Ces dernières années, une avalanche de menaces de nature transnationale, le cas du terrorisme de type islamiste ou des réseaux de criminalité organisée qui pullulent dans la région, s’ajoutent à la faiblesse politique et institutionnelle, à une économie fondamentalement agraire et à des guerres qui semblent ne jamais s’arrêter. , laissant de nombreux pays au bord de l’effondrement.Pour cette raison, la France est devenue la gardienne de ses anciennes colonies. Dans un mélange de pragmatisme et de néocolonialisme, Paris protège ses intérêts politiques et économiques en même temps qu’elle récupère une partie de son identité perdue et prend le contrôle d’une «arrière-cour» dans laquelle il est possible de se considérer comme hégémonique, ce que peu de pays peuvent affirmer à l’heure actuelle. . C’est précisément la base de l’idée de la France.Les chaînes de De GaulleLe processus de décolonisation par la France n’a été ni meilleur ni plus exemplaire que les autres. La tactique, identique à celle entreprise par le reste des puissances coloniales, était de retarder le plus longtemps possible les temps, d’expérimenter des structures politiques mortes avant la naissance et, si nécessaire, d’appliquer une main lourde. Ainsi, les territoires qui voulaient obtenir l’indépendance et les dirigeants qui guidaient la cause devaient choisir: soit pour s’insérer dans le lent processus qui était promu depuis Paris, soit pour opter pour la voie armée. Le second est en partie une conséquence du premier. Bien qu’il y ait eu des insurrections armées dans les premières années du processus de décolonisation, couronnées de succès comme en Indochine et frustrées comme à Madagascar, le reste s’est produit en raison d’un retard délibéré des Français dans le processus de décolonisation.Bien qu’une constitution qui semblait égaler le statut politique des colonies par rapport à celle de la métropole sous l’égide de l’Union française ait été promulguée avec la IVe République en 1946, la vérité est que de nombreuses dispositions n’ont pas été respectées ou ont été délibérément retardées par l’administration coloniale française. Dans une large mesure, la guerre d’indépendance algérienne et la révolte camerounaise de 1955 ont été motivées par des brèches métropolitaines. Ainsi, ce projet français, loin de calmer les revendications coloniales, a encore stimulé l’indépendance de l’Afrique.L’avènement de la Ve République se produirait précisément en raison de la situation désastreuse de la guerre d’Algérie et de la mauvaise conception de la république précédente. Le général de Gaulle, héros de la Seconde Guerre mondiale, a été appelé à la présidence en 1958 dans une sorte de catharsis de la société française, désespérée de la situation politique du pays et craignant les menaces de l’armée d’Alger. De Gaulle, conscient que la situation coloniale glissait à travers la France, a décidé de préparer la scène politique africaine plutôt que d’essayer de sauver une bataille déjà perdue.Afrique coloniale La refonte du système politique français propulsé par De Gaulle vers un présidentialisme fort a doté le pays d’une stabilité qui perdure jusqu’à nos jours. Dans la politique à l’égard de l’Afrique, le nouveau président a proposé un système colonial apparemment ouvert mais avec un chemin politique très marqué. Ainsi est née en 1958 la Communauté française, une confédération dans laquelle, avant de rejoindre, les territoires africains pouvaient voter leur entrée. À l’exception du cas guinéen qui, en rejetant la proposition référendaire, a immédiatement obtenu l’indépendance, les autres territoires ont accepté de faire partie d’un tel cadre.Lors de la première vérification que la Guinée était un État indépendant, contrairement à eux, et que la Communauté française n’avait pas beaucoup de viabilité en tant qu’entité politique, l’enthousiasme de 58 était éphémère, et presque immédiatement les territoires coloniaux ont commencé à revendiquer l’indépendance. De Gaulle a accepté un tel scénario, mais a proposé une série de conditions que les nouveaux États devraient accepter. Les dirigeants africains, avec un raisonnement entre indépendance, panafricanisme et francophilie (beaucoup d’entre eux avaient été éduqués en France), ont accepté.Treize États (Cameroun, Sénégal, Togo, Bénin, Niger, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Tchad, République centrafricaine, République du Congo, Mali et Mauritanie) sont ainsi nés en Afrique subsaharienne. Parmi les conditions imposées par de Gaulle figuraient le cantonnement des troupes françaises dans certains des pays nouvellement indépendants; héritant de dettes coloniales et acceptant deux monnaies régionales, une pour les États d’Afrique de l’Ouest et une pour les pays d’Afrique centrale, respectivement contrôlées par des banques centrales régionales dans lesquelles la France aurait un droit de veto. En théorie, ces nouveaux États étaient indépendants, même si une grande partie de la politique monétaire était contrôlée depuis Paris et militairement, ils continuaient à dépendre des troupes françaises. Ainsi, un scénario postcolonial a été inauguré dans lequel, paradoxalement, les relations seraient semi-coloniales.Le gendarme africainLe reste du 20e siècle a été passé en Afrique continentale francophone, car il se déroule généralement dans n’importe quelle arrière-cour. Les dirigeants africains alignés sur Paris en étaient protégés, tandis que les dirigeants qui tentaient de s’opposer aux intérêts de l’ancienne métropole allaient avoir le scénario le plus compliqué. Ainsi, la France a évité autant de coups que ceux soutenus, et le sort de la Françafrique a continué à dépendre largement de Paris.Au XXIe siècle, la panoplie de situations menaçantes tant pour les pays africains du Sahel et du golfe de Guinée que pour les intérêts français de la région s’est élargie. Avant, l’Elysium avait deux scénarios possibles: un coup d’État ou un groupe rebelle attaquant une ancienne colonie. Ces questions sont toujours en vigueur aujourd’hui, mais des facteurs transnationaux ont fait leur chemin à l’ordre du jour. L’expansion du djihadisme à travers le Sahel en fait partie, mais on retrouve également la faiblesse chronique des structures étatiques, aujourd’hui plus démocratiques qu’il y a un demi-siècle mais pas forcément plus stables; piraterie dans le golfe de Guinée; l’augmentation des flux migratoires, de drogue et d’armes, outre l’affaiblissement des pays du Maghreb, la couverture géographique et politique historique entre la Méditerranée et la région subsaharienne.De même, la France a mis à profit les changements intervenus en Afrique aux niveaux politique, économique et social pour modifier progressivement sa présence dans les anciennes colonies en fonction des intérêts que ces nouveaux scénarios ont suscités à Paris. Chaque situation de crise dans laquelle l’armée française est considérée comme le seul garant de la paix est une opportunité géostratégique pour la France.L’une de ces premières opportunités s’est présentée au Tchad, en 1986. Pendant la guerre de Toyota, l’armée française a déployé plusieurs milliers de soldats pour soutenir le régime tchadien contre l’invasion des troupes libyennes. Le résultat de la guerre s’est terminé par une victoire pour le Tchad, mais la France n’a pas entrepris le retour au pays, mais a plutôt établi une base à N’Djamena, la capitale du pays, un lieu privilégié pour contrôler le conflit au Soudan, l’instabilité dans la République centrafricaine et la stabilité même du Tchad, dont le président, Idriss Déby, est soutenu par l’Elysée depuis 1990, notamment lors de la guerre civile tchadienne entre 2005 et 2010.Djibouti a également été un autre endroit où la France est intervenue, pendant la guerre civile que le pays a subie entre 1999 et 2001. Là encore, l’intervention française a marqué un tournant dans le conflit et a permis de renforcer sa position géostratégique dans la Corne. d’Afrique, de la péninsule arabique et du détroit crucial de Bab el-Mandeb, l’un des principaux goulots d’étranglement du commerce mondial et du transport des hydrocarbures. En fait, dans cet endroit si apparemment séparé de la géopolitique africaine « épaisse », se trouve le plus gros contingent français situé en permanence en Afrique, avec environ 1500 hommes.L’action en France-Afrique s’est ensuite déplacée vers le golfe de Guinée; La Côte d’Ivoire, ancien joyau subsaharien de la France, a été engloutie dans une guerre civile entre 2002 et 2007, au cours de laquelle des troupes françaises, précédemment stationnées dans le pays, ont servi de « soldats de la paix » au commandement de l’ONU. Cependant, la situation ne s’améliorerait pas beaucoup depuis cette première confrontation. Quelques années plus tard, en 2011, le pays ivoirien reviendrait au cours des violences après le refus du président de l’époque Laurent Gbabo d’accepter la défaite électorale, d’abandonner le poste et de le transférer au candidat vainqueur aux élections, Alassane Ouattara.Viendrait ensuite ce qu’on appelle les sources arabes, la France observant depuis la rive nord de la Méditerranée comment les révolutions démocratiques apparentes s’ancraient, affaiblissant les seuls États à stabilité minimale en Afrique (à l’exception de l’Afrique du Sud) et facilitant la propagation d’un incendie du Moyen-Orient à le Sahel.Imprégnée de l’esprit républicain, la France a plaidé pour une intervention en Libye avec le Royaume-Uni, espérant que le régime de Kadafist serait rapidement désarticulé et que les factions rebelles libyennes formeraient un État démocratique. Cependant, en raison de l’ignorance ou de l’inconscience, le tandem franco-britannique et le reste de l’OTAN ont facilité la disparition pratique de l’État libyen en ne promouvant pas un plan post-Kadhafi qui stabiliserait d’abord et reconstruirait ensuite le pays sur le plan politique. Aujourd’hui, une autre guerre civile dévaste le pays, aussi éternelle que la première et ouvrant les portes du Moyen-Orient à l’Afrique de l’Ouest comme du Maghreb au Sahel. La Libye était un goulot d’étranglement que la France a débouché et n’a pas pu fermer.Une conséquence directe de la conversion de la Libye à un État en déroute serait le début des problèmes dans l’ouest du Sahel. Des milliers de Touaregs qui avaient grossi les rangs de l’armée de Kadhafi retournaient maintenant dans leurs régions d’origine, emportant avec eux une grande partie de l’arsenal libyen d’un pouvoir considérable. Ainsi, les groupes touaregs ont pu ressusciter leurs revendications politiques et affronter l’État malien. Initialement allié à des groupes djihadistes tels qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) ou Ansar Dine, le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) a remporté des victoires notables, plongeant l’armée malienne dans le désarroi. Leurs revendications étaient principalement de nature indépendantiste, exigeant que le gouvernement de Bamako accorde l’indépendance au territoire qu’ils appellent Azawad (le nord du pays), bien que les Touaregs soient un peuple traditionnellement nomade.Cependant, les joies du côté touareg n’ont pas duré longtemps. Lorsqu’ils ont menacé la ville de Mopti, l’antichambre de Bamako, ses alliés salafistes ont choisi de détourner le mouvement et de réorienter la conquête vers la constitution d’un État islamique au cœur du Sahel. Si la menace touareg était inquiétante, malgré une solution politique, la présence de centaines de djihadistes à quelques centaines de personnes dans la capitale malienne a sonné l’alarme. L’ONU a confié à la Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) la constitution d’une force multinationale pour détenir la combinaison de Touaregs et de terroristes, cependant, le temps dont les États membres avaient besoin, en plus du peu de confiance qui leur était accordée. Son succès a incité le Mali à demander officiellement de l’aide à la France. Le pays français est intervenu avec force par le biais de l’opération Serval et en quelques semaines début 2013, les troupes maliennes et africaines, avec l’aide de l’armée française, avaient repris l’essentiel du nord du pays, y compris les importants centres urbains.Après le conflit du Mali, la France allait encore intervenir dans un autre point chaud d’Afrique centrale: la République centrafricaine. La guerre qui a englouti le pays a connu l’un de ses épisodes les plus violents en 2013, les milices de la Séléka étant sur le point d’entrer dans la capitale, Bangui. C’est alors que, pour soutenir la mission de paix établie dans le pays (MISCA), la France a déployé 2000 soldats dans cette ville, arrêtant l’avancée de la Séléka et sauvant la situation compliquée dans laquelle le président Bozizé était plongé.Actuellement, environ 9 000 soldats français sont déployés dans différents pays africains, la plupart insérés dans des missions de maintien de la paix des Nations Unies. Dans une large mesure, ce modèle français d’interventionnisme fonctionne avec une mission de maintien de la paix ultérieure (sinon précédemment). En raison de la connaissance de la région et des intérêts mutuels, les troupes françaises effectuent le déploiement initial, contiennent la menace et stabilisent la situation jusqu’à ce qu’une mission de l’ONU ou de l’Union européenne puisse prendre le relais. C’est le cas par exemple au Mali, où se développe la MINUSMA, en République centrafricaine avec la MINUSCA et au Tchad avec la MINURCAT. Une question distincte est, bien sûr, les bases permanentes que la France a dans différents pays africains.Géoéconomie françaiseLe rôle de la France en Afrique, loin de répondre à la doctrine R2P, n’est pas non plus dirigé par les cours du romantisme impérial. La réponse, comme presque tout ce siècle, réside dans l’intérêt économique. Que ce soit votre arrière-cour ou non, la vérité est que la France a d’énormes gains économiques dans ses anciennes colonies, à la fois structurellement et conjoncturellement. Leur travail d’extinction du feu du continent répond largement à cette dynamique géoéconomique.Les anciennes colonies parisiennes absorbent 5% des exportations françaises, tandis que les entreprises françaises du continent africain extraient les matières premières qui sont ensuite expédiées en Europe. Et cela sans compter sur près de 300 000 ressortissants français qui vivent disséminés sur plusieurs dizaines de territoires francophones. Métaux en République centrafricaine; Le pétrole au Gabon, le coton et l’or malien et l’uranium nigérian sont quelques-uns des rendements économiques que la France obtient de la présence de ses sociétés en Afrique. Dans ce scénario, la clé de la sécurité énergétique française est la situation au Niger, où l’Areva française extrait entre un tiers et 40% de l’uranium que les centrales nucléaires françaises utilisent pour produire les deux tiers de l’électricité consommée par le pays. L’équation est donc claire: une déstabilisation du Niger peut poser un sérieux défi à l’approvisionnement en électricité en France.Bien que le Niger n’ait jusqu’à présent été impliqué dans aucun problème majeur, la vérité est que l’opération Serval au Mali avait une certaine composante préventive envers le pays nigérian voisin. Si les Touaregs, ou pire, les djihadistes, prenaient le contrôle du nord du Mali, ils contrôleraient la frontière avec le Niger, pouvant pénétrer facilement dans le pays, mettant ainsi en péril la sécurité énergétique de la France.Cependant, nous ne pouvons pas oublier la commodité de la France pour l’existence des États eux-mêmes en Afrique de l’Ouest et du Centre. La construction monétaire résolue par De Gaulle a été extrêmement favorable à l’économie française, mais pas tant aux différentes économies africaines.Avec l’indépendance, deux régions monétaires ont été créées en Afrique française, l’une autour du franc CFA ouest-africain et l’autre autour du franc CFA d’Afrique centrale, chacune dirigée par une banque centrale indépendante. Malgré les similitudes nominales, elles étaient et sont en pratique deux unions monétaires totalement différenciées, bien que dans leurs relations avec la France les paramètres soient identiques.L’un des avantages théoriques de ces accords monétaires pour les nouveaux-nés était que leurs monnaies avaient un changement fixe par rapport au premier franc et à l’euro par la suite (elles sont actuellement de 655,95 francs CFA pour un euro). Ceci, bien qu’il s’agisse d’une mesure commerciale protectionniste française, était une garantie de stabilité monétaire pour les États africains. Cependant, les contreparties qu’elles devaient accepter, explicites ou implicites, étaient nombreuses. En plus du droit de veto commenté de la Banque centrale de France dans les banques centrales régionales, 50% des réserves de change des différents pays des deux zones monétaires doivent être déposées auprès de la banque centrale française, ce qui signifie en pratique et c’est une injection de liquidité et de stabilité pour le Trésor français lui-même. De même, même si les francs occidentaux et les francs centraux ont le même taux de change contre l’euro, il n’y a aucune possibilité d’échange entre eux, créant une puissante barrière à l’intégration économique africaine. Diviser pour mieux régner, ils penseraient à Paris.Les effets de cette relation postcoloniale ont approfondi les relations de dépendance économique et politique des États africains vis-à-vis de la France. Basée sur l’existence d’échanges fixes et libres entre le franc africain et l’euro, cela a permis à de nombreuses entreprises européennes, notamment françaises, de rapatrier sans frais les bénéfices vers l’Europe, décourageant les investissements dans les pays africains. De même, il convient de considérer le fait que le taux de change est surévalué, protégeant ainsi les investissements gaulois en Afrique et réduisant la compétitivité des économies africaines.La dépendance du franc africain à l’égard de la politique monétaire de la France a été pleinement démontrée. Les dévaluations successives du franc français dans la seconde moitié du XXe siècle – jusqu’à 14 – ont entraîné le franc CFA dans la même mesure, rendant les États africains incapables de contrôler leur inflation, leur dette publique et leur compétitivité extérieure. Bien que les dévaluations de Paris aient été bénéfiques pour accroître la compétitivité économique française, la vérité est que l’effet inverse s’est produit dans les États africains, aggravant les déséquilibres commerciaux et nuisant à leur développement économique.Une politique étrangère viable?Depuis 2007 Nicolas Sarkozy et depuis 2012 François Hollande insistent sur le fait que l’idée de la franco-Afrique est en déclin et que la France n’est plus guidée par ces prémisses lorsqu’elle agit et traite avec des États africains, autrefois des colonies. Cependant, peu de choses ont changé dans les relations entre les deux acteurs. La domination économique est toujours présente et les interventions, toutes raisons confondues, ont continué de se produire. Si les premiers ministres gaulois insistent sur l’obsolescence du concept franco-africain, la vérité est que la France n’a jamais manqué de compenser le maintien d’un tel système.Ainsi, la France est actuellement confrontée à deux possibilités très différentes et largement incompatibles. D’une part, continuer à agir hégémoniquement dans la région, perpétuant la dépendance des États africains à l’égard du pouvoir français ou leur permettant d’agir de manière autonome mais en coordination.D’un point de vue pragmatique, il est dans l’intérêt de la France d’agir de manière paternaliste dans la région de ses anciennes colonies africaines, mais ce serait quand même un anachronisme dans un monde globalisé, où l’intégration régionale et les hégémonies «moyennes» prévalent au détriment des unipolarité. Pour l’esprit français lui-même – politique, social et culturel – cette arrière-cour est importante; elle ne suppose la continuité de l’idée impériale de la France que de manière édulcorée, ce que même le Royaume-Uni ne soutient pas aujourd’hui. De la même manière, il accentue le rôle de la France dans le monde d’aujourd’hui et lui donne son propre espace pour se déplacer librement, ce que Paris n’a pas réussi à maintenir même dans l’Union européenne elle-même, cédant lentement la co-centralité politique à Berlin. Ainsi, dans une perspective globale, la France parvient à maintenir une importance que l’Allemagne ou le Royaume-Uni n’ont pas ou ont perdu.Pour cette raison, un retrait serait un choc identitaire pour la France sans précédent depuis un demi-siècle, et probablement une incitation argumentative à l’extrême droite sur la faiblesse politique de la France. Dans ce scénario, une grande partie de leur sécurité économique et énergétique serait confiée à des États politiquement et militairement faibles et à des processus d’intégration excessivement lents, à un moment où les menaces transnationales contre les États africains sont d’une importance considérable sans avoir complètement disparu. menaces traditionnelles. De plus, il faut considérer qu’en Afrique les puissances régionales ne sont pas pleinement consolidées, rendant inutile toute politique d’hégémonie régionale «africaniste». En revanche, la France doit être consciente que les faiblesses économiques et politiques, tant nationales que régionales, sont largement dues à la politique néocoloniale française depuis l’indépendance de l’Afrique.L’idée de la France, bien que les dirigeants gaulois insistent au contraire, est toujours présente. À l’heure où l’idéalisme modéré se mêle au pragmatisme national, un retrait français de l’Afrique semble hautement improbable. Dans une certaine mesure, cette pratique a été légitimée par le retrait des États-Unis de la zone atlantique, qui cherche à laisser les affaires de la verticale européenne entre ses mains, malgré les échecs et les faiblesses manifestes que les interventions ont jusqu’à présent démontrés. de l’OTAN et de l’Union européenne en dehors des terres communautaires.Cependant, le moment venu, la France devrait envisager de soutenir le renforcement des structures régionales et d’engager une seconde décolonisation. Pour le plein développement de l’Afrique française – ainsi que de l’Afrique anglophone voisine – le démantèlement de la superstructure héritée de la décolonisation est une étape incontournable. D’ici là, les troupes françaises seront l’un des rares garants de la stabilité en Afrique.Tags : France, Afrique, colonisation, décolonisation, Franc-CFA, FCFA, impôt colonial, -
Le franc CFA, un outil de contrôle politique et économique sur les pays africains de la zone franc
La zone franc et le franc CFA, un système hérité de la colonisation
La zone franc et sa monnaie le franc CFA constituent le seul système monétaire colonial au monde à avoir survécu à la décolonisation. La mise en place progressive de ce système est le résultat de choix stratégiques de la France mettant l’entreprise de colonisation au service des intérêts économiques français. Les monnaies africaines sont supprimées et des banques privées appartenant aux colons mais contrôlées par la France sont créées.
La puissance coloniale exploite les matières premières des colonies pour alimenter l’industriefrançaise et utilise les colonies comme débouchés pour les produits français. Suite à la crise de 1929, la France accentue son repli sur l’empire colonial pour protéger son économie et son commerce extérieur.
La création de la zone franc en 1939 offre le moyen de pérenniser cette stratégie : les échanges avec des pays extérieurs à la zone franc sont interdits, ce qui cimente lesliens économiques et commerciaux entre la France et son empire.
La monnaie franc CFA (ColoniesFrançaises d’Afrique) est quant à elle créée en 1945 afin que la dévaluation du franc français au sortir de la guerre n’affecte pas les marchés des possessions africaines de la France. Celle-ci conserve ainsi le leadership dans le commerce extérieur des colonies et réaffirme sa suprématie surson empire.
Au moment des indépendances, la quasi-totalité des anciennes colonies françaises d’Afrique subsaharienne décide de rester dans le giron de la France en signant des accords de coopération monétaire et en adhérant de ce fait à la zone franc. Le franc CFA est d’ailleurs renommé franc de la Communauté Française d’Afrique en 1958. Mais la Guinée refuse cet assujettissement monétaire et sort de la zone franc dans un coup d’éclat. Le président Sékou Touré veut une réelle indépendancepolitique et économique pour la Guinée, et pour ce faire crée le franc guinéen et quitte la zone en 1960.
Au Togo, ancienne colonie allemande membre de la zone franc depuis 1949, des voix s’élèvent également contre le franc CFA en la personne du président Sylvanus Olympio. La sortie de la zone est prévue pour 1963 mais Sylvanus Olympio est assassiné juste avant que l’indépendance monétaire du pays ne soit acquise. Ce n’est que dix ans plus tard, en 1973, que la zone connaît denouvelles modifications avec la sortie de la Mauritanie et de Madagascar.
C’est également à la période des indépendances que des banques centrales dont seulement la moitié des administrateurs sont des représentants africains sont créées pour émettre le franc CFA.
Les présidents de ces institutions sont néanmoins français et restent maîtres de toute décision. Pendant les années 1970 la zone franc connaît des ajustements à la fois techniques et symboliques : révision des accords de coopération monétaire, déménagement des sièges des banques centrales de Paris à Dakar et Yaoundé, diminution du nombre de représentants français au sein des Conseils d’Administration.
D’autre part deux nouveaux pays signent des accords de coopération avec la France et adoptent le franc CFA : la Guinée Équatoriale en 1985 et la Guinée-Bissau en 1997. Malgré ces changements, la France garde la mainmise sur la politique monétaire de la zone franc dont les pays subissent des choix économiques et monétaires dictés par les intérêtsfrançais. La France va même jusqu’à décider unilatéralement de la dévaluation du franc CFA en 1994.
La zone franc : une gestion et des principes au service des intérêts français
La zone franc englobe donc aujourd’hui quinze pays : huit pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina-Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo), six pays d’Afrique centrale (Cameroun, République Centrafricaine, Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad) et lesComores. C’est une organisation financière, monétaire et économique, dont le cœur est la France et l’instrument principal le franc CFA.
Cette organisation, gérée par la France, s’appuie sur des institutions africaines : la Banque Centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), la Banque des Etats d’Afrique Centrale (BEAC), la Banque Centrale des Comores (BCC).
Le système franc CFA est basé sur quatre grands principes : la centralisation des réserves de change au Trésor public français, la fixité de la parité franc CFA/euro, la libre convertibilité du francCFA à l’euro, et la libre circulation des capitaux entre la France et les pays africains de la zonefranc. A ces principes s’ajoutent la participation française aux instances de direction des banquescentrales africaines, pièce maîtresse du système CFA puisqu’elle garantit l’application sans faille des quatre principes précédemment cités.
La centralisation des réserves de changes : un principe qui bloque l’économie despays de la zone franc
Chaque banque centrale de la zone franc possède un compte d’opérations au Trésor public françaiset doit y déposer une partie de ses réserves de monnaie. Depuis 2005, 50% des réserves de change doivent être stockées sur le compte d’opérations en France (jusqu’en 2005 ce pourcentage était de 65). Il y a donc actuellement environ 8000 milliards de francs CFA venant de la BCEAO et la BEAC stockés au Trésor public, soit plus de 12 milliards d’euros.
C’est autant d’argent qui est amputé du budget des États de la zone franc. La France rémunère les banques centrales africaines en intérêts, tout en se servant au passage grâce à des placements privés (des sommes dégagées au profit de laFrance qui se comptent en centaines de millions d’euros). Pire, la part d’intérêts versée aux banques centrales est comptabilisée dans l’Aide Publique au Développement !
Dépouillés de la moitié de leurs recettes, les pays africains de la zone franc se retrouvent ainsi dans une situationéconomique et sociale très difficile, d’autant plus que la France leur impose une rigueur budgétaire (c’est-à-dire une baisse des dépenses publiques) pour que l’approvisionnement du compte d’opérations soit garanti.
La parité fixe franc CFA-euro : une entrave à la compétitivité des économies africaines dans le monde
Hier lié au franc français, le franc CFA est aujourd’hui arrimé à l’euro, c’est-à-dire que la valeur dufranc CFA sur les marchés mondiaux dépend de celle de l’euro. Autrement dit, les pays africains de la zone franc n’ont pas le contrôle de leur politique de change et subissent les fluctuations du cours de la monnaie unique européenne. Les recettes de leurs exportations doivent être converties en euro avant de l’être en franc CFA, ce qui signifie que si la conversion entre l’euro et les monnaies étrangères fluctue, les recettes des pays africains de la zone franc fluctuent également.
Actuellement la valeur de l’euro se renforce par rapport aux monnaies étrangères. Par conséquent, la compétitivité des pays de la zone euro, et donc de la zone franc, diminue par rapport au reste du monde. Une baisse de la compétitivité signifiant une plus grande difficulté à vendre ses produitssur le marché mondial, les conséquences pour les pays africains de la zone franc d’un arrimage à une monnaie forte comme l’euro sont considérables : les économies restent faibles, et lespopulation se paupérisent car les matières premières qu’elles produisent ne peuvent ni être exportées ni être transformées.
La libre convertibilité franc CFA/ euro et la libre circulation des capitaux ou comment légaliser la fuite des capitaux
La libre convertibilité s’applique des pays africains de la zone franc à la France et inversement, mais ne concerne pas les échanges entre les trois zones du système CFA. Ce principe facilite lesinvestissements français en Afrique, le rapatriement des capitaux, et l’importation par la France de matières premières, mais bloque les échanges inter-africains.
Les principes de libre convertibilité et libre circulation des capitaux favorisent également la fuite des capitaux de l’Afrique vers la France. Les entreprises françaises installées dans les pays africainsde la zone franc peuvent rapatrier librement leurs liquidités vers la France et les transferts d’argent entre la France et l’Afrique s’opèrent sans entraves au profit des élites françafricaines.
La participation française à la gestion des banques centrales africaines
Dans les trois banques centrales de la zone franc, des administrateurs français siègent aux Conseils d’Administration (CA). Dans les faits, la présence d’administrateurs français garantie par les statuts des banques centrales confère à la France un droit de veto lors de la prise de décision. Au CA de la BCC, 4 administrateurs sur 8 sont français alors que les décisions doivent être votées à la majorité.
A la BCEAO seuls 2 administrateurs sur 16 sont français, mais l’unanimité est requise pour toute décision majeure (et notamment la modification des statuts). La situation est la même à la BEAC avec 3 administrateurs français sur 13. Le pouvoir de la France dans ces institutions est donc considérable et la présence de représentants français garantit la mise en œuvre de tous lesprincipes centraux du système CFA.
Un système monétaire qui constitue une entrave à la souveraineté des Étatsafricains de la zone franc
Le franc CFA est un liant qui cimente les relations économiques entre la France et les pays africainsde la zone franc. Ces pays ne sont pas libres de la gestion de leur politique économique et monétaire, domaine pourtant constitutif de la souveraineté d’un État. Preuve en est la dévaluation de 1994 décidée unilatéralement par la France.
Malgré le passage à l’euro, la France garde la mainmise sur la zone franc, alors même qu’elle n’est plus émettrice de la monnaie d’arrimage. L’adoption de l’euro aurait pu se traduire par une disparition du pouvoir tutélaire de la France sur ses anciennes colonies, or la France a obtenu queles accords de coopération monétaire de la zone franc ne soient pas affectés par l’intégration européenne.
Cinquante ans après les indépendances, la politique monétaire de la zone franc reste donc décidée par la France en fonction de ses intérêts propres. Cinquante ans pendant lesquels cette politique a été complètement déconnectée des vrais enjeux du développement africain tout en permettant à laFrance de contrôler économiquement et politiquement ses anciennes colonies au profit de son économie nationale, et au préjudice du développement des relations entre pays africains.
Le modèle imposé par le système franc CFA induit une verticalité des échanges (Nord-Sud) au détriment d’une coopération horizontale (Sud-Sud). Un tel système financier, au service des intérêts économiques etpolitiques de la France, ne peut pas être le vecteur de l’autonomie monétaire et du développement. Il perpétue les relations asymétriques et néocoloniales entre la France et les pays de la zone CFA.
Survie.org
SourceTags : Françafrique, France, colonialisme, colonisation, franc CFA, FCFA, CEDEAO, UEMOA,
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L’avant-dernier vestige du colonialisme: 75 ans de franc CFA
-Jusqu’à 14 pays africains continuent d’utiliser cette monnaie liée à la France
-Ils doivent déposer leurs réserves à la Banque de France
-Cette année, ils pourraient créer une nouvelle monnaie sans contrôle gaulois.
Sur le continent africain, il y a jusqu’à 14 pays dont les habitants continuent d’avoir le franc français comme monnaie officielle. Oui, le franc, malgré le fait que depuis les années 1950 ces pays ont cessé d’être des colonies de France et malgré le fait que depuis près de 20 ans même le pays français ne l’utilise pas.
Le nom de la monnaie est le franc CFA (colonies françaises d’Afrique), et en 2020, elle a 75 ans – elle a été créée après l’accord de Bretton-Woods, dans lequel la Banque mondiale et le FMI ont également été créés après la Seconde Guerre mondiale- comme monnaie de référence au Bénin, Burkina Faso, Guinée-Bissau, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Cameroun, République centrafricaine, Tchad, Congo, Guinée équatoriale et Gabon – divisé en un groupe occidental et un groupe central- .
Quelle est donc la raison pour laquelle cette union monétaire continue d’utiliser cet anachronisme du contrôle économique français? Jaques Chirac lui-même, ancien président de la République et ancien Premier ministre, a assuré en 2008 que « le gouvernement français perçoit jusqu’à 440. milliards d’euros d’impôts chaque année » en contrepartie de la dette coloniale pour les infrastructures construites par la France.
Mais ce n’est pas seulement une source de revenus qui décime – encore plus – certains des pays les plus pauvres du monde, mais donne également à la France le contrôle économique de cette zone inégalée dans le monde. Une autre preuve en est que l’État français a la priorité sur les ressources naturelles de ces pays, qui sont peu ou pas très valorisantes, tandis que les entreprises françaises ont la priorité pour remporter des marchés publics dans ces lieux.
Le contrôle est également transféré à la politique monétaire. Ces quatorze pays sont tenus de déposer 50% de leurs réserves de change à la Banque de France, sous le contrôle direct du Trésor français. Le reste de leurs réserves ne suffit pas pour répondre aux besoins de ces pays, de sorte qu’ils doivent généralement emprunter à l’État français lui-même, avec leurs intérêts inclus. De même, la France est présente dans les trois institutions du franc CFA: la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), où elle nomme des représentants avec droit de veto.
Les arguments en faveur de l’existence de cette monnaie ne manquent pas non plus et, comme l’explique Javier Rivas, professeur à l’EAE Business School, « a été une source de stabilité pour ces pays, puisque la Banque centrale française a soutenu l’existence d’une parité entre l’euro et le CFA « , qui est resté à un taux fixe de 655 francs pour un euro.
« Si vous analysez ce qui s’est passé dans d’autres pays de cet environnement qui ne sont pas inclus dans l’union monétaire, l’évolution a été bien pire, subissant plusieurs dévaluations de leurs monnaies et avec une inflation incontrôlée, comme c’est le cas en Angola par exemple », ajoute Rivas. « Le mauvais côté, c’est que ces pays sont très différents les uns des autres, et le fait d’avoir une monnaie forte limite considérablement leur compétitivité internationale en matière d’exportation, notamment leurs produits, à faible valeur ajoutée », fait valoir le professeur.
Les huit pays de la zone ouest ont passé des années à demander l’abolition de ce système, qui l’année dernière a accepté de se terminer en juillet prochain, bien que Rivas ne pense pas que « les délais soient respectés, puisque ces pays n’ont pas encore fixé selon les détails du nouveau système, tels que le nom de la nouvelle monnaie, quels pays formeront l’union ou les conditions pour y adhérer, en plus d’autres questions ». « J’ai des doutes sur le fait que cette nouvelle monnaie est plus stable que la précédente. Au final, la Banque de France lui a donné de la crédibilité, bien qu’elle ait également été enrichie par les revenus du seigneuriage – l’affaire de l’émission de monnaie -« , conclut Rivas.
Le nom préliminaire de cette monnaie est l’Eco. Depuis Ebury, ils soulignent que « le changement sera surtout cosmétique même si les réserves de change ne sont plus en France. La souveraineté économique de ces pays va augmenter mais aussi le risque d’instabilité de la monnaie et de plus grande l’inflation et l’impression de l’argent comme une alternative aux impôts ».El Economista, 6 mai 2020
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FRANCE-AFRIQUE : Le malheur de l’Afrique c’est d’avoir rencontré la France?
Le malheur de l’Afrique c’est d’avoir rencontré la France, disait Aimé Cesaire. Il n’avait pas tord de le dire. Entre le discours philanthropique, ou humanisme et la réalité. Le contraste est grand.
L’indépendance , ceux qui la veulent aujourd’hui, qu’ils la prennent maintenant.
Dixit Le général Charles De Gaulle , héro de la Libération de la France avec les résistants de l’extérieur , les maquisards, ainsi que des troupes alliés (Nord-Américains, Britanniques, Canadiens..etc ), auxquelles il faut ajouter des supplétifs Africains venus des quatre vents du vaste territoire de l’Empire Colonial Français (Afrique Occidentale français AOF ; Afrique Équatoriale française AEF et Madagascar).
Emmanuel MACRON en 2018, dira la même chose au sujet du franc C.F.A Le franc C.F.A, ceux qui veulent le quitter ils sont libres >>. Pourtant l’histoire des 50 ans dernières années nous enseigne qu’il faut ne faut jamais se fier à ces déclarations à l’emporte pièce. En voici des exemples :
Ahmed Sékou TOURÉ
Quand à Conakry Hamed Sékou Toure homme politique et syndicaliste, futur président de la Guinée déclencha l’abandon de la France. En faisant voter » Non », au référendum initié par le Général DE GAULLE visant à jeter les bases de l’Union Française : Un État Fédéral composé de la France et de ses anciennes colonies ( Le pacte colonial).
Trois mille Français quittèrent le pays, en prenant tous leurs biens et en détruisant tout ce qui ne pouvait être déplacer : les écoles, les crèches, les bâtiments de l’administration publique furent détruits, les voitures, les livres, les médicaments, les instruments de l’Institut de recherche, les tracteurs furent écrasés et sabotés ; les chevaux, les vaches dans les fermes furent tués, et les nourritures entreposées furent brûlées ou empoisonnées.Le but de cet acte scandaleux était bien évidemment, d’envoyer un message clair à toutes les autres colonies sur les conséquences encoureus du rejet de la France.
Le fait est que peu à peu, la peur s’empara des élites africaines, et après ces événements aucun autre pays ne trouva jamais le courage de suivre l’exemple de Sékou Touré, dont le slogan était “Nous préférons la liberté dans la pauvreté à l’opulence dans l’esclavage”.
Pour les pays nouvellement indépendants il fallut trouver des compromis avec la France.
Sylvius Olympio, le premier président de la République du Togo, un petit pays d’ Afrique de l’Ouest, trouva une solution susceptible de calmer les Français :
Ne voulant pas continuer a subir une domination française, il refusa de signer le pacte colonial proposé par De Gaule, mais accepta en contrepartie de payer une dette annuelle à la France pour les soi-disant avantages obtenus lors de la colonisation française.
Ce furent les seules conditions de la France pour ne pas détruire le pays avant de partir. Toutefois, le montant estimé par la France était si grand que le remboursement de la soi-disant « dette coloniale » était proche de 40 % du budget du pays en 1963.
Dès lors, la situation financière du Togo tout juste indépendant fut très instable, et afin de se sortir de cette situation, Olympio décida de sortir du système monétaire mis en place par la France coloniale le FCFA ( franc des colonies françaises d’Afrique ), et créa la monnaie du pays.
Le 13 Janvier 1963, trois jours après qu’il ait commencé à imprimer les nouveaux billets, une escouade de soldats (soutenus par la France) s’empara de lui et tua.
Le premier président élu de l’Afrique indépendante : Olympio fut exécuté par un ex Légionnaire français, le sergent de l’armée Etienne Gnassingbé qui, au passage, reçu à ce moment une prime de 612 dollars de l’ambassade française locale pour le succès de sa mission.
Le rêve de Olympio était de construire un pays indépendant et autonome. Mais l’idée ne correspondait pas aux volontés françaises.
Le 30 Juin 1962, Modibo Keita, le premier président de la République du Mali , décida également de se retirer du système monétaire FCFA ( imposé à 12 pays africains nouvellement indépendants ).
En effet, pour le président malien, qui se penchait plus vers une économie socialiste, il était clair que la colonisation qui perdurait avec ce pacte avec la France, devenait un piège, un fardeau pour le développement du pays.
Le 19 Novembre 1968, comme Olympio, Keita sera victime d’ un coup d’état mené par un autre ex légionnaire français , le lieutenant Moussa Traoré.
Ainsi, durant cette période turbulente où l’Afrique luttait pour se libérer du joug de la colonisation européenne, la France usera à nombreuse reprises de mercenaires anciennement affiliés à la légion étrangère pour réaliser des opérations coup de poings contre les présidents nouvellement élus :
Au 1er Janvier 1966, Jean- Bedel Bokassa, ex légionnaire français, portait un coup d’état contre David Dacko, le premier président de la République centrafricaine.
Le 3 Janvier 1966, Maurice Yaméogo, le premier président de la République de Haute-Volta, aujourd’hui appelé Burkina Faso, a été victime d’un coup porté par Aboubacar Sangoulé Lamizana, un ex légionnaire français qui a combattu avec les troupes françaises en Indonésie et en Algérie contre ces pays l’indépendance
Le 26 Octobre 1972 Mathieu Kérékou qui était un garde de sécurité au président Hubert Maga, le premier président de la République du Bénin, a porté un coup d’État contre le président, après avoir fréquenté les écoles militaires françaises de 1968 à 1970.
En fait , au cours des 50 dernières années, un total de 67 coups état qui se sont passés dans 26 pays en Afrique, 16 de ces pays sont des ex- colonies françaises, ce qui signifie que 61 % des coups d’États en Afrique ont été initiés dans d’anciennes colonies françaises.En Mars 2008, l’ancien président français Jacques Chirac a déclaré :
« Sans l’Afrique, la France va glisser vers le bas dans le rang de vingt-troisième puissance [ du monde ] “
Le prédécesseur de Jacques Chirac François Mitterrand avait déjà prophétisé en 1957 que : « Sans l’Afrique, la France n’aura pas d’ histoire au 21e siècle ”
Au moment où nous écrivons cet article, 14 pays africains sont obligés par la France, à travers le pacte colonial , de mettre 85% de leurs réserves à la banque centrale de France sous le contrôle du ministère des finances français. Jusqu’à maintenant , en 2014, le Togo et environ 13 autres pays africains doivent encore payer la dette coloniale à la France. Les dirigeants africains qui refusent sont tués ou victimes de coup d’état . Ceux qui obéissent sont soutenus et récompensés par la France à travers un mode de vie somptueux, un soutient indéfectible à leurs dérives autoritaires tant qu’ils sont les » amis » de la France , tandis que leurs populations endurent la misère et le désespoir.
Un tel système maléfique, est dénoncé par l’Union européenne, mais la France n’est pas prête à se passer de ce système colonial qui lui offre une trésorerie d’environ 500 milliards de dollars en provenance de l’Afrique, et ce par année.
Nous accusons souvent les dirigeants africains de corruption et de servir les intérêts des nations occidentales, mais il y a une explication claire de ce comportement . Ils se comportent ainsi parce qu’ils ont peur d’être tués ou d’être la victime d’un coup d’État. Ils veulent s’allier à une nation puissante pour se sauvegarder en cas d’agression ou de difficultés. Mais, contrairement à une protection amicale, la protection de l’occident est souvent offerte en échange du renoncement à servir leur propre peuple ou les intérêts des nations.
Les dirigeants africains travailleraient dans l’intérêt de leurs peuples s’ils n’étaient pas constamment harcelés et intimidés par les pays coloniaux.
En 1958 , effrayé des conséquences de son choix d’indépendance face à la France , Léopold Sédar Senghor déclarera : « Le choix du peuple sénégalais, c’est l’indépendance, ils veulent qu’elle ait lieu seulement dans l’amitié avec la France , pas en litige.
Dès lors la France a accepté qu’une « indépendance sur le papier” pour ses colonies , mais a signé en parallèle des ” accords de coopération “, précisant la nature de leurs relations avec la France, en particulier les attaches envers la monnaie ( le Franc ), le système éducatif français, les ententes militaires et les préférences commerciales.
Voici les 11 principales composantes de la poursuite du pacte de colonisation depuis les années 1950 :
1 . La dette coloniale pour les avantages de la colonisation française
Les pays nouvellement « indépendants » doivent payer pour l’infrastructure construite par la France dans le pays pendant la colonisation. Les détails sur les montants, l’évaluation des avantages coloniaux et les conditions de paiement imposées aux pays africains, ne sont pas encore disponibles mais nous y travaillons ( nous aider avec des informations ).
2.Confiscation automatique des réserves nationales
Les pays africains doivent déposer leurs réserves monétaires nationales en France à la banque centrale.
La France a tenu des réserves nationales de quatorze pays africains depuis 1961 : Bénin, Burkina Faso, Guinée- Bissau, Côte-d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Cameroun, République centrafricaine, Tchad, Congo -Brazzaville, la Guinée équatoriale et le Gabon.
La politique monétaire régissant un tel regroupement diversifié de pays est simple car il est géré par le Trésor français, sans en référer aux autorités fiscales centrales comme l’UEMOA ou la CEMAC. Selon les termes de l’accord qui a été mis en place par la banque centrale du CFA, chaque Banque centrale de chaque pays africain est obligée de garder au moins 65 % de ses réserves de change dans un « compte d’opérations » tenu au Trésor français, ainsi qu’un autre 20 % pour couvrir les passifs financiers.
Les banques centrales CFA imposent aussi un plafond sur le crédit accordé à chaque pays membre à l’équivalent de 20 % des recettes publiques de ce pays sur l’année précédente. Même si la BEAC et la BCEAO ont une facilité de découvert auprès du Trésor français, les traites sur les facilités de découvert sont sous réserve du consentement du Trésor français. Le dernier mot est celui de la Trésorerie française qui a investi les réserves étrangères des pays africains en son propre nom à la Bourse de Paris.
En bref , plus de 80% des réserves de change de ces pays africains sont déposées dans les « comptes d’opérations » contrôlés par le Trésor français. Les deux banques CFA sont africaines de nom, mais n’ont pas de politique monétaire propre. Les pays eux-mêmes ne savent pas, ne sont pas informés, à hauteur de combien la réserve de change détenue par le Trésor français leur appartient en tant que groupe ou individuellement.
Les gains de l’investissement de ces fonds du Trésor français sont censés être ajoutés à la réserve de change, mais il n’y a pas de comptabilité transmise aux banques ou aux pays, ni les détails de ces modifications. « Seul un groupe restreint de hauts fonctionnaires du Trésor français connaissent les montants figurant dans les « comptes d’opérations » où ces fonds sont investis ; si il y a un bénéfice sur ces investissements, ils ont interdiction de divulguer ces informations aux banques CFA ou aux banques centrales des états africains. ” écrit le Dr Gary K. Busch
Il est estimé que la France gère près de 500 milliards d’argent africain dans sa trésorerie, et ne fait rien pour mettre un peu de lumière sur ce côté sombre de l’ancien empire.
La finalité reste : Les pays africains n’ont pas accès à cet argent.
La France leur permet d’accéder à seulement 15 % de leur argent par an. S’ils ont besoin de plus, les pays africains doivent emprunter, à des taux commerciaux, sur les 65% de leur argents détenu au Trésor français.
Pour rendre les choses plus tragiques , la France impose un plafond sur le montant de l’argent que les pays peuvent emprunter à la réserve . Le plafond est fixé à 20 % de leurs recettes publiques de l’année précédente. Si les pays ont besoin d’emprunter plus de 20% de leur propre argent, la France a un droit de veto.
L’ancien président français Jacques Chirac a récemment parlé de l’argent des pays africains dans les banques en France. Voici une vidéo qui parle du système d’exploitation français.
3. Droit de priorité sur toute ressource brute ou naturelle découverte dans le pays
La France a la priorité en matière d’achats de toutes les ressources naturelles de la terre de ses ex- colonies. C’est seulement en cas de refus de celle-ci que les pays africains sont autorisés à chercher d’autres partenaires.
4.Priorité aux intérêts et aux entreprises françaises dans les marchés publics et constructions publiques
Dans l’attribution des marchés publics , les entreprises françaises doivent être considérées en premier lieu, et seulement après les marchés étrangers sont considérés. Le fait que les pays africains pourraient obtenir une meilleure offre financière ailleurs n’est pas pris en compte.
En conséquence, dans la plupart des ex- colonies françaises, toutes les plus grosses compagnies et acteurs économiques sont dans la main des expatriés français. En Côte d’Ivoire, par exemple, les entreprises françaises possèdent et contrôlent tous les grands services publics – eau, électricité, téléphone, transports, ports et les grandes banques. Idem dans le commerce, la construction et l’agriculture.
En fin de compte, comme je l’ai écrit dans un précédent article, les Africains vivent maintenant sur un continent possédé par les Européens !
5.Droit exclusif de fournir des équipements militaires et de former les officiers militaires des pays
Grâce à un système sophistiqué de bourses, de subventions, et les « accords de défense » attachés au pacte colonial, les africains doivent envoyer leurs officiers supérieurs de formation en France ou dans des infrastructures militaires françaises.
La situation sur le continent est telle que la France a formé et nourri des centaines, voire des milliers de traîtres. Ils sont en sommeil tant qu’ils ne sont pas nécessaires, et activés en cas de besoin pour un coup d’état ou à d’autres fins !
6. Droit pour la France de pré-déployer des troupes et intervenir militairement dans le pays pour défendre ses intérêts
Sous la dénomination « Accords de défense » attachés au pacte colonial. La France a le droit d’intervenir militairement dans les pays africains, et aussi de stationner des troupes en permanence dans des bases et installations militaires, entièrement géré par les Français.
Les bases militaires françaises en Afrique
Lorsque le président Laurent Gbagbo de Côte d’Ivoire a tenté de mettre fin à l’exploitation française du pays, la France a organisé un coup d’état. Durant le long processus pour chasser Gbagbo du pouvoir, les tanks français, les hélicoptères de combat et les forces spéciales sont intervenues directement dans le conflit, ont tiré sur des civils et tué beaucoup d’entre eux.
Pour ajouter l’injure à l’insulte, la France estime que la communauté d’affaires française a perdu alors plusieurs millions de dollars lors de la ruée pour quitter Abidjan en 2006 (où l’armée française a massacré 65 civils non armés et blessé 1200 autres.)
Après la réussite du coup d’état par la France, et le transfert du pouvoir à Alassane Ouattara, la France a demandé au gouvernement Ouattara de verser une indemnité à la communauté d’affaires française pour les pertes pendant la guerre civile.
Du fait, le gouvernement Ouattara leur a payé le double de ce qu’ils ont dit qu’ils avaient perdu en quittant.
7. Obligation de faire du français la langue officielle du pays et de la langue pour l’éducation
Oui , monsieur. Vous Devez parler français, la langue de Molière ! La langue française et une organisation de la diffusion de la culture a été créée. Appelée « Francophonie » qui regroupe avec plusieurs branches et organisations affiliées toutes contrôlées par le ministre français des Affaires étrangères.
Comme démontré dans cet article, si le français est la seule langue que vous parlez, vous auriez accès à moins de 4% de la connaissance de l’humanité et des idées. C’est très limitant.
8 . Obligation d’utiliser la l’argent de la France coloniale le FCFA
C’est la véritable vache à lait pour la France, un tel système maléfique, est dénoncé par l’Union européenne, mais la France n’est pas prête à se passer de ce système colonial qui lui offre une trésorerie d’environ 500 milliards de dollars en provenance de l’Afrique, et ce par année.
Lors de l’introduction de la monnaie euro en Europe, d’autres pays européens ont découvert le système d’exploitation français . Beaucoup, en particulier les pays nordiques, ont été consternés et ont suggéré à la France se débarrasser du système, mais sans succès.
9 . Obligation d’envoyer en France le rapport annuel du solde et de réserve
Sans le rapport, pas d’argent. Quoi qu’il en soit le secrétariat des banques centrales des ex- colonies, et le secrétariat de la réunion bi-annuelle des ministres des Finances des ex- colonies sont assurés par la France banque centrale / Trésor.
10 . Renonciation à entrer en alliance militaire avec tout autre pays , sauf autorisation par la France
Les Pays africains en général sont ceux avec le moins d’alliances militaires inter-etats. La plupart des pays ne disposent que d’alliances militaires avec leurs ex- colonisateurs ! ( drôle, mais vous ne pouvez pas faire mieux ! ).
Dans les cas où ils souhaiteraient une autre alliance, la France les garde bien de le faire.
11 . Obligation de s’allier avec la France en situation de guerre ou de crise mondiale
Plus d’un million de soldats africains se sont battus pour la défaite du nazisme et du fascisme pendant la seconde guerre mondiale.
Leur contribution est souvent ignorée ou minimisée, mais quand vous pensez que cela a pris seulement 6 semaines pour l’Allemagne pour vaincre la France en 1940, la France sait que les Africains pourraient être utiles pour conserver la « Grandeur de la France ” à l’avenir.
Il y a quelque chose de quasiment psychopathe dans la relation de la France avec l’Afrique.
Tout d’abord, la France est gravement accro au pillage et à l’exploitation de l’Afrique depuis l’époque de l’esclavage. Ensuite, il y a ce manque complet de la créativité et de l’imagination de l’élite française à penser au-delà du passé et de la tradition.
Enfin, la France dispose de 2 institutions qui sont complètement gelées dans le passé , habitées par des paranoïaques et psychopathes ” les hauts fonctionnaires ” qui répandent la crainte de l’apocalypse si la France devait être amenée à changer, et dont la référence idéologique vient toujours du romantisme du 19ème siècle. Ils sont : le ministre des Finances et du Budget de la France et le ministre des affaires étrangères de la France.
Ces deux institutions ne sont pas seulement une menace pour l’Afrique, mais pour les Français eux-mêmes.
C’est à nous qu’il revient de libérer l’Afrique, sans demander la permission, parce que je ne peux toujours pas comprendre par exemple comment 450 soldats français en Côte d’Ivoire pourraient contrôler une population de 20 millions de personnes ?
La première réaction des personnes lorsqu’ils apprennent l’existence de l’impôt colonial français est souvent une question : Jusqu’à quand ?
A titre de comparaison historique, la France a fait payé à Haïti l’équivalent moderne de 21 milliards de dollars de 1804 à 1947 ( près d’un siècle et demi ) pour les pertes causées aux marchands d’esclaves français suite à l’ abolition de l’esclavage et à la libération des esclaves haïtiens.
Les Pays africains paient la taxe coloniale depuis les 50 dernières années !
Pour Combien de temps encore ?
Cerbac.
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Le colonialisme et le néocolonialisme
On peut faire l’hypothèse qu’il existe une relation entre colonisation et sous-développement puisque les pays jadis colonisés sont les les plus pauvres de la planète
Par Guy Bajoit
S’il faut commencer par parler du colonialisme, c’est parce que les pays qui furent colonisés sont, encore aujourd’hui, à quelques rares exceptions près, les pays les plus pauvres de la planète. On peut donc, au moins, faire l’hypothèse qu’il existe une relation entre colonisation et sous-développement. Je me limiterai ici, aux grandes étapes de l’histoire coloniale et post (ou néo) coloniale, au cours des cinq derniers siècles.
L’hégémonie du Portugal et de l’Espagne
Déjà, ce sont les besoins de l’économie des pays les plus puissants, combinés avec la conjoncture politique du moment, avec les découvertes scientifiques et, bien sûr, avec beaucoup d’audace, d’imagination et de chance, qui expliquent la découverte et la colonisation de ce que l’on a appelé « l’Amérique ». Les bourgeoisies du sud de l’Europe avaient grand besoin de développer le commerce, surtout avec l’Asie (la Chine, les Indes) : elles cherchaient des épices, des soieries et surtout des métaux précieux. Mais il fallait, pour cela, faire la concurrence aux Vénitiens et aux Génois, et s’arranger avec les Turcs, qui contrôlaient le Moyen-Orient. Les Portugais et les Espagnols cherchèrent donc une voie maritime pour se rendre en Asie : les premiers en contournant l’Afrique (dès 1485 et surtout, à partir de 1497, avec Vasco de Gama) ; les seconds, en naviguant vers l’Ouest (dès 1492, après le succès de Christophe Colomb). Or, justement, les progrès de la navigation (connaissances géographiques, pilotes expérimentés, bons bateaux — la caravelle, le galion — et nouveaux instruments comme l’astrolabe nautique et l’arbalète) rendaient possible de tels projets. Le Portugal et l’Espagne financèrent de nombreuses expéditions, qui aboutirent à trouver un continent qu’ils ne cherchaient pas puisqu’ils ignoraient son existence. Et Christophe Colomb put réaliser pleinement les promesses de son nom : il porta le Christ (Christophe) en terre colonisée (Colomb) !
Dès 1493, mais surtout en 1494, avec le Traité de Tordesillas, le Pape Alexandre VI (un Espagnol) confirme le partage du « nouveau monde » entre le Portugal et l’Espagne. Et la colonisation commence : les populations indigènes sont christianisées, mais aussi réduites au servage dans les encomiendas ; des tonnes d’or et d’argent (les mines de Potosí produisent, à elles seules, cinq fois plus d’argent que toute la production européenne) sont ramenées à Séville par les galions espagnols ; les guerres, les maladies et les conditions de travail déciment la population autochtone (elle serait passée de 80 à 10 millions au cours du XVIe siècle) ; la traite des noirs, à laquelle prennent part non seulement les Portugais et les Espagnols, mais aussi les Français, les Anglais et les Hollandais, introduit une main-d’œuvre nouvelle ; des populations d’origine européenne vont y chercher fortune.
Cette « œuvre » coloniale fut légitimée par la christianisation. L’Église, après avoir douté de l’humanité des « indiens » (voir la controverse de Valladolid, où Bartolomé de las Casas plaida leur cause), admit qu’il s’agissait bien d’hommes et de femmes, et, par conséquent, justifia l’entreprise par son devoir de sauver leurs âmes, de lutter contre leur idolâtrie, leur ignorance, leur infantilisme et contre les sacrifices humains ! Ils étaient hommes, c’était entendu, mais d’un niveau inférieur : il y a, pensait-on, des hommes que Dieu à condamnés à rester esclaves, qui sont serviles par nature ! S’ils manifestaient quelque résistance (ce qu’ils ont fait), la guerre ne pouvait être que juste : c’était pour leur bien… Pour ceux que ces arguments ne convainquaient pas, on en invoquait d’autres : le droit de chacun de circuler et de s’établir partout sur la terre, la propriété commune des richesses naturelles (du sol, du sous-sol et de la mer)… Dès le départ, l’Espagne et le Portugal se heurtèrent à la concurrence des Anglais, des Hollandais et des Français, les puissances montantes de l’époque qui, elles aussi, se mirent à chercher une route vers l’Asie, et des territoires pour promouvoir leurs activités commerciales.
L’or et l’argent faciles, provenant du pillage de l’Amérique du Sud, a permis à la noblesse espagnole et portugaise de vivre dans le luxe, en achetant, notamment, des produits fabriqués dans d’autres pays européens et, paradoxalement, chez ses rivaux. La hausse des prix stimula fortement l’économie, surtout anglaise, hollandaise et française. On le sait, Marx a vu dans cette dilapidation, l’origine de ce qu’il appelait « l’accumulation primitive du capital », qui a été l’une des conditions de l’essor du capitalisme industriel, mettant fin à l’hégémonie des Espagnols et des Portugais et consacrant, du même coup, celle des Anglais et des Français.
Après environ trois siècles de résistance contre ces puissances montantes et de lutte contre des rébellions internes à leurs colonies, l’Espagne et le Portugal durent lâcher prise. Des mouvements de décolonisation, conduits par des dirigeants créoles, aidés par des Européens, finirent par l’emporter, et, au début du XIXe siècle (vers 1810-1830), les États latino-américains se constituèrent, et jouirent, au moins formellement, de leur indépendance politique, et de l’aide « protectrice » de leurs nouveaux « amis » (l’Angleterre, la France, et plus tard, les États-Unis).
L’hégémonie de la Grande Bretagne et de la France
Leur rivalité avec les Espagnols et les Portugais mena les Anglais, les Français et les Hollandais, au moins en partie, vers d’autres rivages : le nord du nouveau continent, que l’on appelait maintenant l’Amérique, ainsi que l’Afrique et l’Asie. Ils bourlinguaient depuis longtemps sur toutes les mers du monde, mais n’avaient pas, à proprement parler, installé de colonies. Ils avaient plutôt coutume d’établir des comptoirs, comme l’avaient fait aussi les Portugais, sans pénétrer profondément dans les terres, se limitant à installer des ports et à faire du commerce. Ils confiaient cette activité à des « compagnies à charte » (chaque pays avait la sienne : par exemple les Compagnies des Indes). Bien sûr, les comptoirs constituaient bien une forme de colonisation, mais très limitée, si l’on considère les méthodes des Espagnols en Amérique latine, et celles que pratiqueront ensuite les autres puissances européennes.
En Amérique du Nord, les Français et les Anglais rivalisèrent, entre eux et avec les « Indiens », pendant au moins un siècle (de la moitié du XVIIe jusqu’en 1763), pour s’approprier des territoires. Les Français arrivèrent les premiers : après les expéditions de Jacques Cartier (1534-1536), Samuel de Champlain, le père de la Nouvelle-France, fonda la ville de Québec (1608) et quelques colons commencèrent à s’installer dans la vallée du Saint-Laurent. Leurs commanditaires, cependant, furent déçus : ils cherchaient une route vers l’Asie, des métaux précieux et ils trouvèrent des fourrures, du poisson et un climat plutôt hostile ! Un peu plus bas, les Anglais s’installèrent d’abord en Virginie (1607) et en Nouvelle-Angleterre (1620 : le Mayflower). Un siècle et demi plus tard, ils occupaient de nombreuses colonies, qui se répartissaient sur toute la côte Est du sous-continent et, déjà, à l’intérieur des terres, sur la moitié Est des États-Unis et du Canada actuels. Après quelques décennies de querelles et de guerres locales, les Anglais s’imposèrent et éliminèrent les Français (Traité de Paris, 1763).
Néanmoins, les colons, d’origine anglaise principalement, jugèrent que la pression fiscale exercée par la Couronne britannique était excessive. Ils commencèrent à s’organiser pour revendiquer leur indépendance. Ils l’obtinrent, après plusieurs affrontements violents, et avec l’aide de l’armée française (victoire de Yorktown, 1781). À l’exception du Canada (qui gagna progressivement son autonomie par rapport à l’Angleterre et ne fut vraiment indépendant qu’après la Première Guerre mondiale) et de quelques autres petits territoires, on peut dire qu’au cours des trois premières décennies du XIXe siècle, le continent américain — les États-Unis d’abord, les pays latino-américains ensuite — se libérèrent de la colonisation, au moins formellement (car, dans les faits, les Anglais, principalement, prirent la relève des Espagnols et des Portugais en Amérique Latine). La colonisation se poursuivit donc sous d’autres latitudes : en Asie, en Afrique, et dans le monde arabe, sous l’égide de la Grande-Bretagne, de la France et, secondairement, de quelques autres pays européens.
Les Anglais surtout construisirent un empire colonial énorme : « Vers 1914, alors que le Royaume-Uni compte 45 millions d’habitants, regroupés sur 310 mille kilomètres carrés, il régit le destin d’une Inde peuplée de 322 millions d’habitants et vaste de ses 5 millions de kilomètres carrés, gouverne directement soixante colonies dépendantes, peuplées de 5,2 millions d’habitants dispersés sur plus de 8 millions de kilomètres carrés et conserve des droits étendus dans cinq dominions, où 24 millions d’hommes, la plupart de race blanche, occupent 19 millions de kilomètres carrés » [1]. Cet empire comportait principalement le Canada, l’Inde, l’Australie et pratiquement tout l’Est de l’Afrique (une continuité territoriale s’étendant du nord au sud du continent, de l’Égypte à l’Afrique du Sud). Il s’agrandit encore, après le premier conflit mondial, lorsque certaines possessions coloniales allemandes (Traité de Versailles, 1919) et une partie de l’Empire ottoman furent confiées à la Grande-Bretagne.
Bien que plus modeste, l’empire colonial français fut lui aussi très vaste. En Afrique du Nord, la conquête de l’Algérie, commencée en 1830, se heurta à la résistance du sultan Abd-el-Kader, qui dura jusqu’en 1847 ; la Tunisie devint protectorat en 1883 ; le Maroc, très disputé par les autres puissances, ne le devint qu’en 1912. « En 1914, l’influence française s’étend à l’Afrique du Nord […], à l’Afrique occidentale et à l’Afrique équatoriale placées sous l’autorité de gouverneurs, à l’Indochine (Cochinchine, Annam, Tonkin, Cambodge, Laos) […], à Madagascar, aux Antilles, à l’Océanie et aux comptoirs de l’Inde » [2]. Comme les Britanniques, les Français profitèrent du dépècement de l’empire ottoman et de la fin de la colonisation allemande.
D’autres pays européens participèrent, beaucoup plus modestement, à la colonisation : la Belgique eut le Congo (qu’elle considérait comme sa dixième province, 86 fois plus grand qu’elle !), puis le Ruanda-Urundi ; l’Italie eut la Libye et l’Éthiopie (qu’elle arracha de haute lutte en 1936) ; la Hollande, qui avait participé à la première phase de la colonisation (avec ses compagnies à charte et ses comptoirs), participa aussi à la seconde, avec l’Indonésie et la Guyane ; il en fut de même pour l’Espagne, qui eut une partie du Maroc et du Sahara, et pour le Portugal, qui garda l’Angola, la Mozambique et les Îles du Cap Vert jusqu’en 1974.
La course aux matières premières et aux produits alimentaires était la raison principale de cette seconde phase : le développement du capitalisme industriel en Europe occidentale en avait le plus grand besoin. Mais il fallait aussi trouver des débouchés pour investir des capitaux et des marchés pour les produits de l’industrie. En outre, au tournant du XXe siècle, de nombreux émigrants européens cherchaient à s’installer ailleurs pour fuir le chômage et la pauvreté.
Le régime dit « de l’exclusif » s’imposait : chaque métropole s’assurait le monopole du commerce avec ses colonies. Seuls les Anglais étaient un peu plus souples que les autres dans l’application de cette règle : ils pouvaient se le permettre parce qu’ils craignaient moins la concurrence, étant donné les performances de leurs industries. Déjà, entre colonisateur et colonisé, la division du travail s’appliquait : les colonisés devaient se contenter de produire des matières premières (du coton, par exemple), alors que les métropoles se réservaient les produits manufacturés (comme le tissu). Toute tentative d’une colonie pour produire et vendre des produits finis était systématiquement détruite, par n’importe quel moyen (l’Inde et l’Égypte l’apprirent à leurs dépens), afin d’éviter toute concurrence avec l’industrie européenne.
La justification idéologique de cette seconde étape de l’entreprise coloniale ne se faisait plus tellement au nom de la christianisation (même si cette préoccupation ne fut pas oubliée), mais plutôt au nom de la civilisation moderne : il s’agissait d’apporter la culture et la technologie à des populations arriérées, ignorantes et souvent barbares, et de leur apprendre, (très) progressivement, à se gouverner seules.
L’hégémonie des États-Unis et de l’Union Soviétique
Le régime colonial européen dura jusqu’après la Seconde Guerre mondiale. Celle-ci, en effet, modifia fondamentalement la répartition des cartes de l’hégémonie entre les États : les Soviétiques avaient gagné la guerre sur le front de l’Est et les États-Unis, avec l’aide des Alliés, l’avaient gagnée sur le front de l’Ouest ; tous les autres États, notamment la France, n’avaient plus qu’à reconnaître, modestement, ces faits. La Conférence de Yalta (1945) réunit donc les vainqueurs — Staline, Roosevelt (puis Truman) et Churchill — et confirma l’hégémonie des deux nouvelles puissances.
Fondamentalement, les nouveaux maîtres du monde avaient besoin, pour l’expansion de leur économie, de briser les frontières des marchés exclusifs instaurés par les métropoles coloniales européennes, et de construire des zones d’influence, aussi vastes que possible. Puisqu’ils étaient deux prétendants à vouloir se partager le monde, leur entente initiale n’a pas tardé à se dégrader et fut bientôt remplacée par les relations tendues, que l’on a appelé guerre froide. Ils se partagèrent d’abord l’hégémonie sur les pays européens, qu’ils venaient de libérer du fascisme : un rideau de fer et, à Berlin, un mur séparèrent le monde de l’Est de celui de l’Ouest. L’ingérence était pratique courante. Elle passait par des pressions économiques, politiques et militaires : plus négociées à l’Ouest (le Plan Marshall, les investissements des multinationales, la participation à l’Otan) ; plus imposées et, au besoin, violentes, à l’Est (Pacte de Varsovie, Comecon, interventions à Berlin, Varsovie, Budapest, Prague…).
Dans le « troisième » monde (que l’on commençait à appeler le tiers monde), la constitution de zones d’influence passait par la destruction du système colonial européen. Le but des États-Unis et de l’URSS fut donc de favoriser les indépendances nationales des pays colonisés, comme le voulait déjà, après la Première Guerre mondiale, la Société des Nations, et comme l’avait confirmé, après la Seconde, l’ONU. L’heure était à la décolonisation, et de nombreux dirigeants politiques du tiers monde ont su saisir cette occasion historique. Dès la fin des années 1940, l’Indonésie, l’Inde, la Chine lancèrent le processus de libération nationale, qui fut suivi, dans les années cinquante, par plusieurs autres pays, surtout asiatiques et arabes, et qui se généralisa au cours de la décennie suivante. Parfois, le processus se déroula sans trop de heurts (le cas du Congo belge, par exemple) ; d’autres fois, l’ancienne métropole résista longtemps et il fallu arracher l’indépendance par la lutte armée (le cas de l’Algérie, notamment).
Dans beaucoup de pays du tiers monde, les grandes puissances réussirent à s’allier avec des dirigeants nationaux qui contrôlaient fermement le pouvoir et se situaient clairement dans l’un ou l’autre camp ; parfois cependant, le contrôle du pouvoir resta incertain, passant d’un camp à l’autre, avec des guerres civiles incessantes ; certains encore tentèrent, avec des succès très divers, de rester neutres (le mouvement des non-alignés), de jouer sur la rivalité entre les puissances, avec l’aide des anciennes métropoles.
Il s’ensuivit la mise en place d’un « nouvel ordre politique et économique international ». On a dit de cet ordre qu’il était néocolonial, parce que, dans beaucoup de cas, l’indépendance des nouveaux États était plus formelle que réelle. Même si le discours disait exactement le contraire, le système reposait, en effet, sur l’ingérence, dont le but était de mettre au pouvoir des « amis », et de les aider à s’y maintenir (notamment par une coopération militaro-industrielle), en éliminant les forces contraires. Outre l’ingérence politique, cet ordre reposait aussi sur l’endoctrinement idéologique et, bien entendu, sur la dépendance économique.
L’endoctrinement consistait à convaincre les populations de ces nouvelles nations de la légitimité de cet ordre. Après avoir voulu les christianiser, on a voulu les civiliser, et voici que maintenant, on voulait les développer, c’est-à-dire les industrialiser, en les modernisant. Mais, pour atteindre ce but, chaque camp imposait sa méthode, son modèle : le capitalisme versus le communisme. Les courants d’opposition étaient étroitement surveillés par des services de sécurité (aidés soit par la CIA, soit par le KGB), et plus ou moins durement réprimés.
Malgré les beaux discours sur le développement et l’industrialisation, la dépendance économique a été généralement maintenue par les grandes puissances, avec l’aide de leurs « complices » locaux souvent corrompus. Rares sont les États qui ont réussi à y échapper : il fallait, pour cela, des circonstances exceptionnelles, comme celles que connaissent la Corée du Sud ou Taiwan, à cause de leur position géostratégique. La coopération, même quand elle a été conçue et réalisée avec les meilleures intentions, n’a pas suffi à relever un tel défi. On peut même penser qu’une partie de cette aide (pas toute, heureusement) a surtout servi à huiler les engrenages de ce système, et ce, de plusieurs manières : soit en facilitant les transferts du Sud vers le Nord (pour rembourser les dettes, pour rapatrier des bénéfices, pour importer des produits manufacturés) ; soit en ouvrant la voie aux investissements des multinationales ; soit encore en favorisant le maintien au pouvoir de dirigeants locaux complices (dépenses de répression, de prestige) ou même, en s’en servant pour les corrompre. Ce n’est donc pas sans raison que l’on a dit de cet impérialisme qu’il était « néocolonial » : il reprenait et poursuivait, ce qui avait fait l’essence du colonialisme.
Certains s’étonneront de nous voir traiter de la même manière la domination des États-Unis et celle de l’URSS. C’est que, même si chaque puissance avait évidemment sa manière de mener ses relations avec les nouveaux États, l’idée centrale était la même : constituer, grâce à une ingérence politique et militaire, une zone d’influence, économiquement exploitable et/ou stratégiquement utile, en maintenant dans la dépendance des gouvernements et des peuples étrangers. Que les uns aient fait cela au nom du capitalisme et les autres au nom du communisme n’y change, tout compte fait, pas grand-chose !
La domination des grandes organisations supranationales
Le système néocolonial que nous venons de décrire est encore bien vivant. Pourtant, depuis la fin de l’empire soviétique, il est en train de changer suffisamment pour que l’on puisse déjà augurer de la mise en place d’un nouvel ordre politique et économique mondial. Voyons cela de plus près.
Après quarante ans de rivalité, de guerres indirectes, l’URSS s’effondre, les États-Unis triomphent, et du même coup, ils imposent au monde entier la légitimité de leur modèle, le capitalisme néolibéral. Toutefois, pendant la même période, beaucoup d’autres choses ont changé, qui concernent notre propos. Nous observons trois mouvements de fond.• Premier mouvement : l’organisation d’un système dans lequel les acteurs qui exercent l’hégémonie ne sont plus (ou en tout cas, plus seulement) des États, où la base territoriale d’exercice de l’hégémonie n’est plus la nation et où le droit d’ingérence est de plus en plus reconnu. Beaucoup d’organisations internationales (les Nations Unies et toutes les instances qui en dérivent ; le FMI ; la Banque mondiale ; l’OMC ; les unions économiques et politiques régionales, etc.), cherchent à imposer leurs décisions à toutes les nations du monde ou, tout au moins, à une grande partie d’entre elles. Ces organisations cherchent à faire prendre aux États nationaux des engagements qu’ils doivent respecter (même s’ils se font parfois tirer l’oreille) et qui réduisent leur autonomie de décision : après d’innombrables tractations, ils ont signé une multitude de chartes, d’accords, de règlements… Progressivement, un droit et une jurisprudence se constituent ; des tribunaux internationaux interviennent dans les affaires intérieures des États nationaux et prononcent des jugements, des condamnations auxquelles ceux-ci sont obligés de se plier. Peu à peu – avec peine il est vrai, car c’est sans doute le niveau le plus difficile –, on observe des tentatives visant à mettre en place une force militaire agissant au niveau mondial.
• Second mouvement : le phénomène de mondialisation des échanges économiques, selon la logique néolibérale. Les barrières économiques qui protégeaient les nations s’affaiblissent ou tendent à disparaître ; le commerce international s’accroît ; les investissements directs étrangers sont en pleine expansion ; le volume des transactions financières augmente de façon effrénée ; les coûts de transport se réduisent de plus en plus ; les nouvelles technologies dans le domaine des communications se diffusent partout ; les informations circulent avec une très grande fluidité sur toute la surface du globe…
• Troisième mouvement : le déplacement vers les pays du Sud de certaines des activités du capitalisme industriel. On peut penser que ce déplacement est une des conséquences du passage des pays du Nord à une nouvelle étape du développement technologique et économique. En effet, leur nouveau modèle repose plus sur l’accumulation de profits commerciaux que sur l’extraction de la plus-value du travail, du moins, celle de leurs propres travailleurs. Il est donc vital que cette plus-value salariée soit produite ailleurs. Du coup, les pays du Sud et de l’Est sont invités, par les grandes organisations du pilotage économique mondial, à s’industrialiser. Quelques-uns semblent être en bonne voie : la Russie, certains anciens satellites de l’URSS, les « dragons » asiatiques, la Chine, l’Inde, le Brésil et certains pays d’Amérique du Sud ou du Moyen-Orient. Pour piloter cette évolution – entendez, pour imposer cette nouvelle division du travail –, il n’y a plus qu’un seul modèle : le néolibéralisme, installé dans les pays dépendants à grands coups d’ajustements structurels.
Ces trois mouvements essentiels indiquent clairement, nous semble-t-il, qu’un nouveau mode d’exercice de l’hégémonie est en train de se mettre en place. Il ne repose plus sur la base territoriale des nations, mais bien sur des réseaux d’échange d’informations et de capitaux, contrôlés par des organisations internationales et par les États les plus puissants (G8). Quant aux légitimations idéologiques, elles suivent cette évolution. Après la christianisation, la civilisation et le développement, c’est maintenant au nom de la lutte contre la pauvreté et contre le terrorisme que les pays hégémoniques prétendent imposer leurs vues. Le développement est peu à peu remplacé par l’aide alimentaire, et le terrorisme prend la place du communisme pour former le nouvel « axe du mal ». Ainsi, quand on bombarde l’Afghanistan pour en chasser les Talibans, des avions y déversent aussi des rations alimentaires !
De la même manière que, jadis, le Nord avait intérêt, pour mieux justifier le colonialisme, à croire et à faire croire à la répugnante impiété et à la monstrueuse barbarie des peuples du Sud, aujourd’hui il a intérêt à croire et à faire croire que le Sud constitue pour le Nord une épouvantable menace terroriste. Après avoir inspiré la pitié, voici que les pauvres font peur : on ne peut pas laisser traîner des « armes de destruction massive » en Irak, ni laisser l’Iran ou la Corée du Nord fabriquer tranquillement la bombe atomique ! Ainsi, au nom de la répression, soigneusement légitimée, dudit terrorisme, les États impérialistes peuvent, en invoquant la démocratie et les droits de l’homme, justifier toutes leurs ingérences dans les pays du Sud. Et, du même coup, créer dans le Sud exactement les conditions qui… y font progresser plus de terrorisme encore ! Car il est évident que la manière dont les Etats-Unis, la Russie, la Chine ou Israël gèrent la menace terroriste ne fait que la renforcer en Afghanistan ou en Irak, en Tchétchénie, au Tibet ou en Palestine ! Remarquable mystification idéologique (on cache des intérêts sordides derrière des idéaux pleinement légitimes) et cercle terriblement vicieux : les États hégémoniques entretiennent ou accentuent un phénomène néfaste, qu’ils ont intérêt à maintenir pour pouvoir le réprimer, et du même coup, justifier leurs ingérences à finalités économiques ou politiques. Cependant, rien de nouveau sous le soleil : les Espagnols et les Portugais faisaient déjà cela avec le « nouveau Monde » !
par Guy Bajoit[1] Encyclopaedia Universalis, vol. 4, 1993 p. 547.
[2] Encyclopaedia Universalis, vol. 9, 1993, p. 846.
Source: Iteco.be
Tags : Colonialisme, colonisation, décolonisation, guerre froide, impérialisme, ressources naturelles,