Étiquette : constitution

  • «Les partis de l’opposition sont défaillants puisqu’ils n’arrivent pas à s’entendre sur une plateforme commune» (politologue)

    Mohamed Hennad, politologue : «Les partis de l’opposition sont défaillants puisqu’ils n’arrivent pas à s’entendre sur une plateforme commune»

    Reporters : Les initiatives de sortie de crise par le dialogue des partis politiques, tous courants confondus, ainsi que celles de la société civile se multiplient. Est-ce une bonne chose d’avoir une multitude de propositions ?
    Mohamed Hennad : Est-ce une bonne chose ? Oui et non ! Oui, parce que cela signifie que les forces politiques et sociales sont à pied d’œuvre pour essayer de contribuer à la résolution de la crise au lieu de se complaire dans leur passivité coutumière, même relative.

    Non, parce que cela signifie que lesdites forces n’ont pas encore pris conscience de la spécificité du moment historique, à savoir la nécessité de s’entendre sur une plateforme commune pour sortir le pays de la crise politique laquelle a déjà trop duré. Qui plus est, si la crise se prolongeait, ces forces se disperseraient encore plus, pour le bonheur du Pouvoir !

    Les partis qui proposent des solutions de sortie de crise mettent des préalables pour aller au dialogue parmi lesquels «l’instauration d’un climat d’apaisement qui passe, entre autres, par la libération des détenus d’opinion. Jusqu’à l’heure, il n’y a même pas un début de concrétisation de cet important préalable. A votre avis, cet état de fait est-il de nature à décourager même ceux qui croient au dialogue et qui veulent y aller ?

    Tout cela est classique : à chaque fois qu’il y a crise politique il y a un problème de confiance qui se pose pour l’opposition à l’égard du Pouvoir. Et Dieu sait combien cette confiance nous fait défaut ! Dans l’état présent des choses, les forces politiques et sociales ont besoin de préalables pour tester la bonne foi du Pouvoir et espérer aller de l’avant avec lui.

    Parmi ces préalables qui reviennent souvent, il y a, effectivement, ceux relatifs à l’installation d’un climat d’apaisement et la libération des prisonniers politiques. Mais pas seulement, puisqu’il s’agit aussi d’ouvrir le champ politique et de ne pas arrêter les citoyens pour leurs opinions. Mais pour le moment, les tenants du pouvoir semblent faire la sourde oreille ; ce qui est de nature à ne pas favoriser un climat de dialogue que tout le monde semble appeler de ses vœux.

    Parmi les autres préalables, les deux blocs des partis de l’opposition, que ce soit les «Forces de l’alternative démocratique» ou les «Forces du changement» mettent en avant le départ du gouvernement Bedoui ainsi que le départ de tous les symboles du système décrié. Dans le cas où les choses restent telles qu’elles sont, cela pourrait-il entraver l’option du dialogue ?

    Après trois mois d’intérim, les choses restent en l’état. Le Pouvoir continue à parler de dialogue avec les mêmes termes, sans tenir compte du problème de confiance qui se pose entre lui et les forces politiques et sociales du pays.
    Pour l’opposition, il faut se refuser à un jeu perdu d’avance puisqu’il se fait avec des forces qui refusent qu’il y ait des règles à ce jeu ! Aussi, le remplacement du gouvernement Bédoui par un autre composé de personnalités consensuelles devrait constituer un préalable non négociable.

    Mais, ceci dit, les deux blocs de l’opposition demeurent, pour le moment, défaillants puisqu’ils n’arrivent toujours pas à s’entendre sur une plateforme commune dont ils peuvent se prévaloir devant un pouvoir et lui faire comprendre que ce n’est plus possible de continuer comme à l’accoutumée.

    Lors de la dernière rencontre du Chef de l’Etat avec son Premier ministre, il a été procédé à «l’examen des mesures que l’Etat envisage de prendre en vue d’accompagner le processus de dialogue inclusif (…)», selon un communiqué de la présidence de la République. L’Etat ne semble pas prêt pour le dialogue puisqu’il «envisage» de prendre des mesures «en vue de…», ce qui veut dire que rien de concret n’a été fait. Est-ce normal que l’Etat qui prône le dialogue n’ait pas encore pris des mesures concrètes alors que les partis semblent plus actifs ?

    En l’occurrence, je préfère parler plutôt de Pouvoir que d’Etat. L’échange dont on nous a fait part entre un « Chef d’Etat » – dont l’intérim est arrivé à terme – et un Premier ministre fortement contesté a été, comme d’habitude, dans le plus pur style de la langue de bois.

    La rencontre démontre l’obstination du Pouvoir, lequel veut, apparemment, un dialogue sans préalable, c’est-à-dire non régi par des règles mutuellement acceptées, parce qu’il tient à en être le seul maître. Qui plus est, il donne l’impression qu’il navigue à vue soit parce qu’il est à court d’idées et acculé soit parce qu’il mise sur le pourrissement de la situation afin d’imposer, pour survivre, une sortie de crise à sa manière.

    Tags : Algérie, dialogue, partis politiques, armée, constitution,

  • Algérie : Entamer le changement

    La santé va au plus mal. C’est le ministre qui qui pose son diagnostic à travers les symptômes les plus apparents de la déficience dans la prise en charge des patients et de la gestion des établissements hospitaliers. Ce paradoxe entre les énormes ressources financières injectées dans le système des soins et ses piètres performances n’est toutefois pas nouveau.

    Les prédécesseurs de l’actuel ministre, entre autres, ont tous relevé cette inadéquation et posé autant de fois ce même diagnostic sans que la situation n’ait évolué d’un iota dans le bon sens.

    Aujourd’hui le pays a besoin de solutions pratiques qui donnent des résultats sur le terrain en matière de qualité des prestations et qui ont des répercussions positives sur la charge financière. Les précédentes ont jusque-là totalement échoué, pour la bonne raison que le système dans son entièreté n’est pas tourné pour atteindre un tel impact et que les tergiversations autour du principe de la gratuité des soins et des plans de sa remise en cause provoquaient l’émergence d’appétits aussi féroces que ceux déjà en place, nourris par la gabegie qui y règne.

    Creuser une franche tranchée entre les sphères des intérêts permettrait déjà de solutionner à moitié le problème ; l’autre moitié se dissoudra avec l’assainissement d’une administration trop impliquée dans le jeu des affaires.

    Contrairement à l’idée répandue, l’accès aux soins n’est pas gratuit, il est financé par les deniers publics. Verrouiller les accès aujourd’hui faciles à la dépense stérile et impunie est le seul moyen réaliste et efficace pour entamer le changement de la culture prévalant dans le système actuel et amener ce dernier à se soumettre à une gestion plus conforme aux canons de l’économie de la santé.

    Ne pouvant plus être entretenue, toute la fumée qui se dégage aujourd’hui à travers les comportements anomiques des uns et des autres finira forcément par se dissiper pour laisser place aux questions sérieuses de la formation, de l’organisation, de l’équité dans l’accès aux soins, de la performance, de la recherche médicale et, pourquoi pas, de la contribution à l’économie nationale à travers le tourisme médical, à l’instar de ces pays qui nous en administrent la leçon alors qu’ils ne sont pas forcément mieux dotés que l’Algérie.

    Horizons, 1 jui 2019

    Tags : Algérie, transition, élections, Bouteflika, Hirak, démocratie, constitution, article 102,

  • Migration, Rif, Afrique, service militaire: le Maroc illibéral reprend la main

    Joseph Paoli

    25 octobre 2018

    Le Maroc est un pays de grands changements déclarés et de lents changements effectifs. Ce mélange dissonant d’attitudes contraires a cependant, depuis presque trente ans, créé et maintenu un équilibre aussi improbable qu’indéniable. L’ampleur du changement proclamé servait de guide au changement réel, qui poursuivait son chemin à petit pas, parfois claudiquant, et pourvoyait en espoir ceux qui s’y étaient engagés, la plupart de bonne foi. D’une certaine manière, le Maroc politique a vécu au superlatif depuis la dernière décennie du règne d’Hassan II. Pour qu’un tel fonctionnement procure la paix publique, dans un pays de fortes inégalités, de contrôle social plus ou moins pesant et de transition démocratique inaccomplie, et parvienne, vaille que vaille, à intégrer la plupart des acteurs politique comme ceux de la société civile et une large partie des citoyens, il faut qu’il y ait un discours du changement cohérent et audible et que les faits à même de le démentir ne s’accumulent pas de manière flagrante. Depuis quelques mois, ce discours est en panne et les faits contredisant les perspectives ouvertes se sont accumulés à tel point qu’ils les ont largement obscurcies.

    Il y a eu au moins six discours marquants et porteurs d’espoir (du moins pour les libéraux), six grandes narrations, depuis les années 1990 : le discours sur les droits de l’homme, le discours sur l’alternance (et partant sur « la transition démocratique »), le discours sur le développement humain, le discours sur la nouvelle Constitution, le discours sur l’avenir africain du pays et, intégré à celui-ci, le discours sur la nouvelle politique migratoire. C’est, bien sûr, peu de dire que les dispositions libérales et pluralistes de la nouvelle Constitution (2011) n’ont pas été mises en œuvre. Cependant, on s’attendait à cette lenteur et à une accumulation d’impasses. Personne n’avait jamais envisagé, par exemple, que l’égalité entre les hommes et les femmes, proclamée par ladite Constitution, aboutirait à une discussion orientée vers l’adoption d’une loi abrogeant leur inégalité devant l’héritage. Il était clair que ce n’était qu’un « reminder » dépourvu d’agenda. Ce qui se passe depuis quelques mois, en revanche, est plus préoccupant, parce qu’il y avait quelques bonnes raisons de penser que ça ne devait pas arriver.

    Il y a eu, tout d’abord, la répression du Hirak, le mouvement de protestation dans le Rif découlant directement de l’inefficacité et, pire encore, de l’ineffectivité avérée et persistante des politiques publiques destinées à développer la région. Il n’est pas question, ici, de revenir sur l’étiologie de ce mouvement social ni de se prononcer sur la pertinence et la perspicacité de toutes les actions entreprises. On se bornera à constater que le Hirak comme ses personnalités et, plus largement, ses acteurs ont été traités comme les membres d’une conspiration portant atteinte à la sécurité de l’Etat. Le leader du mouvement a été condamné à vingt ans de prison. Il risquait la peine de mort (précisons qu’elle n’est plus en usage au Maroc bien que non abolie). Le constat est simple : lorsqu’une protestation légitime des citoyens est traitée comme une sédition, même si elle s’accompagne d’une certaine « casse », on se situe hors des cadres de la démocratie, laquelle ne réside pas, et de loin, dans la seule application du droit (ce qui peut être l’attribut de toutes sortes de régimes) mais dans l’impérieuse nécessité du dialogue. Le contraste avec le traitement du Mouvement du 20 février, au moment de ce que l’on s’est plu à nommer « le Printemps arabe », est frappant. La stratégie des gouvernants avait alors été d’éviter la répression désordonnée et obtus et de promouvoir le changement, même s’il s’agissait d’une variation sur la célèbre formule de Lampedusa selon laquelle « il faut que tout change pour que tout reste comme c’est » (dans le cas du Maroc, ce fut plutôt : « il faut que tout change pour que tout ne change pas trop vite »). L’attitude face au Hirak illustrait, au contraire, un raidissement des gouvernants ou une montée de l’influence des gouvernants adepte du raidissement. Ce n’était pas bon signe.

    Durant l’été, est arrivée la nouvelle du rétablissement du Service militaire. Celui-ci a été annoncé dans un contexte de focalisation des politiques publiques sur la jeunesse et son éducation, qui ont, elles aussi, assez largement échoué. L’Armée apporterait une formation et des valeurs à des jeunes qui n’en auraient pas. En général, la plupart des militaires professionnels sont d’accord pour considérer que ce n’est pas leur métier ; leur métier, réside dans la défense active du pays, généralement par la projection ponctuelle, sur des théâtres d’opération extérieurs, de combattants (de préférence) expérimentés. Il en découle que tout ce qu’une Armée peut offrir à la jeunesse de son pays, c’est de la discipline et les valeurs rugueuses qui lui sont liées. S’agissant du Maroc et après la répression du Hirak, on ne pouvait trouver de message plus négatif à donner à cette jeunesse : la contrainte par corps pour compenser l’échec des politiques la concernant. L’annonce elle-même a témoigné d’un rare amateurisme du point de vue de la communication politique ou d’un profond dédain vis-à-vis de l’opinion publique. Un projet d’une telle portée sociétale peut-il être annoncé et adopté par un gouvernement sans la moindre concertation avec la société civile, sans le moindre débat public préalable, sans la moindre discussion ? Au-delà de la déception démocratique qu’une telle attitude provoque, se pose la question de la faisabilité de la chose et donc de la précipitation de l’annonce. Le Maroc, on le sait, compte une importante communauté résidant à l’étranger, en grande partie composée de binationaux. Tous les jeunes gens appartenant à cette communauté devront-ils interrompre leur vie dans leurs pays de résidence pour aller faire leur service militaire au Maroc, y compris ceux qui n’en parlent que pas ou mal la langue ? Devront-ils, sinon, renoncer à s’y rendre tant qu’ils n’auront pas dépassé quarante ans, âge à partir duquel ils ne seront plus soumis à cette obligation ? On imagine ce que représenterait pour le Maroc une telle coupure avec une partie de sa diaspora. Des listes d’exemptions complètes ou temporaires ont, cependant, fini par circuler : il y aurait les Marocains résidant à l’étranger, les binationaux, les enfants uniques, les mariés, les étudiants, les titulaires d’un emploi… Sans doute, faudra-t-il attendre la rédaction et le vote de la loi pour savoir ce qui sera retenu. Toutefois, le Gouvernement semble être pris entre deux positions également dommageables : soit il met en œuvre l’essentiel des exemptions évoquées et le service militaire apparaît bel et bien comme une servitude inégalitaire imposée aux catégories déscolarisées et sans emplois, considérées comme potentiellement dangereuses ; soit il adopte une conception égalitaire et celle-ci devra alors inclure les Marocains résidants à l’étranger, les étudiants, les titulaires d’un emploi, ce qui créera vraisemblablement un large mécontentement parmi les groupes sociaux qui estiment devoir en être exemptés. Dans les deux cas, il n’en sortira pas indemne et personne n’en tirera aucun gain.

    Le mois d’août a également été marqué par le retour de la traque aux migrants subsahariens. Alors que le Maroc s’était, non sans panache, engagé en 2013 dans une politique volontariste de régularisation de ces derniers, avec une deuxième vague de régularisation lancée en 2016, cette reprise soutenue de la traque et des déplacements forcés vers le sud du pays, voire des expulsions sommaires, semble indiquer, sinon un pur et simple revirement dans la politique suivie depuis cinq ans, du moins un coup d’arrêt à celle-ci. Ainsi qu’en ont témoigné de nombreuses victimes et des acteurs associatifs bien informés, ces opérations ont été menées avec brutalité et n’ont pas toujours pris la peine de distinguer entre les migrants régularisés et ceux qui ne l’étaient pas, entre les migrants et les réfugiés, c’est-à-dire des personnes immatriculées par le Haut-commissariat aux réfugiés des Nations-Unies et donc protégées par le droit international. La rétention des personnes à déplacer, notamment à Tanger, a eu lieu et continue sans doute à avoir lieu dans des conditions dégradantes d’entassement et de maltraitance. Le prétexte de lutter « contre les réseaux de trafic humain » ne change rien au fait que c’est une population particulièrement vulnérable qui s’est trouvée à nouveau et maltraitée et stigmatisée ; du reste, c’est bien cette population que l’on entend contrôler et non les dits réseaux, puisque le but poursuivi – en premier lieu par l’Europe qui fait pression sur le Maroc – est tout simplement d’empêcher les Africains de traverser la Méditerranée, que ce soit par eux-mêmes ou avec l’aide d’autrui. Cette attitude des autorités marocaines apparaît en flagrante contradiction, non seulement avec les principes humanistes avancés pour faire valoir la nouvelle politique migratoire du pays, mais aussi avec sa politique africaine, qui s’était notamment prévalu de l’accueil fraternel fait aux habitants du continent. En témoigne le discours du roi tenu à Addis-Abeba, le 31 janvier 2017, alors que le Maroc réintégrait l’Union africaine. De fait, l’attitude actuelle des autorités marocaines, brutale, indécente et indiscriminée, ne peut manquer d’avoir des répercussions sur la perception du pays par ses voisins du Sud. Comme il est impensable, par son ampleur et sa durée, que cette traque soit un simple et accidentel emballement de l’appareil sécuritaire, une question de fond se pose : pourquoi le Maroc est-il prêt à risquer de mettre à mal son image, sa diplomatie et ses intérêts en Afrique ? Peut-être est-ce une réaction au piétinement du processus d’adhésion à la CEDEAO, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest ; peut-être aussi une partie des acteurs influents de la gouvernance du pays est-elle en train de parvenir à faire prévaloir l’idée que le partenariat avec l’Europe passe avant la poursuite d’un destin africain. Dans ce cas, participer au gardiennage des frontières européennes d’outre Méditerranée est incontestablement plus important que se préoccuper du sort et des souffrances des migrants subsahariens.

    Ce gardiennage renforcé des frontières européennes a provoqué, le 25 septembre dernier, la mort d’une jeune marocaine qui tentait de rejoindre l’Espagne, avec un groupe de compatriotes, sur une petite embarcation. Les garde-côtes de la Marine royale ont ouvert le feu sur celle-ci. Trois autres personnes ont été blessées. Les autorités ont déclaré qu’il s’agissait de stopper l’embarcation et que les garde-côtes ignoraient la présence de passagers à son bord. Sans épiloguer sur ce qu’il y a de douteux dans cette explication – comment les garde-côtes pouvaient-ils ne pas envisager qu’il y ait des passagers dans un lieu où ils sont habitués à patrouiller, précisément pour intercepter les migrants ? – on évoquera seulement l’aspect le plus déconcertant et le plus révélateur de ce drame : le silence officiel qui l’a suivi. Le Chef du Gouvernement et les ministres, les hauts gouvernants du pays n’ont pas éprouvé le besoin d’exprimer ne serait-ce que leur compassion. Pour bien comprendre ce que cette attitude a, tout à la fois, d’étonnant et de révélateur, il suffit d’imaginer ce qui se serait passé en France si un corps militarisé, dans une opération de police, avait blessé mortellement une étudiante de vingt ans tentant de franchir une limite interdite sans constituer une menace pour personne. Même les pires des partisans de l’ordre auraient éprouvé le besoin de dire quelque chose de vaguement humain. Le ministre de l’Intérieur aurait parlé, le ministre des Armées aurait parlé, le Premier ministre aurait parlé et probablement aussi le Chef de l’Etat. Ils auraient parlé par réelle compassion, sans doute, par calcul politique, certainement, ou tout simplement par obligation, par devoir en un mot. Pourquoi ? Parce qu’ils se seraient sentis, parce qu’ils se sentent tenu par l’opinion, y compris par l’opinion minoritaire, de leurs concitoyens. Il est clair qu’au Maroc, sur certains sujets, les gouvernants ne se sentent pas tenu par l’opinion ou ne croient tout simplement pas qu’il existe un devoir politique de parler. Sans doute les excès de parole, de propos et de commentaires rendent-ils le débat démocratique parfois inaudible et insupportable, mais, à tout prendre, cela vaut mieux, bien mieux que le silence.

    Dans un récent article, un éditorialiste marocain, Zouhair Yata, posait la question : « Le Maroc va mal, mais que faire ? ». Diffusé sur Facebook, son éditorial a recueilli de nombreux commentaires, positifs aussi bien que négatifs. Les commentaires négatifs prenaient l’éditorialiste à partie, affirmant que le Maroc était bel et bien en marche vers un avenir digne de lui. Sans doute le Maroc a-t-il accompli plusieurs étapes considérables depuis une trentaine d’années et sans doute a-t-il le potentiel et la volonté d’aller plus loin. Il n’en demeure pas moins que, pour le moment, il est à l’arrêt. Les grands discours qui soutenaient les petits pas sont pris à revers par un subit raidissement des autorités. Dans cette immobilité crispée, tout ce qui ne va pas dans la machinerie qui faisait avancer le pays devient cruellement visible, et notamment la persistance d’une culture politique et d’une pratique gouvernementale foncièrement illibérales et non démocratiques.

    Source: telos-eu.com

    Tags : Maroc, social, monarchie, constitution, répression, Hirak, Rif, Jerada, Zagora,

  • La monarchie marocaine et sa conception de la constitution

    Hassan Zouaoui

    Depuis les premières années de l’indépendance, la question constitutionnelle pèse sur le rapport entre la monarchie et les partis du mouvement national. L’ensemble des crises politico-institutionnelles se ramènent pour l’essentiel à la problématique générale du pouvoir constituant du Roi, c’est-à-dire à sa conquête, à son exercice et à son aboutissement. En témoigne l’élaboration de toutes les constitutions marocaines.

    La fabrication royale de la constitution a permis au Roi, en sa qualité de Commandeur des croyants, de disposer de pouvoirs qui font de lui le centre de toute décision politique. La pratique politico-institutionnelle du Roi Hassan II a érigé la commanderie des croyants en institution stratégique dont la fonction principale est de conforter le monarque dans sa position de maître du jeu politico-institutionnel. Il en résulte que le Roi demeure l’auteur de la constitution qui met en action, préserve et consacre son pouvoir suprême. C’est pourquoi il est inconcevable de penser que la constitution est susceptible d’inhiber sa liberté et son action politiques, alors qu’elle est faite « par et pour lui ».

    On retrouve, dans la révision constitutionnelle approuvée par référendum du 13 septembre 1996, les constantes précédemment observées : la fabrication royale de la constitution et l’absence d’assemblée constituante ou d’organe constituant non contrôlé par le Roi. Le contenu de cette réforme ne touche en rien à l’article 19. Sur le plan strictement juridique, cet article 19 de la constitution marocaine a une fonction de localisation du Pouvoir. Il détache le roi par rapport aux autres organes de l’Etat en l’isolant pour bien montrer qu’il est le lieu géométrique du ‘’Pouvoir agissant ».

    Tout comme Hassan II, le Roi Mohamed VI insiste sur la croyance en une fonctionnalité de la commanderie des croyants, c’est-à-dire en l’existence de son utilité politique, de sa raison d’être et de son rôle légitime d’institution. Dans un entretien accordé à la presse étrangère, publié par Le Figaro du 4 septembre 2001, le nouveau monarque Mohamed VI a bien défini le cadre institutionnel de son action politique : « Les Marocains veulent une monarchie forte, démocratique et exécutive. Notre monarchie est constitutionnelle avec un texte fondamental datant de 1962 qui avait été élaboré en étroite concertation avec les formations politiques de l’époque. Mais chez nous, le roi ne se contente pas de régner… ». On ne s’étonne donc pas dans ces conditions de constater que le fond reste le même, le rôle du roi
    « Amir Al Mouminine et représentant suprême de la Nation » étant immuable.

    L’analyse de ce discours du nouveau monarque révèle une volonté manifeste de ne pas se démarquer d’un schéma institutionnel qui semble visiblement promouvoir une conception des valeurs traditionnelles et ancestrales d’exercice du pouvoir monarchique. C’est ainsi que la monarchie agissante, qui fait désormais partie de l’identité politique marocaine, a pour fondement l’article 19. Cet article qui donne au Commandeur des croyants un pouvoir général d’action et d’interprétation s’impose à tous parce qu’il est de nature supérieure et sacrée. Le modèle de la monarchie exécutive voulue par le nouveau règne présente en effet une certaine continuité avec la base constitutionnelle. Celle-ci se rapporte ici aux diverses sources de l’autorité -religion, tradition, charisme- et aux finalités politiques poursuivies par l’institution royale.

    L’analyse du régime politique marocain reste marquée par le poids historique et institutionnel de la Commanderie des croyants. Sa prépondérance a des conséquences directes sur toutes les institutions constitutionnelles. D’où il serait difficile de reconnaître à ce régime son caractère parlementaire. Parce que les réformes constitutionnelles de 1992 et de 1996, bien qu’elles modifient le mode de désignation du gouvernement qui a favorisé une « symbiose » entre le gouvernement et la majorité au parlement, n’ont pas permis au Premier ministre de devenir « l’homme fort » du régime politique marocain. La structure constitutionnelle aussi bien que la pratique politique du gouvernement conservent la marque de cette intention dans la mesure où la véritable clef de voûte de l’édifice est le Roi, le premier ministre en étant plutôt « la flèche ».

    Dans sa version marocaine, le présidentialisme favorise le principe selon lequel le Roi en sa qualité d’Amir Al-Mouminine « empoche tout » et n’associe pas toujours le Premier ministre au processus de décision politique. C’est le Roi -Commandeur des croyants qui s’est largement approprié les fonctions gouvernementales. Ainsi, cette analyse nous permet de dégager une « conception marocaine » de la monarchie constitutionnelle qui ne présente aucun rapport avec l’expression de « monarchie constitutionnelle » en droit constitutionnel classique. Selon cette expression, il s’agit d’un type de régime dans lequel le monarque règne mais ne gouverne pas. Le cas marocain reste spécifique du fait qu’Imarat Al Mouminine ne favorise pas une « parlementarisation » de la monarchie. Cette perspective est d’autant plus claire qu’il est hors de question de mettre en équation ce particularisme du pouvoir monarchique : un roi fort aux antipodes de la représentation à l’espagnole.

    De ce point de vue, la question principale est celle de l’impact de la Constitution sur la formation du régime politique marocain. Force est de rappeler que la spécificité du système constitutionnel marocain viendrait du fait qu’on y trouve au niveau supérieur, un droit public musulman plus efficace et au niveau inférieur un droit constitutionnel d’inspiration occidentale, perturbé dans son existence, voit son domaine d’application toujours aussi réduit. Il en découle que la construction de la valeur constitutionnelle marocaine en particulier se trouve intimement associée elle-même à la mise en valeur constitutionnelle du droit public musulman qui va servir de critère à la constitutionnalité. C’est à partir de ce critère que sera jugée la légitimité ou l’illégitimité. Les normes de ce droit public musulman, qui disposent d’une force juridique supérieure, constitueraient les fondements essentiels de l’autorité monarchique. Elles contribueraient en effet à légitimer le pouvoir royal.

    L’institution monarchique est ainsi perçue comme détentrice d’une réalité propre où la suprématie et la domination royale se fondent principalement sur le dispositif religieux, par lequel le Roi se voit réserver le droit de gouverner en vertu des qualités qui lui sont reconnues. Ce fait explique pourquoi le cadre constitutionnel marocain, depuis l’élaboration de la première constitution en 1962, n’est pas laissé au hasard tant que les règles de la constitution implicite sont érigées en repères le balisant. Dans cette perspective, l’article 19 a pour effet de réaffirmer les attributs fondamentaux de la royauté, qui font de son titulaire (le monarque) le support d’une légitimité religieuse.

    En raison de la prédominance du sacré, la séparation du religieux et du politique n’existait pas. Au contraire, le sacré et le politique avaient la même finalité : assurer l’un et l’autre le maintien de l’ordre institutionnel établi. Or, l’articulation entre le mécanisme religieux et le mécanisme constitutionnel, et leur rôle dans le maintien de la domination monarchique, signifient que la religion comme la politique ne meurent pas de la constitution. Elle impose souvent une logique qui sert le contrôle politique et institutionnel exercé par la monarchie. Elle repose sur la prise en compte d’une raison divine sans laquelle, il est impossible de comprendre la justification qui fait de la monarchie marocaine une monarchie gouvernante.

    En somme, la fonction politique de la constitution implicite, continue à alimenter le débat politique au Maroc. Après l’annonce de réformes institutionnelles par le discours royal du 9 mars 2011, la démocratisation du régime politique est d’actualité. La place de la commanderie des croyants dans la constitution suscite une large partie de discussion. De sorte qu’on ne peut pas penser la démocratisation sans mettre en question l’hégémonisme politique de cette institution. Deux questions se posent donc : Quel type de monarchie va-t-elle accoucher de la prochaine réforme institutionnelle ? Est-elle capable d’engager le Maroc dans une transition démocratique ?

    On entend par constitution implicite, une série de prescriptions qui ne figurent pas explicitement dans le texte constitutionnel mais qui s’imposent néanmoins aux acteurs institutionnels en tant que règles à respecter.
    Docteur en sciences politiques

    Source : Lakome, 1er juin 2011

    Tags : Maroc, Makhzen, Constitution, Printemps Arabe, 

  • Algérie : Bensalah reste…

    Les élections du 4 juillet annulées

    La date du dimanche 2 Juin marque un nouveau tournant de la crise politique et institutionnelle que vit l’Algérie, notamment depuis le départ forcé du président Bouteflika le 2 avril dernier. En effet, le Conseil Constitutionnel vers lequel tous les regards étaient braqués a rendu en quelque sorte son verdict au sujet de la présidentielle du 4 Juillet, constatant l’impossibilité de sa tenue à la date indiquée.»

    Le Conseil Constitutionnel, réuni les 21, 24 et 27 Ramadhan 1440 correspondant aux 26 et 29 Mai et 1er Juin 2019, à l’effet de délibérer sur les dossiers de candidatures pour l’élection du Président de la République prévu le 4 Juillet 2019, s’est prononcé par le rejet des deux dossiers de candidature déposés auprès de lui, en vertu de deux décisions individuelles n 18/D.CC/19 et n 19/D.CC/19 datées du 1er Juin 2019, lit-on dans le communiqué qui justifie l’annulation du rendez-vous électoral par l’annulation des dossiers des deux candidats, sans donner pour autant des détails sur les raisons de cette annulation.

    Il est néanmoins aisé de les deviner, à savoir que ces deux candidats, en l’occurrence Abdelkrim Hamadi et Hamid Touahri, (les seuls qui ont déposé leurs dossiers, sur les 77 qui ont retiré les lettres d’intention) sont des inconnus qui n’ont pas le profil ni les épaules pour prétendre à la magistrature suprême.

    C’est précisément pour cette raison que l’annulation de l’élection du 4 Juillet était déjà dans l’air du temps, le Conseil Constitutionnel n’a fait qu’acter cette impossibilité qui rebat de facto les cartes. Autant cette annulation était attendue, autant la décision du Conseil Constitutionnel de prolonger indéfiniment le mandat de Bensalah, jusqu’ à l’élection du nouveau président de la République constitue une surprise qui prend de court toutes les exégèses des experts en droit constitutionnel qui ont évoqué plusieurs scénarii qui postulent tous au départ de Bensalah à la fin de son mandat le 4 Juillet.

    Non seulement Bensalah restera comme président de l’Etat, mais en plus son nouveau mandat n’a pas de limites dans le temps, assuré de garder le pouvoir jusqu’ à l’élection du nouveau président de la République. « Il revient au Chef de l’Etat de convoquer de nouveau le corps électoral et de parachever le processus électoral jusqu’à l’élection du Président de la République et la prestation du serment constitutionnel», explique le communiqué du Conseil Constitutionnel. Cette institution est allée puiser ses arguments, pour justifier sa décision de maintenir Bensalah à la tête de l’Etat, d’abord dans sa réunion « du 1er juin 2019, par laquelle il déclare l’impossibilité de tenir l’élection du Président de la République, le 4 Juillet 2019, et la réorganisation de celle-ci de nouveau. » Puis de se référer dans un deuxième temps à la Constitution, plus précisément le paragraphe numéro 12 du préambule qui stipule « la Constitution est au-dessus de tous, elle est la loi fondamentale qui garantit les droits et libertés individuels et collectifs, protège la règle du libre choix du peuple, confère la légitimité à l’exercice des pouvoirs, et consacre l’alternance démocratique par la voie d’élections libres et régulières. »

    L’institution présidée par Kamel Fenniche se réfère également aux articles 7, 8, stipulant que « le peuple est la source de tout pouvoir et qu’il exerce sa souveraineté par l’intermédiaire des institutions qu’il se donne.» Référence aussi aux articles 102 alinéas 6, 182 et 193 de la Constitution qui définissent la mission du Conseil Constitutionnel de « veiller au respect de la Constitution. »

    Cette même Constitution, ajoute le communiqué « prévoit que la mission essentielle dévolue à celui investi de la charge de Chef de l’Etat est d’organiser l’élection du Président de la République, il y a lieu de réunir les conditions adéquates pour l’organisation de cette élection dans la transparence et la neutralité en vue de préserver les institutions constitutionnelles qui concourent à la réalisation des aspirations du peuple souverain. »

    Si l’exégèse du Conseil constitutionnel a le mérite d’éloigner le spectre du vide constitutionnel et institutionnel, jusqu’ à l’élection du nouveau président, elle risque en revanche de braquer davantage le mouvement citoyen et la classe politique qui continuent de réclamer à cor et à cri le départ des deux « B », Bensalah et Bédoui.

    H.Khellifi.

    L’Est Républicain, 3 juin 2019

    Tags : Algérie, Constitution, Bensalah, élections, armée,

  • La nouvelle Algérie à l’épreuve des urnes

    Dans une semaine, le processus électoral sera lancé pour mettre en œuvre la solution légale. Une minorité s’active dans certains médias et réseaux sociaux pour provoquer une impasse et imposer une «transition taillée à la mesure de leurs ambitions» politiques ou personnelles que, bien évidemment, le verdict ne pourra jamais satisfaire.

    L’opinion nationale aura tout compris du refus opposé à toutes les solutions, à l’offre de dialogue et à la proposition du général de corps d’armée Ahmed-Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense nationale et chef d’état-major de l’ANP, favorable à toute initiative pouvant conduire au dénouement définitif et rapide de la crise.

    Le piège du vide institutionnel et constitutionnel fait écho à la tentative de mainmise sur le mouvement citoyen souffrant cruellement d’une représentation à la hauteur de ses revendications légitimes. L’épreuve électorale reste incontournable.

    La constitutionnaliste émérite Fatiha Benabbou, appelant à faire preuve de sagesse et de recherche de compromis, soutient qu’«il est impossible d’annuler des élections. Il y a un processus automatique qu’il faut suivre, sinon l’on entre dans une zone d’illégalité».

    Les préparatifs vont bon train pour éviter une telle issue dangereuse pour la stabilité du pays et organiser le scrutin dans le respect des «délais et des échéances prévus par la Constitution et les lois de la République».

    Après la révision des listes électorales (16-23 avril) et le retrait des formulaires, l’étape décisive du dépôt des candidatures, dont la date limite est fixée au 19 mai, annonce le début de la compétition pour les 68 candidats à la candidature recensés par le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales. Pour autant, les portes du dialogue restent ouvertes.

    Un appel solennel a été encore une fois lancé par le chef de l’Etat, Abdelkader Bensalah, qui, en recevant le Premier ministre, Noureddine Bedoui, a insisté sur la nécessite de «maintenir tous les canaux de concertation et de dialogue ouverts avec toutes les instances et les partenaires concernés par l’élection du 4 juillet».

    La balle est désormais dans le camp de la classe politique interpellée par les enjeux de la refondation démocratique.

    Horizons, 13 mai 2019

    Tags : Algérie, transition, article 102, armée, élections, constitution,

  • Maroc : Texte et commentaires sur la constitution octroyée

    ARTICLE 19: Le Roi, Amir Al Mouminine. Représentant Suprême de la Nation, Symbole de son unité, Garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat, veille au respect de l’Islam et de la Constitution. Il est le protecteur des droits et libertés des citoyens, groupes sociaux et collectivités.

    Commentaire : Et nous, qui va nous protéger de celui qui viole les « libertés des citoyens, groupes sociaux et collectivités » ?

    Il garantit l’indépendance de la Nation et l’intégrité territoriale du Royaume dans ses frontières authentiques.

    Commentaire : Il garantit avant tout que ses affaires marchent bien et que le pillage du Maroc par son entourage direct continue.

    ARTICLE 20: La Couronne du Maroc et ses droits constitutionnels sont héréditaires et se transmettent de père en fils aux descendants mâles en ligne directe et par ordre de primogéniture de SA MAJESTÉ LE ROI HASSAN II, à moins que le Roi ne désigne, de son vivant, un successeur parmi ses fils, autre que son fils aîné. Lorsqu’il n’y a pas de descendants mâles en ligne directe, la succession au Trône est dévolue à la ligne collatérale mâle la plus proche et dans les mêmes conditions.

    Commentaire : On comprend mieux maintenant pourquoi « Moulay Hicham », petit-fils de roi, neveu de roi et cousin de roi, premier de la « ligne collatérale mâle » pense qu’il des chances de piquer le trône à son cousin. Mais bon, il faudrait quand même que le futur « Hassan III » ou le possible « Rachid je ne sais combien » ne soient plus là pour le raconter.

    ARTICLE 21: Le Roi est mineur jusqu’à seize ans accomplis. Durant la minorité du Roi, un Conseil de régence exerce les pouvoirs et les droits constitutionnels de la Couronne, sauf ceux relatifs à la révision de la Constitution. Le Conseil de régence fonctionnera comme organe consultatif auprès du Roi jusqu’au jour où il aura atteint l’âge de vingt ans (20) accomplis.

    Le Conseil de régence est présidé par le premier président de la Cour Suprême. Il se compose, en outre, du président de la Chambre des Représentants, du président de la Chambre des Conseillers, du Président du Conseil régional des oulémas des villes de Rabat et Salé et de dix personnalités désignées par le Roi intuitu personae.

    Les règles de fonctionnement du Conseil de régence sont fixées par une loi organique.

    Commentaire : J’ai une proposition pour assurer la pérennité de la monarchie en cas de vacance du pouvoir. Changer la composition du Conseil de la régence et nommer comme membres dirigeants les personnes suivantes : Cheikh Abdeslam Yassine de Al Adl Wal Ihsane (Justice et spiritualité), Abdallah El Harrif de La Voie démocratique, Abdelhamid Amine le vice-président de l’AMDH et le putschiste militaire copain du général Mohamed Oufkir Ahmed Rami.

    ARTICLE 22: Le Roi dispose d’une liste civile.

    Commentaire : Bien sûr. Selon le quotidien espagnol El Pais, le budget de la famille royale marocaine est 28 fois supérieur à celui de la famille royale espagnole. C’est-à-dire que le Maroc est 28 fois plus riche que l’Espagne. Et après ils disent ne pas comprendre pourquoi certains ne sont pas contents de vivre sous cette « démocratie mohammedienne ».

    ARTICLE 23: La personne du Roi est inviolable et sacrée.

    Commentaire : Doucement les gars, personne n’a envie de violer quiconque ici ! Et puis, Pardon Majesté ! il n’y a de sacré que dieu.

    ARTICLE 24: Le Roi nomme le Premier ministre.

    Sur proposition du Premier ministre, Il nomme les autres membres du Gouvernement,

    Il peut mettre fin à leurs fonctions.

    Il met fin aux fonctions du Gouvernement, soit à Son initiative, soit du fait de la démission du Gouvernement.

    Commentaire : Et qui peut mettre fin aux fonctions du roi ? C’est une simple et innocente question.

    ARTICLE 25: Le Roi préside le Conseil des ministres.

    Commentaire : Combien de fois il l’a fait présidé depuis son accension au trône ?

    ARTICLE 26: Le Roi promulgue la loi dans les trente jours qui suivent la transmission au Gouvernement de la loi définitivement adoptée.

    Commentaire : Pourquoi trente jours et pas trente ans ? Il peut faire ce qu’il veut. Le Maroc lui appartient. Ceux qui attendent continueront d’attendre.

    ARTICLE 27: Le Roi peut dissoudre les deux Chambres du Parlement ou l’une d’elles seulement, par dahir, dans les conditions prévues aux articles 71 et 73 du titre V.

    Commentaire : D’accord, d’accord… mais sur proposition du premier ministre SVP.

    ARTICLE 28: Le Roi peut adresser des messages à la Nation et au Parlement. Les messages sont lus devant l’une et l’autre Chambre et ne peuvent y faire l’objet d’aucun débat.

    Commentaire : Non mais, c’est quoi cette histoire ? C’est Big Brother ou quoi ? Et bien non. Du moment que ces « messages » ne sont pas relus avant par un premier ministre élu par les urnes, et qui le cas échéant peut apporter les corrections qu’il estime nécessaires, ces messages doivent être débattus et pourquoi pas refusés par un parlement dont les membres seraient élus démocratiquement.

    ARTICLE 29: Le Roi exerce, par dahir, les pouvoirs qui Lui sont expressément réservés par la Constitution.

    Les dahirs sont contresignés par le Premier ministre, sauf ceux prévus aux articles 21 (2° alinéa), 24 (1er, 3° et 4° alinéas) 35, 69, 71, 79, 849 91 et 105.

    Commentaire : Après la réforme de la constitution par une assemblée constituante, les élus du peuple vont devoir diminuer considérablement les pouvoirs astronomiques du souverain. Certes, le roi, s’il est toujours là, peut continuer à exercer par dahir, ou par lettre de cachet si ça lui chante, mais uniquement sur proposition d’un premier ministre élu démocratiquement.

    ARTICLE 30: Le Roi est le Chef Suprême des Forces Armées Royales.

    Il nomme aux emplois civils et militaires et peut déléguer ce droit.

    Commentaire : Pourquoi toutes ces majuscules ? « Roi », « Chef », « Suprême », « Forces »… On a compris que pour le moment c’est lui le boss. Il se prend pour dieu. Mais dans le futur son rôle consistera à porter un joli uniforme, à suivre les parades militaires conjointement avec le premier ministre et à inaugurer les chrysanthèmes.

    ARTICLE 31: Le Roi accrédite les ambassadeurs auprès des puissances étrangères et des organismes internationaux. Les ambassadeurs ou les représentants des organismes internationaux sont accrédités auprès de Lui.

    Il signe et ratifie les traités. Toutefois, les traités engageant les finances de l’Etat ne peuvent être ratifiés sans avoir été préalablement approuvés par la loi.

    Les traités susceptibles de remettre en cause les dispositions de la Constitution sont approuvés selon les procédures prévues pour la réforme de la Constitution.

    Commentaire : Pourquoi pas ? Mais, même réponse que pour l’article 29.

    ARTICLE 32: Le Roi préside le Conseil Supérieur de la Magistrature, le Conseil Supérieur de l’Enseignement et le Conseil Supérieur de la Promotion Nationale et du Plan.

    Commentaire : Pas de problème. Dans un Maroc démocratique on l’occupera aussi avec d’autres « Conseils Supérieurs ». Le Conseil Supérieur de la défense du tagine marocain, le Conseil supérieur de la Derbouka, etc…

    ARTICLE 33: le Roi nomme les magistrats dans les conditions prévues à l’article 84.

    Commentaire : Si vous voulez…. Mais rappelez-vous, cela doit être fait sur proposition du ministre de la justice et avec l’accord préalable du premier ministre.

    ARTICLE 34: Le Roi exerce le droit de grâce.

    Commentaire : Même réponse que pour l’article 33.

    ARTICLE 35: Lorsque l’intégrité du territoire national est menacée ou que se produisent des événements susceptibles de mettre en cause le fonctionnement des institutions constitutionnelles, le Roi peut, après avoir consulté le président de la Chambre des Représentants. Le président de la Chambre des Conseillers ainsi que le président du Conseil Constitutionnel, et adressé un message à la Nation, proclamer, par dahir, l’état d’exception. De ce fait, Il est habilité, nonobstant toutes dispositions contraires, à prendre les mesures qu’imposent la défense de l’intégrité territoriale, le retour au fonctionnement des institutions constitutionnelles et la conduite des affaires de l’Etat.

    L’état d’exception n’entraîne pas la dissolution du Parlement.

    Il est mis fin à l’état d’exception dans les mêmes normes que sa proclamation.

    Commentaire : Rien de tout cela. Dans les moments difficiles pour la Nation, c’est le Parlement sous la conduite du premier ministre et des chefs des groupes parlementaires qui mène la danse. Le roi, cantonné dans son beau palais, n’a qu’à signer les dahirs que lui présentera le premier ministre.

    La défense du pays dans ses frontières internationalement reconnues est affaire de tous les Marocains.

    Source

    Tags : Maroc, constitution, printemps arabe, démocratie, Makhzen, mohammed VI

  • Editorial – Le peuple algérien ne lâche rien face aux manoeuvres du pouvoir

    La dernière manœuvre du clan Bouteflika a consisté à renoncer au cinquième mandat d’un président impotent… pour mieux prolonger le quatrième. Elle n’a en rien entamé la détermination des contestataires. Vendredi 15 mars, les manifestants étaient plus nombreux que jamais, peut-être 15 millions dans tout le pays. « Système dégage », scandent-ils : la colère contre les affairistes qui accaparent les ressources du pays est générale. Elle touche toutes les régions de ce pays immense, et jusqu’aux Algériens en France. Elle mobilise les femmes, que les islamistes avaient voulu cloîtrer à la maison. De nombreuses couches sociales, y compris des catégories privilégiées comme les juges, sont mobilisées. La jeunesse scolarisée est en pointe dans la mobilisation.

    Les Algériens ont de quoi être révoltés par ce système qui les condamne à la précarité, au dénuement, pendant que les privilégiés liés au pouvoir se gavent, tout en affichant leur mépris pour les classes populaires. En Algérie, le salaire minimum ne dépasse pas 130 euros mensuels. Quand on sait qu’Issad Redrab, le patron du conglomérat de l’agroalimentaire, de la distribution et de l’industrie Cevital, a accumulé une fortune de 3,7 milliards de dollars, on mesure l’exploitation féroce réalisée par les capitalistes.

    Quelles sont aujourd’hui les perspectives pour le peuple algérien ? Pour l’instant, l’armée se tient en retrait. Mais le passé a montré que ses dirigeants n’hésitaient pas à tirer sur la population. En 1988, l’armée a tué des centaines de jeunes manifestants. Durant les années 1990, elle répondit aux massacres des islamistes par d’autres massacres. En 2001 encore, elle a réprimé en Kabylie en faisant 125 morts au bas mot. Les islamistes sont eux aussi en embuscade, même si certains se sont discrédités en participant au pouvoir. Enfin, il est possible que les dignitaires du régime finissent par accéder à la demande d’élections sans Bouteflika et se reportent sur un autre homme qui garantirait leurs privilèges.

    Si les médias français ne rapportent que les manifestations du vendredi, toute une agitation traverse en permanence l’Algérie. Des grèves éclatent dans de nombreuses entreprises publiques ou privées : dans les chemins de fer, les hydrocarbures, les chantiers, l’industrie, etc. Les travailleurs réclament le départ de Bouteflika et parfois aussi des augmentations de salaires. Il est à espérer que ces grèves se multiplient et que les travailleurs réalisent ainsi le rôle qu’ils jouent dans la société. Produisant toutes les richesses accaparées par les privilégiés, ils détiennent un levier incomparable. S’organiser dans leurs entreprises peut leur permettre de se constituer en une force sociale et collective qui compte.

    Les travailleurs rejettent le système en place. Mais ils ont intérêt à imposer que le changement ne soit pas seulement un ravalement de façade. S’il se réduit au remplacement de Bouteflika par un autre dignitaire, en quoi la vie des jeunes chômeurs si nombreux, des travailleurs si précaires et si mal payés, en serait-elle transformée ? Il faut espérer que ces derniers exercent leur contrôle sur les événements. Ils ne doivent pas accepter un changement qui se réduirait à changer les têtes sans remettre en cause l’accaparement des richesses tant dénoncé.

    Les manifestants ciblent également Macron, qui soutient la clique en place. Pendant 132 ans, la France a pillé l’Algérie après l’avoir colonisée dans des violences atroces. Aujourd’hui, les capitalistes français liés au régime de Bouteflika continuent de piller les ressources et le travail des Algériens. Alors que de plus en plus de jeunes risquent leur vie pour franchir la Méditerranée, le gouvernement français réduit le nombre de visas accordés aux Algériens. Le Pen, elle, voudrait carrément les supprimer ! Elle est la digne héritière de son père, ancien de l’Algérie française et officier tortionnaire pendant la guerre d’Algérie.

    Ces politiciens français défendent les intérêts des possédants des deux pays. Les travailleurs de France ont, eux, toutes les raisons d’être solidaires de la lutte des travailleurs d’Algérie. Les capitalistes qui les exploitent sont parfois les mêmes : Renault, Total, Lafarge, Sanofi et consorts. Leurs intérêts de travailleurs sont les mêmes aussi.

    Alors, tous nos espoirs se portent vers les femmes et les hommes qui, de l’autre côté de la Méditerranée, se battent pour avoir un travail et pouvoir en vivre correctement, pour la liberté et pour la dignité. Vive la lutte des travailleuses et des travailleurs d’Algérie !

    Lutte Ouvrière, 18 mars 2019

    Tags : Algérie, Présidentielles 2019, Bouteflika, gouvernement, transition, constitution,

  • Algérie – Le Hirak ravive la vie publique : Le peuple revient sur sa démission

    Ainsi donc, l’on apprend que 72 Mouhafed (commissaire du parti) sur les 120 compte le parti FLN, se sont réunis hier à Lakhdaria, pour dénoncer la direction collégiale et provisoire de leur appareil, et annoncer dans la foulée, leur ralliement au mouvement populaire.

    Ces lionceaux de l’ex Palestro, dont tout le monde sait de quelle manière ils ont été parachutés, chacun dans sa circonscription, se trompent d’époque et de peuple. Comment est-il possible, que des personnes qui sont un peu la partie visible du système, puissent pousser l’indélicatesse jusqu’à vouloir rejoindre un peuple dont ils n’ont jamais fait partie, si ce n’est par leur appartenance administrative. Avec la permission des lecteurs, j’abuserais d’un «je» que je sais haïssable, pour rappeler à ces «illustres» personnages, que de tous temps, ils ont incarné, l’arrogance, l’ignorance, la hogra, la prédation, les passe-droits, le clientélisme, la corruption et comme de bien entendu «l’aplaventrisme» devant leurs maîtres du moment. Cela va de Saïdani à Ould Abbès en passant par l’actuel patron de la SARL FLN. Car, ce n’est plus un parti politique depuis le décès de feu Abdelhamid Mehri.

    Le tribunal de l’Histoire ne vous ratera pas

    Rejoindre le mouvement populaire en ce mois de mars 2019, à la veille de la date historique du 19 mars, n’est pas de votre gabarit. En effet, que connaissez-vous réellement de «la rue», vous qui n’êtes habitués pour tout exercice militant, qu’à faire du petit business en choisissant les transporteurs et les patrons de fast-food, pour organiser «vos» rencontres politiques (sic) en abusant des gros plans de caméras corrompues, honteusement braquées sur le petit peuple et les badauds que vous ramenez de très loin avant de les abandonner à la fin de vos meetings.

    Quel crédit avez-vous alors que nul n’ignore que la «chkara» est votre unique programme politique et que la cooptation, votre unique mode d’élection.

    Comment vous admettre dans ce sublime mouvement populaire qui vous demande de décamper et de partir loin de sa vie et de sa vue ?

    N’êtes-vous pas les relais locaux de ce système vomi, honni et publiquement rejeté par les Algériens et les Algériennes ?

    N’êtes-vous pas, avec la complicité d’une administration aux ordres, les artisans de toutes les fausses élections que l’Algérie a connues ?

    Vous avez usé et abusé d’un nom prestigieux, détourné au lendemain de l’indépendance en vous appropriant illégalement et illégitimement du sigle FLN. Un patrimoine commun immatériel que vous avez outragé et honteusement malmené, jusqu’à faire fuir les jeunes générations, de l’Histoire de leur pays et de ses martyrs. Ne vont-ils pas festoyer à Paris le 14 juillet, parce que le 5 juillet pour eux, n’est qu’un…stade de football au mieux, sinon une cité dortoir ?

    La récréation est finie

    Aujourd’hui, le blanchiment de conscience que vous entamez ne concerne que vous et n’engage que ceux qui vous croient. Sachez vous retirer de l’espace public et partez, vous êtes répudiés.

    Toutefois, sachez également, que le peuple que vous avez berné près de 60 ans durant et notamment vingt ces dernières années, s’est ravisé et a retiré sa démission. Une démission sur laquelle vous-avez fondé d’énormes espoirs pour pérenniser votre règne.

    Ironie du sort, le peuple et a retiré sa démission et est en passe de vous délivrer votre solde de tout compte.

    Courage, fuyez !

    Le Provincial, 17 mars 2019

    Tags : Algérie, Présidentielles 2019, Bouteflika, gouvernement, transition, constitution,

  • Algérie : Victoire du courant islamiste après le départ du régime de Bouteflika : les précisions de Mourad Dhina

    A la suite de notre article sur les propositions formulées par l’activiste exilé à l’étranger, plus exactement en Suisse, Mourad Dhina, ce dernier a fait parvenir à notre Rédaction quelques précisions pour compléter nos informations. Nous les publions comme le dicte notre déontologie et notre éthique :

    « Je n’ai pas dit que « [Mourad Dhina] estime que le courant islamiste, notamment celui de l’ex-FIS, est celui qui pourra remporter une large victoire lors des prochaines élections présidentielles indépendantes et transparentes qui doivent être organisées pour tourner la page du long règne d’Abdelaziz Bouteflika » –

    Lors de l’émission , j’ai dit qu’il était préférable de repousser les élections d’au moins quelques mois après avoir entamé la phase de transition pour éviter une polarisation de la société, car j’estime que ce serait le courant islamiste qui remporterait une majorité de voix étant donné que les autres forces n’auront pas eu le temps de s’organiser.

    Cette analyse est basée sur des réalités socio-politiques et ne doit pas être comprise comme un souhait ou l’entame d’une campagne pour un courant donné. Bien au contraire, mon souhait est de voir une dose de proportionnalité représentative de tout le spectre politique qui accompagnerait la transition. Une polarisation, surtout pendant la transition, mènera vers l’échec du processus de refondation de la république.

    Par ailleurs, et avec tout le respect dû au courant dit islamiste ainsi qu’aux autres courants, je ne vois nullement dans la ligne politique, ni dans les textes ou déclarations du mouvement Rachad (www.rachad.org) ce qui peut permettre de le cataloguer comme « islamiste ».

    Cordiales salutations, Mourad Dhina

    Algérie Part

    Tags : Algérie, Présidentielles 2019, Bouteflika, gouvernement, transition, constitution,