Étiquette : Eric Laurent

  • Le Roi prédateur est un séisme pour le palais royal

    Interview de Catherine Graciet par Bernard Strainchamps ( 1 avril 2012)

    Mohammed VI, roi du Maroc, est désormais le premier banquier, le premier assureur, le premier entrepreneur de bâtiments de son pays. Entretien avec Catherine Graciet co-auteure du document Le roi prédateur.

    Quelle est la genèse de ce livre ? Pourquoi avoir travaillé à deux journalistes sur ce sujet ?

    Eric Laurent et moi-même travaillons depuis longtemps sur le Maroc mais avec des expériences et des parcours différents. En 1993, Eric Laurent a longuement interviewé Hassan II pour un livre intitulé Mémoires d’un roi puis a gardé un contact privilégié avec le monarque jusqu’à sa mort, en 1999. Il a donc connu le palais royal et la Cour de l’intérieur. C’est rare pour un journaliste français. Mon parcours est très différent. De 2004 à 2007, j’ai travaillé comme journaliste d’investigation pour Le Journal hebdomadaire, un titre phare de la presse indépendante marocaine que les autorités ont fermé en 2009 pour lui clouer le bec. J’ai notamment passé un an au Maroc, à Casablanca, où j’ai multiplié les reportages et les enquêtes pour Le Journal hebdomadaire, tout en assumant les correspondances pour Radio Canada International et le quotidien Sud-Ouest. Pendant cette période, j’ai écrit avec le journaliste Nicolas Beau un premier livre sur le Maroc, intitulé Quand le Maroc sera islamiste (ed. La Découverte, 2006). Nous y traitons la question de l’islamisme politique mais aussi la corruption des autorités. Puis je suis rentrée en France à la fin 2007 pour rejoindre le site internet Bakchich dont j’ai géré le service Monde jusqu’en 2010, tout en ayant un œil sur le Maroc. Connaissant Eric Laurent depuis longtemps, l’idée d’unir nos forces, nos contacts et nos deux parcours sur le Maroc s’est imposée petit à petit. Au début, nous avions pensé travailler sur les relations franco-marocaines puis, au retour d’un premier voyage au Maroc, en juillet 2011, il nous est apparu évident que LE sujet à traiter était la prédation économique pratiquée par le roi Mohammed VI.

    Vous décrivez les étapes successives de la mise en place d’un système de prédation de l’économie marocaine au service du roi. Comment écrire un document avec des témoins qui sont obligés de rester dans l’anonymat ?

    Nous avons volontairement préservé l’anonymat de certaines de nos sources parce que c’était la condition sine qua non pour qu’elles parlent. Qu’elles soient au cœur du Palais ou qu’il s’agisse de diplomates étrangers ou d’hommes d’affaires, ces sources auraient eu beaucoup à perdre si leur anonymat était révélé ! Licenciement, harcèlement judiciaire ou fiscal, intimidations en tous genres… Les services secrets marocains savent très bien s’y prendre avec leurs ressortissants quand il s’agit d’essayer de faire taire quelqu’un. Il ne faut pas oublier qu’au Maroc, la personne du roi n’est plus considérée comme “sacrée” depuis peu mais reste “inviolable”. On peut aller en prison pour critiquer Sa Majesté ! Un peu comme si ceux qui critiquent Nicolas Sarkozy étaient embastillés ou poursuivis en justice. Travailler avec ces sources requiert donc une très grande prudence (pas d’échanges par mail ni de longues conversations téléphoniques…) mais aussi le fait de “croiser” les informations qu’elles nous communiquent avec plusieurs autres sources, pour s’assurer qu’elles ne sont pas en train de nous manipuler. Nous avons été particulièrement vigilants sur ce point. Il y a d’ailleurs des informations sensibles que nous n’avons pas publiées faute de pouvoir les confirmer avec une certitude de 100 %. Il faut aussi rendre hommage à toute une génération de journalistes marocains qui, malgré les intimidations, ont enquêté sur des sujets extrêmement sensibles comme la corruption ou l’argent de la monarchie.

    La chronologie des faits et l’ampleur des participations du roi dans les différentes holdings sont-elles connues par les décideurs français ?

    Des diplomates français savent puisque au moins l’un d’entre eux nous a textuellement dit que « Mohammed VI possédait directement ou indirectement 70 % de l’économie marocaine ». Ce chiffre est sans doute exagéré mais a le mérite de montrer que la prédation économique de Mohammed VI n’est pas inconnue ! En 2006 et 2007, quand de grands groupes français comme Danone, Axa et Auchan ont connu de gros problèmes avec des holdings appartenant au roi, on sait que leurs patrons respectifs se sont plaints à l’Elysée des mauvaises manières qui leur étaient faites au Maroc. Rien n’a bougé. D’abord parce que l’image voulant que Mohammed VI soit un roi moderne et réformateur, qui fasse rempart contre l’islamisme radical et sorte son pays de la pauvreté a la vie dure. D’autre part parce qu’avec le Maroc, comme cela était le cas avec la Tunisie, la France privilégie des relations d’Etat à Etat. Voire de chefs d’Etat à chefs d’Etat. On sait que Jacques Chirac était très proche de la famille royale marocaine et que Nicolas Sarkozy négocie directement avec Mohammed VI lorsqu’il s’agit de grands contrats comme celui de la ligne de TGV Casablanca-Tanger que la France offre au Maroc. Cet état d’esprit et cette manière diplomatique de faire rappellent l’attitude de la France envers la Tunisie de l’ancien président Ben Ali. A force de fermer les yeux sur les dérives dictatoriales et corruptrices des clans au pouvoir la France n’a pas vu venir la révolution tunisienne. Et n’a toujours pas compris ce qui s’est passé…

    Pourquoi les tunisiens ont dégagé Ben Ali et les marocains ont approuvé la nouvelle constitution proposée par « le roi des pauvres » à plus de 90% ?

    Parce que le score du référendum approuvant la nouvelle constitution marocaine est bidonné ! Non seulement il est digne de la Corée du Nord mais, en plus, le taux d’abstention était beaucoup plus élevé que ce que les autorités ont prétendu. Ce référendum est une farce qui a fait rire jusque dans les chancelleries européennes. Plus sérieusement, contrairement au Tunisien Zine el Abidine Ben Ali, Mohammed VI a su faire preuve d’un sursaut réformateur, sans doute motivé par la peur d’être emporté par la lame de fonds qui a balayé l’Egyptien Moubarak et Ben Ali. Il a eu l’intelligence d’organiser, en décembre 2011, des élections législatives qui sont les plus transparentes que le Maroc ait connu mais aussi de nommer un Premier ministre islamiste. Une révolution au Maroc !

    Si Mohammed VI a donc su introduire des réformes d’un point de vue politique, il en va tout autrement d’un point de vue économique. Là, c’est l’opposé qui se passe et les exemples ne manquent pas. Ainsi, en 2010, les deux principales holdings royales, SNI et ONA, ont fusionné pour créer un mastodonte opaque et en ont profité pour se retirer de la Bourse. Résultat : personne ne sait ce que fait la nouvelle entité aujourd’hui… Autre exemple, dans le domaine des énergies renouvelables, l’entreprise royale Nareva remporte d’importants marchés dans le domaine de l’éolien…

    Vous écrivez dans ce livre que le Maroc est un des rares pays au monde où les pauvres et les élites veulent de concert émigrer. Avez-vous des retours de lecture de votre document du Maroc ?

    Oui, toutes les informations sont convergentes : Le Roi prédateur est un séisme pour le palais royal, qu’il s’agisse de Mohammed VI ou de ses principaux conseillers que nous épinglons dans le livre. On sait aussi qu’il a suscité un vrai engouement auprès des jeunes Marocains. Un indice en est l’activité liée au livre sur les réseaux sociaux Facebook et Twitter. Sur You Tube, on a trouvé des passages où des lecteurs se sont enregistrés en train de le lire à voix haute ! On relève aussi de nombreuses traductions “à la sauvage” en arabe. Enfin, Le Roi prédateur a suscité un véritable engouement dans les médias marocains qui ne sont pas aux ordres. Plus qu’en France, en tout cas, où c’est le service minimum. Au Maroc, les médias arabophones, notamment sur internet, comme Goud, Lakome ou Hespress ont abondamment traité du livre au moment de sa sortie. Saluons aussi l’hebdomadaire francophone Tel Quel qui a publié des bonnes feuilles à ses risques et périls.

    Tags : Maroc, Le roi prédateur, Catherine Graciet, Eric Laurent, Mohammed VI, monarchie marocaine,

  • Maroc : Mohammed VI plus riche que les émirs du Qatar et du Koweït

    Il est le 7e roi le plus fortuné du monde

    Le Roi prédateur, main basse sur le Maroc, d´Eric Laurent et de Catherine Graciet, sera mis en vente à Paris le 1er mars prochain.

    Dans ce livre de 216 pages, très attendu du grand public à l´heure du «Printemps arabe», deux journalistes français parmi ceux qui connaissent le mieux les régimes corrompus de Ben Ali et de Hassan II, apportent cette fois un nouveau témoignage documenté et troublant sur l´ascension rapide de la fortune de Mohammed VI.

    Avec 2,5 milliards de dollars, le souverain alaouite est devenu, en 2008, le septième roi le plus riche du monde, surclassant les émirs du Qatar et du Koweït, deux monarchies pétrolières du Golfe. La fortune du souverain marocain, qui a quintuplé en cinq ans, est de six fois plus importante que celle de l´émir du Koweït.

    Pourtant, dans un classement effectué en 2009 par le Programme des Nations unies sur le développement humain dans le monde, le Maroc occupe la 126e place sur une liste de 177 pays.

    L´indice de pauvreté est de 18,1% dans ce pays où 5 millions de personnes vivent avec 10 dirhams par jour, soit moins d´un euro, alors que le salaire minimum légal dans ce pays ne dépasse pas les 55 dirhams (5 euros/jour). Pour seulement être roi tous frais payés pour lui et sa famille, Mohammed VI perçoit 40 000 dollars par mois. Ce «salaire», indemnités annexes non comprises, est deux fois plus élevé que celui du président des Etats-Unis.

    Les «sources de richesse» du palais royal

    Toutefois, ce n´est pas de cette rémunération que le roi tire sa principale richesse. Le monarque dispose d´un budget de plusieurs millions de dollars pour la gestion de ses 12 palais qui emploie 1200 personnes. Ses seuls déplacements, très fréquents tout au long de l´année, ou ceux de membres de sa famille avec leurs cours, au Maroc ou à l´étranger, coûtent 38 millions de dollars/an au contribuable marocain.

    D´où provient donc l´essentiel de la richesse de la monarchie marocaine dont le budget annuel dépasse de très loin celui du palais royal espagnol et de cinquante fois celui de l´Elysée ? Son origine est diverse. Depuis toujours, le palais royal marocain investit une part de la rente du contribuable dans les services, entre autres l´immobilier, les transports, les banques, l´agriculture ou l´exploitation des richesses du sous-sol. La rente royale devient de ce fait inestimable et incontrôlable.

    Les médias étrangers savent, cependant, que cette richesse provient pour une large part du phosphate dont le Maroc est devenu le plus important exportateur dans le monde depuis l´occupation du Sahara occidental en 1975, dont il exploite les riches réserves de Boucrâa.

    La famille royale prélève un impôt substantiel sur les exportations de cette matière dont le volume ne fait jamais l´objet d´une estimation réelle. En plus, le roi est propriétaire de vastes exploitations agricoles, notamment sur les terres les plus fertiles du Sahara occidental. Leurs produits sont écoulés sur le marché européen à la faveur de l´Accord agricole renouvelé, la semaine dernière, avec l´Union européenne, et sous forme de monopole sur le marché local.

    La corruption

    La corruption contribue beaucoup à l´enrichissement du palais. Beaucoup d´investisseurs espagnols se sont plaints à leur gouvernement, en 2011, des méthodes employées par l´administration royale pour leur prélever un pourcentage sur tout contrat passé avec des entreprises locales privées ou publiques, dans les secteurs de l´hôtellerie, du bâtiment ou des travaux publics.

    Le versement de pots-de-vin, une «monnaie courante» au Maroc devenue une obligation pour tout investisseur qui veut garder son projet au Maroc. Beaucoup d´hommes d´affaires récalcitrants ont vu leurs contrats résiliés pour un fallacieux prétexte, avant d´être déboutés par une justice aux ordres.

    Les proches de Mohammed VI, comme Mounir Majidi ou son ami du collège comme Fouad el Himma sont les principaux régisseurs de la fortune royale qui est au centre des protestations populaires du «Mouvement du 20 Février».

    Tags : Maroc, Mohammed VI, fortune, le roi prédateur, Catherine, Graciet, Eric Laurent,

  • Comment Mohammed VI a fait du Maroc sa machine à cash

    Surnommé le roi des pauvres, lors de son accession au pouvoir, grâce à ses nouveaux conseillers Mohammed VI a mis au point une véritable machine à cash, faisant main basse sur tous les marchés du pays grâce à sa holding royale. Plus riche que l’émir du Qatar, le roi du maroc règne sur un pays qui pointe à la 126ème place mondiale du point de vue du développement humain, dont il a fait sa pompe à finances. Dans «le Roi prédateur», les journalistes Catherine Graciet et Eric Laurent démontent le mécanisme de ce business royal.

    Plus riche que l’émir du Qatar, les ressources naturelles que lui offre son sous-sol sont infiniment moindres que celles de l’émir, tout juste quelques « espoirs pétroliers » et des mines d’or. Sa fortune personnelle a pourtant doublé en 5 ans. Le budget de fonctionnement du « Palais » est deux fois supérieur à celui de l’Elysée alors que le PNB du pays est plus de 25 fois plus faible à celui de la France.

    Il s’est relativement bien sorti, en comparaison de ses « confrères », des bouleversements politiques qui ont frappé le monde arabe. Mohamed VI, que l’on surnomme « M6 », ne connaît pas la crise financière. En revanche, il règne sur un pays classé 126ème (sur 177) du point de vue du développement humain. Plus de 5 millions d’habitants du royaume vivent avec moins de 1 euro par jour et son taux de pauvreté dépasse les 18% !

    Les journalistes Catherine Graciet et Eric Laurent ont consacré leur dernière enquête à ce « Roi prédateur », tant il a fait de son royaume sa holding personnelle. Le livre fait l’impasse, on pourra le regretter, sur le bilan politique de Sa Majesté, pour faire le point sur son bilan financier. Globalement très positif ! En moins de dix ans de règne M6 s’est livré, selon les auteurs à « une sorte de holp-up à l’encontre de l’économie de son pays ». Un véritable coup d’état économique, que son père Hassan II, connu pour son autoritarisme, qui était aussi un habile politique et un homme d’affaires averti n’avait pas su ou pu réaliser.

    Les auteurs décrivent un véritable « village Potemkine qui dissimulerait les prédations royales ». Car le bas-peuple doit tout ignorer du niveau de fortune du roi: le numéro de Forbes qui révélait son niveau de fortune (1,8 milliards d’euros) a été interdit sur le territoire marocain.

    LE TGV MAROCAIN PAYÉ PAR LES CONTRIBUABLES FRANÇAIS !

    Mis en cause lors des manifestations à travers ses collaborateurs les plus proches, M6 a senti le vent de l’opinion tourner. Et c’est pour mieux asseoir son règne qu’il a su concéder certaines réformes, très relatives. Le « makhzen » qui désigne l’appareil d’état a été réformé mais il est toujours en place et demeure une « une mine à ciel ouvert, un monde où le sens de l’intérêt général et l’intérêt national n’existe pas ».

    Le souverain perçoit un salaire royal mensuel de 40.000 dollars, auquel s’ajoute 2,5 millions d’euros par an pour la famille proche, et 31 millions d’euros de subventions répartis selon son bon vouloir : « une somme dont l’usage échappe naturellement à tout contrôle, mais on sait qu’au temps d’Hassan II, elle servait de caisse noire pour s’assurer les faveurs de certaines personnalités politiques, marocaines ou étrangères et récompenser pour sa fidélité l’étrange tribu française des « amis du Maroc », composée de journalistes, d’académiciens d’avocats et d’anciens responsables des services de renseignements…». Ces hôtes le lui rendent bien. Hassan II qui voulait intervenir à la télé française se fera inviter –à sa demande- à l’émission « 7 sur 7 » sur un simple coup fil à Bouygues…

    Passons sur ses innombrables voitures de luxe, ses jets, ses tableaux, son festival royal subventionné par le royaume, ses « frais » vestimentaires qui s’élèvent à 2 millions d’euros par an, les immenses palais rénovés ou édifiés par son père pour des centaines de millions de dollars où il ne passait parfois que quelques heures.

    A l’absolutisme politique teinté de terreur d’Hassan II a ainsi succédé, avec Mohammed VI, un système de confiscation organisé et légalisé. Où plutôt même au dessus des lois. Tout ce qu’il dépense dispendieusement ou « donne » au peuple lors de ses déplacements sort des poches de l’Etat et tout ce que dépense Sa Majesté est payé par le peuple à travers l’impôt. L’Etat subventionne même les entreprises du roi. Chaque jour le peuple enrichit Sa Majesté. Un système gagnant-gagnant à sens unique.

    Autre exemple avec le « TGV marocain», marché remporté par la France, en compensation du fiasco sur le Rafale, considéré comme un caprice royal que l’Agence Française pour le Développement a financé à 50%. Ainsi, le TGV marocain aura coûté 1 milliard aux contribuables français !

    UNE PUISSANCE POLITIQUE QUI FAIT MAIN BASSE SUR LE DOMAINE ÉCONOMIQUE

    A mesure, que la génération Mohammed VI s’affirme au pouvoir, écartant, les conseillers d’Hassan II, naît la « Monarchie des copains et coquins» où la compétence ne se révèle pas toujours un critère déterminant pour accéder aux entrailles du royaume.

    Quand la holding royale (ONA) bat de l’aile, plusieurs dirigeants se succèderont à sa tête. Les nouveaux conseillers du roi, le duo Mahidi-Bouhemou concocte la stratégie des « champions nationaux » : des entreprises en situation de monopole ou quasi-monopole dont le roi est actionnaire. L’épreuve de force est engagée avec les anciens partenaires, Axa, Danone et Auchan etc. Chacun revendra ses parts royales ou quittera le Maroc, laissant le Roi régner sur les marchés de l’assurance, les télécoms, l’agro-alimentaire, l’immobilier, l’énergie et la distribution. Ce dernier représente aujourd’hui 25% du chiffre d’affaires de l’ONA. Le Maroc devient la machine à cash du roi : « Une pieuvre royale » envisagée « comme le moyen d’asseoir une puissance politique qui, absolutisme monarchique oblige, s’exprimait jusque dans le domaine économique » écrivent les auteurs.

    Ce n’est rien à côté du racket social auquel se livrera M6 avec la Caisse de dépôt et de gestion qui gère les retraites de millions de Marocains. Par quelques entourloupes financières détaillée dans le livre, le Roi a fait une OPA sur l’institution qui participe désormais au financement des projets royaux.

    Prédations , pressions, intrigues, courtisaneries, excès, corruption délits d’initiés présumés, les exemples sont légion.

    Le nouveau roi a mis au point un régime aux conditions très avantageuses pour la couronne : une forte capacité à mâter le peuple pour éviter toute révolte et un royaume entièrement tourné vers le développement de la fortune royale. Une monarchie « néo-féodale » dont M6 profite chaque jour.

    Marianne.net, 7 mars 2012

    Pour lire les commentaires d’Abdelmalek Alaoui sur « Le roi prédateur », cliquez ici 

    Tags : Maroc, Mohammed VI, Makhzen, le roi prédateur, Catherine Graciet, Eric Laurent,

  • Maroc : Le Roi prédateur est un séisme pour le palais royal

    Interview de Catherine Graciet par Bernard Strainchamps ( 1 avril 2012)
    Mohammed VI, roi du Maroc, est désormais le premier banquier, le premier assureur, le premier entrepreneur de bâtiments de son pays. Entretien avec Catherine Graciet co-auteure du document Le roi prédateur.
    Quelle est la genèse de ce livre ? Pourquoi avoir travaillé à deux journalistes sur ce sujet ?
    Eric Laurent et moi-même travaillons depuis longtemps sur le Maroc mais avec des expériences et des parcours différents. En 1993, Eric Laurent a longuement interviewé Hassan II pour un livre intitulé Mémoires d’un roi puis a gardé un contact privilégié avec le monarque jusqu’à sa mort, en 1999. Il a donc connu le palais royal et la Cour de l’intérieur. C’est rare pour un journaliste français. Mon parcours est très différent. De 2004 à 2007, j’ai travaillé comme journaliste d’investigation pour Le Journal hebdomadaire, un titre phare de la presse indépendante marocaine que les autorités ont fermé en 2009 pour lui clouer le bec. J’ai notamment passé un an au Maroc, à Casablanca, où j’ai multiplié les reportages et les enquêtes pour Le Journal hebdomadaire, tout en assumant les correspondances pour Radio Canada International et le quotidien Sud-Ouest. Pendant cette période, j’ai écrit avec le journaliste Nicolas Beau un premier livre sur le Maroc, intitulé Quand le Maroc sera islamiste (ed. La Découverte, 2006). Nous y traitons la question de l’islamisme politique mais aussi la corruption des autorités. Puis je suis rentrée en France à la fin 2007 pour rejoindre le site internet Bakchich dont j’ai géré le service Monde jusqu’en 2010, tout en ayant un œil sur le Maroc. Connaissant Eric Laurent depuis longtemps, l’idée d’unir nos forces, nos contacts et nos deux parcours sur le Maroc s’est imposée petit à petit. Au début, nous avions pensé travailler sur les relations franco-marocaines puis, au retour d’un premier voyage au Maroc, en juillet 2011, il nous est apparu évident que LE sujet à traiter était la prédation économique pratiquée par le roi Mohammed VI.
    Vous décrivez les étapes successives de la mise en place d’un système de prédation de l’économie marocaine au service du roi. Comment écrire un document avec des témoins qui sont obligés de rester dans l’anonymat ?
    Nous avons volontairement préservé l’anonymat de certaines de nos sources parce que c’était la condition sine qua non pour qu’elles parlent. Qu’elles soient au cœur du Palais ou qu’il s’agisse de diplomates étrangers ou d’hommes d’affaires, ces sources auraient eu beaucoup à perdre si leur anonymat était révélé ! Licenciement, harcèlement judiciaire ou fiscal, intimidations en tous genres… Les services secrets marocains savent très bien s’y prendre avec leurs ressortissants quand il s’agit d’essayer de faire taire quelqu’un. Il ne faut pas oublier qu’au Maroc, la personne du roi n’est plus considérée comme “sacrée” depuis peu mais reste “inviolable”. On peut aller en prison pour critiquer Sa Majesté ! Un peu comme si ceux qui critiquent Nicolas Sarkozy étaient embastillés ou poursuivis en justice. Travailler avec ces sources requiert donc une très grande prudence (pas d’échanges par mail ni de longues conversations téléphoniques…) mais aussi le fait de “croiser” les informations qu’elles nous communiquent avec plusieurs autres sources, pour s’assurer qu’elles ne sont pas en train de nous manipuler. Nous avons été particulièrement vigilants sur ce point. Il y a d’ailleurs des informations sensibles que nous n’avons pas publiées faute de pouvoir les confirmer avec une certitude de 100 %. Il faut aussi rendre hommage à toute une génération de journalistes marocains qui, malgré les intimidations, ont enquêté sur des sujets extrêmement sensibles comme la corruption ou l’argent de la monarchie.
    Tags : Maroc, Mohammed VI, le roi prédateur, Catherine Graciet, Eric Laurent,