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  • Interview d’Alain Juillet : « Les néocons français vont souvent plus loin que les Américains »

    INTERVIEW EXCLUSIVE : Ex-numéro 2 de la DGSE, ancien haut responsable chargé de l’intelligence économique au sein du SGDN, actuellement senior advisor au sein du cabinet Orrick Rambaud Martel, Alain Juillet nous fait l’honneur d’être le premier expert à répondre aux questions de Deep-News.media. Éminent spécialiste du Renseignement, ayant des décennies d’expérience dans ce domaine, Alain Juillet a le mérite de ne pas avoir la langue dans sa poche. Son franc-parler sur les questions les plus sensibles est en parfaite adéquation avec la philosophie de Deep-News.media. Nous avons donc le plaisir de vous dévoiler cette première interview décapante, tout en vous signalant que d’autres personnalités tout aussi intéressantes répondront à nos questions dans les prochaines semaines.

    Maxime Chaix : Dans The Economist, le Président Macron a reconnu que les récentes guerres de changement de régime soutenues par les néoconservateurs et les partisans du droit d’ingérence avaient engendré des catastrophes. En août dernier, il avait mis en garde ce qu’il a nommé l’« État profond » contre toute tentative de blocage de ses initiatives de rapprochement avec la Russie. Plus récemment, il a fustigé l’OTAN dans sa forme actuelle, évoquant sa « mort cérébrale » à la suite de l’intervention turque au Nord-Est de la Syrie. Quel regard portez-vous sur ces déclarations?

    Alain Juillet : On ne peut pas reprocher au Président Macron de dire une vérité gênante : toutes les guerres que les États-Unis et nous-mêmes avons mené au nom du droit d’ingérence et de la mise en place de la démocratie à l’occidentale ce sont révélées catastrophiques par rapport à nos objectifs : la Libye, le Kosovo, l’Irak, la Syrie en sont la démonstration. Après la chute du mur de Berlin et la disparition du bloc soviétique, l’OTAN a changé de périmètre et d’objectifs et ne répond plus à nos besoins car c’est une alliance avec des visions stratégiques différentes entre les anciens pays de l’Est devenus européens, la Turquie, et les pays du Sud qui, à part la France et l’Angleterre, ne veulent pas assurer leur part des dépenses comme l’a rappelé le Président Trump. Les États-Unis veulent une OTAN aux ordres pour mener la politique américaine. Les pays du Nord veulent une alliance défensive contre la Russie. Les autres la considèrent comme une armée supranationale qui évite de s’impliquer dans un effort de défense. Quand le Président Macron parle de se rapprocher de la Russie, il ne fait que reprendre l’idée du Général de Gaulle d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural. Il reprend également celle du Président Mitterrand, qui avait bien compris ce qui allait se passer après la chute du mur de Berlin. Elle est évidemment combattue par l’Allemagne, les pays du Nord de l’Europe et les néoconservateurs français, qui vont souvent plus loin que les Américains.

    MC : En 2016, dans une interview à Paris Match, vous aviez déclaré que l’État français s’était fait « manipuler en aidant des gens, prétendument rebelles, alors qu’en réalité il s’agissait d’équipes d’al-Qaïda poussées par des pays du Golfe [en Syrie]. » Vous aviez ajouté que nos services de renseignement faisaient remonter la présence d’al-Qaïda dans cette rébellion à nos dirigeants politiques, qui ne les ont pas écoutés. Comment peut-on expliquer un tel aveuglement, d’autant plus que nos services spéciaux coopéraient en Syrie avec la Turquie et les puissances du Golfe, qui étaient accusées de financer et de soutenir différents groupes djihadistes ?

    AJ : Lorsque l’on remonte au début de l’histoire de la guerre en Syrie, on voit qu’elle a été le résultat du croisement de trois problèmes très différents : la migration vers les villes de la population rurale qui n’avait pas été anticipée et a créé de gros problèmes sociaux dans les zones périphériques des grandes villes ; la volonté étrangère de mettre au pouvoir les Frères Musulmans dans le cadre d’un « printemps arabe » à la syrienne, comme cela avait été fait en Tunisie, en Égypte et en Turquie ; et la décision de Bachar el-Assad de choisir le projet de gazoduc iranien au détriment du gazoduc qatari. 1 Le premier a réellement généré des rebelles, les deux autres inspirés de l’étranger ont armé des combattants dont la suite de l’histoire a montré que la grande majorité était des islamistes. Là-dessus se sont greffés des combattants irakiens venus de la zone sunnite qui ont été très vite fédérés par Daech. Au début, on a parlé d’une « Armée Syrienne Libre » alors qu’elle ne représentait qu’une faible partie des combattants. Or, cette fable permettait aux Occidentaux, dans le cadre de l’opération Timber Sycamore, d’injecter du matériel militaire en quantité sans se poser de questions vis-à-vis des katibas dont chacun savait qu’elles étaient financées ou aidées par la Turquie, l’Arabie saoudite et d’autres puissances du Golfe.

    Les services de renseignement comme la diplomatie ne connaissaient que partiellement la situation. En effet, ils n’avaient plus de contact avec les loyalistes et recevaient par leurs alliés du Moyen-Orient des informations tendancieuses. Pour ceux qui connaissaient la situation réelle, il est évident que les services étant mal renseignés, ils ont donc mal informé l’État. On a pu l’observer quand le Président Obama – qui avait des informations de meilleure qualité –, refusa de suivre le Président Hollande après l’attaque chimique de la Ghouta en août 2013, ou quand la Russie est entrée en guerre deux ans plus tard. La question à laquelle les historiens devront répondre sera de savoir si les informations reçues par les services étaient incomplètes, ou si c’est le système et ses dirigeants qui ne voulaient pas voir la réalité en face pour d’autres raisons.

    MC : Depuis avril 2015, un nombre restreint de journalistes français – dont Régis Soubrouillard, Georges Malbrunot et Claude Angeli –, ont dénoncé la cobelligérance de la France au Yémen, soit le fait que nos services de renseignement épauleraient l’Arabie saoudite et les Émirats Arabes Unis dans leur offensive. De son côté, l’État français nie toute implication directe dans ce conflit, alors que les journalistes en question ne se sont jamais rétractés. Selon vous, la France est-elle directement engagée dans la guerre au Yémen (renseignement satellitaire, aide au ciblage, appui des troupes émiraties par nos Forces spéciales…) ? Ou s’agit-il d’un soutien exclusivement matériel en faveur de l’Arabie saoudite et des Émirats via nos ventes d’armes ?

    AJ : Il faut s’entendre sur les mots. La France ne s’est pas engagée militairement au Yémen. Elle l’affirme et jusqu’à maintenant personne n’a pu faire la preuve du contraire sur le terrain, y compris les journalistes dont vous parlez. Par contre, ayant vendu du matériel militaire à l’Arabie saoudite et aux Émirats, elle doit assurer la formation des personnels locaux et la maintenance lourde sur une longue période, avec des effectifs dédiés à cet effet. Dans ce cadre, si l’Arabie met ses canons à la frontière et tire sur des objectifs au Yémen, on est obligé de reconnaître que le matériel est utilisé pour faire la guerre – mais n’est-ce pas la destination de ce type d’armes ? Par contre, cela ne permet pas de dire que les Français font la guerre. De même pour le renseignement satellitaire : former des opérationnels à l’utilisation de ce type de matériel dans des situations réelles fait partie du contrat, mais former n’est pas agir. 2 Derrière, se pose le problème des ventes d’armes à des pays étrangers et ce qu’ils en font à chaque fois qu’il y a un conflit armé.

    MC : Un nombre croissant d’experts estiment que la France est en train de s’enliser au Mali. Dans le même temps, plusieurs sources m’ont fait état de la présence d’anciens combattants du djihad syrien aux côtés des groupes armés terroristes locaux. Entre 2013 et 2016, certains officiers français avaient même affirmé que le Qatar et l’Arabie saoudite finançaient plusieurs milices djihadistes au Mali (Mujao, Ansar Dine…). En clair, nos alliés du Golfe sont-ils engagés dans une guerre par proxy contre la France au Mali, voire dans l’ensemble du Sahel ?

    AJ : Il est certain que l’opération Barkhane n’arrive pas à régler avec 4 500 hommes un problème qui s’étend sur une zone plus grande que l’Europe du Sud. Au départ, dans le Nord du Mali, le gros des djihadistes venait d’Algérie, d’où ils avaient été chassés, et ils s’appuyaient sur une population touareg, majoritairement en opposition avec le pouvoir central, qui voulait pour certains l’autonomie et d’autres l’indépendance. La Libye et les pays du Golfe ont encouragé cette volonté par des aides diverses tandis que nous apportions une aide militaire quand il fallait une solution politique. Notez qu’Iyad Ag Ghali, chef d’Ansar Dine, a été ambassadeur du Mali en Arable saoudite et en est revenu chef rebelle islamiste. Les difficultés en Syrie ont amené des combattants du djihad syrien à se joindre aux katibas locales et ce phénomène s’amplifie. Par contre, le soutien des pays du Golfe en leur faveur diminue du fait de leur nouvelle politique internationale. On ne peut pas dire qu’ils sont contre la France, mais ils voient d’un bon oeil le développement du salafisme dans la zone sahélienne, avec l’espoir de voir l’arrivée de gouvernements amis dans la zone.

    MC : En Libye, l’on peut observer l’un des plus grands désastres de la politique étrangère française de cette dernière décennie. Or, sous l’impulsion de Nicolas Sarkozy, le colonel Kadhafi s’était rapproché de la France avant ce conflit. Comment expliquez-vous un tel revirement ?

    AJ : La France était proche de Bachar el-Assad à l’époque du président Chirac, et ce jusqu’à l’attentat contre le Premier Ministre Hariri au Liban. Le changement de politique a été la conséquence d’un événement majeur. En Libye, il n’y a rien eu de tel car les tensions sont récurrentes entre la région de Benghazi et le pouvoir central, comme d’ailleurs avec les autres tribus libyennes que Kadhafi contrôlait tant bien que mal. Personne ne comprend pourquoi la situation réelle du moment justifiait une intervention qui n’avait jamais été faite auparavant. Comme il est impossible de croire que c’est Bernard-Henri Lévy qui a convaincu le Président français, il s’est passé autre chose que l’on découvrira un jour ou l’autre. L’une des clés est sans doute la présence confirmée de katibas djihadistes financées par le Qatar lors du lancement de l’opération militaire. Au-delà du pourquoi de l’intervention militaire, et de sa finalité qui nous a brouillés avec la Russie, il reste que cette campagne fut une victoire militaire sans grand risque qui s’est achevée en désastre politique, car rien n’avait été prévu pour la suite. Nous en payons les conséquences au Sahel, où le pillage des arsenaux militaires libyens a permis d’équiper les djihadistes et groupes touareg ou peuls avec l’armement récupéré.

    MC : Dans le monde occidental, l’approche de la lutte antiterroriste à l’étranger semble être quasi-exclusivement militaire. Or, l’on peut observer que, dans des pays tels que l’Afghanistan ou le Mali, ces opérations ne réduisent pas nécessairement la menace terroriste. Selon vous, existe-t-il d’autres moyens non-militaires de combattre l’expansion du djihadisme ? Par exemple, avons-nous des moyens de pression suffisants vis-à-vis de nos alliés du Golfe pour les dissuader de financer l’islamisme global ?

    AJ : C’est le coeur du problème. Les pays du Golfe, à commencer par l’Arabie saoudite, ont commencé à financer le djihadisme quand ils sont devenus très riches grâce aux cours du pétrole. Après la lutte contre les Russes en Afghanistan, la deuxième étape significative a été l’arrivée des groupes de moudjahidines islamistes dans les Balkans pour défendre et appuyer les populations musulmanes contre les Serbes à la fin des années 1990. À cette époque, l’OTAN n’y voyait pas d’objections. Il a fallu le 11-Septembre pour que les Américains et leurs alliés prennent conscience du risque que ces groupes représentaient par leur prosélytisme et leur application de la Charia. On a alors commencé à lutter contre leur développement avec une intensité variable selon les pays et les intérêts politico-économiques, si l’on se rappelle du choix des Frères Musulmans pour porter le « printemps arabe » ou l’appui aux groupes armés syriens qui se sont révélés djihadistes. L’action militaire peut freiner ou stabiliser l’expansion islamiste, mais la vraie solution est de tarir les sources de financements venant du Moyen-Orient, d’investir dans le développement des régions pauvres soumises à la pression djihadiste, et de faire la promotion d’un Islam « normal » comme il est pratiqué en Indonésie, pays qui compte le plus de musulmans dans le monde. Ceci exige du temps, des moyens et de la volonté.

    Notes de la rédaction :

    1. Selon nous, et bien qu’il le cite dans la suite de sa réponse, Alain Juillet a oublié dans cette liste un quatrième facteur déterminant dans la guerre en Syrie : la volonté saoudienne de renverser Bachar el-Assad par tous les moyens, et ce pour contrer l’influence iranienne grandissante au Levant. Ainsi, comme l’a dévoilé le New York Times en janvier 2016, l’Arabie saoudite a été le principal financeur de l’opération de changement de régime coordonnée par la CIA contre Assad, une campagne qui faisait partie d’un « plus vaste effort de plusieurs milliards de dollars impliquant l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie » – trois États pourtant accusés par des hauts responsables américains d’avoir soutenu la nébuleuse djihadiste au Moyen-Orient, dont l’« État Islamique » (Daech). Pour plus de détails sur cette opération, nous vous recommandons le livre La guerre de l’ombre en Syrie, publié en mars 2019 aux éditions Erick Bonnier.

    2. Nous émettons des réserves sur cette réponse d’Alain Juillet, sachant que l’ambassadeur français au Yémen – qui a certes nié la présence d’officiers français dans la « war room » cogérée par la « coalition arabe », les États-Unis et la Grande-Bretagne –, a néanmoins confirmé que la France fournissait du renseignement satellitaire à l’Arabie saoudite et aux Émirats Arabes Unis dans le cadre de leur offensive yéménite. En outre, ni Claude Angeli, ni Georges Malbrunot, qui sont des journalistes chevronnés, n’ont démenti leurs révélations sur la cobelligérance de l’État français au Yémen. Comme l’avait souligné en avril dernier l’expert des questions de défense Jean-Dominique Merchet, « la guerre, ce n’est pas de savoir la nationalité de l’obus qui va tuer quelqu’un, c’est tout un système de renseignement, de logistique et de formation et c’est ce système qui fait la guerre. Enfin, il est clair que la France participe à ce système saoudien et émirati, en leur fournissant des équipements, de l’information et du renseignement et donc nous sommes engagés, nous avons une part de responsabilité. » Bien que l’on n’en connaisse pas les détails, la cobelligérance française dans ce que Jean-Yves Le Drian a appelé la « sale guerre » du Yémen nous semble être avérée, d’autant plus que nos propres sources dans les milieux de la Défense et du Renseignement nous l’ont unanimement confirmée.

    Source : Deep News Media, 6 jan 2020

    Tags : France, Afrique, françafrique, Franc CFA, FCFA, Barkhane, Sahel, Mali, Niger,

  • L’œuvre négative du néocolonialisme français et Européen en Afrique. Les Accords de Partenariat Économique (APE) : De la Françafrique à l’Eurafrique

    Saïd Bouamama

    Au moment où se « négocient » les indépendances des colonies françaises d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Ouest, la France met en place « un système de coopération » c’est-à-dire souligne le juriste Guy Feuer « un ensemble organisé et articulé d’éléments plus ou moins interdépendants[i] ». Le « traité de coopération et de défense » que la France signe formellement avec ses colonies est bâtit selon une architecture et un contenu unique. Il inclut l’ensemble des domaines de coopération (zone Franc, coopération commerciale et douanière, coopération culturelle, coopération militaire, etc.). Ce système s’impose en bloc pour l’ancienne colonie comme le souligne de manière paternaliste le premier ministre Michel Debré le 15 juillet 1960 s’adressant au futur président de l’État gabonais : « On donne l’indépendance à condition que l’État s’engage une fois indépendant à respecter les accords de coopération signés antérieurement : il y a deux systèmes qui entrent en vigueur en même temps : l’indépendance et les accords de coopération. L’un ne va pas sans l’autre[ii]. »

    La nature néocoloniale de ces accords sera explicitement reconnue par le président Giscard d’Estaing 15 ans plus tard lors d’une interview concernant le sommet Franco-Africain du 10 mai 1976 : « Il faut enlever au concept de coopération la notion d’impérialisme sous toutes ses formes[iii]. » Il est vrai que cet aveu se faisait dans un contexte de combat de nombreux pays du tiers-monde pour un « nouvel ordre économique mondial ». Après avoir traité dans notre livraison précédente la partie consacrée à la zone Franc de ces accords de coopération, penchons-nous sur le volet commercial, économique et douanier.

    La « coopération » est la continuation de la colonisation par d’autres moyens[iv]

    « L’histoire des accords franco-africains et malgaches ne se sépare pas de celles du groupe de Brazzaville, de l’UAM et de l’OCAM[v] » rappelle le juriste Guy Feuer. Le groupe de Brazzaville est constitués par 11 Etats francophones en décembre 1960 « de tendance modérée très favorable à la coopération avec la France[vi] » souligne l’historien burkinabé Yakouba Zerbo. Ces Etats constitueront l’Union Africaine et Malgache (UAM) en septembre 1961 qui se transforme en Organisation Commune Africaine et Malgache (OCAM) en février 1965. Ces regroupements apparaissent en réponse et en contrepoids des États africains dénonçant le néocolonialisme qui se regroupent au sein du groupe de Casablanca en janvier 1961[vii]. L’affrontement est immédiat entre les deux groupes sur la question de l’indépendance de l’Algérie, les membres du groupe de Brazzaville soutenant leur ancien colonisateur dans l’enceinte des Nations Unies alors que ceux du groupe de Casablanca soutiennent les nationalistes algériens. C’est dans ce contexte marqué par la guerre d’Algérie et par l’émergence d’une Afrique progressiste que s’élaborent les accords de coopération. Le leader Ghanéen Kwame Nkrumah décrit comme suit cette période de transition :

    L’impérialisme quand il se trouve en face de peuples militants des anciens territoires coloniaux d’Asie, d’Afrique, des Caraïbes et d’Amérique Latine, change de tactique. Sans hésitation, il se débarrasse de ses drapeaux et même de certains de ses représentants les plus haïs. Ceci veut dire, proclame-t-il, qu’il « donne » l’indépendance à ses anciens sujets, et que cette indépendance sera suivie d’une « aide » accordée à leur développement. Sous le couvert de phrases de ce genre, il met pourtant au point d’innombrables méthodes pour réaliser les objectifs qu’il atteignait naguère grâce au simple colonialisme. C’est l’ensemble de ces tentatives pour perpétuer le colonialisme sous couvert de « liberté » que l’on appelle néo-colonialisme[viii].

    La coopération envisagée n’est donc que la poursuite de la dépendance sous de nouveaux atours. Les responsables politiques de l’époque ne s’en cache d’ailleurs pas à commencer par le premier ministre que nous avons cité plus haut et par le Général De Gaulle. Celui-ci revient sur les objectifs de la « coopération » dans une série d’intervention du début de la décennie 60. Ces allocutions télévisées que l’on peut voir sur le Web en consultant le site de l’INA (conférence de presse du 11 avril 1961[ix], conférence de presse du 31 janvier 1964[x], allocution du 16 avril 1964[xi], etc.) répète une même série d’arguments : fierté de l’œuvre accomplie dans les colonies, nécessité de poursuivre l’œuvre civilisatrice, changement d’époque rendant nécessaire la décolonisation, coopération comme relais pour garder des zones d’influences politiques et économiques face aux concurrents, etc. La coopération gaulliste est bien un projet de maintien de la dépendance dans une forme moins décrédibilisée et moins délégitimée que la colonisation directe.

    Il suffit de jeter un regard sur un de ces accords (copie conforme des autres) pour saisir les mécanismes de cette dépendance maintenue sur les plans économiques, commercial et douanier. En voici quelques exemples :

    L’accès aux minerais stratégiques : les accords signés entre la Centrafrique, le Congo, le Tchad et la France prévoit une annexe aux « matières premières et produits stratégiques » qui sont précisées comme suit : les hydrocarbures liquides ou gazeux, l’uranium, le thorium, le lithium, le béryllium, l’hélium. L’annexe énonce dans son article 4 :
    La République Centrafricaine, la République du Congo et la République du Tchad réserveront à la satisfaction des besoins de leur consommation intérieure les matières premières et produits stratégiques obtenus sur leurs territoires. Elles accordent à la République française une préférence pour l’acquisition du surplus et s’approvisionnent par priorité auprès d’elle en ces matières et produits. Elles facilitent leurs stockages pour les besoins de la défense commune et lorsque les intérêts de cette défense l’exigent, elles prennent les mesures nécessaires pour limiter ou interdire leur exportation à destination d’autre pays[xii].

    Dans un langage moins euphémisé ces lignes se traduisent comme suit : les matières premières stratégiques de ces pays sont réservées à la France.

    L’accès aux marchés : les mêmes accords prévoient un accès privilégiés aux marchés africains pour la France libellé comme suit dans l’article 12 :
    Les parties contractantes conviennent de maintenir leurs relations économiques dans le cadre d’un régime préférentiel réciproque dont les modalités d’application pourront être précisées par accords spéciaux. Ce régime préférentiel a pour objet d’assurer à chacune des débouchés privilégiés ; notamment dans le domaine commercial et tertiaire ainsi que dans celui des organisations de marchés.

    Dans un langage plus transparent cet énoncé peut se traduire comme suit : Les exportations de produits agricoles et miniers des pays africains sont réservées à la France et l’accès aux marchés africains est prioritairement accordé aux entreprises françaises. En outre l’article 13 du même accord prévoit l’exonération des droits de douane pour les parties contractantes. « Dès le début d’âpres critiques se sont fait entendre en Afrique même mais également en France et ailleurs « rappelle le juriste international Guy Feuer en précisant comme suit ces critiques : « Les milieux contestataires considéraient ces accords comme un pur instrument d’exploitation[xiii]. » Les quelques exemples cités suffisent à illustrer que ces critiques n’étaient pas exagérées. « Les accords bilatéraux de coopération concernent beaucoup moins les États africains que les grands groupes industriels français, ainsi que leurs centaines de filiales travaillant sur place en Afrique » résume l’anthropologue congolais Patrice Yengo[xiv].

    Le temps des sommets de la « famille franco-afrocaine »

    Au moment où De Gaulle prépare activement la transition du colonialisme au néocolonialisme l’économie française comme celles des autres State industrialisés d’Europe est également en pleine transition vers une concentration et une monopolisation sans précédent. Le leader marocain Mehdi Ben Barka (futur organisateur de la Conférence de solidarité des peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine de janvier 1966) y voit même, à côté de la lutte des peuples, une des causes de la décolonisation préparée et du néocolonialisme :

    Cette orientation [néocoloniale] n’est pas un simple choix dans le domaine de la politique extérieure ; elle est l’expression d’un changement profond dans les structures du capitalisme occidental. Du moment qu’après la Seconde Guerre Mondiale, l’Europe occidentale par l’aide Marshall et une interpénétration de plus en plus grande avec l’économie américaine, s’est éloignée de la structure du 19e siècle, pour s’adapter au capitalisme américaine, il était normal qu’elle adopte également les relations des Etats-Unis avec le monde ; en un mot qu’elle ait aussi son « Amérique Latine[xv].

    Autrement dit le néocolonialisme marque le passage définitif à l’économie monopolistique avec sa domination par de grands groupes industriels et financiers et ses multinationales. L’évolution de la « coopération » suivra celle de cette monopolisation activement accompagnée par De Gaulle, Pompidou puis Giscard. L’accompagnement étatique se concrétise dès le Vème plan gaulliste (1966-70) qui se donne explicitement pour but la « constitution ou le renforcement d’un petit nombre d’entreprise ou de groupe de taille internationale capable d’affronter les groupes étrangers[xvi]». Si De Gaulle enclenche le processus de monopolisation, ses successeurs l’accélèrent.

    La période est celle d’une contestation des accords franco-africains qui s’exprime « sous des formes diverses, et quelques fois violentes, en Mauritanie, au Congo, au Cameroun, au Niger, etc.[xvii]. » Une rénovation s’impose. Elle sera l’occasion d’un véritable tournant de la coopération vers l’ultralibéralisme articulé aux politiques de soutien à l’émergence de grands groupes industriels et financiers français. Le VIème plan (1971-1975) dont l’objectif est résumé comme suit par le président de la République Georges Pompidou : « donner à l’économie française sa dimension internationale en réalisant des ententes internationales et des créations d’entreprises de taille mondiale[xviii] ». Giscard poursuivra dans la même direction : « La volonté de promouvoir l’investissement des entreprises françaises à l’étranger s’est cependant renforcée sous Valéry Giscard d’Estaing[xix] » résume le chercheur en sciences politiques Daniel Bach.

    Les conséquences sur la « coopération » avec l’Afrique sont énormes sur le plan de ladite « aide au développement : Il ne s’agit plus officiellement d’aider au développement mais d’aider des projets rentables ; il n’est plus question d’une aide essentiellement publique mais « d’associer les capitaux privés » ; le lien n’est plus pensé de manière bilatérale mais au contraire les pays africains sont incités à recourir à la banque mondiale et au FMI ; du soutien à des États inféodés, on passe à une incitation à la privatisation du secteur public ; le « soutien au développement » est abandonné au profit de « l’économie productive » ; etc. Bref le « libre-échange » avec son lot de privatisations, d’endettements, de développement inégal dans chacun des pays (entre un « secteur rentable » et des régions « inutiles »), de spoliation des terres au profit des grosses entreprises agro-exportatrices, etc., s’installe. Giscard d’Estaing symbolise cette transition vers une coopération visant une rentabilité à court terme. Le projet n’est plus seulement de maintenir une dépendance globale mais de maximiser le profit à court terme rappelle Daniel Bach :

    Durant le septennat de V. Giscard d’Estaing, le grand dessein dans lequel on prétendait inscrire la politique de coopération […] reste souvent marginalisé au profit de préoccupations économiques immédiates. Le projet contenu dans le rapport Abelin[xx] laissait transparaître la vision d’une coopération bilatérale intimement liée au développement des activités de l’industrie française à l’étranger. Cette conception inscrite dans l’un des rapports du VIIème plan sera reprise avec une vigueur nouvelle à partir de 1978 […] En février 1979, lorsque V. Giscard d’Estaing se rend au Cameroun, il est officiellement souligné que la coopération doit être « d’intérêt réciproque » mais « aussi de préférence s’effectuer dans les secteurs où une activation économique est souhaitable pour la France. Le gouvernement français va confier à un groupe d’experts la mission de rechercher « sans que soient remises en cause les autres finalités de la coopération » comment les fonds publics pourraient concourir plus efficacement au succès de la politique d’exportation[xxi].

    Non seulement la dépendance antérieure n’a pas disparue mais elle s’est accrue au cours de cette ère de « libre-échange ». Le poids accru des multinationales françaises et européennes a approfondi la scission entre une Afrique « utile » vers laquelle se dirige « l’aide » et une Afrique « inutile » qui sombre dans l’implosion et la déstructuration sociale. A l’intérieur même de chaque pays la fragmentation entre des zones « utiles » recevant les investissements et les zones « inutiles » s’est accélérée et a renforcée les sources de conflits liées aux mécontentements des régions délaissées. La destruction des capacités d’intervention des États africains est porteuse d’un chaos qui ne gêne pas les affaires pourvu que les zones « utiles » soient protégées au besoin par l’armée française. Il faut avoir en tête ce processus de mise en dépendance néocoloniale puis son approfondissement dans la décennie 70 pour éclairer la question des migrations contemporaines. Il en est de même pour les multiples conflits et guerres qui secouent l’ancien empire colonial français.

    Une telle aggravation de la situation n’est possible qu’avec un accompagnement politique. Ce rôle sera dévolu aux fameux sommets franco-africains (du premier à Paris en 1973 au dernier en 2017 à Bamako) qui ont été des espaces d’impositions des décisions et orientations de Paris et Bruxelles. Ces espaces sont également des lieux de gestion des insatisfactions, contestations et revendications inévitables du fait de la régression massive imposée. La sociologue sénégalaise Sow Fatou résume comme suit la représentation qu’ont les peuples africains de ces sommets : « De ces sommets on retiendra que les tête-à-tête de la France avec ses anciennes colonies furent longtemps perçus, par les populations africaines et de nombreux analystes de la politique africaine, comme des réunions de syndicats de chefs d’États africains, sous son égide[xxii]. » Certes les contestations africaines n’ont pas manquées mais globalement les décisions stratégiques de Paris s’imposent du fait de la dépendance économique, politique et militaire d’une part et du fait des menaces françaises d’autre part. Donnons quelques exemples : approbation de la décision française de se débarrasser de Bokassa devenu trop encombrant après 13 ans de soutien ininterrompus au sommet de Kigali de 1979 ; Consécration de la légitimité d’Hissène Habré après son coup d’État contre Goukouni Wede au sommet de Kinshasa de 1982; aval donné à la nouvelle stratégie militaire française c’est-à-dire à la création du RECAMP (Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix) par le sommet de Biarritz en 1994, etc.

    L’écrivain camerounais Mongo Beti fustige ces sommets comme outils du néocolonialisme à l’occasion de celui de Yaoundé en 2001 :

    Quel avantage nos populations tirent-elles d’un sommet franco-africain comme celui-ci ? Absolument aucun, bien au contraire. […] Toute l’affaire a pour but de célébrer Paul Biya, grand ami de Jacques Chirac, plus que jamais en mal de reconnaissance. […] La France a imposée depuis plus de 40 ans aux innocentes populations africaines des dictateurs féroces qui, en servant ses intérêts, ont été l’instrument d’une révoltante exploitation des ressources humaines et matérielles de notre continent[xxiii].

    Les sommets ne se contentent pas de ce rôle. Ils constituent également un contrepoids à l’OUA et une pression sur elle. Pour ce faire, ils ont été ouverts aux autres pays africains que ceux de l’ancien empire colonial français. On passe en effet de 7 chefs d’États au sommet de Paris en 1973 à 53 au sommet de Bamako en 2017. Le soupçon et la critique de vouloir se substituer à l’organisation africaine est tellement fréquente que Mitterrand est contraint de préciser au sommet de Kinshasa de 1982 que le sommet franco-africain « n’est ni une institution, ni une organisation. Elle n’entend se substituer à personne, notamment à l’Oua. Nous n’en avons ni le mandat ni l’intention… C’est aux Africains qu’il appartient de se déterminer eux-mêmes, au niveau privilégié de l’OUA[xxiv]. »

    De la Françafrique à l’Eurafrique

    Le tournant giscardien en matière de coopération se réalise dans le contexte de construction de la communauté européenne et de la montée en puissance du FMI et de la Banque mondiale comme instrument des États-Unis. Le modèle gaulliste d’un face à face entre chaque pays et la France cède le pas au multilatéralisme. Paris compte gagner ainsi pour ses multinationales l’accès aux pays anglophones et lusophones en échange d’une fonction de gendarme pour l’ensemble des pays européens d’une part et plus largement encore pour l’ensemble des puissances occidentales. Bien sûr ce compromis n’est pas exempt de contradictions d’intérêts mais il forme la texture de la coopération avec l’Afrique de Giscard à aujourd’hui. « Le néocolonialisme certes a mis fin partiellement à la politique de « chasse-gardée » du colonialisme traditionnel […] Cette ouverture ne met pas en cause la prépondérance au moins relative de la France en matière d’investissements et de commerces extérieurs ; elle a pour contrepartie le « redéploiement » français dans des pays qui n’appartenaient pas à sa zone d’influence[xxv] » résume l’historien et géographe Jean Suret-Canale.

    Le projet de constituer de grands groupes industriels et financiers de De Gaulle à Giscard s’inscrit dans la logique de la construction européenne. Dès sa gestation, avant même toute concrétisation, ce projet était en lien avec les colonies. Aimé Césaire dénoncait déjà en 1954 « l’Eurafrique » :

    Le colonialisme n’est point mort. Il excelle pour se survivre, à renouveler ses formes ; après les temps brutaux de la politique de domination, on a vu les temps plus hypocrites, mais non moins néfastes de la politique dite d’Association ou d’Union. Maintenant, nous assistons à la politique dite d’intégration, celle qui se donne pour but la constitution de l’Eurafrique. Mais de quelques masques que s’affuble le colonialisme, il reste nocif. Pour ne parler que de sa dernière trouvaille, l’Eurafrique, il est clair que ce serait la substitution au vieux colonialisme national d’un nouveau colonialisme plus virulent encore, un colonialisme international, dont le soldat allemand serait le gendarme vigilant[xxvi].

    L’analyse de Césaire a un caractère visionnaire impressionnant car elle est datée d’avant le traité de Rome de 1957. La seule erreur est que le soldat n’est pas allemand mais français même s’il défend désormais également les intérêts des multinationales allemandes. Le traité de Rome créant la Communauté Économique Européenne (CEE) comporte explicitement une dimension africaine. Son article 131 précise : « Les États membres conviennent d’associer à la Communauté les pays et territoires non européens entretenant avec la Belgique, la France, l’Italie, et les Pays-Bas des relations particulières. » Son article 132 révèle le véritable but : « Les États membres appliquent à leurs échanges commerciaux avec les pays et territoires le régime qu’ils s’accordent entre eux en vertu du présent traité[xxvii]. » Il s’agit bien comme le disait Césaire d’un projet de néocolonialisme européen.

    Les indépendances néocoloniales confirmeront cette « association » entre la CEE et 18 anciennes colonies africaines sous la forme des « accords de Yaoundé » de juillet 1963 renouvelés en 1969. Le contexte et le rapport de force de la période expliquent le contenu de ces accords qui, sur plusieurs aspects prennent en compte les intérêts des pays africains. Le contexte est celui d’une montée des luttes contre le néocolonialisme se traduisant par le groupe de Casablanca, par les conférences panafricaines et afro-asiatiques, par le groupe des non-alignés, par la conférence tricontinentale en 1966, etc. L’intervention militaire et l’ingérence suffisent de moins en moins à cantonner cette poussée. S’attacher structurellement les pays restés dans le giron des anciennes puissances coloniales devient une nécessité. Le second élément est le projet européen en pleine guerre froide avec l’ambition de constituer un troisième pôle, face aux USA et à l’URSS, roulant pour son propre compte.

    Pour ce faire, il faut « garantir l’approvisionnement de l’Europe en certaines matières premières tout en sécurisant les débouchés des anciennes colonies […] et pérenniser le rôle central exercé par quelques firmes européennes dans le commerce avec ces pays [xxviii]» résume l’économiste congolais Gildas Walter Gnanga. L’Europe n’est d’ailleurs pas la seule à tenter d’utiliser l’aide et la coopération dans le cadre de la guerre froide. A la même période l’URSS offre des prêts à long terme et à bas taux d’intérêts à ses alliés. Les USA créent pour leur part sous le couvert de la Banque mondiale l’International Development Association (IDA) en janvier 1960 dont l’objectif est également de proposer des prêts à taux faibles avec une échéance de 25 à 40 ans. La coopération est devenue un « instrument de propagande dans le cadre de la guerre froide » résume l’historien Guia Migani[xxix] ».

    En raison de ce contexte, les conventions de Yaoundé 1 (1963- 1969) et 2 (1969- 1974) prennent en compte les intérêts des pays africain : Les droits et taxes de douanes frappant les produits africains sur les marchés européens sont supprimés alors qu’ils sont maintenus pour les autres pays; en sens inverses les États africains s’engagent à ouvrir leur marché avec exemption des droits de douanes mais seulement « progressivement » et compte tenu « des impératifs de leurs économies » ; un fond européen de 730 millions de dollars est créé (le Fond Européen de Développement- FED) consacré aux infrastructure de transports, sociales et culturelles ou à la diversification des cultures afin de contrecarrer la monoproduction ; il est complété par un fond de 170 millions de dollars pour des prêts à « conditions spéciales » ou avec « bonifications d’intérêts » ; des prix garantis pour certains produits ; etc.

    Malgré leur caractère positif pour les États africain, les conventions de Yaoundé ne signifient pas la rupture avec la dépendance et encore moins la mise en place de rapports égalitaires. Bruxelles oriente en effet son aide vers les secteurs agricoles et miniers correspondant à ses besoins avec comme effet ce que le journaliste Tibor Mende appelle dès la fin de la décennie une « recolonisation[xxx] ». A l’issue de la décennie 60 les économies des pays africains signataires sont encore plus dépendantes, plus extraverties, plus mono-productrice. Même le très europhile et très peu contestataire ministre de l’économie ivoirienne est contraint de le constater en ces termes en 1969 :

    L’aide globale dont ont bénéficié les dix-huit est inférieure à la perte subie par ces pays, par suite de la dégradation des cours mondiaux. D’autre part, l’essentiel de l’aide reçue est destinée au développement agricole et plus précisément à l’agriculture d’exportation. Ainsi tant que durera la détérioration des termes de l’échange[xxxi], les économies africaines continueront à se perpétuer sur des bases contradictoires. D’un côté les économies bénéficient d’une aide, de l’autre elles sont pénalisées pour avoir tiré le fruit de cette aide[xxxii].

    L’adhésion du Royaume Uni à la Communauté Européenne met à l’ordre du jour l’extension du partenariat européen aux anciennes colonies anglaises. Un nouveau cycle de négociation s’ouvre sur fond d’un bilan négatif de la part des pays africains. La convention de Lomé 1 signé en 1975 avec 46 pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) est comme les conventions précédentes riches d’avancées sur le papier qui seront rapidement démenties dans la mise en pratique. La logique reste la même que pour les accords de Yaoundé dans un processus à trois temps désormais rodé : reconnaissance verbale des revendications des pays africains, traduction en mesures prometteuses dans les accords, dévitalisation de ces mesures par la maitrise des orientations des aides d’une part et de l’écoulement des surplus agricole européen à des prix subventionnés sur le marché africain d’autre part. La mise en place d’un fond de stabilisation des recettes d’exportation (le STABEX) visant à compenser les pertes du prix des matières agricoles est la grande avancée sur le papier de Lomé 1 concernant 48 produits de base. Un fond similaire pour les produits miniers est institué par les accords dits « Lomé 2 » (signé avec 57 États la convention couvre la période 1979- 1984) le Sysmin (le Système de Développement du potentiel minier) pour huit produits miniers.

    La convention Lomé 3 concerne désormais dix États européens et 65 États ACP dont tous les États d’Afrique subsaharienne à l’exception de l’Afrique du Sud et de la Namibie toujours occupée par l’Afrique du Sud. La logique est identique à celle de Lomé deux mais avec une modification de taille : Au prétexte de se concentrer sur la « sécurité alimentaire », cette convention initie le système dit de « concentration » contraignant chaque État à choisir un secteur prioritaire sur lequel est concentré l’aide. La conséquence en est le renforcement encore plus fort sur l’agriculture d’exportation et l’abandon des perspectives de développement industriel. La convention de Lomé 4 (elle touche 70 pays ACP pour la période 1989- 1999) met l’action sur la « promotion des droits de l’homme, de la démocratie et de la bonne gouvernance » initiant ainsi des conditionnalités politiques pour accéder à l’aide. En outre elle impose le concept « d’ajustement structurel » défendu par le FMI et la banque mondiale en stipulant explicitement que les pays qui s’y soumettent auront « automatiquement droit à ces nouveaux fond d’appuis[xxxiii] »

    Indéniablement le principe d’une compensation de la baisse des prix agricole sur le marché mondial (STABEX) (et à une moindre mesure des prix de matières minières – SYSMIN) est celui qui explique l’augmentation du nombre de pays ACP signataires. Les multinationales disposent, en effet, de nombreux moyens pour pousser à la baisse les prix des produits agricoles et les minerais. Ce principe apparaît en conséquence comme la reconnaissance et la prise en compte de l’inégalité structurelle du marché mondial et en particulier de la dégradation continue des termes de l’échange. Cependant par de multiples biais ce principe équitable a été mis au service d’un accroissement de la dépendance :

    Encouragement de la monoculture d’exportation : La garantie STABEX n’est possible que pour les produits agricoles constituant au moins 6 % des recettes d’exportations. Alors que les économies africaines ont besoin d’une diversification pour être moins dépendantes du marché mondial, la concentration sur un ou quelques secteurs est encouragée. Logiquement se sont les pays les plus riches et les plus exportateurs qui ont le plus bénéficié de l’aide : Côte d’Ivoire, Sénégal, Niger.
    Entrave à l’industrialisation de transformation : Le système ne fonctionne pas pour les produits transformés alors que les pays africains ont besoin de ces industrie de transformation parce qu’elles sont créatrices d’emplois mais aussi parce que les variations des prix des produits transformées sont considérablement moindre que celles des produits bruts ;
    Le mensonge sur la « sécurité alimentaire » : Par définition l’agriculture vivrière est éliminée du STABEX pensé uniquement pour les variations de prix des produits exportés. Il s’agit objectivement d’une incitation à privilégier l’agriculture d’exportation au détriment d’une agriculture centrée sur l’autosuffisance alimentaire ;
    Des moyens contradictoires avec l’objectif de compensation : Les montants affectés au STABEX comme au SYSMIN sont sans commune mesure avec les pertes subies par la baisse des prix sur le marché mondial. Ainsi par exemple le montant du STABEX est de 180 millions d’écus en 1981 alors que la baisse des prix sur le marché mondial s’est traduite par une perte de 450 millions. Seule 52 % des demandes de cette année ont pu être satisfaites et l’année 81 est encore pire avec seulement 40 % des demandes satisfaites.
    L’ensemble de ces facteurs et mécanismes conduisent le juriste luxembourgeois Marc Elvinger à poser le bilan suivant :

    Bien que constituant un peu le fleuron de la politique de coopération de la CEE en ce qu’il peut sembler réaliser un pas en direction de la mise en place d’un nouvel ordre économique international, le Stabex est susceptible d’encourir de graves critiques pouvant aller jusqu’à l’accuser de n’être au contraire qu’un instrument au service de la pérennisation du pacte colonial. […] Dans ces conditions, la question se pose bien sûr de savoir si le Stabex ne constitue pas un piège en faisant miroiter la possibilité de ne pas avoir à modifier radicalement la division du travail Nord-Sud en en aménageant quelque peu les modalités, alors que, au bout du compte, il s’ avère même impuissant a ce faire en temps de crise importante. […] Bien que le Sysmin et le Stabex diffèrent de façon importante dans leur mode de fonctionnement, l’essentiel des critiques adressées au Stabex pourrait être repris à propos du Sysmin, en ajoutant que le principal moteur de la mise en place du Sysmin semble bel et bien avoir été le souci de la préservation de l’outil de production minier ACP au profit de la sécurité d’approvisionnement minier de la Communauté[xxxiv].

    Le « baiser de la mort » de l’Europe à l’Afrique

    Les négociations qui s’ouvrent à l’issue de la convention Lomé IV se déroulent dans un monde considérablement modifié. La guerre froide à définitivement pris fin avec la disparition de l’URSS en 1991 et avec elle le besoin de « préserver » les alliés africains. De l’intérieur comme de l’extérieur de l’Union Européenne, les critiques se multiplient sur la « violation » de la concurrence que constituerait les accords de Lomé. A l’interne les critiques proviennent essentiellement de l’Allemagne qui a gagné en poids au sein de l’Union Européenne depuis sa réunification. De l’extérieur se sont plusieurs pays d’Amérique Latine et les multinationales états-uniennes qui y sont installées qui dénoncent dès 1993 une « concurrence déloyale » et une « discrimination » dans ce qui est appelé « la crise de la banane ». L’enjeu en termes de profit est immense puisque l’Union Européenne est devenue depuis 1995 le premier importateur de bananes au monde. « Contesté à l’intérieur même de la Communauté par l’Allemagne (grand importateur de bananes latino-américaines) ce règlement [Règlement de l’UE adopté en 1993[xxxv]] fut surtout attaqué au sein du GATT par des pays d’Amérique latine » résument la juriste Catherine Hagueneau-Moizard et l’économiste Thierry Montalieu[xxxvi].

    L’ensemble des pays européens étant signataire de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (General Agreement on Tariffs and Trade ou GATT[xxxvii]) c’est celui-ci qui sera invoqué pour contraindre l’Union Européenne à modifier les règles de ses échanges avec les pays ACP :

    Dès 1993, un panel (organe du GATT chargé d’arbitrer les conflits commerciaux) avait constaté que les exemptions de droit de douane résultant des Accords de Lomé étaient contraires aux règles selon lesquelles, d’une part, les opérateurs nationaux ne doivent pas être favorisés (règle du traitement national, article III du GATT) et, d’autre part, l’ensemble des opérateurs doivent bénéficier du traitement le plus favorable (clause de la nation la plus favorisée, article 1er du GATT). La Communauté négocia alors une dérogation lui permettant de maintenir ses exemptions jusqu’en février 2000, date à laquelle le dernier Accord de Lomé devait prendre fin[xxxviii].

    La transformation du GATT en une Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995 renforce encore les critiques. Les États-Unis saisissent l’Organe de Règlement des Conflits (ORD) qui condamne à deux reprises l’UE en 1997 et 1998 pour « discrimination au détriment des pays tiers ». C’est dans ce contexte que s’ouvrent les négociations à l’issue de la convention de Lomé en 2000. Les accords de Cotonou (signés avec 77 pays ACP) qui en découlent sont à bien des égards une rupture, une régression lourde de conséquences pour les peuples africains et une atteinte supplémentaire aux souverainetés nationales. L’article premier de ces accords souligne ainsi que l’objectif n’est plus seulement le « développement » mais « l’intégration progressive dans l’économie mondiale ». Les exemptions douanières sont maintenues jusqu’en 2007 en raison d’une dérogation de l’OMC, la période transitoire devant se traduire par la signature « d’Accords de Partenariats Economiques […] compatible avec les règles de l’OMC » (article 36 et 37). L’article 96 pose en outre des conditionnalités politiques libellées comme suit : « les droits de l’homme, les principes démocratiques et l’État de droit[xxxix]. »

    Le ton de l’accord et les termes utilisés réintroduisent explicitement une relation de tutorat qui n’est pas sans rappeler la fameuse « mission civilisatrice » de la colonisation. D’une part l’Europe se dédouane entièrement de la situation catastrophique de nombreux pays africains et se pose d’autre part en tuteur de ces pays. « L’accord de Cotonou véhicule une image à la fois négative et restrictive de l’Afrique : gaspillage, incompétence, corruption, absence d’État de droit, pauvreté et retard à rattraper. Cela sert à justifier la perte d’automaticité de l’aide européenne, le renforcement des conditionnalités économiques et politiques, et les procédures de sanctions prévues comme la suspension des fonds[xl] » explique le sociologue Raphaël Ntambue Tshimbulu.

    Les accords de Cotonou prévoient la mise en place d’Accords de Partenariat Économique avec 6 régions du groupe ACP (les Caraïbes, l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique de l’Est, l’Afrique Australe, l’Afrique Centrale et le Pacifique). Au passage le découpage régional de l’Union Africaine est jeté à la poubelle au profit d’un autre décidé par les seuls européens. Progressivement on ne parlera plus que des APE et de moins en moins du dispositif de Cotonou dans lequel ils sont censés s’insérer. Ce constat signifie que les objectifs de libéralisation du commerce ont pris explicitement le pas sur ceux concernant le « développement » ou l’amélioration des conditions d’existence des populations.

    Quant au contenu des APE, il s’agit tout simplement d’ouvrir entièrement le marché africain à terme en supprimant l’ensemble des droits de douane. Le petit producteur d’oignons local est ainsi mis en concurrence directe avec la multinationale exportant des oignons. « Les APE prévoient en effet la suppression des droits de douane sur trois quarts des exportations de l’Union, tandis que celle-ci continuera à importer d’Afrique de l’Ouest la totalité de ses produits qui sont déjà en franchise de droits. Un marché de dupes[xli] » résume l’économiste Jacques Berthelot. Ce dernier caractérise ces accords comme un « baiser de la mort de l’Europe à l’Afrique ». Un autre économiste, Jean Christophe Defraigne, complète : « Il s’agit donc de créer plusieurs zones de libre-échange au sein du groupe ACP, ce qui devrait permettre aux multinationales européennes d’opérer plus efficacement au niveau régional[xlii]. »

    Les conséquences à terme de ces accords ultra-libéraux sont catastrophiques. L’ONG belge, « Centre National de Coopération au Développement (CNCD) », les évaluent comme suit :

    Une ouverture des économies entraînera une perte estimée entre 26 et 38 % des recettes douanières à l’horizon 2022. Ouverture à sens unique, d’ailleurs: l’Afrique n’a rien, ou presque, à exporter, sinon des matières premières (agricoles, pétrolières, métallurgiques), dont elle dépossède ses propres générations futures pour un bénéfice quasi nul. L’inverse n’est pas vrai. Les investissements étrangers connaissent, en Afrique, un « retour sur investissement » record (40 %), ce qui fait de la région « une manne féconde pour les prédateurs[xliii].

    Les futurs drames africains et les futures traversées meurtrières de la méditerranée qui en découleront inéluctablement sont en gestation dans ces accords ultralibéraux prétendant mettre en concurrence « libre et non faussée » des producteurs locaux et des multinationales.

    Résistances africaines

    Malgré leur dépendance étroite, la plupart des pays africains ont d’abord refusé le marché de dupe et ce d’autant plus qu’un mouvement militant s’organisait contre les APE. A échéance de la période transitoire des accords de Cotonou (2008), quasiment aucun pays africains n’avait signé les accords. Le sommet Europe-Afrique de Lisbonne de décembre 2007 voit même se constituer une fronde des Etats africains. Le sociologue Malgache Jean-Claude Rabeherifara résume comme suit les raisons de cette unité inédite depuis longtemps :

    La majorité des 53 États africains, à l’exception de quelques pays à revenus intermédiaires, ont en fait refusé de signer les APE car la conscience des pièges de pillage et de mise sous tutelle (« de recolonisation » disent certains analystes plus clairement !) qu’ils déploient est de plus en plus largement partagée dans les populations. Les États et gouvernements – fussent-ils des chantres du libéralisme – ne sont pas prêt de se mettre à dos des frondes populaires attendues, autrement dit à scier la branche sur laquelle ils sont assis[xliv].

    La riposte européenne ne tarda pas et pris une double forme. La première est celle de la menace à la baisse de l’aide au développement pour les pays refusant de signer les accords et le chantage à la réintroduction de droits de douanes pour leurs exportations vers l’Europe. La seconde fut celle de la division en ouvrant à des accords bilatéraux alors que les APE étaient censés être de dimension régionale. Les pressions européennes feront céder la plupart des États africains. Ainsi en juillet 2014 étaient signé coup sur coup un APE avec les États de l’Afrique de l’Ouest, un autre avec les États d’Afrique australe et un dernier avec le Cameroun seul. De manière significative Alassane Ouattara a joué un rôle de premier plan pour emporter la décision des États de l’Afrique de l’Ouest. Rappelons qu’il vint au pouvoir en 2011 dans la dynamique d’une intervention militaire française aboutissant à la destitution scandaleuse de Laurent Gbagbo. En 2016 c’est au tour de l’Afrique de l’Est de signer l’accord. Pressions, menaces, divisions, chantage à l’isolement et si nécessaire l’épée de Damoclès d’une intervention militaire, ont conduit à faire céder les États récalcitrants.

    Heureusement la résistance est également portée par des mouvements populaires : le réseau « Third World Network Africa » et le congrès des Syndicats du Ghana ; la Plate-forme des organisations de la société civile de l’Afrique de l’Ouest sur l’accord de Cotonou (Poscao), le Réseau des organisations paysannes et de producteurs de l’Afrique de l’Ouest (Roppa), la Coalition nationale « Non aux APE » et la plate-forme « France Dégage » pour l’Afrique de l’Ouest ; le Forum des Petits Exploitants Agricoles au Kenya ; etc.

    Les premiers effets se sont fait sentir au Sénégal avec l’arrivée du groupe Auchan en 2015 qui a comme conséquence la mise en danger du petit commerce sénégalais. La plate-forme « France Dégage » et l’Union nationale des Commerçants et Industriels du Sénégal (UNACOIS) appellent à la mobilisation en soulignant le lien entre le développement de la grande distribution et les APE : « Ils veulent ainsi, que le gouvernement leur dise quel étude d’impact il a fait en signant les Accords de partenariat économique (Ape). Ils prônent la protection du commerce sénégalais d’abord avant la promotion de l’économie étrangère et française précisément[xlv]. »

    Ces mouvements sont encore largement insuffisants pour faire basculer le rapport des forces. Cependant l’audience de ces luttes ne peut que grandir au fur et à mesure que les APE déploieront leurs effets désastreux. Les progressistes d’Europe sont aussi interpellés par la situation crée par la violence économique des APE. Le rapport des forces dépend aussi de leur capacité à se mobiliser en soutien aux luttes que développeront inéluctablement les peuples africains.

    [i] Guy Feuer, La révision des accords de coopération franco-africains et franco-malgaches, Annuaire Français de Droit International, n° 19, 1973, p. 720.

    [ii] Michel Debré, Lettre adressée à Léon Mba datée du 15 juillet 1960, cité in Alfred Grosser, La politique extérieure de la Vème République, Fondation Nationale des Science Politiques, Paris, 1965, p. 74.

    [iii]Philippe Decraene, interview de Valérie Giscard d’Estaing, Le Monde du 4 mai 1976, http://discours.vie-publique.fr/notices/767033608.html, consulté le 14 juillet 2018 à 16 h 15.

    [iv] Nous paraphrasons le théoricien de la guerre Carl Von Clausewitz qui donne à celle-ci la définition suivante encore d’actualité : « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ».

    [v] Ibid, p. 720.

    [vi] Yakouba Zerbo, La problématique de l’unité africaine (1958-1963), Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 212, 2003/4, p. 120.

    [vii] Ce groupe réunit le Ghana, la Guinée, l’Algérie, le Mali, le Maroc et la République Arabe Unie.

    [viii] Kwame Nkrumah, Le Néo-colonialisme. Dernier stade de l’impérialisme, Présence Africaine, Paris, 2009 (1965), p. 245.

    [ix] Conférence de presse du 11 avril 1961, https://fresques.ina.fr/de-gaulle/fiche-media/Gaulle00218/conference-de-presse-du-11-avril-1961.html, consulté le 14 juillet 2018 à 16 h30.

    [x] Conférence de presse du 31 janvier 1964, http://www.gaullisme.fr/2014/08/08/conference-de-presse-du-31-janvier-1964/, consulté le 14 juillet 2018 à 18. 30.

    [xi] Conférence de presse du 16 avril 1964, https://fresques.ina.fr/de-gaulle/fiche-media/Gaulle00232/allocution-du-16-avril-1964.html, consulté le 14 juillet 2018 à 20 h 00.

    [xii] Accord particuliers conclus les 11, 13 et 15 août 1960 entre le gouvernement de la république française, de la république centrafricaine, de la république du Congo, et du Tchad, Annexe concernant les matières premières et produits stratégiques, http://wabeafrikaezingocentrafrique2009.over-blog.com/2016/09/les-accords-de-cooperation-rca-france-de-1960-signes-par-dacko-enfin-retrouves-et-exposes-par-des-patriotes-centrafricains.html, consulté le 15 juillet 2018 à 10. 02.

    [xiii] Guy Feuer, La révision des accords de coopération franco-africains et franco-malgaches, op. cit., p. 721.

    [xiv] Patrice Yengo, Au cœur de la domination : Etat franco-africain, système de réseaux et criminalisation du politique, in Collectif, Résistances et dissidences. L’Afrique (centrale) des droits de l’homme, Rupture-Solidarité, n° 4, tome 2, 2002, p. 200.

    [xv] Mehdi Ben Barka, Option révolutionnaire au Maroc, in Ecrits politiques 1957-1965, Paris, Syllepse, 1999, pp. 229-230.

    [xvi] Cinquième plan de développement économique et social (1966-1970), Volume 1, Imprimerie des journaux officiels, Paris, novembre 1965, p. 68.

    [xvii] Yves Goussault, L’évolution de la coopération franco-africaine, Aujourd’hui l’Afrique, n° 8, 1977, p. 4.

    [xviii] Cité in Martin Verlet, redéploiement, intégration et politique de crise de l’impérialisme français, in L’impérialisme français aujourd’hui, Editions sociales, Paris, 1977, p. 15.

    [xix] Daniel Bach, La politique extérieure de Valéry Giscard d’Estaing, Presses de la Fondation Nationale de Sciences Politiques, Paris, 1985, p. 416.

    [xx] Ce rapport daté de 1975 prend pour prétexte la crise mondiale pour justifier une réforme importante de la coopération en faveur des multinationales françaises et européennes.

    [xxi] Daniel Bach, La politique africaine de V. Giscard d’Estaing : contraintes historiques et nouveaux espaces économiques, Travaux et documents n° 6, Centre d’Etude d’Afrique Noire de Bordeaux, 1984, pp. 22-23.

    [xxii] Fatou Sow, Langues, identités et enjeux de la recherche féministe, in Fatou Sow (dir.), La recherche féministe francophone. Langue, identités et enjeux, Karthala, Paris, 2009, p. 13.

    [xxiii] Mongo Betti, Billets d’Afrique, octobre 2000.

    [xxiv] Les 22 premières conférences des chefs d’Etats de France et d’Afrique, https://www.diplomatie.gouv.fr/IMG/pdf/B0100_-fiche22sommets.pdf, consulté le 16 juillet 2018 à 17 h 55.

    [xxv] Jean Suret-Canale, Dix ans de politique française en Afrique (1974-1984), Aujourd’hui l’Afrique, n° 30, 1985, p. 6.

    [xxvi] Aimé Césaire, Le colonialisme n’est pas mort, La Nouvelle Critique, n° 51, janvier 1954, p. 28.

    [xxvii] James D. Thwaites, La mondialisation, Presses de l’Université de Laval, 2004, p. 280.

    [xxviii] Gildas Walter Gnanga, Les Accords de Partenariat Economiques (APE) et les enjeux pour la CEMAC, Institut sous régional de statistique et d’économie appliquée, Yaoundé, 2008, p. 5.

    [xxix] Guia Migani, La France et l’Afrique subsaharienne, 1957-1963 : histoire d’une décolonisation entre idéaux eurafricains et politique de puissance, Bruxelles, Peter Lang, 2008, p. 207.

    [xxx] Tibor Mende, De l’aide à la recolonisation, Seuil, Paris, 1972.

    [xxxi] Pour une explication de ce que signifie l’expression « termes de l’échange » voir notre article précédent consacré au Franc CFA.

    [xxxii] Konan Bédié, La dégradation des cours des produits tropicaux et l’action de la Communauté, Revue du marché Commun, n° 123, mai 1969, p. 225.

    [xxxiii] Daniel Bach, Un ancrage à la dérive : la convention de Lomé, Revue Tiers-Monde, n° 136, 1993, p. 750.

    [xxxiv] Marc Elvinger, De Yaoundé à Lomé IV, Forum für Politik, Gesellschaft und Kultur, n° 106, novembre 1988, pp. 10-11.

    [xxxv] Ce règlement exonère les bananes ACP de droits de douane et fixe ceux-ci à 100 écus la tonne pour les autres provenances.

    [xxxvi] Catherine Hagueneau-Moizard et Thierry Montalieu, L’évolution du partenariat UE-ACP de Lomé à Cotonou : de l’exception à la normalisation, Mondes en développement, n° 128, 2004/4, p. 70

    [xxxvii] L’accord signé par 23 pays en 1947 vise à libéraliser les échanges en ayant comme objectif de diminuer puis de supprimer les tarifs douaniers. Ainsi par exemple les tarifs douaniers moyens sur les produits industriels passent de 40 % en 1947 à 5 % en 1993. Ce qui sera appelé cinquante ans plus tard « mondialisation » trouve son origine dans cet accord enlevant aux Etats un des outils de la souveraineté économique.

    [xxxviii] Catherine Hagueneau-Moizard et Thierry Montalieu, L’évolution du partenariat UE-ACP de Lomé à Cotonou : de l’exception à la normalisation, op. cit., p. 70.

    [xxxix] Accord de partenariat entre les membres du groupe des Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, 23 juin 2000, JO n° L317 du 15 décembre 2000, https://wallex.wallonie.be/PdfLoader.php?type=doc&linkpdf=8369-7516-45, consulté le 19 juillet 2018 à 10 h 15.

    [xl] Raphaël Ntambue Tshimbulu, L’Union Européenne sous le feu de la critique, Le Monde Diplomatique, Juin 2002, p. 18.

    [xli] Jacques Berthelot, Le baiser de la mort, de l’Europe à l’Afrique, Le Monde Diplomatique, Septembre 2014, p. 12.

    [xlii] Jean-Christophe Defraigne, Introduction à l’économie européenne, De Boeck, Louvain-la-Neuve, 2013, p. 364.

    [xliii] Erik Rydberg, Les APE : visées commerciales de l’Union européenne, Les Cahiers de la Coopération Internationale, n° 11, mai 2009, p. 11.

    [xliv] Jean-Claude Rabeherifara, APE : Sursaut africain au sommet de Lisbonne, Aujourd’hui l’Afrique, n° 107, mars 2008, p. 3.

    [xlv] Rama Gueye, L’économie sénégalaise en danger avec Auchan et les APE : la Plateforme « France Dégage » lance l’alerte, Dakar midi, https://www.dakarmidi.net/actualite/leconomie-senegalaise-danger-auchan-ape-plateforme-france-degage-lance-lalerte/, consulté le 20 juillet 2018 à 17 h 30.

    Source

    Tags : Françafrique, France, Afrique, colonialisme, néo-colonialisme,

  • Mali: des manifestants veulent le départ des militaires étrangers du pays

    Mali – Niger : IBK et Issoufou acculés par les manifestations contre la France
    Ça devait arriver, ce n’était qu’une question de temps. Les africains se sont révoltés contre le pillage de la France et ses pions africains. Leur révolte est d’autant plus justifiée du fait que les populations du Sahel ne voient aucun progrès dans la situation sécuritaire et la force Barkhane n’a prouvé aucune efficacité dans la lutte contre la menace terroriste. Pire encore, la situation va de mal en pire, notamment depuis que le débat sur le France CFA et la présence de l’armée française en Afrique est devenu quotidien.

    Vendredi dernier, la population de Bamako est de nouveau sortie pour revendiquer le départdes troupes militaires étrangères du territoire malien. À l’appel d’associations et de partis politiques notamment, les manifestants se sont regroupés devant le monument de l’Indépendance de Bamako. De nombreux drapeaux maliens étaient visibles. Des responsables de la société civile et de la classe politique malienne étaient également présents.

    Banderoles, drapeaux et des slogans à gogo la Place de l’Indépendance de Bamako. Des citoyens décidés à chasser les derniers vestiges de la colonisation française. Une colonisation maintenue par des dirigeants sans aucune dignité et qui ne pensent qu’à remplir leurs poches au détriment de la misère d’une population meurtrie par les souffrances.

    Macky Sall, IBK, Alassane Ouattara doivent comprendre qu’il est temps de réagir en défense des intérêts des peuples et non des métropoles.

    Tags : Mali, Niger, France, Barkhane, Françafrique, Sahel, terrorisme,

  • Réforme du franc CFA : optimisme prudent des experts

     La réforme donnera aux pays plus de contrôle sur leurs monnaies et leurs économies, selon les experts

    Mourad Belhaj | 10.01.2020

    AA – Kigali – James Tasamba

    La réforme du franc CFA, une monnaie soutenue par la France et utilisée par ses anciennes colonies d’Afrique de l’Ouest, pourrait donner aux pays d’Afrique francophone plus de contrôle sur leurs monnaies et leurs économies, selon les experts, même si le scepticisme persiste.

    En décembre dernier, l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA) est convenue, avec la France, de renommer le franc CFA, Eco, et de couper certains liens financiers avec Paris qui sous-tendent la monnaie commune de la région depuis sa création en 1945.

    S’exprimant lors d’une conférence de presse conjointe avec le Président français, Emmanuel Macron, à Abidjan, le Président ivoirien, Alassane Ouattara a salué cette décision comme historique pour l’Afrique de l’Ouest.

    Cette annonce fait suite à des entretiens entre des dirigeants ouest-africains, tenus à Abuja, la capitale du Nigéria.

    Dans le cadre de la réforme, ces pays africains n’auront plus à conserver 50% de leurs réserves au Trésor français, mais l’Eco restera ancré à l’euro.

    De plus, il n’y aura plus de représentant français au conseil d’administration de l’union monétaire.

    Davantage de contrôle économique

    Les experts estiment que ce changement privera la France d’épargne et de réserves vitales conservées à Paris, ainsi que de sa capacité à influencer la valeur des devises pour ses avantages commerciaux.

    « Cela donnera à l’Afrique francophone la liberté de fixer la valeur de sa monnaie et de l’ajuster avec les nouveaux développements du commerce mondial, avec des partenaires comme la Chine et l’Asie qui n’étaient pas significatifs en 1945 », a déclaré à Anadolu Fred Muhumuza, analyste basé en Ouganda.

    « De plus, la monnaie française a depuis longtemps été remplacée par l’euro, qui est entraîné par des dynamiques différentes qui ne peuvent plus être déterminées par Paris », a-t-il noté.

    Muhumuza, professeur d’économie à l’Université de Makerere, l’une des universités les plus anciennes et les plus prestigieuses d’Afrique, a déclaré qu’avec la réforme, la France pourrait également perdre la capacité de gérer la monnaie pour promouvoir son commerce avec l’ancienne zone CFA, dans une situation où l’influence de la Chine dans la région se développe.

    « Cela permet aux pays francophones de mieux contrôler leur économie et leur monnaie mais refuse à la France des réserves vitales qui étaient disponibles presque gratuitement », a-t-il déclaré.

    Le CFA est utilisé dans 14 pays africains, dont la population totale est d’environ 150 millions d’habitants, avec 235 milliards de dollars de produit intérieur brut.

    Mais les changements n’affecteront que la forme ouest-africaine de la monnaie utilisée par la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Bénin, le Burkina Faso, la Guinée-Bissau, le Sénégal et le Togo dans l’UMOA.

    Hormis la Guinée Bissau, ancienne colonie portugaise, les autres sont d’anciennes colonies françaises.

    Récupérer des décisions souveraines

    Macron a déclaré que c’était la fin de certaines reliques du passé, car il ne voulait pas d’influence par »tutelle ou intrusion ».

    « L’Eco verra le jour en 2020, et je m’en réjouis », a-t-il déclaré.

    Selon Lonzen Rugira, chercheur et commentateur basé au Rwanda, la réforme signifie que les pays auront davantage accès à leurs ressources car »ils empruntaient leur propre argent avec intérêts ».

    « Les pays ouest-africains pourront prendre des décisions souveraines sur la manière de mobiliser des ressources sans nécessairement lier ces décisions à la France. Tout cet argent qu’ils utilisaient pour emprunter leur propre argent peut être affecté à leurs priorités », a déclaré Rugira à l’Agence Anadolu.

    La valeur du CFA par rapport au franc français est restée la même de 1948 à 1994, date à laquelle elle a été dévaluée de 50% dans le but de stimuler les exportations agricoles de la région.

    Suite à la dévaluation, un franc français valait 100 francs CFA et lorsque la monnaie française a rejoint la zone euro, le taux fixe est devenu un euro à 656 francs CFA.

    Balayer le symbole du colonialisme?

    Les analystes soutiennent que le CFA représentait un symbole du colonialisme, de l’ingérence française passée et d’un affront à la souveraineté économique, même si ses partisans disent qu’il a fourni la stabilité financière en période de turbulence dans la région.

    En 2017, Macron a souligné les avantages stabilisateurs du CFA, mais a indiqué qu’il appartenait aux gouvernements africains de déterminer l’avenir de la monnaie.

    La France, sous Macron, essaie de reformuler sa façon de s’engager avec l’Afrique, en parlant d’égalité de traitement, de nouvelles relations et de respect mutuel.

    Rugira pense que la France aurait finalement réalisé que sa survie ne dépendait pas de l’exploitation de ses anciennes colonies.

    « Vous ne pouvez pas parler de relations d’intérêt mutuel lorsque vous avez en place des outils d’oppression. Vous devez supprimer les outils qui ont été identifiés comme étant exploiteurs. Le CFA n’était plus tenable au regard des nouveaux termes suivant lesquels la France souhaite s’engager en Afrique. L’environnement politique nécessite leur requalification », a déclaré Rugira.

    « Les Français ne pouvaient plus continuer à se comporter comme si rien ne se passait, alors qu’il y avait beaucoup de pression contre le CFA », a-t-il insisté.

    Pour Muhumuza, la décision française peut certainement être considérée comme un moyen pour la France de renoncer à son influence en Afrique, »mais seulement dans une faible mesure ».

    « Elle (la France) conserve une influence militaire importante et aura également son mot à dire dans la structure économique de ces pays, qui resteront toujours dépendants de la France, pour de nombreux appuis et aides techniques. La France fait également du lobbying international pour ces pays, dans les domaines de la politique, de l’économie et des flux d’aide », a-t-il déclaré.

    La France a promis de fournir un soutien, sous la forme d’une ligne de crédit, si les pays de l’UMOA connaissent une crise monétaire.

    « Pérennité » contre »optimisme prudent »

    Rugira a souligné la nécessité pour les nations africaines d’avoir leur argent dans leurs propres banques, affirmant que contrôler leur propre trésorerie est »un aspect très important de la souveraineté d’un pays ».

    Sur le succès de l’Eco, Muhumuza a déclaré que les choses peuvent être plus faciles à dire qu’à faire.

    « La gestion de la liberté monétaire exigera un engagement politique fort et une indépendance des technocrates pour prendre les décisions nécessaires, que les politiciens doivent soutenir ; par exemple, au cas où il serait nécessaire de dévaluer ou de demander à un pays membre de gérer son déficit pour éviter d’affecter la valeur totale de la monnaie », a-t-il déclaré.

    Selon Rugira, si le mouvement n’est pas exploiteur, il obtiendra le soutien dont il a besoin pour réussir. Mais s’il est abusif, les Africains auront la même attitude qu’ils avaient envers le CFA.

    Il a exhorté les pays à faire preuve de prudence pour comprendre les moindres détails de la réforme, notant qu’il est nécessaire de renforcer la transparence du régime monétaire.

    « L’histoire de la France en Afrique rend ses motivations douteuses, a-t-il conclu. L’économie de la France a beaucoup bénéficié du contrôle des ressources ouest-africaines. Il se pourrait qu’il y ait quelque chose qui se trame. »

    Anadolou

    Tags : Afrique, France, françafrique, Franc CFA, FCFA, colonialisme,

  • Selon le FMI : La réforme du franc CFA est une  » étape essentielle « 

    L’institution de Bretton Woods salue l’annonce de la modernisation des accords monétaires qui lient la France et l’Union économique ouest-africaine.

    La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) a salué, dimanche 22 décembre, la réforme d’envergure du franc CFA décidée par huit pays d’Afrique de l’Ouest ainsi que par la France. Pour Kristalina Georgieva, ces changements  » constituent une étape essentielle dans la modernisation d’accords de longue date entre l’Union économique et monétaire ouest-africaine et la France « .

    En déplacement à Abidjan, le président français Emmanuel Macron a annoncé, samedi, la fin prochaine du franc CFA, créé en 1945 et perçu comme l’un des derniers vestiges de la  » Françafrique  » après les indépendances des années 1960.

    La réforme comprend le changement de nom de la monnaie, qui s’appellera désormais l’éco, la fin du dépôt de la moitié des réserves des pays africains concernés auprès du Trésor français ainsi que le retrait de la France des instances de gouvernance de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), où elle était présente.

    Parité avec l’euro conservée

     » Les mesures annoncées s’appuient sur le bon bilan de l’UEMOA en matière de conduite de la politique monétaire et de gestion des réserves extérieures « , selon Mme Georgieva, qui a souligné la faible inflation, la forte croissance économique, l’amélioration de la situation des finances publiques et l’augmentation du niveau des réserves de change des membres de l’UEMOA ces dernières années.

    La parité fixe avec l’euro et le rôle de garant financier de Paris pour les huit pays de l’UEMOA seront en revanche conservés.

     » Le FMI se tient prêt à coopérer avec les autorités régionales en fonction des besoins ainsi qu’à appuyer la mise en œuvre de cette importante initiative « , a assuré la patronne de l’institution financière.

    Le Maghreb, 25 déc 2019

    Tags : France, Afrique, françafrique, franc CFA, FCFA, eco, monnaie, euro,

  • Burundi: la France, pompier pyromane ?

    Alors que le Burundi fait l’objet des sanctions totalement illégales et « politique » de l’Union européenne et de ses États membres depuis maintenant 3 ans, la France, déguisée en « cavalier sauveur » tend la main au gouvernement burundais !

    Mais il serait très naïf de croire que la France, qui a décrété le gel des avoirs de plusieurs responsables burundais déjà sanctionnés par l’Europe, il y a à peine 3 mois de cela, ait soudainement changé de cap et décidé de venir à l’aide d’un président qui tient tête au camp néocolonialiste.

    Selon une note de fri, « la France semble avoir décidé de faire cavalier seul, en reprenant son aide directe au Burundi depuis le début de l’année 2019, dans l’espoir notamment de faire bouger les lignes dans ce pays souvent qualifié de jusqu’au-boutiste. »

    Un pays qualifié jusqu’au-boutiste par ce média français, prouve bien à quel point les prises de position de Nkurunziza ne plaisent pas au camp occidental et la suite du texte confirme bien cela :

    « Problème, la répression meurtrière se poursuit au Burundi selon les experts de l’ONU, et Gitega, la nouvelle capitale du pays, n’a pas voulu saisir jusqu’ici cette main tendue de Paris. »

    En effet, tout comme le peuple burundais, Pierre Nkurunziza n’est pas prêt à oublier du jour au lendemain les politiques hostiles du gouvernement français et ses accusations contre Nkurunziza concernant les multiples violations des droits de l’homme, ainsi que ses pressions à la SADC, organisation d’intégration des pays d’Afrique australe, de rejeter pour la deuxième fois la demande d’adhésion du Burundi.

    Pression occidentale, la SADC, organisation d’intégration des pays d’Afrique australe, vient de rejeter pour la deuxième fois la demande d’adhésion du Burundi.

    D’ailleurs, il y a à peine un mois, le président Nkurunziza n’avait pas manqué de rappeler l’histoire de son pays depuis le XVIIe siècle jusqu’à l’arrivée des « colons européens », qui ont apporté guerre, mort et désolation dans son pays et dont les politiques continuent à défier la nation burundaise.

    Face à l’insistance de la France à renouer les liens avec le Burundi, et ce, dans la plus grande discrétion comme le confirme rfi : « Ce changement de cap, alors qu’au même moment l’Union européenne venait de reconduire ses sanctions contre le Burundi, s’est fait dans la plus grande discrétion à l’époque. Pas de communiqué, aucune déclaration de la part des autorités françaises ou burundaises sur cette reprise de l’aide directe de la France depuis le début de la crise au Burundi il y a quatre ans », une question se pose : Que cherche la France au juste à travers ce nouveau scénario ?

    En effet, à l’approche des élections présidentielles de 2020 au Burundi, et alors que Nkurunziza a déjà annoncé qu’il ne sera pas candidat pour ces élections, peut-être que la France cherche à placer son pion à la tête du pays ; un président qui soit plus à l’ordre des Occidentaux et moins indépendantiste, comme c’est le cas en RDC par exemple !

    Mais la France doit savoir que le peuple burundais est intelligent et est conscient des complots qui se cachent derrière les fameuses « mains tendues » du gouvernement français.

    Source: Regardsurlafrique

    Tags : Burundi, France, RDC, françafrique, Nkurunziza,

  • Non à l impérialisme français en Afrique !

    En Afrique de l’Ouest, Centrale, Equatoriale et du Sahel, les travailleurs sont privés de leurs richesses par les capitalistes, principalement français, et leurs laquais.

    Malgré les indépendances de façade, les anciennes colonies françaises du continent sont toujours sous le joug de deux traités coloniaux :

    1- Le Pacte Colonial : 400 milliards d’euros volés chaque années aux peuples d’Afrique par la banque de France.

    2- Le France CFA : Issu de la vieille monnaie colonile, son cours et sa valeur sont décidés par le ministère français de l’économie. Les billets sont imprimés en France, par la Banque de France.

    Derrière ce pillage se cache la bourgeoisie française, Bolloré, Total, Orano, Lesieur-Avril, Enedis et tant d’autres ! Les mêmes que ceux qui nous imposent la précarité, le chômage et nous refusent la vie digne ici en France, imposent la misère, l’exploitation barbare et la guerre en Afrique !.

    Travailleurs de France, unis avec les travailleurs d’Afrique, brisons les pilliers sur lesquels reposent les monopoles ! Brisons l’impérialisme ! Unis, construisons un monde nouveau, de travail, de dignité et de paix ! Pour la révolution et le socialisme !

    Source : Jeunes Communistes Lyon

    Tags : Franc CFA, France, françafrique, impérialisme, Pacte Colonial,

  • L’ECO, la monnaie africaine qui remplacera le Franc CFA: une victoire posthume pour Kadhafi

    par René Naba

    Soixante-dix ans après l’indépendance de l’Afrique, quinze pays d’Afrique de l’Ouest sont convenus de l’instauration d’une monnaie commune dès 2020, en remplacement du Franc CFA pour la moitié d’entre eux.

    L’ECO, la nouvelle monnaie remplacerait les huit monnaies en cours dans la région. Elle apparaît comme une victoire posthume pour le colonel Mouammar Kadhafi, guide de la révolution libyenne, qui préconisait une monnaie unique à l’Afrique, comme terme ultime du processus de décolonisation.

    Avec la multiplication des opérations de troc entre la Russie et les pays du Moyen-Orient, le lancement de la bourse de Shanghai pour le règlement en yuan des transactions pétrolières, la suprématie absolue du dollar comme instrument de référence des échanges internationaux pourrait être compromise à terme.

    La décision a été prise par les chefs d’État et de gouvernement de la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le 28 juin à Abidjan. Cette monnaie était à l’ étude depuis une trentaine d’années.

    Le nom de la future monnaie, l’éco, a été préféré à afri et kola. La Cédéao a opté pour un «régime de change flexible» par rapport aux monnaies internationales, ce qui signifie que le taux de change évoluerait au gré des marchés, comme l’euro ou le dollar.

    Le Nigéria exige un «plan de divorce» avec le Franc CFA

    Pour huit des 15 pays concernés, l’ECO remplacerait le Franc CFA. Cette monnaie, créée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, est indexée à l’euro et garantie par le Trésor français. Ce vestige de la colonisation est décrié par certains, mais garantie une stabilité de la monnaie. Le Nigeria, pays leader de la Cédéao, exige un « plan de divorce » avec la France, où reste déposés la moitié des réserves de change (avoirs en monnaie étrangère ou en or) de ces pays.

    Madaniya Info , 23 juillet 2019,

    Tags : CEDEAO, franc CFA, ECO, monnaie, françafrique,

  • Marcon veut réssuciter la françafrique

    CE JEUDI, EMMANUEL MACRON REÇOIT 400 PERSONNES DANS LA SALLE DES FÊTES DU PALAIS PRÉSIDENTIEL POUR UN « ÉVÉNEMENT » AVEC LES « DIASPORAS AFRICAINES ». PAR LE PARISIEN

    A l’Elysée, on bombe le torse. En guest star, le président du Ghana et très populaire sur le continent africain, Nana Akufo-Addo. « Ce ne sera pas un discours », prévient son entourage, mais un « dialogue interactif avec le public »… comme un nouvel épisode du grand débat national.

    Cette fois, il sera destiné à évoquer la relation entre la France et le continent noir, loin des sentiers battus et rebattus des sujets migratoires et sécuritaires. Charge aux convives du chef de l’Etat de l’interroger. « Sans tabou », insiste-t-on en haut lieu. Le public a été puisé parmi la diaspora africaine de France.

    C’est-à-dire, d’après les critères élyséens, des personnes qui ont une nationalité africaine et vivent en France, des binationaux ou encore des Français ayant une ascendance africaine.

    Des personnalités emblématiques de « success story » franco-africaines, comme Albert Malongo Ngimbi, sacré meilleur sommelier du pays par le Guide Michelin. Quelques têtes d’affiche seront là aussi, à l’image du rappeur Abd-el-Malik, de la chroniqueuse Hapsatou Sy ou encore de la basketteuse Diandra Tchouatchang.

    Avec, petite curiosité, la présence de Lilian Thuram… Guadeloupéen.Une opération serait plus politique que diplomatique ?« La salle sera multicolore, mais ça va être tout sauf du communautarisme puisque pour la première fois, on va donner la parole à des gens qui n’ont pas voix au chapitre dans ce genre de rencontres, vante Hervé Berville, député (LREM) des Côtes-d’Armor, né au Rwanda. Ils vont pouvoir échanger librement en dehors des cercles habituels des hauts fonctionnaires, des diplomates, etc. ». D’ailleurs les ambassadeurs africains à Paris n’ont pas été conviés à ce grand raout.

    Rwandaises,  10/07/2019

    Tags : France, Macron, Françafrique,

  • Qu’est-ce que la Françafrique?

    Guerres civiles, dictatures, pauvreté, analphabétisme, malnutrition… La situation précaire de l’Afrique francophone soulève de nombreuses questions. Pourquoi tant de misère dans des pays si riches en matières premières ? À qui profite l’argent du pétrole, de l’uranium, du diamant, du bois, des minerais ? Comment expliquer la présence permanente de l’armée française dans ses anciennes colonies ? Pour quelles raisons le gouvernement français reçoit-il régulièrement, avec tous les honneurs, des dirigeants africains parvenus au pouvoir par des coups d’Etat ou des élections truquées ?

    UNE DÉCOLONISATION INACHEVÉE

    La Françafrique désigne le système politique et institutionnel ainsi que l’ensemble des réseaux qui permettent à la France de garder la mainmise sur ses anciennes colonies, afi n de garantir son accès aux matières premières et de conserver sa puissance sur l’échiquier international. Il a été mis en place au moment des indépendances africaines par le sommet de l’Etat français et a accompagné toute l’histoire de la Ve République. « Le temps de la françafrique est révolu » — François Hollande, le 12 octobre 2012 à Dakar —

    ET AUJOURD’HUI ?

    Aujourd’hui, tout en prétendant avoir mis fi n à ces pratiques, la France poursuit son ingérence dans ses anciennes colonies. Le pillage et les guerres sont banalisés sous prétexte de crise économique et de lutte contre le terrorisme. Dans les médias comme les discours politiques, racisme et préjugés participent de ce système. La Françafrique s’oppose à la démocratie et aux droits de l’Homme en Afrique, car elle repose sur le maintien de régimes dictatoriaux, répressifs et prédateurs, qui empêchent toute émergence démocratique.

    La Françafrique s’oppose à la démocratie et aux droits de l’Homme en France, car elle résulte de décisions prises sans la moindre transparence par les plus hautes sphères de l’État, sans concertation ni contrôle parlementaire ou citoyen. « La Françafrique, c’est comme un iceberg. Vous avez la face du dessus, la partie émergée de l’iceberg : la France meilleure amie de l’Afrique, patrie des droits de l’Homme, etc. Et puis ensuite, vous avez 90 % de la relation qui est immergée : l’ensemble des mécanismes de maintien de la domination française en Afrique avec des alliés africains. » La France développe et déploie ses pratiques néocoloniales, avec la complicité de nombreux chefs d’Etats africains dits « amis de la France » : pillage des matières premières, corruption, détournement de l’aide au développement, soutien aux dictatures, trafi cs, interventions militaires (François-Xavier Verschave, ancien président de Survie, auteur de La Françafrique, le plus long scandale de la République, 1998, Stock)

    LES MÉCANISMES DE LA FRANÇAFRIQUE

    UN PEU D’HISTOIRE…

    « Tous les pays sous développés, qui hier dépendaient de nous, et qui sont aujourd’hui nos amis préférés, demandent notre aide et notre concours ? Mais cette aide et ce concours, pourquoi les donnerions-nous si cela n’en vaut pas la peine ? ».

    — De Gaulle, 5 septembre 1961 A la fin des années 1950, De Gaulle accorde officiellement l’indépendance à 14 pays d’Afrique francophone, pendant que, avec son conseiller Jacques Foccart, ils organisent officieusement le maintien de ces pays sous influence française.

    POURQUOI ?

    2 raisons économiques :

    › Garder un accès privilégié aux matières premières stratégiques (pétrole, uranium, minerais) et aux cultures de rente (coton, bois, plantations agricoles)

    › Préserver des débouchés pour les entreprises françaises 3 raisons politiques › Garder l’Afrique dans le camp occidental en période de guerre froide › Maintenir le rang de la France à l’ONU avec un cortège «d’Etats clients» › Financer le parti gaulliste par le détournement des rentes africaines, puis par la suite tous les partis de gouvernement (ce qu’a révélé notamment l’affaire Elf)

    COMMENT ?

    Le pouvoir français installe dès le début des années 60 des chefs d’état acquis à ses intérêts, et use de différents moyens pour les maintenir en place : élections truquées, coups d’Etat, assassinats politiques, soutien militaire via des accords de défense secrets… Par exemple, entre 1955 et 1971, la France mène au Cameroun une guerre coloniale faisant des dizaines de milliers de morts, et participe à l’assassinat ciblé des grands leaders indépendantistes (Ruben um Nyobe, Félix Mounié, Ernest Ouandié). Depuis lors, elle soutient la dictature en place, d’abord celle d’Ahmadou Ahidjo, puis celle de PaulBiya, à la tête du Cameroun depuis plus de 33 ans.

    ET AUJOURD’HUI ?

    Les mécanismes de maintien de la domination française en Afrique perdurent aujourd’hui encore, bien qu’ils aient pris de nouvelles formes.
    Les intérêts ont évolué au fil des années :
    Au niveau économique, l’exploitation des matières premières s’est intensifiée et mondialisée, les entreprises nationales ont presque toutes été privatisées.

    Par ailleurs, de nouvelles puissances sont entrées dans le jeu de la concurrence, en particulier les pays émergents.

    Fini «l’âge d’or» où des entreprises facilement identifiables comme «françaises» se partageaient seules le gâteau des profits en Afrique francophone. Aujourd’hui l’ancrage de l’économie africaine dans la mondialisation (ce qui implique un partage du gâteau, mais aussi un gâteau plus gros !) pousse l’Etat français à agir ouvertement en faveur de la défense de firmes transnationales qui brandissent les arguments de l’emploi et du rayonnement tricolore pour bénéficier à plein régime de son réseau d’influence.

    « L’Afrique est comme une île, reliée au monde par les mers. Donc, qui tient les grues tient le continent ! » — Un ancien cadre du groupe Bolloré (Th. Deltombe, le monde diplomatique, avril 2009)

    Au niveau de la politique internationale, la guerre froide a pris fin, mais le camp occidental et ses alliés se retrouvent aujourd’hui engagés dans une «guerre contre le terrorisme» dans laquelle la France se donne un rôle prépondérant. Malgré une économie affaiblie, elle reste une puissance de premier ordre, notamment grâce à ses positions militaires sur le sol africain. La France soutient politiquement et militairement des dictatures au pouvoir depuis plusieurs décennies : Depuis 1967 pour la famille Bongo au Gabon, depuis 1990 pour Idriss Déby au Tchad…

    Quant à la politique intérieure, l’affaire des valises révélée par Robert Bourgi en 2011, ou les accusations de plus en plus étayées de financement de la campagne de N. Sarkozy de 2007 par M. Kadhafi, nous rappellent que les pratiques de financement occulte des partis politiques perdurent encore de nos jours.

    LES PILIERS DE LA FRANÇAFRIQUE

    L’ARMÉE FRANÇAISE EN AFRIQUE ET LA COOPÉRATION MILITAIRE

    Peu connue, la présence militaire de la France en Afrique constitue depuis plus de 50 ans un des piliers de sa politique d’ingérence. Héritage d’un passé colonial proche, la France joue encore aujourd’hui un rôle depuissance militaire majeure en Afrique.

    Avec 8700 militaires sur le sol africain, la France intervient régulièrement sous différents prétextes (antiterrorisme, démocratie, maintien de la «paix») assurant ainsi sa domination sur les états et sur leurs ressources.

    « Si la France ne s’était pas engagée [au Mali], et bien les risques les plus grands auraient existé pour nos six mille ressortissants à Bamako et puis pour les ressources tout à fait importantes en uranium qui se trouvent au Niger » — Déclaration du Général Desportes en 2013.

    LE FRANC CFA

    Le franc CFA est la seule monnaie coloniale ayant survécu à la décolonisation, il lie quinze pays d’Afrique à la France. Aujourd’hui encore ce système empêche ces pays d’être souverains économiquement : chaque pays doit déposer 50 % de ses réserves en devises étrangères au trésor public français, le franc CFA est arrimé à l’euro et donc soumis à ses fluctuations, et des Français siègent aux instances de direction des banques centrales africaines. La France, en se portant officiellement garante de la stabilité et la convertibilité du franc CFA, contrôle directement ou indirectement la politique monétaire des États concernés.

    L’AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT

    En 2013, l’aide publique au développement française était de 8,5 milliards d’€, dont 45,6 % pour l’Afrique. Il s’agit d’un mélange de dons, de prêts et d’allègements de dette. Cette «aide» est essentiellement un outil au service des intérêts français et un instrument de tutelle et de dépendance.

    Parmi les dons, la France comptabilise par exemple : les frais d’accueil des réfugiés en France, les coûts des étudiants africains en France, les dépenses visant au rayonnement culturel et à la promotion du français.

    Une institution financière met en œuvre la politique d’Aide Publique : l’Agence Française de Développement (AFD). Elle fonctionne comme une banque. Sa politique est menée avec le souci constant de préserver et favoriser les intérêts de la France… et ceux de ses grandes entreprises

    COMMENT RÉSISTER ?

    CE QUI EST SCANDALEUX ›

    La françafrique : une politique néo-coloniale française, au service des intérêts de l’État, d’entreprises, de carrières politiques ou militaires, dont les populations paient le prix fort.

    › Les conséquences humaines et environnementales sont dramatiques : dictatures, crimes et guerres, pauvreté, migrations, pollution.

    › L’impunité des acteurs impliqués, militaires, économiques, politiques, est garantie, même lorsqu’ils vont jusqu’à se rendre complices d’un génocide, comme au Rwanda en 1994 (soutien diplomatique, livraison de munitions…) lors du génocide des Tutsis.

    La pauvreté en Afrique a d’abord des racines politiques, il faut donc agir dans le champ politique !

    RÉSISTANCES À LA FRANÇAFRIQUE EN AFRIQUE

    IIl existe en Afrique de nombreux mouvements citoyens, syndicaux, de défense des droits humains comme le Balai citoyen au Burkina Faso, Dynamique Citoyenne au Cameroun, ÇaSuffit Comme Ça au Gabon, leROTAB au Niger…

    Soutenir les peuples africains, cela passe aussi par le soutien aux mouvements des sociétés civiles en lutte pour leurs droits.

    ET EN FRANCE

    Survie s’engage depuis 30 ans pour une refonte de la politique de la France en Afrique. Des associations de la diaspora africaine et de solidarité internationale participent également à ce combat.

    Survie demande :

    › une diplomatie qui soutienne les peuples; › le retrait de l’armée française d’Afrique; › la fin du pillage et la transparence économique et fiscale;

    › un véritable contrôle parlementaire de la politique étrangère;

    › une justice indépendante et la fin de l’impunité

    Tags : France, Afrique, françafrique, pillage, colonialisme,