Étiquette : Front Polisario

  • WikiLeaks : quand Algériens et Marocains se confient sur le Sahara occidental

    Le conflit au Sahara occidental, né il y a une quarantaine d’années, n’est pas près de trouver une solution, à en croire les télégrammes obtenus par WikiLeaks et révélés par « Le Monde ».

    Par Jean-Pierre Tuquoi

    Le Monde, 03 décembre 2010

    Le conflit au Sahara occidental, né il y a une quarantaine d’années, n’est pas près de trouver une solution. Les positions sont trop éloignées, les rivalités trop profondes, les procès d’intention trop nombreux entre les deux principaux protagonistes: le Maroc, qui occupe le Sahara occidental en dehors de toute légalité internationale, et l’Algérie sans l’appui de laquelle le Front Polisario, favorable à un référendum pour fixer l’avenir de l’ancienne colonie espagnole (indépendance ou rattachement au Maroc), aurait le plus grand mal à exister.

    La position algérienne est clairement exprimée dans le compte-rendu d’une audience (d’une durée de 3 heures 30) accordée en mai 2007 par le président algérien Abdelaziz Bouteflika à Frances Fragos Townsend, la conseillère du président Bush pour les affaires de sécurité, obtenu par Wikileaks et révélé par Le Monde.

    « Si je pouvais résoudre le problème je le ferais, affirme le président algérien. Mais je ne peux pas parler à la place des Sahraouis . » Ce qu’il faut c’est que « le Maroc et le Polisario trouvent une solution, et ils peuvent le faire avec l’aide des Américains ».

    Les Français, confiera-t-il à une autre occasion, « du fait du poids de leur histoire coloniale au Maghreb, sont incapables de jouer un rôle constructif dans le conflit ». D’ailleurs, ajoute-t-il, « la France n’a jamais vraiment accepté l’indépendance algérienne ». Pour lui, elle tente de régler ses comptes avec l’Algérie « en appuyant le Maroc ».

    LE JUGEMENT DE M. BOUTEFLIKA SUR LE ROI DU MAROC

    Un an plus tard, en février 2008, recevant un diplomate américain, changement de registre. Le président algérien dénonce « le plan d’autonomie » voulu par Rabat à la place du referendum d’autodétermination. Celui-ci n’offre qu’un semblant d’autonomie. Les provinces algériennes en ont d’avantage vis-à-vis d’Alger, soutient M.Bouteflika.

    Puis, au fil de l’entretien, le président algérien se laisse aller: il comprend que les Marocains se sentent menacés par la perspective d’un Sahara occidental indépendant mais, dit-il, ils sont les premiers responsables de la situation. Au lieu de faire preuve d’une approche « élégante » en acceptant une indépendance du Sahara occidental qu’ils auraient pu « contrôler » ou « superviser », ils veulent « un Anschluss, comme Saddam Hussein avec le Koweït ». S’ils n’avaient pas été aussi maladroits, les Marocains « auraient pu obtenir ce qu’ils voulaient », assure le président algérien à son hôte.

    L’année suivante, en novembre 2009, devant le chef du commandement américain pour l’Afrique (Africom), le général William Ward, le chef de l’Etat algérien revient à la charge. Selon lui, le projet d’autonomie est à rejeter. « Vous ne pouvez pas défendre l’application d’un principe pour la Palestine et un autre principe pour le Sahara occidental », fait valoir le président algérien.

    Le jugement négatif de M. Bouteflika sur le roi du Maroc n’est pas fait pour arranger les choses. Autant le président algérien apprécie Moulay Rachid, le frère du roi (« On a plaisanté et discuté agréablement » à l’occasion d’une rencontre à Séville, en Espagne) autant le courant ne passe pas avec Mohammed VI. « Il n’est pas ouvert, et manque d’expérience », se plaint-il. Pour M. Bouteflika, aucun dialogue n’est possible entre lui et le roi du Maroc.

    LES APPRÉCIATIONS SÉVÈRES DES MAROCAINS

    Côté marocain, la suspicion n’est pas moindre. Non pas que Mohammed VI se confie un tant soit peu aux très rares interlocuteurs américains qu’il reçoit. Mais ses proches le font pour lui. Or, ils sont sévères dans leur jugement. Selon leur lecture, la clé du dossier du Sahara occidental se trouve non pas à Tindouf, où siège les indépendantistes du Polisario, mais à Alger. Là-bas, expliquent-ils en juin 2009 au représentant personnel du secrétaire général de l’ONU, Christopher Ross, le pouvoir est toujours entre les mains de généraux dogmatiques, incapables de bouger et « pétrifiés » à l’idée du plan d’autonomie présenté par Rabat.

    Faut-il miser sur le temps et attendre qu’une nouvelle génération soit aux commandes en Algérie pour résoudre le conflit au Sahara occidental ? Certains conseiller du roi en sont convaincus, mais pas le chef des services de renseignements extérieurs, Mohamed Yassine Mansouri. Dans un « mémo » du printemps 2008, il se dit convaincu qu’un changement de génération « pourrait compliquer la situation ». « L’ancienne génération qui a créé le problème est la mieux placée pour le résoudre », dit-il à son interlocuteur américain.

    Dans un télégramme de juin 2009, le même Mansouri confie que Rabat a demandé au président français Nicolas Sarkozy de faire en sorte « de n’être pas perçu, comme par le passé comme aussi pro-marocain sur le Sahara occidental ».

    C’était aussi le cas de l’administration Bush, « qui apparaissait trop favorable au Maroc ». A l’équipe diplomatique du président Obama, le patron des services d’espionnage fait observer qu’ »il ne serait pas très judicieux d’abandonner ses vrais amis au profit du pétrole ».

    Jean-Pierre Tuquoi

    Le Monde, 03 décembre 2010

    Tags : Maroc, Algérie, Sahara Occidental, Front Polisario,

  • ONU : Examen de la question du Sahara occidental

    La question sahraouie est de retour, le mois en cours, devant le Conseil de sécurité qui devrait renouveler le mandat de la Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental (Minurso) à la faveur des consultations qui doivent se tenir le 14 octobre, selon le programme de l’organe exécutif de l’ONU pour le mois d’octobre.

    Il sera question de renouveler le mandat de la Minurso qui expire le 31 octobre, et avant cela, le représentant spécial pour le Sahara occidental, Colin Stewart, doit faire un compte rendu sur la Minurso.

    Ces consultations interviennent, alors que le secrétaire général n’a pas encore nommé un nouvel envoyé personnel depuis que l’ancien président allemand Horst Kohler, a renoncé à sa mission de médiation en mai 2019. Au Conseil de sécurité, plusieurs membres sont « frustrés » par la lenteur qu’accuse le processus de désignation d’un nouvel émissaire et par l’absence « concomitante » de progrès politique et préoccupés par le statu quo de fait .

    Les membres du Conseil peuvent se concentrer, les prochains jours, sur l’absence persistante d’envoyé personnel et, par ricochet, sur l’absence de tout progrès politique sur l’une des questions les plus anciennes traitée par le Conseil de sécurité. La Minurso a été créée en 1991 dans le but principal de faciliter un référendum pour l’autodétermination du peuple du Sahara occidental. Aujourd’hui et en raison des constructions et du manque de volonté du Maroc , ses tâches consistent principalement à surveiller le cessez-le-feu.

    En parallèle l’avant projet dès résolutions de l’ONU concernant ce territoire non autonome sont initialement discutées au sein du groupe des amis du Sahara occidental, composé de la France, de la Russie, du Royaume-Uni et des Etats-Unis, rejoints par l’Espagne, l’ancienne puissance coloniale. D’aucuns regrettent d’ailleurs, le fait qu’il n’y ait pas de représentation du continent africain au sein du Groupe d’amis.

    La dernière résolution sur la Minurso, adoptée en octobre 2019, a été sévèrement critiquée, notamment par la Russie et l’Afrique du Sud qui avaient, alors, dénoncé un texte » déséquilibré » visant à diluer le principe de l’autodétermination par un libellé ambiguë et peu clair. C’est la Russie qui a présidé le conseil de sécurité et l’on a observé un harcèlement de la diplomatie marocaine en direction de Moscou .Une attitude traditionnelle de Rabat qui dans le même temps active ses relais de propagande pour faire pression sur le conseil .

    En 2019 ,la délégation sud-africaine qui assurait la présidence tournante du Conseil de sécurité avait critiqué des passages de résolution et affirmé que les concepts » réalisme et compromis utilisés dans la résolution sont une tentative visant à saper le principe d’autodétermination établi par l’AG et les nombreuses résolutions du Conseil de sécurité « .

    La Russie qui s’est abstenue de voter le texte de la résolution avait déclaré qu’elle n’ »acceptait pas les tentatives visant à redéfinir l’axe du processus de négociations mené sous l’égide de l’ONU ou à modifier les approches convenues dans les résolutions précédentes du Conseil de sécurité ».

    La dernière résolution sur le Sahara occidental marquait également un retour à un mandat de 12 mois au lieu de six mois, imposé en 2018 par les Etats-Unis, porte plume des résolutions sur le Sahara occidental, pour faire pression sur les deux partis au conflit afin qu’ils reprennent les négociations.

    Le statu quo l’emporte aussi lorsqu’il s’agit de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental. À ce titre, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme Michelle Bachelet a déclaré récemment que son bureau poursuivait à distance la situation au Sahara occidental. Elle a déclaré que les dernières missions techniques avaient eu lieu il y a cinq ans et que de telles missions étaient « vitales pour identifier les problèmes critiques des droits de l’homme » dans ce territoire non autonome.

    De son côté, le groupe de soutien de Genève qui compte plus de 240 ONG a demandé, en juillet, dans une lettre ouverte au président du Conseil de sécurité de l’ONU, de reprendre la Mission technique initiée en 2015, et à inclure un chapitre sur les droits de l’Homme dans le mandat de la Minurso. Le 29 août, à l’occasion de la Journée internationale des victimes de disparitions forcées, célébrée le 30 août, le groupe de soutien de Genève avait plaidé dans un communiqué pour la création d’un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits de l’Homme dans les territoires sahraouis occupés.

    Dans son rapport le Sg de l’Onu consacre un paragraphe à la question des droits de l’homme au moment où à El Ayoun occupée, le Maroc redouble de férocité et accentue sa répression à l’égard des Sahraouis et de leur icone Aminatou Haider.
    M. Bendib

    Le Courrier d’Algérie, 6 oct 2020

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, ONU; MINURSO, Conseil de Sécurité,

  • Sahara Occidental : Lettre ouverte à l’ONU de Mahrez Lamari

    MAHREZ LAMARI / MILITANT DES DROITS DE L’HOMME ET DES PEUPLES : Lettre ouverte à l’ONU

    Au moment où se tiennent et se déroulent les travaux de la 75ème session de l’Assemblée générale de l’ONU et à la veille des travaux de la 4eme commission (questions politiques spéciales et de décolonisation des Nations unies), J’ai l’honneur de m’adresser à Votre Haute Autorité, en qualité de citoyen d’honneur de la ville d’ Alger-centre et de militant des droits de l’Homme et des peuples, ex-président du comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui, pour vous exprimer mes profonds sentiments de justice et d’humanité basés sur la défense du principe de droit à l’autodétermination des peuples. Cette position constante de l’Algérie inspirée de l’attachement aux valeurs et aux enseignements tirés de la lutte du peuple algérien pour son indépendance.

    Ainsi, j’appartiens à un peuple jaloux de son indépendance, attaché aux valeurs nobles de la glorieuse Révolution de novembre 1954, tirant légitimement un motif de fierté du formidable mouvement de libération nationale qui a permis du faire prévaloir la primauté du principe de droit des peuples de disposer d’eux mêmes, principe qui est la seule solution conforme à la Résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 de L’AG des Nations unies, portant déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et peuples coloniaux.

    J’ai fortement souhaité et aimé me déplacer au siège des Nations unies et m’inscrire en qualité de citoyen pétitionnaire pour défendre, devant les membres de la 4ème commission en charge des questions politiques et de décolonisation, la légalité internationale qui appelle au parachèvement de la dernière question de décolonisation en Afrique, inscrite à l’ONU: Le Sahara occidental. Malheureusement les contraintes indépendantes de notre volonté, la pandémie du coronavirus ont fait de sorte que les moyens de transport aérien soient impossibles et inexistants en cette période. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi cette forme citoyenne (LETTRE OUVERTE) pour m’adresser à Vous pour vous réaffirmer ma solidarité agissante avec la lutte du peuple du Sahara occidental pour son indépendance et aussi pour appuyer la position officielle de mon pays, l’Algérie, autour de cette question de décolonisation, position de principe qui rappelons-le, est claire et sans ambiguïté, constante et cohérente, basée sur le principe de l’autodétermination.

    C’est sans vous rappeler que le Sahara occidental représente la dernière question de décolonisation en Afrique inscrite sur l’agenda des Nations unies et figurant sur la liste de l’ONU des territoires non autonomes, depuis 1963, alors que ce territoire était sous le régime colonial espagnol. L’AG de L’ONU a reconnu depuis et à maintes reprises le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance. Elle a appelé à l’exercice de ce droit en concordance avec les textes et principes de la Charte de l’ONU et de ses résolutions, dont principalement la Résolution 1514 de L’AG contenant la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et peuples coloniaux. En effet, L’AG des Nations unies a adopté ses premières résolutions depuis 1965 en appelant à la décolonisation du Sahara occidental, via le référendum d’autodétermination du peuple sahraoui. L’AG des Nations unies continue d’appuyer la question sahraouie en tant que question de décolonisation et elle continue aussi à se mobiliser en faveur de l’autodétermination du peuple sahraoui par la tenue d’un référendum libre, régulier et sans contrainte. Les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU confortent le principe inaliénable du droit des peuples à l’autodétermination et confirment ainsi clairement la voie la plus appropriée pour un règlement juste, équitable et définitif de ce conflit.

    Or, nous constatons malheureusement que le royaume du Maroc qui occupe illégalement le territoire du Sahara occidental, continue d’adopter une attitude négative, une stratégie de confrontation, et une fuite en avant comme style de politique permanente, qui à chaque progrès enregistré par la communauté internationale, il érige de nouveaux obstacles sur le chemin du processus de règlement pacifique sur la base de la légalité internationale, comme ce fut le cas de son refus de toutes les résolutions du Conseil de sécurité, autour de cette question de décolonisation, reconnue et qualifiée comme telle par la communauté internationale. La stratégie du Maroc consiste à vouloir ignorer son vis à vis dans son conflit sur le Sahara occidental, à savoir le Front Polisario représentant unique et légitime du peuple sahraoui reconnu par la communauté internationale en tant que tel, et à travers la République arabe sahraouie démocratique (RASD), membre fondateur de L’Union africaine, ce même Front Polisario avec lequel, d’ailleurs et à maintes reprises le Maroc s’est assis autour d’une table, sous les auspices de l’ONU, pour négocier une solution juste et définitive au problème du Sahara occidental. Face à l’entêtement du Maroc qui se complaît dans le statu quo au Sahara occidental et qui s’emploie à le perpétuer et face aux violations systématiques des droits de l’Homme du peuple sahraoui, face à ses manœuvres de vouloir aussi détourner la volonté des Nations unies exprimée clairement dans les différentes résolutions et face au déni marocain du droit dont est victime le peuple sahraoui : Je lance un appel citoyen à L’ONU.

    L’ONU doit agir, les Nations unies ont une responsabilité politique et légale à assumer à l’égard des populations des territoires non autonomes comme c’est le cas pour le peuple du Sahara occidental. Car tout regard silencieux et complaisant, nourrit l’injustice. L’ONU, son AG des Nations unies, son Conseil de sécurité, son Secrétaire général doivent relever les défis et faire prévaloir la légalité internationale, par l’application des textes de la Charte onusienne et par le respect de la doctrine des Nations unies, en matière de décolonisation. Ils ne doivent en aucun cas compromettre leur crédibilité, ni altérer leur image et prestige. Le Conseil de sécurité des Nations unies doit faire preuve de détermination et de fermeté pour qu’il oblige le Maroc à stopper sa politique d’arrogance, d’obstruction à l’application de la légalité internationale au Sahara occidental.
    Le Conseil de sécurité des Nations unies doit assumer sa responsabilité qui lui incombe dans le processus devant conduire au parachèvement de la décolonisation du Sahara occidental, en vue de garantir la paix et la sécurité des peuples de la région, par le respect et l’application des résolutions pertinentes des Nations unies.

    Pour conclure ma Lettre ouverte, je souligne haut et fort qu’aucune forme de pression ne pourrait influer sur la détermination citoyenne du mouvement populaire mondial solidaire avec la juste lutte du peuple sahraoui conduite par le Front Polisario, à continuer à soutenir le droit du peuple sahraoui à se libérer du joug colonial marocain, jusqu’à l’organisation d’un referendum libre régulier et sans contraintes

    TÔT OU TARD LE DROIT IMPRESCRIPTIBLE À L’AUTODETERMINATION DES PEUPLES COLONIAUX TRIOMPHERA AU SAHARA OCCIDENTAL et ‘L’HISTOIRE EST LÀ POUR EN TÉMOIGNER ET LE RAPPELER.
    Respectueusement.

    MAHREZ LAMARI / Citoyen d’honneur de la Ville d’Alger Centre, militant des droits de l’Homme et des peuples, ex-président du Comité national algérien de solidarité avec le peuple sahraoui (CNASPS).

    Tags : Sahara Occidental, ONU, MINURSO, Mahrez Lamari, Front Polisario, autodétermination, décolonisation, 

  • Sahara Occidental : L’intransigeance du Maroc menace toute la région (Ould Breidelleil)

    MOHAMED YEHDIH OULD BREIDELEIL : LA POSITION DU MAROC AU SAHARA OCCIDENTAL, SON INTRANSIGEANCE ET SON REJET DE TOUTE SOLUTION RAISONNABLE , MENACE TOUTE LA RÉGION .- INTERVIEW

    Dans un entretien exclusif avec le Département Recherche et Etudes du Comité de rédaction du Portail Diplomatique, le grand penseur Mohamed Yahdih Ould Breideleil a abordé les différents aspects du conflit au Sahara Occidental: Dangers découlant de l’intransigeance marocaine et de son rejet d’une solution pacifique au conflit; L’horizon étroit de la présence française au sahel ; Et les relations entre les peuples sahraoui et mauritanien.

    Mohamed Yahdih Ould Breideleil, grand écrivain et historien à dimension stratégique, ancien ministre mauritanien et homme politique chevronné, a écrit de nombreux ouvrages en arabe et en français sur les questions du monde arabe, du Maghreb et de l’Afrique, en particulier la région du Sahel.

    Ould Breideleil est l’un des pionniers de l’illumination intellectuelle qui a éclairé le paysage culturel et médiatique de la Mauritanie après l’indépendance. Il est également un penseur ascétique connu pour ses positions progressistes et son plaidoyer pour les questions de libération.Il est diplômé de l’École supérieure de journalisme de la ville française de Lille….

    Pour lire l’integralit » de l’interview : Akhbar Nouadhibou

    Source : adrar.info 

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, Mauritanie, Sahel, Maghreb,

  • Guterres : Le Maroc restreint le mouvement de la MINURSO au Sahara Occidental occupé

    Alors qu’il a exprimé sa satisfaction par rapport à la liberté de mouvement dont jouit la MINURSO, le secrétaire général de l’ONU a critiqué son manque d’accès avec les inteerlocuteurs dans les villes sahraouis occupées par le Maroc.

    « A l’est du mur de sable ou dans les camps de réfugiés situés à proximité de Tindouf, le personnel humanitaire de la MINURSO et des Nations Unies a conservé un accès sans entrave aux réfugiés et aux autres interlocuteurs locaux et internationaux. La Mission a continué de renforcer ses capacités d’analyse et d’alerte rapide en surveillant les informations tirées des médias sociaux ou, à Tindouf, provenant des communautés locales, en plus de celles fournies par les médias grand public ». a affirmé le Chef de l’ONU dans son dernier rapport sur la situation au Sahara Occidental et l’activité de la mission onusienne qui y opère.

    Ce n’est pas le cas dans le paragraphe 55, où il indique qu’à cause du « manque d’accès à des interlocuteurs locaux à l’ouest du mur de sable, la Mission a eu des moyens très limités de recueillir de manière indépendante des informations fiables sur la situation ainsi que d’évaluer l’évolution de la situation dans sa zone de responsabilité et d’en rendre compte ».

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, ONU, MINURSO, Antonio Guterres, Conseil de Sécurité, société civile sahraouie, liberté de mouvement, interlocuteurs, 

  • Le HCDH chargé de surveiller les droits de l’homme au Sahara Occidental

    Au Conseil de Sécurité, il semble que la France a levé son veto sur la question des droits de l’homme. Du moins, partiellement!. Les Nations Unies semblent avoir confié la mission de la surveillance de la situation des droits de l’homme au Sahara Occidental au Haut Commiassariat des Nations Unies aux Droits de l’homme (CHDH). Dans son dernier rapport sur l’ancienne colonie espagnole, le SG de l’ONU a inclu une nouvelle rubrique appellée “Droits Humains” dans laquelle il fait part de la surveillance des droits de l’homme dans ce territoire.

    Rappelan que le Conseil de sécurité a encouragé vivement le renforcement de la « coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), y compris en facilitant des visites dans la région », Guterres indique que “la surveillance des droits humains au Sahara occidental demeure fortement entravée par le manque d’accès du HCDH à ce territoire ». « Les défenseurs et défenseuses des droits humains, les chercheurs et chercheuses, les avocats et avocates et les représentantes et représentants d’organisations non gouvernementales internationales continuent également de rencontrer des contraintes similaires », a-t-il ajouté.

    Le Chef de l’ONU a signalé l’inquiétude du HCDH concernant “la persistance des restrictions imposées par les autorités marocaines à la liberté d’expression, au droit de réunion pacifique et au droit d’association au Sahara occidental ».

    A cet égard, Guterres indique que durant la période considérée, le HCDH « a reçu des signalements de harcèlement, d’arrestations arbitraires et de condamnations de journalistes, d’avocates ou avocats et de défenseurs ou défenseuses des droits humains ». « Il a également reçu plusieurs signalements de faits de torture, de mauvais traitements et de négligence médicale dans les prisons marocaines, tandis que des organisations de la société civile et des avocats demandaient la remise en liberté, pendant la pandémie de COVID-19, de prisonniers sahraouis, tels que le groupe Gdeim Izik et un groupe d’étudiants », ajoute-t-il.

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, droits de l’homme, Antonio Guterres, ONU, HCDH,

  • Paragraphes intéressants du rapport du SG-ONU sur le Sahara Occidental

    Le Maroc renforce le mur de défense militaire

    -« À l’ouest du mur de sable, la MINURSO a constaté que les activités d’entretien le long de tronçons du mur de sable à Oum Dreyga et Auserd avaient dépassé le cadre autorisé, de nouvelles rangées de blocs de pierre ayant été installées sur les lieux. Ces activités ont été désignées comme étant des violations d’ordre général, respectivement en mai et en juin 2020, puis ajoutées, respectivement en juillet et août, à la liste des violations persistantes. La Mission a essayé de faire retirer ces rangées de blocs mais l’Armée royale marocaine s’y est opposée, indiquant notamment, dans une lettre du 16 avril 2020 adressée à la Mission, qu’elles avaient été installées pour limiter la circulation de véhicules utilisés pour le trafic de drogue. La position de l’Armée royale marocaine n’est pas conforme aux règles définies dans l’accord militaire no 1 ».


    -« En mai, la MINURSO a observé le redéploiement de membres de l’Armée royale marocaine sur la ligne de postes d’observation installés le long du mur de sable, dans la zone d’accès restreint, en plusieurs points d’Auserd et Oum Dreyga. Désignés en août 2012 comme constituant une violation persistante, ces postes d’observation avaient été abandonnés en 2019 par l’Armée royale marocaine à l’issue de négociations avec la MINURSO. La rubrique correspondante de la liste d es violations persistantes avait alors été supprimée. La MINURSO avait par la suite donné son accord pour qu’ils soient utilisés de manière strictement encadrée et à court terme au titre de la lutte contre le trafic de drogue, mais l’Armée royale marocaine l’a informée verbalement, lors d’une réunion de coordination officielle, qu’elle entendait aller au – delà des termes de cet accord et continuer d’en faire usage. L’utilisation de ces postes a été déclarée en juillet comme une violation d’ordre général de l’accord militaire n o 1 et la rubrique correspondante a été réinscrite en août sur la liste des violations persistantes.

    -« La MINURSO a constaté une divergence entre la dotation en armes et en équipements consignée dans l’ordre de bataille et le nombre d’armes lourdes déployées sur le terrain à Oum Dreyga et l’a qualifiée de violation en mars. Une violation commise par l’Armée royale marocaine a également été enregistrée en janvier, celle-ci ayant pénétré dans la zone tampon, à proximité d’Auserd, pour tenter d’en retirer un camion des forces militaires du Front POLISARIO [dont la présence a conduit également à la déclaration d’une violation commise par ce dernier (voir par. 29)]. Une autre violation ayant trait à la restriction de la liberté de circulation de la MINURSO dans la région de Mahbas a été consignée en juin ».

    Le Maroc continue de s’opposer à un changement dans les plaques des véhicules de la MINURSO

    -« En outre, la confiance de la population en l’impartialité de la Mission continue d’être compromise par le fait que le Maroc exige que les véhicules de la MINURS O utilisent des plaques d’immatriculation marocaines à l’ouest du mur de sable, ce qui contrevient à l’accord sur le statut de la Mission. En mars 2014, mon Représentant spécial et le Gouvernement marocain ont convenu verbalement de remplacer progressivement les plaques d’immatriculation marocaines par des plaques d’immatriculation de l’ONU (S/2014/258, par. 50), mais aucune suite n’a encore été donnée à cet accord. Cette question en suspens, ainsi que l’apposition par le Maroc de cachets sur les passeports de la MINURSO, continue d’être régulièrement dénoncée par le Front POLISARIO ».

    Guterres demande au Front Polisario de nommer un coordinateur avec la MINURSO

    J’engage S/2020/938 20-12400 17/21 également le Front POLISARIO à nommer un nouvelle personne chargée de la coordination avec la MINURSO dans la zone de la Mission.

    L’intérêt de Guterres pour les droits de l’homme n’inclue pas les prisonniers politiques sahraouis

    -« J’exhorte à nouveau les parties à respecter et promouvoir les droits humains de toutes les personnes au Sahara occidental, notamment en réglant les questions en suspens en la matière et en resserrant leur coopération avec le HCDH et les mécanismes des Nations Unies chargés des droits humains, et à faciliter leurs missions de suivi ».

    Source : Rapport du SG-ONU du 23 septembre 2020

    Tags : Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario, ONU, MINURSO, Antonio Guterres, Conseil de Sécurité, 

  • Sahara Occidental : « Nous sommes dans les limites de la patience (Brahim Ghali)

    CHEF DU POLISARIO: NOUS SOMMES DANS LES LIMITES DE LA PATIENCE, ET TOUTE ATTAQUE CONTRE UN SAHRAOUI SIGNIFIE LE RETOUR DE LA GUERRE

    Le chef du Front Polisario qui réclame l’indépendance du Sahara Occidental de la tutelle du Maroc, M. Brahim Ghali, a déclaré que les sahraouis sont au bout des limites de la patience, et que toute attaque contre un Sahraoui signifierait le retour de la guerre.

    Dans une interview accordée à la télévision algérienne, Ghali a ajouté que le front polisario a été conduit à se positionner dans certaines zones pour protéger ses citoyens qui ont bloqué spontanément, le passage terrestre de la zone tampon « guerguerat » confirmant qu’ils ont averti le Maroc et les Nations Unies de prendre la responsabilité de ce qui pourrait advenir, signalant que toute attaque contre eux signifie le retour de la guerre.

    Ghali a déclaré que les sahraouis ont beaucoup enduré, demandant: Combien de temps allons-nous attendre pour répondre aux appels répétés (de nos compatriotes) pour un retour à la guerre, indiquant que les enfants sahraouis nés en septembre 1991 sont devenus papas et mamans.

    Les nouveaux propos de Ghali sont considérés les plus forts prononcés -jusqu’ici- par les parties en conflit sur le Sahara occidental.

    Mourassiloun

    Source : adrar.info, 2 oct 2020

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, El Gargarat, ONU, MINURSO, 

  • Les voix d’une patrie perdue : la poésie du Sahara occidental

    La poésie sahraouie retrace des expériences allant de la guerre et du déplacement aux odes de Badi à « une douce existence pleine de vie »

    Par Sam Berkson – TINDOUF, Algérie

    Cela fait près d’un an que le poète sahraoui Mohamed Mustafa Mohamed Salem, connu sous le nom de « Badi », est mort à l’âge de 83 ans.

    Sa mort a fait l’objet de peu de nécrologies, mais sa poésie continue d’inspirer les jeunes générations exilées si loin de la patrie dont il parle, et qui n’en gardent aucun souvenir.

    Badi a vécu la seconde moitié de sa vie dans les camps de réfugiés autour de Tindouf, une région aride de l’ouest de l’Algérie.

    Comme des milliers d’autres réfugiés, il a fui son foyer après l’annexion du Sahara occidental par le Maroc en 1975.

    Vivre dans les camps, avec leurs ressources limitées et leur isolement géographique, signifiait une publication et une distribution restreintes de sa poésie sous forme écrite. Mais elle a survécu pendant des années par la récitation.

    La poésie sahraouie elle-même, composée en hassanya (un dialecte arabe), est peu connue au-delà de son propre peuple. Dans les territoires occupés, elle est souvent réprimée, avec d’autres initiatives culturelles hassanya.

    Selon Amnesty International, en 2019 au Sahara occidental, « les autorités ont harcelé des journalistes, des blogueurs, des artistes et des activistes pour avoir exprimé leurs opinions pacifiquement, en ont condamné au moins cinq à des peines de prison pour avoir ‘’insulté’’ des fonctionnaires et en avoir apparemment pris pour cible d’autres avec des logiciels espions ».

    Les dangers pour les poètes y sont démontrés par ce qu’a connu Hadjatu Aliat Swelm, qui a publié des poèmes en ligne sous pseudonyme.

    Après la découverte de son identité, elle dit avoir été soumise à ce qu’elle appelle la « pression » de fréquentes descentes de police et avoir été suivie dans la rue. En 1999, elle a choisi de se faire réfugiée plutôt que de disparaître, comme cela est arrivé à beaucoup d’autres dans sa situation.

    Le poème de Badi, Tishuash, recrée avec une beauté mélancolique la vie traditionnelle des Bédouins, que de nombreux Sahraouis n’ont jamais connue.

    Tishuash est un hymne à la gloire d’un mode de vie perdu. Le titre signifie, à peu près, « le plaisir de se souvenir de choses qui sont passées ».

    Il regorge de mots que même les traducteurs locaux ne connaissaient pas : des mots comme srei, signifiant « le voyage fait avant l’aube », torda, qui est « un petit trou creusé où l’on trouve de l’eau près de la surface après les pluies au milieu d’une vallée », ou as’geig, « l’eau qui forme des flaques sur les rochers concaves sur le lit d’une rivière asséchée ».

    Ces mots issus d’une langue orale sont pratiquement oubliés après 45 ans de colonisation forcée.

    Ainsi, leur récitation dans la poésie est elle-même un acte de résistance. Il s’agit des apocryphes « centaines de mots désignant la neige » des Inuits et d’un intéressant défi de traduction.

    Cependant, se souvenir de ces lieux perdus et de la connaissance perdue était, pour Badi, presque un devoir sacré. Comme il le dit dans son poème Paysage :

    Après toute cette douleur,
    incapable de marcher à Lejouad,
    sachez que louer les noms de ces lieux
    les rapproche du Tout Miséricordieux.

    « Douce existence pleine de vie »

    Né berger dans la ville d’Aousserd en 1936, Badi a appris la poésie et le chant auprès des femmes de sa région. Il a voyagé en Algérie, en Libye et en Mauritanie, et après une sécheresse qui l’a privé de son troupeau, il a rejoint l’armée espagnole.

    Après la formation d’un mouvement d’indépendance sahraoui unificateur, le Front Polisario, Badi a rejoint sa nouvelle « Armée de libération du peuple sahraoui », mais il n’a jamais été porté sur la poésie politique de la guerre.

    Selon sa fille, Sumaya Mohamed Salem, Badi « ne pouvait pas écrire ce que les gens voulaient qu’il écrive ». Comme l’a dit Badi un jour : « Les poètes expliquent l’humanité et ce que signifie être humain. La véritable poésie doit être proche de la vérité, honnête vis-à-vis de ce que vous ressentez et fidèle à vous-même. »

    Mohamed Salem confie qu’il y a beaucoup de choses qu’elle ne savait pas sur son père : « Une étrange coutume que nous avons, c’est que nous ne pouvons pas parler de quoi que ce soit avec nos parents. Nous ne pouvons pas demander leur avis sur les choses ou leurs véritables sentiments. »

    « Badi était plus ouvert d’esprit que la plupart des gens, mais il était toujours très strict sur les coutumes. Il était très résistant à toute nouveauté. Pour lui, les jeunes étaient l’ennemi, plus encore que les Marocains. »

    Mohamed Salem a très peu de liens avec la terre à laquelle son père faisait référence avec tant d’émotion.

    En 2011, elle a rejoint son père lors de son voyage vers ce que les Sahraouis appellent al-Bedir, littéralement la « campagne », mais c’est-à-dire la « zone libre » – les 20 % à l’est du territoire du Sahara occidental qui n’ont pas été bouclés par la « berme », les 2 700 km de mur défensif du Maroc, un espace extrêmement miné et faisant l’objet de patrouilles intensives, achevé en 1987.

    Badi a pleuré de revoir sa patrie, mais sa fille explique n’avoir rien ressenti : « Le Sahara occidental pour moi, c’est comme Paris ou Berlin – un endroit dont j’ai entendu parler, mais où je ne suis jamais allée. »

    Écrit après son voyage dans la zone libérée, Tishuash parle de la « douce existence pleine de vie » du nomade du désert que la génération de sa fille n’a jamais connue. Le poète est transporté dans cette vie à travers ses souvenirs des vues, sons et odeurs, un peu comme, en un autre lieu et un autre temps, John Keats a été transporté par le chant du rossignol.

    Les souvenirs sensoriels ramènent Badi dans ce monde perdu, mais quand il s’approche si près qu’il peut « sentir la peau de cet animal à côté de la broche / et voir les os propres à côté de cette peau », cette image de la mort termine brusquement le voyage imaginaire.

    Il arrive à la même prise de conscience que Keats, quand il a été forcé de reconnaître que, « Car malgré ce qu’on dit, les chimères / Ne peuvent tout à fait nous abuser, – elfe joueur ».

    Dans le présent, Badi s’interroge dans le vide, « comment se fait-il, mon frère, que tu ne te souviens pas de cela ? » Il répond pour le lecteur :

    Il n’est plus avec nous,
    et si tishuash pourrait le ramener
    il ajouterait tishuash
    au tishuash
    de mon tishuash.

    Pourtant, le tishuash de Badi fait renaître quelque chose. Il ravive la perte : il ranime le sentiment de privation, mais aussi ce mode de vie perdu pendant le court laps de temps que dure le récit du poème. Nous l’entendons dans le « bruissement de la queue des chameaux / avant que le soleil ne se lève jusqu’à nos yeux » ; sentir, avec le poète, « le sable humide » sur lequel il dort près de « la bouche d’un puits » ; et goûter son thé, aromatisé aux herbes du désert.

    Sa poésie préserve les pratiques, la langue et les coutumes qui sont étrangères même à sa fille, qui parle le rabouni hassinaya (la langue des camps, pas celle du Sahara occidental).

    Comme la poésie traditionnelle d’avant la guerre, on retrouve la fonction et l’esthétique dans la composition de son travail – la préservation et la transmission de la connaissance. Pourtant, à cause de la rupture qui s’est produite entre les générations, même sa fille déclare : « Je ne comprends pas ses poèmes. »

    Poésie et chanson

    En février de cette année, une célébration culturelle a eu lieu dans les camps de réfugiés du Sahara occidental à Tindouf.

    Cet événement annuel, qui marque l’anniversaire de la déclaration de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) en 1976 par le Polisario, a été organisé par le ministère de la Culture du gouvernement du Sahara occidental en exil. Pendant cinq heures, les poètes ont récité leur travail dans une « tente culturelle ».

    « Ce n’est pas tous les jours qu’on voit tous les grands poètes, surtout les anciens », explique Mohamedsalem Wared, un militant sahraoui de 35 ans qui est né et a grandi dans les camps. « Cela me parle en tant qu’être humain et Sahraoui. Je me sens plus représenté dans la poésie que dans toute autre chose. »

    En tant que peuple largement pastoral et nomade, la poésie et le chant (les deux sont si étroitement liés que le mot hassiniya leghna signifie à la fois le chant et la poésie lyrique) avait traditionnellement des fonctions vitales dans la vie de la société.

    Comme la poésie orale en générale, la leur était composée selon des règles métriques et formelles strictes, restées plus ou moins inchangées pendant des siècles. Les poèmes doivent avoir deux hémistiches (teefelwatan), avec une rime à la fin de chacun. Les rimes qu’un poète a choisies fixent alors le rythme que suivra le poème.

    Comme l’explique Mustafa El-Kattab, ministre du Polisario et chercheur en poésie sahraouie, « le type de voyelles utilisées dans chaque hémistiche détermine le choix du mètre pour le poème ».

    La tente culturelle qu’a visitée Wared recréait l’aspect social du rassemblement, de l’écoute et de l’appréciation des vers. Avant le colonialisme, elle avait aussi des fonctions plus pratiques : se souvenir et transmettre les noms des lieux et des pratiques qui servaient les gens du désert à l’élevage de chèvres et de chameaux ; préserver le folklore, la sagesse et les mœurs ; et fournir un moyen d’interagir avec d’autres « tribus ».

    Contrairement à la Mauritanie voisine, le statut de poète n’est pas (du moins de mémoire vivante) une fonction de caste. Certains poètes naissent dans des familles de poètes, d’autres le deviennent en écoutant et en apprenant le métier. Ce n’est pas non plus un rôle sexué : femmes et hommes sont poètes.

    Dans les années 1970, tout a changé. Un mouvement indépendantiste croissant a uni les « tribus » en un peuple du Sahara – les Sahraouis – et poussait à l’autodétermination de l’Espagne, semblable à celle qui avait déjà été accordée à l’Algérie voisine et aux États de l’ancienne Afrique-occidentale française.

    Malgré la reconnaissance par l’ONU du Front Polisario, la promesse espagnole d’un référendum et la décision de la Cour internationale de Justice, après la mort du dictateur espagnol Franco, en 1975, le territoire a été transféré au Maroc et à la Mauritanie. La guerre a éclaté, qui a duré jusqu’à un cessez-le-feu en 1991.

    Pendant ce temps, la poésie sahraouie a changé radicalement aussi. Elle a conservé sa forme et structure particulière, mais le contenu était complètement différent. Un nouveau genre a vu le jour, qu’El-Kattab qualifie de « poésie socialement engagée ».

    Al Khadra Mabrook, aujourd’hui octogénaire, indique que sa propre poésie a subi ce changement, passant de la poésie qui « célébrait principalement la beauté féminine », aux poèmes qui lui donnaient le surnom de « poétesse du fusil ».

    Dans l’un de ses poèmes les plus connus, plutôt que de célébrer la beauté, elle célèbre la vue d’un nouveau char soviétique acquis par l’armée de guérilla du Polisario. Elle termine en s’adressant à l’ennemi :

    Pillards ! Sachez que ce char sera impitoyable pour ses ennemis
    Et réduira en poussière les envahisseurs et toutes leur artillerie

    Dès le début de la guerre, son travail n’avait « qu’un seul objectif : inspirer et encourager, louer une armée qui sauvait des gens en danger, au mépris du danger pour eux-mêmes ». Elle-même fait partie de la moitié de la population sahraouie qui, fuyant la guerre en 1975, a été « sauvée » par cette armée et vit maintenant dans les camps de réfugiés près de Tindouf.

    Mabrook livre sa poésie avec théâtralité et force, et tout cela, dit-elle, « est pour la révolution ».

    Poésie de la guerre

    La poésie sahraouie des années de guerre a un dynamisme unique, un sens de l’humour et elle est directe et utile. Pourtant, à certains égards, elle est figée dans le temps, appartenant à une période qui ne peut pas être recréée et inspirant chez ses jeunes auditeurs non seulement un sentiment de gloire de l’unité, la victoire et le sacrifice, mais aussi des sentiments de honte ou d’insuffisance pour avoir grandi en des temps moins héroïques.

    Le travail de Mabrook a été diffusé par sa petite-fille, la chanteuse Aziza Brahim, qui vit en Espagne et a mis en musique la poésie de sa grand-mère.

    Mariam Hassan, qui est restée dans les camps et est morte en 2015, a également connu un succès international et a enregistré trois albums studio, qui contiennent des chansons créées à partir de la poésie sahraouie.

    Cependant, l’histoire distinctive de la poésie sahraouie et le conflit géopolitique, dont il est difficile de démêler les poèmes, n’ont pas aidé à sa diffusion.

    Et, selon le poète et bibliothécaire du ministère de la Culture du Polisario, Mahmoud Hadri, trouver un éditeur arabe prêt à publier de la poésie sahraouie peut être un défi, de sorte qu’elle reste principalement l’apanage des gens dont la vie et les luttes en ont été l’inspiration.

    Pourtant, pour ces gens, la poésie reste inestimable. Pendant la guerre, le rôle de la poésie dans la société était clair. Quelques années avant sa mort, Beyibouh El Haj déclarait : « Le temps des combats et de la libération était le temps de l’épanouissement de la poésie. »

    Comme beaucoup de poètes sahraouis, il considérait ses poèmes en termes militaires. La poésie était « une arme pour révéler le vrai visage du Maroc… aucun missile ne peut la détruire ».

    Après des décennies d’incertitude, d’exil et d’oppression continue dans la patrie – l’année dernière, une femme a été tuée et des dizaines de personnes blessées dans une violente répression lors des célébrations de la victoire de l’Algérie dans la Coupe d’Afrique des nations – le problème aujourd’hui, c’est : que peuvent écrire les poètes maintenant ?

    L’un des poèmes ultérieurs de Beyibouh, Aux Jeunes, exhorte directement une génération née en exil à ne pas abandonner la lutte pour l’indépendance :

    Écoutez les jeunes,
    je ne veux pas me montrer critique,
    mais pourquoi tournez-vous le dos à la patrie ?

    Les poèmes que Wared a entendus lors du festival culturel semblaient « s’adresser à moi, qu’ils évoquent ce que les gens ont vécu pendant la guerre ou qu’ils disent à ma génération que nous n’en faisons pas assez ».

    Nadgem Said est un poète de la même génération de Wared. Il dit essayer d’utiliser sa poésie « pour contribuer à la cause ». Formé en Libye et en Algérie, son Poème sur le devoir de l’étudiant universitaire tente de reprendre l’exhortation de Beyibouh à agir dans son propre appel à ses pairs (et lui-même) :

    Donnez de la voix à ce que vous avez appris :
    décrivez les douleurs de votre race souffrante,
    l’abus et l’agonie qui sont devenus lieux communs
    tandis que les yeux du monde se fermaient.

    Badi était un grand ami de Beyibouh, mais sa poésie nostalgique pour la terre et un mode de vie perdu a également inspiré une nouvelle génération, d’une manière différente de la poésie de la guerre de Beyibouh.

    Badi était résolument contre la modernité. Lorsque le wi-fi a été installé dans les camps, il en a été convaincu, « désormais, nous ne rentrerons plus dans notre pays ». Il dédaignait même la poésie moderne, qu’il rejetait, selon sa fille, comme étant de la « fast food », quelque chose qui « vous remplit, mais ne vous nourrit pas. Elle est simplement faite pour la célébration ».

    Pourtant, malgré cela, elle observe que « la meilleure poésie de Badi est universelle parce qu’elle est si particulière. Il est honnête et fidèle à sa vie et donc l’auditeur s’y retrouve avec lui ».

    Face à ce que les universitaires américains Stephen Zunes et Jacob Mundy appellent « un génocide lent », où, au cours de quatre décennies, « les politiques marocaines visaient l’effacement symbolique de la nation sahraouie », des poèmes comme Tishuash préservent un mode de vie et une identité.

    En se souvenant et en recréant le mode de vie de sa génération, alors qu’en tant que pasteurs nomades, ils étaient intimement liés à la terre dont le peuple tient son nom, les poèmes de Badi ont aidé les nouveaux Sahraouis connectés numériquement à se sentir ancrés dans quelque chose qui leur appartient et à ressentir un sentiment d’appartenance à un lieu, même s’ils n’ont jamais été en mesure de le visiter.

    Un recueil de poésie sahraouie, Settled Wanderers, est disponible auprès de Influx Press, traduit en anglais par SamBerkson, en collaboration avec l’artiste sahraoui Mohamed Sulaiman, avec une introduction par les universitaires américains Stephen Zunes et Jacob Mundy

    Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

    Source : Middle East Eye, 3 oct 2020

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Poésie, litérature, chants, vers, 

  • Sahara Occidental : Le Maroc manœuvre à nouveau pour bloquer le processus de paix

    ENTRE MANIPULATIONS ET INTOX : Le Maroc manœuvre à nouveau pour bloquer le processus de paix

    Les déclarations faussement attribuées par l’agence de presse marocaine (MAP) au secrétaire général de l’ONU sur Guerguerat constituent une nouvelle manœuvre du régime marocain, avant la réunion du Conseil de sécurité prévue fin octobre pour examiner la question sahraouie, a estimé jeudi Dr. Amari Taher-Eddine, professeur des relations internationales à l’université de Tizi Ouzou.
    Dans une déclaration à l’APS, Dr. Amari a précisé que « la campagne de manipulation marocaine reflète les appréhensions du régime marocain de la réunion du Conseil de sécurité consacrée à la question sahraouie. Elle vise à empêcher la désignation de l’Envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU au Sahara occidental et la définition d’un calendrier pour l’organisation du référendum d’autodétermination, d’autant que l’opération de recensement des habitants sahraouis effectuée par la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso) touche à sa fin ».

    « Les déclarations de la Haute Commissaire onusienne aux droits de l’homme qui a fait part de son souhait de débattre des normes d’envoi d’une mission technique au Sahara occidental pour s’enquérir de la situation des droits de l’homme dans ce territoire occupé ont dérangé le régime marocain », ce qui explique cette campagne, a-t-il estimé.

    La manœuvre de la MAP n’est pas la première du genre et ne sera pas la dernière », a souligné Dr Amari, rappelant, dans ce sens, « le problème créé par le Maroc en 2018, lorsqu’il a envoyé ses forces à Guerguerat et a procédé au bitumage d’une route menant vers la Mauritanie. Suite à quoi, le Front Polisario avait réagi en déposant plainte auprès de l’ONU infligeant ainsi un échec à la diplomatie marocaine.

    Pour l’enseignant universitaire, « les mensonges des médias marocains n’ont pas uniquement des objectifs politiques mais économiques aussi en vue de s’accaparer les richesses naturelles du Sahara occidental et semer ainsi la confusion pour détourner l’attention de l’essence même de la question et exploiter indûment les richesses sahraouies ».

    Le régime marocain veut « mettre le Front Polisario sur le banc des accusés », alléguant qu’il (Polisario) « ne respecte par la légalité internationale et fait fi du droit international, en menaçant la sécurité et la paix internationales » et tenter donc de « l’isoler diplomatiquement au niveau de l’ONU et de l’UA », a-t-il poursuivi. « Ces pratiques sont obsolètes et d’une autre époque, car la communauté internationale est consciente qu’il s’agit là d’une question de décolonisation », a-t-il soutenu.

    L’intervenant a rappelé que « le régime marocain se doit d’appliquer toutes les décisions onusiennes et de se conformer à la légalité internationale à l’effet d’organiser le référendum d’autodétermination du peuple sahraoui et d’aboutir à la décolonisation de la dernière colonie d’Afrique pour instaurer la paix et permettre à la région de lever les obstacles empêchant l’édification de l’Union du grand Maghreb ».

    La MAP avait récemment attribué une fausse déclaration au SG de l’ONU dans laquelle elle a prétendu à tort que Antonio Guterres avait lancé un appel au Front Polisario en vue de « mettre fin à l’obstruction de la circulation civile et commerciale » dans la zone de Guerguerat.

    M. B.

    Le Courrier d’Algérie, 3 oct 2020

    tags : Sahara Occidental, Maroc, Front Polisario,  ONU, MINURSO, El Gargarat,