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  • Ephémérides : Le jour où le Maroc a livré á la France les leaders du FLN

    Quand les français signaient le premier acte de piratage aérien

    En 1965, le Maroc a livré au Mossad les enregistrements des débats de la Ligue Arabe sur la possibilité d’une attaque contre Israël. Ce n’était pas la première trahison du roi Hassan II aux arabes. Neuf ans auparavant, il livrait à la France l’avion qui transportait les principaux leaders du FLN.

    Cela est arrivé le 22 octobre 1956, à un moment où les pays maghrébins qui étaient indépendants se faisaient du souci en raison de la prolongation de la violence française contre le peuple algérien.

    Ce jour-là, un avion marocain a été mis à disposition de la délegation de responsables algériens pour regagner la Tunisie en vue de participer à une réunion maghrébine à Tunis. Il y avait à bord aussi deux journalistes françaises pour couvrir l’événement. Autour de l’avion rôdaient des éléments des services secrets français venus de l’ambassade de France à Rabat.

    L’équipage est français et le commandant Gaston Grellier reçoit ses instructions en vol. À bord, l’hôtesse Claudine Lambert tente de ne pas éveiller les soupçons des passagers qui sont armés, il s’agit de cinq chefs historiques du FLN, Ahmed Ben Bella, Mohamed Khider, Mostefa Lacheraf, Hocine Aït Ahmed et Mohamed Boudiaf. Une fois l’avion posé, les troupes françaises donnent l’assaut et interpellent Ben Bella et ses compagnons.
    Aprés un retard inexplicable, l’avion fait une escale inattendue aux Iles Baléares. La décision a été prise par le pilote français engagé par l’Etat marocain en vue de réfléchir sur les ordres qu’il vient de recevoir de Paris et qui lui pressaient de changer de cap vers Alger. Il a fini par obéïr en faisant attérrir l’avion à l’aéroport d’Alger. Une fois sur terre, l’équipage complice quitta l’appareil après avoir étteint les lumières intérieures. Aussitôt, un contingent équivalent à l’effectif d’un bataillon prend l’avion royal marocain en assault.

    Dans un ton triomphaliste, les militaires français criaient : « La guerre est finie ! », « Nous avons gagné ! ». L’évidente ambiance de lynchage visant à intimider les passagers algériens a été soudainement interrompue par Aït Ahmed : « Fusillez-nous et finissons-en ! », a-t-il dit.

    Plus tard dans la nuit, les ôtages sont conduits au siège de la DST à Alger où ont débuté les interrogatoires. La réaction des moudjahidines algériens était unanime : « Ce n’est pas l’arrestation de quelques dirigeants ou responsables qui mettra fin à un mouvement d’envergure issu des profondeurs du peuple ». Leurs interlocuteurs cachaient à peine leur arrogance et conviction que l’Algérie restera française jusqu’à la fin des temps.

    Dans les montagnes, villes et villages, le combat faisait rage. Rien nse semble arrêter la guerre de libération malgré les tonnes de tracts déversés par l’aviation militaire proclamant une victoire présumée suite au kidnapping des dirigeants du FLN dont l’arrestation a conduit à des violentes représailles contre les ressortissants français.

    En vue de les garder en vie, le gouvernement français décide de les faire transférer en France dans un avion menottés et interdits d’aller au toilettes si ce n’est accompagné d’un gendarme. Sur le sol parisien, des marchands les accueillaient dans la rue avec des slogans harneux. Ils étaient excités par les circonstances de l’opération de piratage.

    L’euphorie provoquée par cet acte a vite été déchantée par les protestations des militants anti-colonialistes des partis de gauche. Protestations qui étaient accompagnées par les nombreu succès de la résistance. La réponse coloniale était la répression, la torture, la liquidation physique des militants algériens.

    Entre le congrès de la Soummam en 1956 et la perspective très proche de la constitution du GPRA (gouvernement provisoire de la République algérienne) à Tunis, la lutte en Algérie avait beaucoup progressé malgré les massacres, les tortures, les emprisonnements en masse qui avaient marqué la criminelle répression de la Bataille d’Alger.

    Dans les derniers mois de l’année 1958, De Gaulle transféra ses prisonniers dans une sorte de lieu de résidence pénitentiaire hautement surveillée pour empêcher leur lynchage. C’est à Fort Liédot, à l’autre bout de la petite Ile-d’Aix (département de Charente-Maritime) en plein océan Atlantique, qu’ils ont été conduis.

    Pour Ben Bella, le fait que la présence de l’armée française dans au Maroc permettait de surveiller les faits et gestes des révolutionnaires algériens à la loupe constituait un acte de trahison de la part du roi Mohammed V. Selon Hassanine Haykel, journaliste et conseiller du président égyptien Nasser, Hassan II était derrière cette trahison

    Cet acte de la piraterie aérien relève surtout de la faiblesse de la IVème République (1946-1958). En effet, dès le début de l’année 1956, les militaires français deviennent les véritables décideurs. Ce sont ces mêmes militaires qui décideront, deux ans plus tard, d’achever cette République pour en faire une autre plus dure. Il faudra alors tout le génie du général de Gaulle pour que le pouvoir revienne aux civils.

    Tags : Algérie, Maroc, détournement avion FLN, piratage aérien, France, guerre de libération, colonisation, De Gaulle, OAS,

  • Algérie : Des rapports complexes avec la France

    par Daniel Junqua

    l est de tradition de présenter les relations franco-algériennes depuis l’indépendance comme marquées du sceau de la difficulté, de l’incompréhension, de la méfiance. Comment en effet ne pas évoquer les crises — du vin en 1967-1968, du pétrole en 1970-1971, de l’émigration ensuite — qui jalonnèrent ces rapports que des divergences en politique étrangère ont encore aigris à partir de 1975 ? La France giscardienne intervenait alors activement en Afrique pour aider ses amis et clients « conservateurs » alors que l’Algérie de Boumediène aspirait à être le chef de file du camp progressiste. Alger parlait volontiers des « occasions manquées » par une France, figée dans un esprit de domination hérité du passé, qui n’avait pas su établir une « coopération exemplaire » et agir en commun avec l’Algérie dans l’arène internationale contre le tête-à-tête des deux superpuissances.

    La visite à Alger en avril 1975 de M. Giscard d’Estaing, premier chef d’État français à se rendre en Algérie en voyage officiel depuis l’indépendance, avait suscité des espoirs à la mesure des désenchantements qui suivirent, lorsque Paris prit le parti de Rabat dans le conflit du Sahara occidental. Cette nouvelle crise atteignit son paroxysme lorsque les Jaguar attaquèrent les maquisards du Polisario, lesquels, il est vrai, avaient enlevé plusieurs techniciens français travaillant en Mauritanie ; leur libération à la Noël 1977, après plusieurs mois de détention, fit retomber la tension, mais une fois de plus se vérifiait la formule de Boumediène : « Les relations entre la France et l’Algérie peuvent être bonnes ou mauvaises, elles ne peuvent être banales. »

    M. Claude Cheysson, ministre des relations extérieures, entrait dans cette logique lorsqu’en août 1981, venu préparer une visite de M. Mitterrand, il parlait à Alger d’un « coup de passion » entre les deux pays. Passionnées, certes, les relations franco-algériennes l’ont été tout au long de ces vingt dernières années. Elles n’ont même été que cela. Pouvait-il en être autrement ? Y a-t-il eu dans le monde — Vietnam mis à part — décolonisation plus complexe et plus traumatisante ?

    En France, la droite n’a toujours pas vraiment accepté ce qui lui apparaît encore comme une défaite, un renoncement, une amputation. Les « pieds-noirs » entretiennent le souvenir d’une Algérie qui était trop exclusivement la leur. La gauche, communistes inclus en dépit de leurs efforts pour récrire l’histoire et en supprimer des passages gênants, tel le vote en 1956 des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, reste culpabilisée. Le P.S. lui-même, bien qu’il compte dans ses rangs nombre de militants de la lutte anticoloniale venus de l’UNEF, du P.S.U. ou de la C.F.T.C., ne peut totalement ignorer l’héritage de la S.F.I.O., de l’envoi du contingent en Algérie à l’expédition de Suez en 1956. C’est aussi dans les rangs de cette gauche que l’Algérie a trouvé des « compagnons de route » romantiques ou honteux qui ont contribué à former l’image d’une révolution algérienne mythique, pure et dure, bâtissant à marches forcées un paradis socialiste.

    Les gaullistes ont contribué à l’entreprise : sans doute ont-ils eu le courage d’avoir mené à son terme la décolonisation, mais ils ne peuvent ignorer qu’elle s’est achevée dans un bain de sang et au prix d’équivoques peu glorieuses. Ils avaient rêvé d’une Algérie indépendante étroitement liée à la France par la coopération et où subsisterait une importante minorité française. Or les accords d’Évian (18 mars 1962) ont été vidés de leur contenu par l’exode massif des Européens au printemps et à l’été 1962, exode que les éléments « durs » du F.L.N. n’ont rien fait pour freiner, bien au contraire.

    Des plaies à vif

    La guerre d’Algérie, pour toutes les familles politiques françaises, constitue une des pages les plus noires de leur histoire contemporaine, page d’autant plus douloureuse qu’elle a été marquée du sceau infamant de la torture. Que les plaies soient encore à vif au bout de deux décennies, il n’est pas permis d’en douter. En témoignent les polémiques suscitées par les récentes mesures gouvernementales d’amnistie pour les faits liés à la guerre. En témoignent encore les débats suscités par le film de Pierre Schoendorfer l’Honneur d’un capitaine, qui raconte l’histoire d’un officier qualifié publiquement de tortionnaire vingt ans après sa mort sur la ligne Morice, à la frontière tunisienne, et dont la veuve veut laver la mémoire. (Lire l’article de Christian Zimmer.)

    En témoigne aussi la tempête soulevée par l’initiative d’un ministre socialiste proposant innocemment d’ériger au rang de date de « recueillement national » l’anniversaire du 19 mars 1962, qui vit l’entrée en vigueur du cessez-le-feu en Algérie. Comment d’ailleurs oublier ce que furent les « départements français d’Algérie » alors que les séquelles en sont encore présentes au cœur même de la société française ? Si les rapatriés sont intégrés, économiquement et socialement sinon psychologiquement, il n’en est pas de même des harkis, ces supplétifs « coupables » d’avoir « choisi » la France, moisissant aux marches de la société française et dont les fils rejoignent dans une même frustration et une identique révolte les émigrés de la « seconde génération », ballottés, eux aussi, entre deux cultures et rejetés des deux côtés de la Méditerranée.

    L’Algérie reste donc un problème intérieur français, vivace et douloureux. Elle va jusqu’à constituer un thème décisif dans certaines élections locales. C’est une liste « Algérie française » qui, en juin 1978, a chassé les socialistes de la mairie d’Aix-en-Provence. Les rapatriés constituent toujours un enjeu, et leurs voix sont sollicitées dans toutes les consultations. Déçus par M. Giscard d’Estaing, hostiles par tradition aux gaullistes « qui les ont trompés », ils n’ont sans doute pas été tout à fait étrangers à la victoire socialiste du 10 mai 1981.

    En va-t-il différemment de l’autre côté de la Méditerranée ? Les relations avec la France jouent un rôle majeur dans le débat interne, même si l’opacité d’un régime qui ne tolère pas d’expression autre qu’officielle ne permet pas de cerner exactement l’importance du phénomène. Le pouvoir se réclame plus que jamais aujourd’hui de l’ « héritage de novembre » (du 1er novembre 1954) et célèbre d’autant plus les vertus des moudjahidin que ceux-ci végètent souvent dans d’humbles emplois administratifs lorsqu’ils n’ont pas choisi, comme nombre d’anciens dirigeants de la fédération de France du F.L.N., de vivre dans l’ancienne métropole. La presse exalte périodiquement les exploits des combattants, justifiant du même coup le rôle dominant joué par l’armée dans la vie politique depuis l’indépendance. Le régime fonde de plus en plus sa légitimité sur le combat libérateur. Les Français sont-ils les mieux placés pour s’en étonner ou s’en scandaliser, la référence à la résistance contre l’occupation allemande constituant encore une donnée politique essentielle et la collaboration avec les nazis une tache infamante ? Paradoxalement, les adversaires les plus résolus d’hier sont ceux qui ont aujourd’hui à l’égard de la France la plus grande marge de manœuvre. Les responsables qui, au contraire, n’ont rejoint que tardivement le F.L.N. n’hésitent pas toujours à recourir à la surenchère nationaliste pour se faire pardonner leurs tiédeurs passées.

    De façon générale, les dirigeants algériens se sont abstenus — et cela mérite d’être souligné — de cultiver démagogiquement la haine et d’entretenir ou de susciter les rancœurs. « Certes, nous disait l’un d’entre eux, il faut que les jeunes générations sachent de quel prix a été payée l’indépendance nationale, non pas pour entretenir un stérile esprit de vengeance, mais pour se montrer dignes des aînés et consentir les sacrifices nécessaires pour donner à cette indépendance un contenu économique, social et culturel. »

    La presse algérienne n’exploite pas les macabres découvertes faites en différents points du territoire dans d’anciens camps de détention ou des centres d’interrogatoire de l’armée française. Récemment encore, en janvier 1982, la mise au jour d’un immense charnier à Khenchela, dans l’est du pays, sur les contreforts des Aurès, a été rapportée par El Moudjahid en termes sobres, sans insistance. Mais les responsables algériens n’ont pas été mécontents de l’écho donné à cette affaire en France par une enquête de Libération qui a suscité de vives controverses et a révélé aux jeunes Français un aspect soigneusement occulté de la guerre d’Algérie.

    L’accueil de la population aux Français, coopérants, techniciens des sociétés privées, rares touristes, est empreint de dignité et souvent même de chaleur, surtout chez les plus de trente ans. Le ton change avec les jeunes qui n’ont pas connu la guerre et ont de la colonisation une vision manichéenne. Ils ne peuvent imaginer la complexité de la société coloniale et l’ambiguïté des rapports qui existaient entre colonisateurs et colonisés dans un système caractérisé par la présence d’une forte population européenne — modèle et repoussoir à la fois — et par une volonté d’intégration et donc une politique d’acculturation des « indigènes » qui, par son ampleur, n’a sans doute pas eu d’équivalent ailleurs.

    Bilinguisme de fait

    Dans la société algérienne elle-même, les attitudes face à la France, pour n’être pas mesurables — faute de pouvoir se manifester publiquement — n’en sont sans doute pas moins très diverses. Il est impossible d’évaluer le rôle et la place des familles qui s’étaient jadis « compromises » avec le colonisateur et ont été écartées du pouvoir politique. De même, il est difficile de cerner l’importance et l’influence de courants ou de sensibilités incarnés dans le passé par des hommes comme Messali Hadj ou Ferhat Abbas. Il est douteux cependant qu’ils aient un impact sur une jeunesse « désinformée » par quinze ans de boumediénisme. L’ancien chef de l’Etat ne tolérait qu’une histoire du nationalisme algérien expurgée et ne faisait pas mystère de son aversion pour la notion de « chefs historiques », sans doute, disent ses adversaires, parce qu’il n’en faisait pas partie. Ces jeunes, en revanche, peuvent être sensibles aux discours des intellectuels arabes tournés vers le Proche-Orient. Ils militent pour un « retour » à une « authenticité » et à une « identité » arabes, vivement contestées d’ailleurs par les berbérophones, tout en affichant, leur hostilité à la langue et à la culture françaises.

    Le français garde, pourtant, de très fortes positions malgré la politique d’arabisation officiellement proclamée. Il a fallu attendre, il est vrai, la mise en place d’une nouvelle équipe sous la houlette du président Chadli Bendjedid pour que se manifeste concrètement la volonté d’appliquer la partie de la Charte nationale de 1976, qui fait de l’arabisation l’axe de la révolution culturelle. Mais, en raison des tensions qui se sont manifestées dans la rue en 1980 par une double agitation des étudiants arabisants et des Kabyles berbérophones et francisants, les autorités n’avancent que pas à pas, avec une grande prudence.

    L’objectif poursuivi est d’instaurer un bilinguisme de fait. Il est loin d’être atteint, le français restant très largement dominant dans les circuits économiques, la plupart des administrations, à l’Université et dans les moyens d’information. « Nous avons plus fait pour répandre la langue française que la colonisation en cent trente ans », nous disait, non sans raison, un responsable de l’éducation nationale. Le français est enseigné partout — grâce à la politique de scolarisation — à raison de deux heures par jour au moins dès la quatrième année de scolarité lorsque commence, à l’âge de dix ans, le second cycle de l’école fondamentale (1). Il constitue la langue de travail des universités et des instituts scientifiques et technologiques où se trouvent la majeure partie des étudiants. Le principal quotidien du pays, El Moudjahid, rédigé en français, tire à plus de 300 000 exemplaires, soit près du double des trois quotidiens en arabe.

    L’hebdomadaire Algérie-Actualités, réalisé par une équipe jeune et dynamique, vend chaque semaine quelque 100 000 numéros. La télévision, en revanche, est largement arabisée, et le bulletin d’information du soir, le plus important, car largement écouté sur tout le territoire, est présenté en arabe. Mais une station de radio, la chaîne 3, dite « internationale », fait la part du lion au français, les émissions en espagnol et en anglais n’occupant qu’un court créneau d’une heure chaque soir. Les ministères de la justice et de l’intérieur mis à part, l’emploi du français est largement répandu dans les administrations. Il suffit pour s’en convaincre de lire les circulaires internes affichées sur les panneaux placés dans les halls d’entrée. Enfin, nombreux sont les Algériens qui écoutent Radio-Monte-Carlo ou France-Inter. Sur le littoral, les gens aisés se procurent, en général par l’intermédiaire d’émigrés, un téléviseur bistandard et une antenne spéciale permettant de capter TF 1 et Antenne 2 (2).

    Cette pratique du français explique pour une très large part la familiarité des relations bilatérales telles qu’elles sont vécues au niveau populaire. Pour nombre d’Algériens des classes moyennes, la France constitue un prolongement naturel de leur pays : ils en connaissent les produits et rêvent devant les publicités dans les hebdomadaires féminins français des derniers gadgets ménagers. La communauté émigrée en France, forte de près de 1 million de personnes, sert de relais, de point d’appui, de base d’accueil. Tel jeune fonctionnaire, par ailleurs très nationaliste et partisan des options du régime, passe chaque année ses vacances à Quimper. Depuis plusieurs années, le gouvernement n’importe plus de voitures françaises, préférant conclure des contrats avec le Brésil, les pays de l’Est et, plus récemment, le Japon. Mais les Renault et les Peugeot ramenées et vendues par les émigrés n’en restent pas moins très prisées : elles constituent encore l’essentiel du parc automobile algérien (3). On pourrait multiplier les exemples de ce type. Toutes ces importations invisibles ne sont pas prises en compte par la balance commerciale officielle, mais représentent des montants très élevés, que l’on pouvait chiffrer, en 1980, à quelque 4 ou 5 milliards de francs.

    Un double sentiment d’attraction-répulsion

    Dans le domaine de la santé, la Sécurité sociale algérienne n’accepte, en principe, de prendre en charge les frais entraînés par une hospitalisation en France que pour des cas ne pouvant être traités en Algérie, faute de spécialistes ou de moyens. En fait, les dérogations se multiplient, le citoyen algérien ne manifestant qu’une confiance limitée au système hospitalier national, pourtant entièrement gratuit. Il en résulte des charges financières lourdes pour l’Etat, elles-mêmes génératrices de contentieux.

    La proximité géographique, les liens créés par l’histoire — les familles comptant des membres ayant opté à l’indépendance pour la nationalité française sont plus nombreuses qu’on ne le pense, — la densité des relations économiques, conduisent à une situation qui n’a sans doute pas d’équivalent dans le monde. Les nouvelles générations, particulièrement, éprouvent une double réaction d’attraction-répulsion mêlées. Lors du congrès de l’Union nationale de la jeunesse algérienne (UNJA), en janvier 1979, un orateur exprimait à sa façon ce sentiment en se prononçant contre l’octroi de bourses en France à des étudiants. « Ils sont victimes du racisme, disait-il, doivent subir de perpétuelles vexations et brimades », et il dressait un sombre tableau des conditions de vie en France avant de conclure : « De surcroît, cet investissement n’est pas rentable, car nombre de ces étudiants, une fois leur diplôme acquis, ne reviennent pas au pays. » A trop vouloir prouver !

    Certains dirigeants rêvent de trancher dans le vif, de baisser un « rideau de fer » qui isolerait enfin leur pays et donnerait toutes ses chances à la politique d’arabisation afin de préserver et de développer l’ »héritage arabo-islamique ».

    Mais l’Algérie n’est pas la Chine ou l’U.R.S.S. Et comment traiter la France en pays étranger au même titre que les autres alors qu’existe une telle osmose, que des romanciers algériens — et non des moindres — comme Mouloud Mammeri, leur doyen, Rachid Boudjedra, Rachid Mimouni, des historiens comme Mohamed Harbi et même un ancien président du G.P.R.A. comme Ferhat Abbas éditent leurs œuvres à Paris ; que des hommes d’affaires par centaines investissent en France, achetant des boutiques, des stations-service, des agences de voyages ; et qu’existe désormais dans l’ancienne métropole une communauté algérienne profondément enracinée pour qui la réinsertion outre-Méditerranée ne relève plus que du mythe pieusement entretenu par les aînés ? « S’agissant des familles, explique le sociologue algérien Ahsène Zehraoui, les parents disent : « Nous attendons, pour rentrer, la fin des études des enfants », et ces derniers répondent : « Nous verrons quand les parents seront à la retraite. Et il conclut : « La présence de cette communauté interroge la société française sur ses capacités à être pluriethnique et pluriculturelle, à vivre et à accepter les différences. »

    Les relations entre les deux pays vont sans doute évoluer d’ici à la fin du siècle vers une plus grande complexité et poser de part et d’autre de redoutables problèmes humains et culturels. Deux facteurs surtout vont y contribuer. L’évolution des techniques de communication et leur développement conduisent à la mise en place, en principe à partir de 1985, de satellites au-dessus de la Méditerranée. Ils vont permettre la diffusion sur les côtes d’Afrique du Nord de programmes télévisés français qui atteindront ainsi toutes les couches de la population avec toutes les incidences que cela suppose. En revanche, le poids de la démographie algérienne — la population du pays devrait atteindre au minimum trente-cinq millions dans vingt ans — va inévitablement se faire sentir sur une France en proie à la dénatalité, et que tout prédispose à être une terre d’accueil préférentielle.

    Telle est la toile de fond permanente des relations algéro-françaises. Ignorer ces réalités ne peut conduire qu’à des impasses. L’Algérie le sait, qui est toujours restée prudente dans ses rapports avec Paris, défendant avec pugnacité ses intérêts, tentant constamment d’obtenir le maximum de concessions sans jamais pousser les différends trop loin. Le poids de la France est trop grand dans la société algérienne pour qu’une rupture soit possible, si souhaitée soit-elle par certains. Mais tous sont animés par le souci constant de limiter autant que faire se peut une influence gênante : modèle culturel pour beaucoup, la France peut être aussi un modèle politique (4).

    A Paris, M. Giscard d’Estaing, après avoir adopté une ligne d’action « dure », contrant l’Algérie au Sahara occidental et tentant d’obtenir le départ des travailleurs immigrés, avait assoupli son attitude après l’effondrement, en juillet 1978, du régime de M. Ould Daddah en Mauritanie et la mort de Boumediène en décembre de la même année. L’arrivée au pouvoir d’un nouvel interlocuteur, M. Chadli Bendjedid, facilitait la reprise du dialogue souhaitée de part et d’autre. Le souci du nouveau chef de l’Etat, désireux de sortir son pays d’un certain isolement, en pratiquant une politique de « bon voisinage actif », ne pouvait exclure la France.

    Un échange de visites — M. Jean François-Poncet, ministre des affaires étrangères, à Alger en juin 1979, et M. Benyahia, à Paris en janvier 1980 — permit d’enclencher une négociation marathon pour normaliser les relations et liquider les contentieux qui s’étaient accumulés dans tous les domaines. Rude tâche, menée inlassablement dans le secret durant quinze mois par une petite équipe (5) décidée à conclure. Ces discussions aboutissaient, en septembre 1980, lors d’un déplacement à Alger de M. François-Poncet, à la signature d’une série d’accords. Du côté français, on renonçait à obtenir un départ massif des travailleurs émigrés, alors que M. Stoléru voulait programmer trente-cinq mille retours par an. Les deux cent quatre-vingt mille ressortissants algériens installés en France avant le 1er juillet 1962 se voyaient reconnaître un statut « privilégié » ; leur certificat de résidence étant automatiquement prolongé pour dix ans, conformément aux dispositions de l’accord sur la main-d’œuvre de 1968. Les autres, quatre cent mille environ, obtenaient un sursis de trois ans et trois mois qui arrivera à expiration le 31 décembre 1983. La France s’engageait à ne prendre que des mesures « incitatrices » au retour et à déployer un effort exceptionnel en matière de formation professionnelle. D’autres textes permettaient de liquider de vieux contentieux en matière financière et de Sécurité sociale. Au-delà de ces dispositions, on se félicitait de part et d’autre de la sincérité et de la qualité des discussions.

    Un élan nouveau

    L’arrivée au pouvoir de la gauche en mai 1981 a donné un élan nouveau à cette évolution et elle a surtout permis, ainsi que le souhaitait M. Mitterrand, de créer un climat de confiance, de dissiper les suspicions anciennes. Les mesures immédiatement prises par M. Defferre, ministre de l’intérieur et de la décentralisation, pour stopper toute expulsion de jeunes Algériens nés en France ou y résidant depuis plus de dix ans, fussent-ils délinquants, les déclarations officielles reconnaissant l’importance de la contribution apportée par l’immigration au développement économique français, la régularisation de la situation des clandestins, dont quinze mille Algériens ont bénéficié, tout cela a fait à Alger la meilleure impression. Ont été appréciées également les options « tiers-mondistes » du nouveau chef de l’Etat et son désir de relancer le dialogue Nord-Sud par une négociation globale aux Nations unies.

    Le voyage à Alger de M. Mitterrand en novembre 1981, suivi deux mois plus tard d’un accord sur le prix du gaz naturel donnant satisfaction aux thèses algériennes, a concrétisé de façon décisive la volonté de Paris d’entretenir avec l’Algérie des relations de qualité fondées sur l’amitié dans le respect des options réciproques et la prise en considération des préoccupations de chacun. Sur le plan extérieur, les efforts déployés par le président Chadli Benjedid pour prendre une certaine distance à l’égard de l’U.R.S.S. et revenir à un non-alignement rigoureux sont suivis avec sympathie par Paris, où l’on se dit prêt à faciliter cette évolution. A l’inverse, la réelle neutralité française dans l’affaire du Sahara occidental comme les efforts déployés par M. Mitterrand pour aider à une solution du problème palestinien font l’objet à Alger de jugements positifs.

    Le climat est donc meilleur qu’il n’aura jamais été. Les visites ministérielles se succèdent de part et d’autre. Mais… mais le problème délicat de la nationalité des jeunes Algériens nés en France après l’indépendance n’est toujours pas résolu, l’Algérie refusant la notion de double nationalité. Les jeunes sont donc condamnés soit à faire un choix douloureux, et souvent impossible à leur âge, soit à effectuer un double service militaire tant que les discussions en cours n’auront pas abouti. Mais… les dispositions prises pour les immigrés prennent fin dans un an sans que les principales données du dossier aient évolué, la situation de l’emploi restant en France préoccupante : quatre mille huit cents travailleurs seulement ont bénéficié des dispositions « incitatrices » de l’ »aide au retour », et la formation professionnelle a encore moins de succès.

    La police algérienne filtre elle-même les voyageurs partant en France (6) pour détecter les « faux touristes », chômeurs espérant y trouver du travail, et il faut désormais en Algérie justifier d’un emploi pour obtenir un passeport. Cela n’empêche pas le nombre des « refoulements » opérés dans les aéroports français d’augmenter dans des proportions considérables. Le dispositif mis en place est par ailleurs inefficace contre la fuite des « cerveaux », intellectuels ou cadres qui décident de s’expatrier sacrifiant pour des raisons culturelles et politiques une situation confortable pour repartir de zéro.

    Le réchauffement des relations n’a pas permis non plus, en dépit des engagements pris sur ce point par l’Algérie, de régler les problèmes de la petite communauté « pied-noir » restée en Algérie après l’indépendance et dont les effectifs, composés pour l’essentiel de personnes âgées, fondent un peu plus chaque année. Ils ne sont plus que trois mille cinq cents et ne peuvent toujours pas, en pratique, vendre leurs biens, appartements, villas ou commerces pour rentrer finir leurs jours en France. Les conditions de vie et de travail des coopérants français, enfin, se sont largement détériorées au fil des années et leur nombre va diminuant sans cesse.

    On retrouve là, au-delà des déclarations optimistes des dirigeants, la réalité prosaïque et quotidienne des relations franco-algériennes vouées pour très longtemps encore à l’ambiguïté et à la difficulté, des relations telles que peuvent en entretenir des couples séparés après une longue vie commune et qui n’en finiraient pas de régler les problèmes nés de leur divorce, éprouvant entre des crises d’exaspération, et parfois de colère, de subits accès de tendresse et d’émotion.

    Daniel Junqua

    Journaliste, auteur de « La Presse écrite », CFPJ-Editions, Paris, 1995

    Source : Le monde diplomatique, novembre 1982

    Tags : Algérie, France, colonisation, mémoire, guerre de libération, FLN,

  • Algérie : Une date qui dérange encore

    Le rendez-vous du 1er novembre approche à grands pas. Synonyme pour l’ensemble de la société du premier acte de la délivrance du pays de la barbarie colonialiste, le déclenchement de la guerre de libération nationale, est de loin, la date la plus consensuelle qu’ait partagé les Algériens, avec celle du 5 juillet, jour d’indépendance. Il va sans dire que la seconde date n’aurait jamais existé sans la première. C’est dire que le 1er novembre 1954 et le 5 juillet 1962 sont intimement liés et sont l’œuvre d’une même génération de combattants et de militants émérites.

    On pourrait s’arrêter là, mais il faut aussi dire à quoi ont servi le combat et la libération du pays. A ce propos, il ne faut pas s’attendre à de la tendresse de la part qui ont perdu l’Algérie de Papa. Ils sont médiatiquement bien armés et ils le font savoir. En effet, à Alger ou à Paris, sur les réseaux sociaux, dans la presse écrite ou dans des livres, les bilans négatifs pleuvent.

    Dans la santé, l’économie, l’éducation, la culture, la politique… où que l’on se tourne, on trouvera toujours un «analyste», «expert», «docteur d’Etat hautement spécialisé», pour nous dresser un tableau noir de ce qu’est devenu l’Algérie, après 7 années de guerre glorieuse et 58 ans de gouvernance d’un pays-continent.

    Dans leurs commentaires « avisés », personne ou presque n’évoque les conditions dans lesquels vivaient les Algériens à l’aube de l’indépendance. Personne ne relève le fait qu’édifier une nation avec plus de 95% d’analphabètes, quelques centaines d’universitaires, des caisses vides, des millions de citoyens vivant en dessous du seuil de la pauvreté, avec une espérance de vie de 46 ans et éparpillés sur deux millions de kilomètres carrés, n’était pas une mince affaire.

    Personne parmi les analystes ne semble capable d’imaginer l’effort colossal fourni par les Algériens et les Algériennes pour aboutir à un taux de scolarisation de plus de 98%, un taux de vaccination des enfants dépassant les 97%, l’électricité fournie à l’écrasante majorité des citoyens. Tout cela est royalement ignoré par les «experts».

    Personne parmi ces «bien pensants» ne charge le système colonial qui avait tous les moyens de réaliser ces performances, mais qui a laissé le peuple algérien mourir dans sa misère. Les «analystes» devraient méditer l’exploit algérien au lieu de considérer le sauvetage de tout un peuple comme une entreprise ratée.

    Ce qu’il faut peut être retenir enfin, c’est qu’au nez et à la barbe des éternels insatisfaits, l’Algérie n’est plus un département français, mais un Etat souverain, une nation forte et une société solidaire. Le 1er novembre 2020 le rappellera sans doute.

    Par Nabil. G.

    Ouest Tribune, 13 oct 2020

    Tags : Algérie, 1er novembre, guerre de libération, alphabétisation, développement,

  • L’évolution de la Révolution algérienne

    Par Ali Chérif Deroua

    Cher lecteur, chose promise, chose due. J’ai choisi pour vous 3 sujets que vous n’allez pas oublier de sitôt, je l’espère. Ils vous aideront à percevoir mieux l’évolution de la Révolution algérienne, son histoire authentique et surtout vous permettront d’avoir une opinion saine sur notre glorieux passé.

    1 – commentaire sur les livres d’Yves Courrière

    Un ami, lecteur de mes contributions, m’a reproché de ne pas avoir écrit sur les rencontres de Aït Ahmed et Yazid avec les leaders de la Conférence de Bandung en les citant et, en incluant Ho Chi Minh. Je lui promis une réponse à ce sujet, à lui de se faire sa propre opinion après la lecture de cette contribution.

    Yves Courrière est considéré par la majorité des Français, et surtout des Algériens, comme l’une des références de l’écriture de l’Histoire de la Révolution algérienne. En ce qui me concerne, je n’ai aucun a-priori, j’ai lu ses 4 tomes à 3 reprises. La première fois, au fur et mesure de la sortie de ses livres aux éditions Fayard, en soulignant à même les livres, ce qui me paraissait bizarre, anormal.

    La seconde fois, en tirage éditions livres de poche. La troisième lecture dans Casbah Éditions, en vérifiant si certaines corrections avaient été apportées sur les nouvelles éditions.
    Dois-je taire ce qu’il a écrit de négatif parce qu’il est décédé ? Relever une erreur sur ce qu’il a écrit est-il condamnable ? Je pense que non.

    Les livres ont été vendus à plus d’un million d’exemplaires. Personne n’a relevé ou osé les signaler, est-ce ma faute ? Donc les donneurs de leçons de morale doivent voir ailleurs.
    À chaque lecture, je relevais quelques erreurs ou abus d’appréciation, quelques excès et quelques «perles».

    Grand historien, ayant reçu le Prix de Albert Londres et le Prix de l’Académie française est un qualificatif qui l’honore et dont je ne peux discuter.

    Il a été un grand reporter de Radio Luxembourg et de journaux de renom durant la Guerre d’Algérie. À ce titre, il a rencontré et côtoyé la crème des officiers supérieurs de l’armée française de l’époque. A ce titre, il a dû avoir accès à de nombreux documents et archives de très grande importance.

    Mais pour ma part, je me contente de mettre à la disposition du lecteur qui m’a interpellé, et à tous les lecteurs, un paragraphe d’un de ses livres. Je les laisse libres de leur jugement, cela permettra peut-être à certains de revoir leur opinion actuelle.

    Dans le tome 2, Le temps des léopards, La Guerre d’Algérie, éditions Casbah, pages 64 et 65, il écrit textuellement :

    «Yazid et Aït Ahmed avaient à peine la trentaine ! Leur jeunesse et leur fougue firent grande impression. Ho Chi Minh qui connaissait Messali et Ferhat Abbas fit contacter les deux jeunes Algériens. Il discuta longuement avec eux. Les Français… oh les Français, leur dit-il, c’est un problème que nous connaissons bien.»

    Que Yazid et Aït Ahmed aient rencontré Ho Chi Minh, pourquoi pas ? Mais pas à la Conférence de Bandung. Pour la simple et unique raison que ni le Vietminh (Vietnam du Nord) ni Ho Chi Minh n’étaient présents à Bandung. La délégation de l’État du Vietnam avec comme capitale Saigon faisait partie des 29 délégations officielles invitées et présentes. La délégation de ce pays était dirigée par Ngo Dinh Diem, président du Conseil des ministres de ce pays. Ce qui est beaucoup plus grave pour le lecteur algérien, c’est que plusieurs historiens ont repris ce passage et l’ont répercuté sur plusieurs médias.

    Autant dire bonjour les dégâts. Me concernant, je reste confiant. Il y aura toujours un Algérien qui rappellera cette «perle».

    Cher lecteur, il est beaucoup plus facile de le vérifier : si Yazid et Aït Ahmed avaient rencontré Ho Chi Minh, ils en auraient fait une référence et ce, à juste titre, dans leurs écrits. Or, aucun des deux ne l’a fait. Peut-être que certains vont le faire à leur place.

    2- Comité permanent de la Révolution

    Un fait historique majeur, que tous ceux, à de rares exceptions, qui ont écrit sur la Révolution algérienne, ont oublié, ignoré, escamoté, évacué, enterré pour des raisons faciles à comprendre, est : le Comité permanent de la Révolution. Oui, à part Ferhat Abbas et Benyoussef Benkhedda, parmi les responsables de la Révolution et quelques auteurs qui ont signalé son existence.

    Lorsque l’on sait que ce CPR a été pendant plus de deux ans l’autorité suprême de la Révolution, au-dessus du Comité de coordination et d’exécution (CCE), on doit se poser des questions et surtout les poser à d’autres : auteurs, historiens, analystes et chroniqueurs politiques et surtout les acteurs potentiels ou se présentant comme tels, de la Révolution algérienne.

    Ce comité a été désigné lors du deuxième congrès du CNRA qui a eu lieu au Caire en août 1957. Il était composé de Abane Ramdane, Bentobal Lakhdar, Boussouf Abdelhafid, Chérif Mahmoud, Krim Belkacem et Ouamrane Amar (citation par ordre alphabétique).

    Tous ses membres faisaient partie du Comité de coordination et d’exécution, dont les autres membres actifs étaient Abbas Ferhat, Lamine Debaghine, Abdelhamid Mehri et les membres à titre honorifique, Hocine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Rabah Bitat, Mohamed Boudiaf, Mohamed Khider.

    Il a disparu du lexique mais n’a jamais été officiellement dissous jusqu’à l’indépendance.
    Quel a été son rôle, quels ont été ses responsabilités, ses problèmes, les solutions et leurs conséquences?

    J’en connais un bout dont j’en parlerai plus tard. C’est aux historiens de s’y intéresser et de jouer leur rôle.

    Ce comité avait son siège à Tunis. Abbas et Debaghine étaient au Caire et Mehri à Damas.
    Pour ne pas être traité de fabulateur, voici des extraits des écrits de Ferhat Abbas et Benkhadda à ce sujet, qui, je l’espère, sont considérés comme des témoins crédibles.

    «Le GPRA réunit le comité permanent de la Révolution, compléta le CNRA et nomma les membres de l’Assemblée consultative maghrébine.» (Ferhat Abbas, Autopsie d’une guerre, Alger Livres Éditions, page 239).

    «N’ayant pu faire appel à l’arbitrage du Comité permanent de la Révolution et du CNRA dont la composition est contestée par certains, le gouvernement s’est trouvé paralysé.»

    Benyoucef Benkhedda, l’Algérie à l’indépendance, La crise de 1962 éditions Dahleb page 137.
    Voici un fait historique majeur sur lequel les historiens doivent se pencher et nous faire bénéficier de leur savoir-faire et de leur compétence.

    3- Affaire Jean-Yves Goeau Brissonnière

    Témoignage de Ahmed Boumendjel(1) sur l’affaire Goeau-Brissonnière, avocat, chargé de cours à la Faculté de droit de Paris et attaché simultanément aux cabinets de Pineau, ministre des Affaires étrangères, et Lejeune, ministre de la Défense nationale avec Bissonet, directeur d’école, attaché au cabinet de Lacoste, ministre et gouverneur général en Algérie.

    Après que les autorités françaises eurent contacté maître Ahmed Boumendjel pour arranger un contact entre des délégués officiels français et des représentants du FLN à Tunis au cours d’un congrès de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) dont l’une des personnalités les plus influentes à cette période était Irving Brown, président de American Federation of Labor (AFL) syndicat américain. Il était proche du FLN.

    Ils ont eu des contacts et discussions avec Mouloud Gaïd (connu sous le nom de Rachid Gaïd), secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), Aït Ahcene, M’hamed Yazid et Lamine Debbaghine.

    Au retour de la délégation française, les inspecteurs de l’aéroport d’Orly reçurent des instructions du commissaire de l’aéroport et de Abel Thomas, conseiller et homme de confiance de Bourges-Maunoury, chef du gouvernement de la République française, pour fouiller Maître Abdelmadjid Chaker, avocat tunisien des chefs du FLN incarcérés à la prison de la Santé à Paris, arrivé dans le même vol que la délégation française.

    Ils le fouillent et trouvent dans ses documents une lettre fermée portant comme adresse deux consonnes : B. B.

    Devant le refus de Chaker d’ouvrir la lettre, l’un des inspecteurs prend la responsabilité de le faire. À l’intérieur, il y avait le compte-rendu des discussions qui ont eu lieu à Tunis entre les deux délégués français et les responsables du FLN.

    C’est ainsi que le commissaire décréta Chaker coupable de complicité d’atteinte à la sûreté extérieure de l’État et l’inculpa en présence de Mohamed Masmoudi, ambassadeur de Tunisie à Paris qui attendait Chaker. Cet événement a fait la Une des journaux et le journal le Monde(2) lui a consacré 2 articles. Cet événement a jeté un froid dans les relations entre les deux pays avec la convocation de Gorce, ambassadeur de France à Tunis et protestations et déclaration du Président Bourguiba.

    Ironie de l’histoire, Chaker «inculpé en flagrant délit» d’après la loi fut autorisé à quitter Paris et rejoindre Tunis, après avoir passé la nuit à l’aéroport en attendant l’avion en partance sur Tunis. Quelle belle interprétation de la justice !!!

    Cet incident, de loin le plus médiatisé en ce temps de toutes les rencontres secrètes ou officieuses entre les deux belligérants, a été complètement occulté, effacé de l’Histoire de la Révolution algérienne.

    Pourquoi ? Chacun avait et a encore ses raisons de le faire oublier. J’en connais quelques-unes que je m’interdis d’émettre afin de ne pas influencer le lecteur.

    Mais quelques questions se posent :
    – le but de cette initiative ?
    – le contenu de la lettre ?
    – qui est le destinataire avec B. B. comme adresse ?
    – pourquoi avoir «grillé» côté français cette initiative ? Et surtout pourquoi ce silence sur un pareil événement ?

    Cet événement est très important. Il a permis au FLN de décider que tous les contacts entre les deux parties seront dorénavant officiels. Depuis cette date jusqu’aux entretiens de Melun en juin 1960, il n’y a jamais eu de contacts secrets ou officieux entre la France et le FLN.

    À ceux qui s’intéressent de façon spécifique à cet événement, je leur suggère de lire le livre écrit par le principal acteur et dont le titre est : Mission secrète. Pour la paix en Algérie par Jean-Yves Goeau Brissonnière.1957. Editions Lieu Commun.

    Cher lecteur, j’espère, encore une fois, être à la hauteur de vos attentes.
    A. C. D.

    (1) La Révolution algérienne par Charles Henri Favrod, pages 386, 387 et 388. Editions Dahleb.
    (2) Le Monde du 19 juillet 1957.

    La prochaine contribution portera sur l’Italie et la Révolution algérienne.

    Le Soir d’Algérie, 11 oct 2020

    Tags : Algérie, révolution, 1er novembre, FLN, guerre de libération, 

  • Sahara Occidental : le peuple sahraoui commémore le 46e anniversaire de la lutte armée

    Le peuple sahraoui célèbre le 46e anniversaire du déclenchement de sa lutte de libération nationale dans la conviction totale de la victoire de sa juste cause

    20 mai 2019. Le peuple sahraoui célèbre le 46e anniversaire du déclenchement de sa victorieuse lutte armée de libération nationale.

    En effet, il ya 46 ans, jour pour jour, le peuple sahraoui décida de revendiquer, d’arracher au colonialisme espagnol son indépendance nationale, mais en usant cette fois-ci du seul langage que l’occupant espagnol serait forcé de comprendre, à savoir, la lutte armée.

    Le 20 mai 1973 marqua un pas décisif qui a permis aux sahraouis de passer de stade de tribus à celui de peuple en lutte pour son indépendance.

    La première action menée fut l’attaque de El Khanga, un petit poste espagnol tenu par un détachement bien armé retranché derrière un blockhaus. Le détachement du Front Polisario était composé de 16 militants ne s’étant jamais battus, ils étaient armés de quelques vieux fuils et une poignée de balles.

    Le début de l’opération était catastrophique. En effet, s’acquittant de la corvée d’eau avec un camarade, El Ouali Moustpha Sayed tomba sur une patrouille de routime qui les arrêta. Ses camarades furent avetis par un guetteur. Furieux par la perte de leur chef, ils décidèrent de passer à l’action, aussi se présentèrent-ils au poste à l’heure du dîner. L’effet de surprise fit son effet et le musqueton se révélant être un argument de poids, la sentinelle se laissa désarmer. Le poste fut rapidement investi.

    Après avoir libéré El Ouali, le groupe repartit sans perdre de temps emmenant ses prisonniers et premières prises de guerre : armes, munitions, chameaux de selle. Puis, après une conférence improvisée pour les soldats de la garnison – tous sahraouis engagés dans l’armée espagnole- sur le bien fondé de la lutte.. ceux-ci furent libérés avec un chameau, un fusil et des provisions de bouche, selon les traditions sahraouies. La guerre du Sahara avait commencé.

    Mobilisé derrière et autour de son avant-garde politique et militaire -le Front Polisario- le peuple sahraoui inaugura ainsi un long et dur combat qui lui rendait, peu à peu, le respect que les agresseurs colonialo-expansionnistes – Espagne et Maroc en particulier- lui refusèrent.

    46 ans après, le peuple sahraoui est en droit de s’énorgueillir du stade très avancé atteint par son héroïque combat, le mettant au bord de la victoire finale.

    Certes, à présent, la guerre est en veille, mais le combat politique et diplomatique continue de faire rage. Le régime expansionnistes marocain a choisi la voie de l’entêtement soutenu et encourage par certaines puissances occidentales, les USA et la France en l’occurrrence, mais ce n’est là au’une fuite en avant qui ne servira en fin de compte qu’à mettre fin définitivement à l’existence de cette monarchie bâtie sur la trahison, la violence, le pillage et la servitude aux pays qui se proclament la berceau de la démocratie et les droits de l’homme.

    L’alliance colonialo-impérialiste n’empêchera point le peuple sahraoui de continuer de combattre pour parachever la libération totale de sa patrie. D’autant plus qu’il a tous les moyens nécessaire (motivation, détermination, moyens matériels…) Le temps joue en sa faveur et la fin du pouvoir alaouite est inévitable.

    Le seul choix qui reste donc à Rabat est de se retirer totalement du Sahara Occidental, puisqu’il est incapable de prendre la voie de la paix, celle du dialogue et de la négociation.

    Tags : Sahara Occidental, Front Polisario, Maroc, France, Etats-Unis, 20 mai 1973, 46e anniversaire, lutte armée, guerre de libération, statu quo, processus de paix,

  • Algérie: Quand le FLN-ALN était une école du militantisme armé africain.

    La photo suivante est un document historique exceptionnel. Parmi ce groupe de militants, plusieurs deviendront présidents de leurs Etats respectifs. On y retrouve les algériens Ben Bella, Boumediène, Bitat et Boudiaf, le mozambicain Samora Machel, l’angolais Agostino Neto. Et un doute subsiste sur le personnage n°2. S’agit-il du Cap-Verdien Aristides Pereira ? Ou d’Amilcar Cabral? Ou de quelqu’un d’autre?

    Photo-Histoire-2

    Largement partagée sur les réseaux sociaux depuis samedi dernier, cette photo est issue d’un article de presse inconnu. Le style et le détail fourni font immédiatement penser à un journal algérien (Lequel? De quand date cet article? Pas de réponse trouvée pour le moment). L’image affichée ci-dessus provient du blog angryarab. Le commentaire ajouté en français est une traduction du texte en arabe. Il est complété par des remarques en relation avec le contexte historique.

    Dans ce groupe, quatre acteurs ont été présidents de l’Algérie à des titres divers. Le premier dans l’ordre chronologique, Ahmed Ben Bella (n°5), a été élu en septembre 1963 avant d’être renversé par Houari Boumediène (n°22) le 19 juin 1965. Ce dernier a dirigé le pays en tant que président du Conseil de la Révolution jusqu’à décembre 1976. Date à laquelle il s’est fait élire en étant candidat unique à la présidentielle. Il est décédé le 27 décembre 1978. L’intérim de deux mois a alors été assuré par Rabah Bitat (n°7). Il s’en est suivi la présidence de Chadli Bendjedid. Ce dernier n’était pas au Maroc. Il était affecté en 1962 en Tunisie sur la frontière algérienne. A sa démission en janvier 1992. C’est le militant historique Mohamed Boudiaf (n°9) qui a alors présidé le HCE (Haut Conseil d’Etat) avant d’être assassiné le 29 juin 1992. Beaucoup d’acteurs de l’Algérie contemporaine sont ainsi présents sur cette photo. Une absence de taille est à noter. Celle du natif d’Oujda. Le commandant Abdelaziz Bouteflika ne figure pas sur les photos avec les activistes africains.

    Du côté des révolutionnaires africains, le militant anti-apartheid Nelson Mandela (n°15) est au centre de la photo. Il avait séjourné dans les camps FLN-ALN en mars-avril 1962 (voir les articles Mandela l’Algérien et Mandela et l’Algérie : cinq mensonges et une révélation). Au cours de son voyage, il avait été invité à visiter les ateliers d’armements de l’ALN près de Oujda et au Nador. Voici deux clichés où il avait été photographié.

    Quatre mois environ après la prise de ces photos, Nelson Mandela a été arrêté en Afrique du Sud (voir sa biographie sur ce document pdf). Il n’en sortira que 27 ans plus tard. Ceux qui disent qu’il avait fait des visites secrètes en Algérie indépendante se trompent lourdement. Assurément, ils le confondent avec d’autres militants de l’ANC. Dont l’actuel Président d’Afrique du Sud Jakob Zuma. C’est ce dernier qui était porteur d’un passeport algérien. Mandela voyageait avec un passeport éthiopien avant son incarcération.

    Revenons à la première photo. Avec une révélation de ce blog. A gauche, le personnage n°10 est Eduardo Mondlane (né le 20 juin 1920 – décédé le 3 février 1969). Il était au début des années 60 le leader des indépendantistes mozambicains. Un anthropologiste de formation qui avait enseigné l’histoire et la sociologie à l’université de Syracuse près de New-York. Il était le Président du Front de Libération Mozambicain (FRELIMO) de la date de création du mouvement en 1962 en Tanzanie jusqu’à sa mort en 1969. Mondlane a été assassiné dans un attentat à Dar es Salam. Un colis piégé lui avait été adressé. La bombe était cachée à l’intérieur d’un livre. Les services secrets portugais sont fortement soupçonnés d’être à l’origine de cet attentat.

    L’un des adjoint de Eduardo Mondlane était Samora Machel (né le 29 septembre 1933 – décédé le 19 Octobre 1986). Il est sur la photo sous le numéro n°16 (le commentaire en arabe intervertit son nom avec le n°17). Lorsque le FRELIMO a déclenché sa guerre d’indépendance le 25 septembre 1964, Samora Machel était le commandant de la région de Niassa. Il est devenu chef de l’armée de libération en octobre 1966 avant de prendre le contôle du FRELIMO en 1970. Machel est devenu Président du Mozambique lorsque l’occupation portugaise du Mozambique s’est terminée en 1975. En février 1977, l’option du marxisme-léninisme avait été choisie officiellement par le FRELIMO. Samora Machel est décédé dans un accident d’avion en 1986. Son avion revenait alors d’un sommet régional à Mbala en Zambie.

    Son voisin sur la photo le n°17 est l’angolais Agostinho Neto (né le 17 septembre 1922 – décédé le 10 septembre 1979). Fils d’un pasteur méthodiste, il avait fait des études de médecine au Portugal. Arrêté à plusieurs reprises par la police du dictateur Salazar pour « activités séparatistes« . Il était le leader du Mouvement Populaire Angolais de Libération (MPLA) lorsqu’il s’est échappé d’une résidence surveillée près de Lisbonne. De là il est parti vers les camps du FLN-ALN au Maroc et ensuite vers d’autres pays amis. Le 11 novembre 1975, lorsque l’Angola est devenue indépendante, le MPLA s’était emparé de la capitale Luanda au détriment d’autres mouvements indépendantistes. Neto est alors désigné président de la République. Il s’en est suivi une guerre civile et une large répression politique. En 1977, le MPLA choisissait le marxisme-léninisme comme idéologie du parti. Neto recevait une aide cubaine importante. Mais en 1979, alors qu’il souffrait d’un cancer, il est décédé à Moscou lors d’une intervention chirurgicale. Il avait 56 ans.

    Il y a un doute sur personnage n°2 de la photo en début d’article. Il pourrait s’agir d’Amílcar Cabral (né le 12 septembre 1924 en Guinée Bissau – décédé le 20 Janvier 1973). Personnage charismatique, on l’avait surnommé le Che Guevara africain. Il militait pour l’indépendance de la Guinée Bissau et des îles du Cap-Vert. Après des études d’agronomie au Portugal, Cabral a fondé le mouvement indépendatiste PAIGC (Partido Africano da Independência da Guiné e Cabo Verde). Pan-Africaniste convaincu, il était aussi l’un des fondateurs du MPLA angolais. Sous le nom de guerre d’Abel Djassi, Cabral était le chef du mouvement anti-colonialiste en Guinée portugaise. Excellent organisateur, son mouvement libérera une partie du territoire de l’emprise coloniale. En 1972, Cabral avait commencé à préparer une assemblée populaire en prévision de la déclaration d’indépendance unilatérale. Des rivaux au sein du PAIGC soutenus par les services portugais l’assassinèrent le 20 janvier 1973 à Conakry. Son demi-frère Luís Cabral reprendra le flambeau et deviendra par la suite président de Guinée Bissau.

    Mais la qualité de la photo et le manque de témoignage descriptif laissent persister un doute. Ce personnage n°2 pourrait être Aristides Pereira (né le 17 novembre 1923 – décédé le 22 septembre 2011). Ce dernier fut le premier président des îles du Cap-Vert indépendant. Il a dirigé son pays de 1975 à 1991. Le Cap Vert était à l’époque proche du bloc socialiste. Mais après l’introduction du multipartisme, Pereira échoua aux élections présidentielles de février 1991. Il décéda après avoir été hospitalisé à Coimbra au Portugal.

    Beaucoup de choses n’ont pas encore été rendues publiques sur cette période où l’Algérie était un sponsor important des mouvements de libération. Et pour cause, c’était les services secrets algériens qui encadraient le soutien apporté aux « frères révolutionnaires. » A travers le Ministère de l’Armement et des Liaisons Générales (MALG) dans les camps d’Oujda et du Nador, et ensuite par l’entremise de la sécurité militaire. Une page de l’Algérie contemporaine à faire écrire par des historiens objectifs.

    Baki @7our Mansour

    Source: Observations Confidentielles, 10 déc 2013

    Tags : Algérie, mecque des révolutionnaires, leaders africains, guerre de libération,

  • L’hymne national de l’Algérie

    Le Kassaman ou Qasaman (arabe : قَسَمًا, « nous jurons » ; berbère : Tagallit, « le serment ») est l’hymne nationalde l’Algérie. Ses paroles ont été écrites par le poète nationaliste Moufdi Zakaria.

    Moufdi Zakaria, militant nationaliste pendant la guerre d’Algérie, est approché en 1955 par Rebah Lakhdar à la demande d’Abane Ramdane et Benyoucef Benkhedda, qui lui demandent d’écrire un hymne national. Zakaria propose très vite un poème, Fach’hadou (« Témoignez-en ! »), qu’il aurait, selon une version répandue, écrit avec son sang sur les murs de la cellule 69 de la prison Barberousse, le 25 avril 1955 ; celui-ci est immédiatement adopté, puis renommé Kassaman (« Nous jurons ! »).

    La première composition musicale de l’hymne est écrite par l’Algérien Mohamed Touri, à Alger. Cette composition n’étant pas jugée satisfaisante, on demande alors au Tunisien Mohamed Triki de composer la musique, avec l’aide d’une chorale algérienne, à Tunis. Son résultat n’ayant lui aussi pas été retenu, on demande finalement à Mohamed Fawzi, compositeur égyptien, d’écrire la partition musicale de l’hymne. Cette dernière composition reste, aujourd’hui, la musique de l’hymne algérien.

    Kassaman a été officiellement adopté comme hymne national peu après l’indépendance de l’Algérie, en 1963.

    Moufdi Zakaria était très attaché à l’unité du Maghreb sur la base de l’Islam, de la berbérité et de l’arabité au delà de tous les clivages aussi bien national que religieux.

    En plus de cette volonté d’unir le Maghreb face à l’impérialisme militaire, politique, économique et culturel de la France; il a aussi manifesté les liens qui lie le Maghreb au Proche et Moyen Orient, et la nécessité de ne jamais l’oublier: « Notre patrie est l ‘Afrique du Nord, patrie indissociable de l‘Orient arabe dont nous partageons les joies et les peines, les ardeurs et la quiétude. Nous unissent à lui, pour l’éternité, les liens de la langue, de l’arabisme et de l’Islam ».

    La version définitive du chant révolutionnaire algérien « Qassaman » en 1957 aura été une belle démonstration de cette union du Machrek et du Maghreb avec une musique composée par l’égyptien Mohamed Fawzi le tout enregistré dans un studio tunisien.

    Par les foudres qui anéantissent,

    Par les flots de sang pure et sans tache,

    Par les drapeaux flottants qui flottent

    Sur les hauts djebel orgueilleux et fiers,

    Nous jurons nous être révoltés pour vivre ou pour mourir,

    Et nous avons juré de mourir pour que vive l’Algérie !

    Refrain : Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !

    Nous sommes des soldats pour la justice, révoltés,

    Et pour notre indépendance nous avons engagé le combat,

    Nous n’avons obéi à nulle injonction en nous soulevant.

    Le bruit de la poudre a été notre mesure

    Et le crépitement des mitrailleuse notre chant favori.

    Et nous avons juré de mourir pour que vive l’Algérie !

    Refrain : Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !

    Ô France ! le temps des palabres est révolu

    Nous l’avons clos comme on ferme un livre

    Ô France ! voici venu le jour où il faut rendre des comptes!

    Prépare toi ! Voici notre réponse!

    Le verdict, notre Révolution le rendra

    Et nous avons juré de mourir pour que vive l’Algérie !

    Refrain : Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !

    Sur nos héros nous bâtirons une gloire

    Et sur nos corps nous monterons à l’immortalité,

    Sur nos âmes, nous construirons une armée

    Et de notre espoir nous lèverons l’étendard.

    Front de la Libération, nous t’avons prêté serment

    Et nous avons juré de mourir pour que vive l’Algérie !

    Refrain : Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !

    Le cri de la patrie monte des champs de bataille.

    Écoutez-le et répondez à l’appel.

    Écrivez-le dans le sang des martyrs

    Et dictez-le aux générations futures.

    Nous t’avons donné la main, ô gloire,

    Et nous avons juré de mourir pour que vive l’Algérie !

    Refrain : Témoignez ! Témoignez ! Témoignez !

  • Algérie : L’apport des femmes dans le mouvement national de la Révolution – Edification du mouvement national algérien : les oubliées de l’histoire (Exrait Revue Babzman)

    L’histoire de l’Algérie contemporaine a été écrite par des hommes et – nous l’oublions souvent – par des femmes. Elles étaient minoritaires, durant la période qui a précédé le déclenchement de la guerre de Libération mais leurs actions ont été remarquables.

    Par Tarek Hafid

    Elles s’appellent Aldjia, Mamia, Emilie, Nafissa, Fatima et Isa. Des femmes qui ont fait le choix de s’engager en politique durant la première moitié du XXe siècle. Elles ont participé à l’édification du mouvement national algérien, devenant ainsi les premières vraies héritières de la résistante Lalla Fatma N’soumer.

    Ces femmes avaient pour dénominateur commun l’amour de l’Algérie, la jeunesse et la volonté de démontrer qu’elles sont capables de s’affirmer autant que les hommes en politique.

    Emilie, l’anarchiste

    Pourtant, une des premières militantes à lutter contre l’administration coloniale n’était pas algérienne mais française. Fille d’un mineur lorrain, Emilie Busquant a été l’épouse de Messali Hadj, un des pères du mouvement national algérien. Ses biographes la présentent comme une «militante anarcho-syndicaliste, féministe et anticolonialiste».

    Douée d’une grande culture politique, elle a joué un rôle important dans la création de l’Etoile Nord-Africaine, première grande formation algérienne porteuse de revendications indépendantistes. Emilie Busquant est également présentée comme étant la créatrice du drapeau algérien que nous connaissons aujourd’hui. L’emblème avait été présenté en 1934 à des cadres de l’Etoile Nord-Africaine lors d’une réunion tenue au domicile des Messali à Paris. Emilie Busquant décède en 1953, soit une année avant le déclenchement de la Révolution. Son engagement a permis d’ouvrir la voie à d’autres femmes.

    Les six pionnières

    Dans son livre Des Femmes dans la guerre d’Algérie, Danièle Djamila Amrane-Minne explique que durant les années quarante et cinquante, les femmes algériennes «sont absentes de la vie politique». Seul le Parti du peuple algérien, formation fondée par Messali Hadj après l’interdiction de l’Etoile Nord-Africaine, intègre des femmes dans ses structures. «Le PPA a attiré l’élite intellectuelle féminine. En 1946, de jeunes enseignantes et étudiantes adhèrent à ce parti. Cependant, elles ne militent pas avec les hommes. Alger en compte cinq à la fin de cette même année. Conscientes que leurs actions doivent être dirigées vers les femmes, et profitant de l’ouverture du mouvement nationaliste à la légalité, elles imposent, en 1947, la création d’une Association des femmes musulmanes d’Algérie (AFMA). Il leur est plus facile dans ce cadre légal, et uniquement féminin, de toucher les femmes mais leurs activités deviennent surtout socioculturelles», écrit Danièle Djamila Amrane-Minne. L’auteure cite des statistiques du ministère des Anciens Moudjahidine de 1978 : «Sur les 10 949 anciennes combattantes enregistrées, seules 6 ont eu une activité politique avant la guerre.» Il faut cependant reconnaître que l’exclusion n’était pas uniquement le fait des nationalistes algériens, elle était également provoquée par les autorités françaises qui voyaient d’un mauvais œil l’émancipation des femmes.

    Briseuses de tabous

    Dans ce club très restreint figurent des femmes qui ont eu la chance de suivre des études supérieures. Aldjia Benallegue-Nourredine et Nafissa Hamoud ont brisé une série de tabous en devenant docteur en médecine. A la Faculté d’Alger, il y avait très peu d’étudiants «indigènes», alors des étudiantes ! Toutes deux étaient militantes du Parti du peuple algérien au début des années 1940. Elles se sont également impliquées activement sur le terrain, notamment lors des manifestations qui ont conduit aux massacres des civils en 1945.

    Première femme médecin d’Algérie et d’Afrique, Aldjia Benallegue-Nourredine a montré une abnégation sans faille dans le combat qu’elle a mené sur le terrain politique. Vice-présidente du Comité de soutien à l’étudiant maghrébin, elle avait prononcé un discours ouvertement indépendantiste lors d’une réunion à laquelle ont participé plusieurs cadres du Parti du peuple algérien, en faisant référence «au drapeau algérien et à sa flamme sacrée qu’est la jeunesse» ! Les paroles, prononcées en public et reprises par la presse algéroise, avaient provoqué l’étonnement de M’hamed Yazid et de Cheikh Ibrahimi, présents dans la salle.

    Durant la guerre de Libération, aux côtés de son époux, le pharmacien Abdelkrim Benallegue, elle a alimenté les maquis de l’Armée de libération nationale en médicaments et produits pharmaceutiques. Menacée par les ultras de l’Algérie française, elle a dû quitter l’Algérie jusqu’à l’indépendance du pays. Durant les années 1960, elle initie le service de pédiatrie de l’hôpital Parnet d’Alger, établissement qui porte depuis 2002 le nom de sa consœur et militante Nafissa Hamoud.

    Connue à travers le monde pour ses travaux sur la santé de l’enfant, Aldjia Benallegue-Nourredine est décédée comme elle a vécu : dans la plus totale discrétion. Elle a passé les dernières années de sa vie auprès de sa fille en Syrie. Le professeur Benallegue a rendu son dernier souffle le 31 décembre 2015 à Tartous, où elle a été inhumée.

    En participant activement à l’édification du mouvement national algérien, ces femmes – héritières de Lalla Fatma N’soumer – ont permis à des milliers de combattantes de prendre part à la guerre de Libération. Mais à l’indépendance, les moudjahidate ont été les premières victimes «politiques» du système qui s’est installé dès 1962.

    A part quelques sièges à l’Assemblée constituante (seulement 10 sur les 195), elles n’ont eu accès à aucun poste politique. Aucune n’a réussi à obtenir le statut d’officier de la jeune Armée nationale populaire. Pas une seule gradée dans les rangs, alors que nombre d’entre elles étaient, armes à la main, dans les maquis, au sein des structures combattantes de l’OCFLN et des cellules d’espionnage du MALG. Comme une victoire qui laisse un goût amer de défaite.

    T.H.

    Babzman, 7 mars 2017

    Tags : Algérie, Guerre d’Algérie, FLN, Bataille d’Alger,

  • Algérie : « Les filles de la révolution » (Documentaire)

    « Les filles de la révolution », est un documentaire français, réalisé en 1968. Il tend à rendre compte de la situation de la femme dans l’Algérie post-indépendante, au travers de témoignages d’Algériennes engagées dans la lutte pour l’émancipation féminine et qui ont participé à la révolution.

    Ce reportage est très riche en témoignages. Si le ton du journaliste est parfois méprisant, les questions dirigées, et ses remarques douteuses, on demeure fasciné et admiratif à la vue de ces jeunes femmes modernes, militantes et conscientes de la place qu’elles occupent.

    L’une d’elle marque particulièrement les esprits…Un visage angélique, une voix charmeuse et enjouée, de grands yeux pleins de malice et d’espoir… Zohra Sellami (future madame Ben Bella) s’exprime, du haut de ses 24 ans, en toute sagesse et lucidité, face au journaliste français qui l’interviewe…

    Source : Babzman, 28 mars 2019

    Tags : Algérie, Guerre d’Algérie, Bataille d’Alger, Zohra Sellami, révolution, guerre de libération, colonialisme, 

    [youtube https://www.youtube.com/watch?v=SiKPaJgAnZ8&w=560&h=315]
  • Maroc – Rif : Biographie de l’Emir Abdelkrim El Khattabi

    INTRODUCTION

    Abdelkrim El Khattabi (né vers 1882 à Ajdir au Maroc et décédé le 6 février 1963 au Caire en Égypte), de son nom complet Mohamed ben Abdelkrim El Khattabi, était un chef militaire rifain, du Rif, zone berbère au nord-est du Maroc. Il est devenu le chef d’un mouvement de résistance contre la France et l’Espagne au Maroc, puis l’icône des mouvements indépendantistes luttant contre le colonialisme. Il prendra le flambeau de la résistance après la défaite de Mouha ou Hammou Zayani, son compagnon le fqih Belarbi Alaoui dit Cheikh Elislam se rallia à la cause d’Abdelkrim pour continuer la lutte contre les espagnols et les français.

    BIOGRAPHIE

    Né à Ajdir au Maroc, fils d’un cadi (juge en arabe) du clan Ait Yusuf de la tribu Aït Ouriaghel (ou Waryaghal), Abd el-Krim a été instruit dans des zaouïas traditionnelles et des écoles espagnoles, finalement son éducation à l’ancienne université de Quaraouiyine à Fès, suivit de trois ans en Espagne où il étudia la mine et la technologie militaire. Entre 1908 et 1915 il fut journaliste au quotidien de Melilla, où il préconisait la laïcité et la coopération avec les occidentaux afin de libérer la Oumma de l’ignorance et du sous développement.

    Il entra dans l’administration espagnole, et fut nommé Cadi chef de Melilla en 1915. À cette époque-là, il commença à s’opposer à la domination espagnole, et en 1917 il fut emprisonné pour avoir dit que l’Espagne ne devrait pas s’étendre au-delà des territoires déjà occupés (qui en pratique excluait la plupart des zones incontrôlées du Rif) et exprimant sa sympathie pour la cause allemande pendant la Première Guerre Mondiale. Peu après s’être échappé, il revint à Ajdir en 1919 et, avec son frère, il commença à unir les tribus du Rif dans une République du Rif indépendante. Pour cette cause, il essaya d’apaiser les inimitiés entre les tribus existantes.

    En 1921, comme une retombée inattendue de leurs efforts pour détruire la puissance de Raisuni, un brigand local, les troupes espagnoles approchent des secteurs inoccupés du Rif. Abdelkrim envoie à leur général Manuel Fernández Silvestre un avertissement : s’ils franchissent le fleuve Amekran, il le considérerait comme un acte de guerre. Fernández Silvestre aurait ri en prenant connaissance du message. Le général installe un poste militaire sur le fleuve à Abarrán. Le même jour au milieu de l’après-midi mille rifains l’avait encerclé ; 179 militaires espagnols furent tués, forçant le reste à la retraite. Les jours qui suivirent après plusieurs escarmouches sanglantes pour les troupes de Fernández Silvestre un événement inattendu se produisit. En effet méprisant Abdelkrim, Fernández Silvestre décide de le défier, et avec 3 000 hommes Abdelkrim parvient en deux jours, grâce à la ruse, à vaincre l’Espagne. Pour l’Espagne, la bataille d’Anoual a été un véritable désastre. Elle y a perdu près de 16.000 soldats, récupéra 24.000 blessés 150 canons et 25.000 fusils. En outre, 700 soldats espagnols ont été faits prisonniers. Il s’agit aussi de la première défaite d’une puissance coloniale européenne, disposant d’une armée moderne et bien équipée devant des résistants sans ressources, sans organisation, sans logistique ni intendance.

    La victoire d’Anoual a eu un immense retentissement non seulement au Maroc mais aussi dans le monde entier. Elle a eu d’immenses conséquences psychologiques et politiques, puisqu’elle allait prouver qu’avec des effectifs réduits, un armement léger, mais aussi une importante mobilité, il était possible de vaincre des armées classiques.

    Fort de son succès, Abdelkrim proclame en 1922 la République confédérée des Tribus du Rif, un embryon d’État berbère. Cette république eut un impact crucial sur l’opinion internationale, car ce fut la première république issue d’une guerre de décolonisation au XXe siècle. Il créa un parlement constitué des chefs de tribus qui lui vota un gouvernement.

    En 1924, l’Espagne retire ses troupes dans ses possessions le long de la côte marocaine. La France, qui de toute façon avait des prétentions sur le Rif méridional, se rendit compte que laisser une autre puissance coloniale se faire vaincre en Afrique du Nord par des indigènes créerait un dangereux précédent pour ses propres territoires, et rentra dans le conflit. Tentant de joindre toutes les forces vives marocaines pour constituer le noyau d’un mouvement de libération marocain préalable à un vaste mouvement de décolonisation, Abdelkrim demanda au sultan Moulay Youssef de rallier sa cause. Mais celui-ci, en raison de la pression de la résidence générale française à Rabat, refusa de lutter contre les puissances coloniales.

    L’entrée de la France en guerre ne se fait pas attendre mais la pression de l’opinion publique aussi bien européenne qu’internationale, subjuguée par cette résistance rifaine, rend la tâche plus ardue et conduit au renvoi du résident général le maréchal Hubert Lyautey.

    À partir de 1925, Abdelkrim combat les forces françaises dirigées par Philippe Pétain à la tête de 200 000 hommes et une armée espagnole commandée personnellement par Miguel Primo de Rivera, soit au total de 450 000 soldats, commença des opérations contre la République du Rif. Le combat intense dura une année, mais par la suite les armées françaises et espagnoles combinées – utilisant, entre autres armes, l’ypérite – furent victorieuses des forces d’Abdelkrim.

    Après la menace de génocide, Abdelkrim se rend comme prisonnier de guerre, demandant à ce que les civils soient épargnés. Il n’en sera rien, les puissances coloniales ne peuvent tolérer qu’un tel soulèvement reste impuni. Ainsi dès 1926 des avions munis de gaz moutarde bombarderont des villages entiers faisant des marocains du Rifs les premiers civils gazés massivement dans l’Histoire, à côté des kurdes iraqiens gazés par les britanniques. On estime à plus de 150 000 le nombre de morts civil durant les années 1925-1926, mais aucun chiffre crédible ne peut être avancé.

    En 1926, Abd el-Krim est exilé à la Réunion, où on l’installe d’abord jusqu’en 1929 au Château Morange, dans les hauteurs de Saint-Denis. Quelques années passent. Il devient habitant de la commune rurale de Trois-Bassins, dans l’ouest de l’île, où il achète des terres et construit une belle propriété. Il y vit douze à quinze ans. En mai 1947, ayant finalement eu l’autorisation de s’installer dans le sud de la France, il embarque à bord d’un navire des Messageries Maritimes en provenance d’Afrique du Sud et à destination de Marseille avec 52 personnes de son entourage et le cercueil de sa grand-mère, le Katoomba.

    Arrivé à Suez où le bateau fait escale, il réussit à s’échapper et passa la fin de sa vie en Égypte, où il présidera le « Comité de libération pour le Maghreb arabe ». Mohamed ben Abdelkrim El Khattabi meurt en 1963 au Caire où sa dépouille repose encore. Au sortir de l’indépendance, la répression d’une révolte du Rif fait plus de 8 000 morts entre 1958 et 1961. Il refusa de rentrer au Maroc après l’indépendance, mais sa dépouille y fut ramenée à la demande du roi Hassan II.

    Source : Blog L’Emir Abdelkrim El Khattabi, 12 fév 2017

    Tags : Maroc, Rif, Hirak, Abdelkrim El Khattabi, Republique du Rif, colonialisme, guerre de libération, guerre de guérrilla,