Étiquette : Islam

  • Selon Erdogan, L’Europe prépare sa propre fin

    Intervenant à l’occasion du 7e congrès du Parti de la justice et du développement (AKP) à Kayseri, le Président turc Recep Tayyip Erdogan a violemment critiqué la politique des pays européens à l’égard des musulmans allant même jusqu’à évoquer un «fascisme européen».

    Pour lui, l’Europe a «ouvert un front contre les musulmans» ce qui signifie le début de sa fin. «Le fascisme européen est entré dans une nouvelle étape avec ce type d’attaques contre les droits des citoyens musulmans. L’Europe prépare sa propre fin avec le front qu’elle a ouvert contre les musulmans. S’ils n’y mettent pas fin, cette maladie rongera toute l’Europe de l’intérieur», a-t-il affirmé.

    Les propos d’Erdogan arrivent à un moment où le président français a décidé de rappeler l’ambassadeur de la France à Ankara suite aux déclaration du président turc mettant en question “la santé mentale” d’Emmanuel Macron en raison des mesures adoptées par ce dernier dans le contexte qui a suivi l’assassinat de Samuel Paty.

    Pour rappel, les événements en France ont laissé place à une forte campagne visant à boycotter les produits français dans le monde musulman en réponse à la publication des caricatures du prophète Muhammad sur les murs de certains immeubles en France.

    Tags : France, Turquie, Europe, Islam, musulmans, caricatures, Charlie Hebdo,

  • Hijab, séduction et coquetterie féminine en terre d’Islam

    Par Ikbel AL Gharbi*

    Un spectre hante les deux rives de la méditerranée : c’est le Hijab ou voile islamique. Certains gouvernements l’interdisent comme la Turquie, la Tunisie et la France, d’autres le tolèrent. Le Hijab est devenu une affaire d’Etat.

    Au-delà des polémiques et des controverses, il est utile d’interroger les représentations culturelles et l’imaginaire arabo- musulman pour mieux cerner cette problématique.

    La culture musulmane est marquée par une représentation stéréotypée d’un éternel féminin caractérisé par la ruse, la coquetterie et la séduction. Et vue que le mot Fitna désigne à la fois désordre, guerre civile , tentation et séduction, le corps féminin se trouva, tout le long de l’histoire musulmane inscrit dans le champs de pouvoir.

    Le désir de cacher ce corps apparaît comme une obsession chez la plupart des

    Fuquahas au point que leurs écrits soient marqués par une invasion massive de la «Charia » dans la vie privée.

    Le Hijab ou voile féminin, dérivé du verbe « hajaba » qui veut dire cacher, protéger, séparer ; était destiné, sur un conseil d’Omar Ben Khattab semble- t -il, à dérober les femmes aux regards des hommes.

    L’islam a justifié le port du Hijab comme étant le plus simple moyen pour les épouses du prophète de se faire reconnaître afin qu’elles ne soient point offensées.

    Cette coutume fut presque unanimement suivie par les citadines, surtout de la classe aisées qui désiraient s’identifier aux mères des croyants, cependant ni les paysannes ni les ouvrières ne purent l’adopter complètement.

    Il parait évident que le port du voile ne constitue pas un pilier de l’islam, il est, de plus et depuis les origines l’objet d’infinies controverses qui prennent leur source dans trois passages du Coran.

    La sourate du hijab concerne uniquement les épouses du prophète. Le hijab y apparaît comme un signe distinctif et honorifique : « Quand vous demandez à ses épouses quelque chose, adressez vous à elle derrière un rideau (hijab). C’est plus décent pour vos cœurs et pour les leurs » (Sourate 33, les Coalisés, verset 53).

    Une évocation plus explicite du voile se trouve au verset 59, qui élargit la recommandation aux femmes proches du prophète et à toutes les croyantes.

    Quant au troisième passage il est situé dans la sourate 24, la Lumière, verset 30, 31 qui fixe aux musulmanes la conduite idéale à tenir pour ne pas exciter la convoitise des hommes.

    Pour les musulmans tolérants, ces versets loin d’imposer le voile aux femmes instaurent plutôt une nouvelle attitude de décence en public et rompent avec certains rituels antéislamiques qui poussaient les femmes, par exemple, à se dénuder les seins pour encourager les combattants qui partaient en guerre.

    Pour d’autres musulmans, adeptes d’une lecture littérale du texte sacré, la recommandation concernant les femmes du prophète a valeur d’obligation.

    Pour ces penseurs, la sharia doit imprégner toute la vie du croyant. Ses directives doivent ériger toute son expérience quotidienne. C’est pour cette raison qu’en parcourant certains textes , on s’aperçoit avec surprise que mille et un détails que l’on pensait relever de la sphère de la vie privée relèvent en fait de la vie publique et politique : intimité du couple, comportement amoureux , tenue vestimentaire parure et ornements, etc.

    Toutefois, et en dépit des interdits et des restrictions, le conformisme a toujours été une affaire de culture et de milieu.

    Certaines femmes musulmanes ont toujours voulu être libres et séduisantes.

    Elles ont affirmé leur personnalité avec leurs allures.

    – A l’image de Aicha B Talha petite fille de Abu Bakr, compagnon du prophète et nièce d’Aicha mère des croyants qui refusa le Hijab. Cette aristocrate alliait à la noblesse de sa naissance une fierté d’esprit et une grande beauté, qu’elle tenait d’ailleurs à laisser admirer. En effet, Aicha refusa de se voiler en déclarant avec malice que Dieu dans sa miséricorde l’a créée belle et qu’elle désirait montrer son œuvre.

    Très coquette, Aicha recherchait les hommages des poètes et savait tirer parti des sentiments qu’elle inspirait, au point qu’elle provoqua la destitution du gouverneur de la Mecque Al Hareth el Makhzoumi , qui avait consentit à retarder l’heure de la prière pour lui permettre de terminer son « Tawaf » (la circulation rituelle autour de la Kaaba).

    – Umm Hani, cousine du prophète et sœur d’Ali, était très coquette. Elle se paradait dans la rue mi-voilée « On apercevait ses boucles d’oreilles » relatent les historiens. Omar Ibn Khattab réprobateur lui dit « ton cousin Mohamed ne pourra rien pour toi si tu continues à te parer de la sorte ». L’envoyé de Dieu, loin de blâmer sa cousine, rétorqua avec tendresse : « j’ai le pouvoir d’intercéder pour tous les membres de ma famille ».

    – Sukeina, fille de l’imam Hussein le martyr de Kerbela, arrière petite fille du prophète Mohamed ne s’est jamais voilée et cela malgré sa jeunesse, sa beauté et la noblesse de son rang. Elle refusa également d’abdiquer sa personnalité et ne consentit jamais au principe d’obéissance au mari « Taa », ni au droit de ce dernier à la polygamie. Elle stipulait cette contestation de l’autorité masculine dans ses contrats de mariage.

    En outre ; en récusant l’institution du Hijab, cette féministe d’avant garde sapa son symbolisme en tant que séparation institutionnelle de deux espaces distincts, un espace privé réservé à la femme et un espace public géré par l’homme.

    Loin de se soumettre aux lois de la claustration, la pétillante Sukeina tenait, en effet, un salon littéraire à Médine et organisait des soirées interminables où se côtoyaient artistes, poètes et hommes de Lettres de diverses tendances et de différentes religions. Très fréquemment, les grands poètes de « ghazal », poésie érotique, de l’école du Hijaz venaient à la résidence de Sukeina réciter leurs poèmes, vanter leurs talents et écouter les critiques.

    Aux cotés du célèbre Omar Ibn Abi Rabiaa on cite al Awas, Djarir mais surtout al Farazdak semble s’y être rendu quand il se trouvait dans les lieux.

    Sukeina ouvrait les discussions, stimulait les débats littéraires, émettait des remarques, des commentaires sur l’emploi inadéquat d’un terme, d’un croisement, ou d’un motif inclus dans les vers cités.

    Les interventions de Sukeina relevaient une bonne connaissance de la poésie et de la culture de son époque.

    Elle a ainsi réussi à préserver l’école de la poésie « Ghazal » puisque ses adeptes étaient protégés et encouragés en bénéficiant de la caution des plus hautes sphères de la société médinoise.

    Ces femmes musulmanes auraient pu cristalliser des modèles qui nous auraient aidées à bâtir des sociétés où les femmes seraient pleinement épanouies.

    Ces récits authentiques redéfinissent les rapports de ces sociétés avec les femmes. Séduire est ici pris dans le sens de charmer, de fasciner, de plaire.

    Dans la séduction on entre dans un autre enjeu : prendre conscience de son corps pour plaire à l’autre.

    Freud a toutefois apporté une contribution ingénieuse à ce sujet.

    Il reconnaît au narcissisme un grand pouvoir d’attraction sur les autres. Il démontre par ailleurs que le narcissisme féminin est un moyen qu’utilisent les femmes pour compenser leur manque et leur infériorité « Pour se dédommager de leur oppression, elles se consacrent à leur beauté. Elles retournent sur leur propre corps un désir qui leur était interdit d’extériorise.

    Or, la relative égalité des sexes qui a régné à cette époque a permis à la femme musulmane d’accéder à une certaine autonomie affective et c’est pour cette raison que la coquetterie fém inine revêt ici un autre sens :

    Sukaina l’artiste et Aicha la séductrice, en contestant l’institution très ambiguë du Hijab ont senti que si on méconnaît les couleurs et les nuances, si on ne perçoit plus le chatoiement des étoffes, quand on ne s’habille plus qu’en uniforme : Bluejean, tenue Mao ou Tchador noir, c’est qu’on est prêt à subir tous les conditionnements et toutes les manipulations. C’est qu’on n’est plus un être libre. Car lorsque la norme disciplinaire réussi à pénétrer le quotidien pour quadriller et stériliser l’expérience de l’individu jusqu’à dans son corps, son désir, sa sensibilité esthétique, bref sa disposition innée au plaisir, elle permet toute les dérives totalitaires.

    Et quand la vie quotidienne est à ce point appauvrie, l’individu n’a même plus la force de demander des comptes à une réalité mauvaise car il n’a plus le désir du bonheur. Évidemment cela rend toute désaliénation improbable.

    D’instinct, les femmes musulmanes se sont toujours opposées à l’uniformisation vestimentaire, sous le khalifat de l’intransigeant Omar B Khattab, elles ont détourné les lois et ont inventé la mode « Kabati ». Le Kabati était une longue robe moulante et ajustée qui ne dévoile aucune partie du corps féminin mais qui épouse ses formes comme une seconde peau.

    A ce propos l’Imam Malek écrit « j’ai appris que Omar B Khattab a proscrit cette mode féminine qui bien qu’elle ne laisse rien transparaître dévoile Tout ».

    Ce qui est bien plus séduisant car comme l’observe Barthe c’est la chemise béante qui provoque le désir bien plus que la nudité du corps.

    A la même époque d’Omar -et désirant toujours plus de fantaisie- les femmes musulmanes ont dévoilés leurs jambes et ont opté pour l’audacieuse mode de la « mini jupe ». Les Fuquahas s’insurgèrent contre cette mode qu’ils qualifièrent de « Bidaa » [Innovation].

    On voit bien que déjà à l’aube de l’islam la mode féminine s’est libérée de la rigueur de l’orthodoxie et s’est caractérisé par la recherche de ligne et de volume.

    Les tenues féminines étaient étincelantes. Les matières utilisées étaient des plus nobles, les tissus étaient raffinés : soie mousseline, taffetas, chantoung satin damassé, brocart broché d’or et d’argent.

    Les couleurs étaient chatoyantes : rose orange et jaune safran, embellissantes, elles étaient à elle seules un maquillage éclatant.

    Les tuniques étaient ajustées, parfumés de musc ou ambrés, décorés de poèmes langoureux et brodées de fils d’or et d’argent …

    Les traînes étaient interminables.

    On superpose, on ose, on s’amuse …

    La fabrication de tissus brodés spéciaux avait lieu dans les ateliers de tissage des palais.

    Cette activité qui débuta sous les Umayyades devint un trait courant de la civilisation matérielle de l’islam médiéval. Ces créations étaient multiples et variées : brocart « dibaj » , satin « istabrak » ; soie fine « harir » , soie diaprée « wachy » et autre tissu de luxe ornaient les gardes robes des nantis.

    Les vêtements brodés étaient donnés en témoignage de la faveur royale et faisaient partie des cadeaux diplomatiques courants.

    La «Khilaa » offerte par les émirs était un vestiaire complet. De beaux vêtements étaient importés de tout le monde islamique : De l’Inde venait la Futa, sorte de sari, de la chine venaient les vêtements de plie en tissu huilé, Mimtari, sorte d’imperméable ainsi que toute sorte de tissus nobles tels que le Sharab, Dimyati , Dabiki… tous en lin.

    Les chaussures et les sandales devaient être choisis parmi un certain nombre de cuir de couleur et de forme, et il était permis d’en porter qui présentent des combinaisons de couleurs telle que le noir et le rouge ou le noir et le jaune.

    La mode des bas empruntée aux persans était aussi bien établie. La lingerie de la musulmane élégante devait être fine et de couleur pastel ou noire.

    Le vêtement féminin s’introduit au double jeu de l’ordre et du désordre, de la soumission à la contrainte et de la liberté. Fidèle à son essence, il joue subtilement entre l’exhibition et le masque.

    Flugel compare en ce sens le vêtement à un symptôme névrotique et notamment à la rougeur. Celle ci est à la fois un signe excessif de honte, mais en même temps comme le montre la psychanalyse, c’est une façon d’attirer l’attention sur soi.

    Selon Flugel, le vêtement est une rougeur perpétuelle sur le corps de l’humanité. En isolant un corps ou une partie du corps il portait immanquablement l’attention sur elle. Par cette dialectique singulière tout vêtement même le hijab cache en même temps qu’il désigne.

    La fantaisie féminine s’est aussi manifestée au niveau de la coiffure. Dés l’époque du prophète les femmes utilisaient du vin comme laque pour donner plus de volumes à leur chevelure.

    Sukaina fille de hussein le martyr de karbala, qui affichait une coquetterie toute féminine, mettait en valeur sa beauté par une coiffure spéciale qui portait son nom « al turra al sukeyniya » (les cheveux bouclés à la Sukeina). Cette coupe à la mèche rebelle fit fureur aussi bien chez les femmes que chez les hommes. Jugeant la « coupe Sukaina » trop efféminée, le pieux Khalife Omar B Abdelaziz l’a interdite aux hommes et punissait tout homme coiffé à la Sukaina à être rasé et flagellé.

    L’Histoire atteste que l’élan de vie et la vitalité des femmes musulmanes se sont toujours opposés à la rigueur de l’orthodoxie. En militant pour reconquérir socialement leur corps, elles affirment l’unité indissoluble de l’être humain : esprit libre dans un corps réapproprié.

    Ces pratiques si souvent vilipendées dont les textes n’ont gardé que des traces partielles et partiales nous en donnent la preuve.

    Ici point de jugement moralisateur, de systématiques querelles entre Anciens et

    Modernes, comme le voudraient le faire croire bon nombre de chroniqueurs nostalgiques d’un passé mythique, mais seulement un incessant bricolage qui fonde le phénomène vestimentaire féminin en une dynamique, parfois turbulente, toujours soumise à des réaménagements.


    * Ikbal al Gharbi est professeur de psychologie et des sciences de l’éducation à L’Institut supérieur des sciences religieuses, ainsi que directrice du Centre de l’innovation pédagogique, à l’université Ezzeytouna en Tunisie. Elle est aussi psychologue, docteur en anthropologie, consultante auprès des Nations Unies et elle s’occupe de la réforme dans le monde arabe.

    Source : Islamiqua, 15 déc 2008

    Tags : Islam, Hijab, musulman, femme, prophète, sunnite, chiite, burka. burkini, pudeur,

  • Maroc: Sur Twitter, un hashtag appelle au boycott des produits français

    Selon le site Middle East Monitor, les marocains ont adhéré à la campagne de boycott des produits français suite à la publications de caricatures illustrant le prophète Muhammad sur les murs d’immeubles français.

    La campagne a débuté sur les réseaux sociaux avec le hachtag #BoycottFrenchProducts « en réponse aux caricatures et à la suite des déclarations du président français Emmanuel Macron, qui ont suscité l’émoi des musulmans du monde entier ».

    Sur Twitter et Facebook, les photos de profil des utilisateurs ont été changés par « la bannière «Muhammad le messager d’Allah», en rejet des déclarations des responsables français », indique MEMO.

    Rania Lamlahi a tweeté: «En tant que Marocaine, je n’accepte pas la façon dont le président français se comporte envers l’Islam, alors je soutiens la campagne de boycott des produits français.»

    À son tour, l’activiste Siham Sark a critiqué dans un tweet la façon dont Macron a traité la question des caricatures offensives: «Malgré son allégation selon laquelle la France est un pays qui garantit les libertés.»

    Quant à Jalal Aouita, il a posté sur Facebook: «Il n’y a pas de différence entre la France d’autrefois et la France d’aujourd’hui sauf pour les tendances maquillage et les veilleuses de Paris. La même haine, la même discrimination, la même intimidation, les mêmes mentalités.

    Aouita a ajouté: «J’ai volontairement publié les caricatures pour que tout le monde prenne conscience de la rancune des décideurs français contre l’islam.»

    Dans un post Facebook, le consultant de la municipalité de Rabat, Hisham El-Harch, a déclaré: «C’est un triste jour dans l’histoire des musulmans, un triste jour dans le vrai sens du terme. La France est-elle devenue folle?

    El-Harch a ajouté: « Les caricatures publiées par le magazine français Charlie Hebdo visant le Messager d’Allah sont affichées sur les murs de certains hôtels de Toulouse et Montpellier en France, après que le président français a annoncé qu’il n’interdirait pas ces publications abusives. »

    La France a récemment été témoin d’une polémique sur les déclarations de politiciens français visant l’Islam et les musulmans, suite à la décapitation d’un enseignant le 16 octobre.

    « Ces derniers jours, les raids contre les organisations de la société civile islamique en France se sont multipliés suite à l’attaque. Mercredi, Macron a annoncé dans un communiqué de presse que son pays n’interdirait pas les caricatures insultant le prophète Mahomet et l’islam », conclue la mème source.

    Tags : Maroc, France, caricatures, Samuel Paty, prophète, Islam, Islamisme, terrorisme, amalgame, islamophobie, Charlie Hebdo,

  • La décapitation en France et les enfants de la haine

    Opinion- Luk Vervaet

    Le 16 octobre 2020, un enseignant a été assassiné, décapité à Paris. L’acte est terrifiant et terrible, les mots pour le décrire le sont également. Un meurtre commis au couteau, à mains nues, non seulement d’un passant, mais d’un enseignant, touche délibérément notre imagination, plus qu’un meurtre commis à distance, avec une arme à feu ou avec un drone. Il évoque une image du passé, des temps barbares et primitifs, que nous pensions révolus depuis longtemps.

    Pourtant, nous ne découvrons pas cette horreur pour la première fois. Nous l’avons vu en Syrie, nous l’avons vu en Grande-Bretagne. Le meurtre du professeur de français m’a rappelé les images de l’attaque de Woolwich près de Londres. Le 22 mai 2013, deux jeunes hommes, Michael Adebolajo (28 ans) et Michael Adebowale (22 ans) d’origine nigériane, ont assassiné le soldat Lee Rigby (25 ans) avec un couteau de boucher puis ont tenté de le décapiter. Pour se venger de la guerre contre les musulmans en Irak, ont-ils déclaré.

    Tony Blair, l’ancien Premier ministre britannique, l’un des instigateurs de la guerre contre l’Irak, a ensuite déclaré que l’attaque n’était pas l’expression isolée de deux individus fous, mais une partie, je cite, « d’un problème plus large au sein de l’Islam ». Dans la semaine qui a suivi le meurtre, 193 incidents islamophobes ont été signalés, dont des attaques contre 10 mosquées.

    Un an et demi plus tard, le 14 janvier 2015, le raciste blanc Zack Davies (26 ans) a piraté le Dr Sarandev Bhambra, un sikh, avec une machette et un marteau dans un supermarché Tesco au Pays de Galles. Pour se venger du meurtre du soldat Lee Rigby, il a déclaré lors de son procès. La chaîne de vengeance et de représailles est sans fin. La ressemblance avec ce qui s’est passé en France est frappante. Seul l’auteur en France, contrairement aux trois auteurs susmentionnés en Grande-Bretagne, ne fera plus de déclaration. En France, plus de siège d’un coupable jusqu’à ce qu’il se rende, mais l’application de la peine de mort dans la rue. Quelque chose qui alimentera à nouveau toutes sortes de théories du complot.

    Dans une société comme la nôtre qui concentre tout sur l’individu, il suffit de marquer les auteurs comme des monstres qui se cachent sous nous et surgissent soudain de nulle part. Il suffirait de classer encore mieux et plus de personnes, de les liquider physiquement dans une attaque terroriste ou de les emprisonner à vie. Le choc généré par la cruauté des jeunes auteurs peut nous faire perdre de vue tout sens de la raison et de la proportion. Il ne s’agit pas ici de comparer les meurtres d’une part avec ceux de l’autre et donc de les blanchir. Ce qui compte, c’est d’assumer nos responsabilités en tant que société et société si nous voulons éviter autant que possible de telles tragédies.

    Les gens, et en particulier les jeunes, sont le produit de leur temps, de leur environnement, de leur société. Par exemple, ma génération de mai 68, ou du moins sa partie de gauche radicalisée, était un produit de son temps. Nous n’avons aucun mérite à cela. Nous avons été pris dans la vague de protestations et de résistances révolutionnaires qui faisait rage dans le monde à l’époque.

    Les jeunes d’aujourd’hui sont tout autant des produits et des échos du temps présent. En ce sens, le meurtre du professeur est un signe, un signal sur le monde barbare que les jeunes d’aujourd’hui ont hérité de nous. Aussi parce que la génération qui les a précédés a stocké ses rêves et ses idéaux d’un nouveau monde, ainsi que sa résistance aux guerres sans fin, pour s’intégrer dans le système que nous détestions autrefois.

    Kyle Rittenhouse (17) et Abdoullakh Anzorov (18)

    Je viens d’écrire un petit essai sur le meurtre de George Floyd aux États-Unis et les liens entre le terrorisme, l’extrême droite et la police aux États-Unis. Quand j’ai appris la nouvelle du meurtre du professeur à Paris, j’ai été frappé par le parallèle entre deux jeunes tueurs, l’un aux États-Unis, l’autre en France. Certains diront que c’est tiré par les cheveux ou que les États-Unis n’ont pas leur place dans ce débat. Parce que les Américains seraient des barbares en matière d’armes, de violence, de prisons ou de Guantanamo. Mais peut-être devrions-nous commencer précisément par regarder le monde, sans regarder aveuglément les soi-disant identités nationales et supériorité, comme cela se passe en France aujourd’hui.

    Le jeune homme aux États-Unis s’appelle Kyle Rittenhouse. Il a 17 ans. Il est fasciné par Trump. Il y a deux mois, le 25 août, il a commis deux meurtres. Deux jours plus tôt, il a vu des images de Mark et Patricia McCloskey en tant qu’invités d’honneur à la Convention nationale républicaine. Le couple était devenu connu dans tout le pays quand, lui avec un fusil d’assaut, elle avec un pistolet, ils se tenaient menaçants devant leur villa alors qu’une manifestation Black Lives Matter passait. Lors de la Convention, le couple a lancé un appel à suivre leur exemple: «Si nous sommes menacés, nous devons nous défendre». « S’ils ne l’avaient pas fait », a tweeté Trump, « au mieux, ils auraient été battus, leur maison aurait été pillée et peut-être incendiée ».

    Le lendemain, le Kenosha Guard, une milice locale d’extrême droite, a lancé un «Appel aux armes» sur Facebook. Le groupe a appelé « les patriotes armés à descendre dans la rue pour défendre la ville contre les criminels de Black Lives Matter ». C’est le climat qui a poussé Kyle à décider de déménager à Kenosha, de chez lui à Antioche, dans l’Illinois, à une demi-heure de route. Il était armé de son fusil Smith and Wesson AR-15, avec 30 cartouches. Sur ce, il a tiré de sang-froid sur deux manifestants.

    Le jeune homme en France s’appelle Abdullakh Anzorov. Il a 18 ans. Il est d’origine tchétchène et est né à Moscou en 2002. Il vit en France depuis l’âge de six ans. Comme Kyle, il ne vit pas là où il commettra son acte. Il habite Evreux, à une centaine de kilomètres de la commune de Conflans-Sainte-Honorine, où s’est déroulé le drame. Il aurait publié des messages sur Twitter pour promouvoir le jihad contre la Chine et l’Afghanistan.

    Tout comme Kyle a dû faire un long voyage, Abdoullakh doit se rendre à l’école, où il demande à un certain nombre d’élèves de lui désigner l’enseignant qu’il recherche. Il aurait même payé des étudiants pour cette information. Il ne connaît pas ce professeur. Il ne le connaît que par le biais des réseaux sociaux où il a lu les manifestations, demandant sa démission parce qu’il a montré les caricatures du prophète Mohamed dans la classe. L’humiliation doit être vengée. Abdoullakh répond à l’appel: « J’ai exécuté un de vos chiens de l’enfer qui a osé humilier Mohammed », a-t-il écrit sur les réseaux sociaux. Plusieurs heures plus tard, la police l’a abattu.

    Je peux continuer avec des comparaisons, comme celle entre Patrick Crusius, 21 ans, qui a tiré sur 21 personnes dans un supermarché d’El Paso, et Mohammed Merah, 23 ans, qui a tué sept personnes à Toulouse et Mantauban.

    Vingt ans de guerre, vingt ans de haine

    Ces jeunes ont tous le même âge que la guerre qui s’est déclenchée dans le monde entier il y a vingt ans pour se venger des attentats du 11 septembre 2001 à New York. Ces attaques ont été à leur tour une réponse à la première guerre du Golfe, qui a commencé en 1991 contre le monde arabe, contre l’Irak. Ce fut le début d’une guerre de cent ans contre les pays du Sud, pour l’instant principalement les pays arabes et musulmans.

    Nous nous souvenons des paroles de Bush et Blair: «Qui n’est pas avec nous est contre nous», «Les règles du jeu ont changé à jamais». Ce qui signifiait que la violence devenait le moyen de résoudre les problèmes politiques, sociaux ou religieux. Ce qui signifiait qu’il était légitime d’aller en guerre. Se venger. Détester l’autre. Œil pour œil dent pour dent.

    Ces jeunes n’ont jamais rien connu d’autre, jamais rien entendu d’autre. Ce sont les enfants de vingt ans de déclarations guerrières, racistes et islamophobes ininterrompues. Appel aux enfants de vingt ans à riposter et à se venger du massacre et de l’humiliation subis par les peuples et les pays opprimés.

    Dans ce climat, la liberté d’expression a une signification guerrière et un arrière-goût amer: quelqu’un comme Julian Assange est en prison à Londres et risque 175 ans de prison aux États-Unis pour avoir publié des documents anti-guerre. Les militants du BDS doivent régulièrement répondre devant les tribunaux de leurs publications contre l’État d’apartheid d’Israël. Les caricatures dégoûtantes de Charlie Hebdo sont déclarées marque de commerce de la République française. Quelque chose qui équivaut presque à la déclaration de Trump comme symbole de la civilisation occidentale.

    Les enfants nous regardent avec incrédulité. Le droit à la caricature est assimilé à l’éducation aux valeurs de la République: oubliez la pénurie d’enseignants, oubliez l’inégalité choquante dans l’éducation ou le manque tout aussi poignant de soutien et de ressources pour les écoles pour les enfants du peuple, oubliez les défavorisés les quartiers et les quartiers où les enfants sont censés apprendre.

    À la guerre!

    Le 2 octobre, quatorze jours avant l’assassinat, le président français Macron avait annoncé lors d’une conférence de presse sous le thème «La République en action», des mesures radicales pour enrayer le «séparatisme islamique», qui échappe aux valeurs de la république. coucher. Désormais, il ne s’agit plus d’une guerre contre le terrorisme, mais d’une guerre contre l’islamisme politique.

    Après le meurtre, une autre vitesse est passée: une véritable machine de guerre est mise en marche pour venger le meurtre du professeur. Stigmatisation de la communauté tchétchène par les uns. L’unanimité pour freiner «l’islam politique». Les perquisitions à domicile et l’annonce de la dissolution des organisations à but non lucratif et d’autres organisations, comme le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). Fermeture de mosquées radicales. Annonce des expulsions. Renforcement de l’interdiction de porter le foulard.

    Les politiciens de gauche et les défenseurs des droits humains doivent commencer à s’excuser d’avoir participé à des marches contre l’islamophobie, au risque d’être qualifiés d’islamo-gauchistes, les judéo-bolcheviks des années 1930. Si nécessaire, disent certains, la constitution doit changé pour faire adopter toutes ces mesures. Le tout surmonté d’un discours ininterrompu sur la défense de nos valeurs, de notre civilisation, de notre liberté d’expression. Contre la barbarie des minorités qui rejettent ces valeurs.

    Breivik et Anzorov: deux mesures, deux poids

    Je n’oublierai jamais le silence qui a régné en Europe après le massacre de 77 personnes, dont des dizaines de jeunes, par Anders B. Breivik à Oslo et sur l’île d’Utoya le 21 juillet 2011. Bien sûr, l’absence a été grande et tout le monde a approuvé – de la gauche à la droit – me demande ce qui s’était passé. Mais pas de manifestations de masse, pas de stigmatisation, pas de raids, pas d’organisations interdites, pas de dénigrement contre «la barbarie de la majorité», pas d’interdiction de publication ou de traduction du manifeste de Breivik.

    Ce qui m’a le plus frappé à l’époque, c’est l’unanimité européenne, le déni dans toutes les clés de toute responsabilité politique de la droite ou de l’extrême droite pour la folie qui s’était produite en Norvège. Après tout, le meurtre et la liberté d’expression étaient deux choses différentes. Cette fois, c’est différent. Cette fois, il semble que nous nous dirigeons vers la guerre civile. La population n’a qu’une impression: le terrorisme musulman est l’ennemi parmi nous. L’extrême droite n’a rien à faire, à ne rien dire, elle a juste besoin de récolter les fruits du climat actuel.

    Où sont nos valeurs en ce qui concerne la percée de l’extrême droite juridique dans pratiquement tous les pays européens? Où est l’éducation sur nos valeurs et notre civilisation en réponse à la série de meurtres d’extrême droite en Europe?

    Après les 10 meurtres, les 15 vols de banque et les 2 attentats à la bombe commis entre 2000 et 2011 par la NSU, le groupe fasciste allemand de Beate Zschäpe. Après le meurtre du député britannique Jo Cox en 2016 par le raciste blanc Thomas Mair. Après la fusillade de Luca Traini, 28 ans, candidat de la Lega Norte aux élections municipales, qui a tiré ses deux pistolets semi-automatiques dans les rues de Macerata en février 2018 sur six migrants africains qui se sont croisés sur son chemin. Après l’assassinat du politicien allemand Walter Lübcke en juin 2019 par le fasciste Stephan Ernst, décrit par lui et une partie de la presse comme un «défenseur des migrants».

    Après l’attaque de Philip Manshaus, le terroriste raciste d’Oslo, contre la mosquée Baerum en août 2019. Après les meurtres de Stephan Balliet, 27 ans, un homme de Halle, en Allemagne, qui, le 9 octobre 2019, parce qu’il n’est pas entré une synagogue pour commettre une attaque, puis abattre une femme qui a eu le malheur d’y passer, et un homme dans un restaurant de kebab. Après les meurtres de Tobias Rathjen qui a abattu 11 personnes dans deux bars à chicha du centre-ville de Hesse le 19 février de cette année avant de se suicider. Et puis nous ne parlons pas de toutes les attaques et incendies criminels contre les centres d’asile qui ne sont pas classés comme terrorisme, mais comme crimes de haine.

    Chez Europol, toutes les flèches restent focalisées sur le djihadisme islamique. Mais pour la première fois, le rapport sur le terrorisme d’Europol 2019 pourrait ressentir une inquiétude croissante concernant l’extrémisme de droite. «En 2019, une vague d’incidents violents de droite, y compris les terribles attentats à Christchurch (Nouvelle-Zélande) et les attaques aux États-Unis, a également atteint l’Europe. Avec des attaques en Allemagne, en Norvège et au Royaume-Uni, une attaque ratée en Lituanie et un plan terroriste contrecarré en Pologne … Bien que de nombreux groupes d’extrême droite dans l’UE n’utilisent pas la violence, ils contribuent à un climat de peur et d’hostilité contre les groupes minoritaires. Ce climat, basé sur la xénophobie, la haine des juifs et des musulmans et des sentiments anti-immigrés, peut abaisser le seuil pour que certaines personnes radicalisées utilisent la violence contre les personnes et les biens des minorités, comme nous l’avons trop souvent vu ces derniers mois. Comme les djihadistes, les auteurs violents isolés de droite sont intégrés dans des communautés en ligne plus larges qui prêchent la haine et déshumanisent certains groupes de nos diverses sociétés ». Le rapport vaut largement la peine d’être lu. Tout cela étant entendu que, dans la plupart des cas, le terrorisme de droite n’est pas classé dans le terrorisme mais dans le crime de haine.

    Personne ne rate le fait qu’il s’agit d’une explosion mondiale de terrorisme blanc de droite. Le Centre très officiel d’études stratégiques et internationales (CSIS), qui se qualifie lui-même de «réflexion-merci numéro un dans le monde de la défense et de la sécurité nationale», exprime son inquiétude depuis des années. En 2018, vous pouviez lire sur son site Web: «  Le nombre d’attaques terroristes perpétrées par des auteurs d’extrême droite a augmenté au cours de la dernière décennie, et a plus que quadruplé entre 2016 et 2017 … En Europe, les attaques de l’extrême droite ont également augmenté, avec 43% entre 2016 et 2017… Depuis 2014, le nombre d’attaques d’extrême droite est plus élevé que celui d’attaques par des islamistes extrémistes ».

    Le 17 juin 2020, le SCRS a publié un nouveau rapport, encore plus inquiétant: «Entre 1994 et 2020, il y a eu 893 attentats et complots terroristes aux États-Unis. Dans tout cela, les terroristes de droite ont commis 57% de toutes les attaques et complots de cette période, contre 25% par des terroristes de gauche, 15% par des terroristes religieux, 3% par des ethno-nationalistes et 0,7% par des terroristes ayant d’autres motifs. ‘

    L’alternative ne peut être que de nous mobiliser pour mettre fin aux guerres sans fin qui font non seulement des centaines de milliers de victimes, mais qui alimentent également le terrorisme de toutes parts. Protéger les minorités ensemble. Ensemble, encore une fois, ouvrant la perspective radicale d’un monde qui mettra fin aux inégalités et à la pauvreté dans tous les domaines. Une inégalité déjà dramatique, mais qui s’est intensifiée pendant la crise sanitaire. Plus de répression, plus de guerre interne apporteront exactement le contraire de ce dont nous avons besoin: plus de haine et plus de folie meurtrière.

    De Wereld Morgen, 24 oct 2020

    Tags : Etats-Unis, terrorisme, Islam, islamisme, France, racisme, haine,

  • Campagne de boycott des produits français – Lancée sur les réseaux sociaux

    Des internautes ont lancé sur les réseaux sociaux une campagne d’envergure de boycott des produits fabriqués en France sous le hashtag “#BoycottLes produitsfrançais” en réaction aux déclarations du président français Emmanuel Macron encourageant les caricatures et les dessins offensants le Prophète Mohamed (QSSSL).

    En effet, le hashtag incitant au boycott des produits français s’est placé en tête des sujets les plus discutés dans le monde arabo-musulman et ce en réaction aux propos hostiles à l’Islam et aux musulmans tenus par des officiels français et en soutien au Prophète (QSSSL).

    En Algérie, plusieurs pages sur les réseaux sociaux et des personnalités publiques ont manifesté leur soutien à cette initiative.

    Le président français a déclaré, lors d’un hommage rendu au prof d’histoire-géographie tué par un jeune homme d’origine tchétchène, que « Nous ne renoncerons pas aux caricatures, aux dessins, même si d’autres reculent », martelant que ce dernier a été assassine « parce qu’il incarnait la République ».

    « Samuel Paty fut tué parce que les islamistes veulent notre futur et qu’ils savent qu’avec des héros tranquilles tels que lui, ils ne l’auront jamais», a insisté celui qui a succédé à François Hollande en 2017.

    Imène Boukhatem / Traduit par: Moussa. K.

    Source : Echourouk Online, 23 oct 2020

    Tags : France, Islam, Islamisme, Charlie Hebdo, caricatures, Samuel Paty, boycott, produits français, réseaux sociaux, campagne,

  • La peur au ventre

    par Hatem Youcef


    A chaque fois qu’un acte criminel perpétré est relié de près ou de loin à des motivations religieuses pour ne pas dire islamiques surtout quand l’horreur le dispute à la consternation comme ce fut le cas pour la condamnable décapitation de l’enseignant Samuel Paty par un refugié tchétchène, toute la communauté musulmane de France se retrouve dans de beaux draps, contrainte de vivre avec la peur au ventre durant tout le temps que le crime en question occupe les esprits et les médias surtout. Alors, tout ce qui a un lien avec la religion musulmane devient (ir)réellement le point de mire de la nation éplorée, musulman pratiquant ou pas, barbu ou rasé de près, vêtu de qamis ou col blanc, burkini ou bikini, intello ou simple ouvrier d’usine, naturalisé ou simple résident, nouveau débarqué ou beur de l’ultime génération, utile à la France ou pas, baptisé ou arborant son prénom musulman comme un stigmate en l’occurrence, laïc, agoniste, déiste ou athée, tous sont coupables d’appartenir à la confession musulmane même s’ils s’égosillent à longueur d’année à apporter de l’eau au moulin de la République.

    Tous se recroquevillent durant tout le temps que la tension est maintenue au summum, ils rasent les murs, se font tout petits, pestent contre le coreligionnaire qui a réveillé les démons patents du racisme et de l’islamophobie. On veut se renier, se convertir momentanément au christianisme, au judaïsme ou encore au bouddhisme pour être fréquentable, innocent et intégrable. La peur au ventre ne laisse point de place aux délices de la nourriture, aux lumières de Paris ; on étouffe dans ce décor tout à coup redevenu gothique et l’on voit partout des policiers prêts à bondir sur vous pour vous inculper d’homicide de Français. On s’impose un couvre-feu, on s’autocensure et se confine à loisir. Les victimes de Charlie Hebdo refont surface et leur journal redevient prisé, très vendable et les sinistres caricatures par qui l’islamophobie croit triompher sont (re)prises d’assaut et exhibées lors des rassemblements et les hommages subséquents.

    La peur au ventre fait oublier la démocratie et les droits de l’homme, vous donne envie de réécrire l’histoire, replonger dans le passé avant l’affaire de l’éventail et envisager une vie en terre natale sans déchirement ni reniement. Tant que la tension est à son paroxysme, on s’en veut d’être là, on se trouve lâche de s’être expatrié, d’être proie aux caprices du destin. La nostalgie vous happe et en rajoute à la peur au ventre qui est l’unique lot de tous ceux qui sont liés de près ou de loin à l’islam là-bas. Il ne faut surtout pas se montrer dans les rassemblements où l’on rend hommage au défunt, il ne faut pas non plus se joindre aux pétitionnaires et signer ‘je suis prof’ car le nom aux consonances musulmanes est plausiblement rejeté, car en pareilles circonstances il ne fait bon être musulman dans l’hexagone. Même les nouveaux convertis adoptent un profil bas et vivent eux aussi avec la peur au ventre en dépit du bleu qu’ils ont dans les yeux.

    Le Quotidien d’Oran, 22 oct 2020

    Tags : France, Islam, islamisme, Samuel Paty, Charlie Hebdo, caricatures, terrorisme, intégrisme,

  • France : deux femmes voilées d’origine algérienne poignardées sous la tour Eiffel

    Les effets collatéraux de la tension psychologique et politique suscitée par le débat sur l’intégrisme dans l’Islam et l’amalgame créée par ce débat commencent à être visibles dans la rue française.

    La Tour Eiffel a été témoin dimanche soir d’une agression contre deux femmes voilées d’origine algérienne. Même si le mobile religieux n’est pas encore évoquée, l’agression a été précédée d’insultes racistes suite à un différend autour d’un chien non attaché. Le commissariat du 7ème arrondissement est chargé d’interroger deux personnes qui se trouvent en garde-à-vue.

    Tout a commencé lorsqu’un chien appartenant à deux jeunes femmes a fait peur aux enfants des deux femmes algériennes. Ces dernières leur ont demandé de tenir le chien en laisse. Et c’est là que la dispute a commencé pour finir avec les deux femmes poignardées.

    Les agresseuses ont proféré des propos racistes tels que « rentre dans ton pays”, « sale arabe », « on est chez nous »…Le voile de l’une des femmes a été arrachée par l’une des femmes coupables d’agression.

    L’une des victimes a déclaré qu’elle n’est pas sûre que l’agression a été intentionnelle, que c’était parce qu’elles portaient un voile. Le parquet de Paris a indiqué qu’il est trop tôt pour se prononcer à ce sujet.

    L’une des deux cousines algériennes a reçu plusieurs coups de couteau et a dû être opérée de la main. L’autre, qui se trouve toujours hospitalisée, a reçu six coups d’arme blanche et subi une perforation du poumon.

    Agences

    Tags : France, Islam, islamisme, Samuel Paty, Charlie Hebdo, caricatures, terrorisme, radicalisation, intégrisme,

  • Quand Emmanuel Macron “plagie” Réda Malek

    Le président français Emmanuel Macron a déclaré -dans le cadre de ce qu’il qualifie de lutte contre le radicalisme islamiste- que « la peur va changer de camp », en reprenant la célèbre phrase du défunt chef de gouvernement Réda Malek prononcée dans les années 1990.

    Selon la presse française, le locataire du palais de l’Elysée a lancé lors d’un conseil de défense et de sécurité nationale tenu dimanche soir, suite à l’assassinat d’un prof d’histoire à Paris, que « la peur va changer de camp » et que « les islamistes ne doivent pas pouvoir dormir tranquille dans notre pays [France, ndlr] ».

    En effet, c’étaient les mêmes mots utilisés par feu Réda Malek -en pleine crise des années 1990- en martelant que « la peur doit changer de camp ». C’était lors de l’enterrement de l’une des icônes du 6e art en Algérie, en l’occurrence Abdelkader Alloula, assassiné par des terroristes en mars 1994.

    Revenant sur sa déclaration qui est devenue célèbre, le défunt Réda Malek a rappelé que « j’étais alors chef de gouvernement et que la peur s’était emparée de l’opinion publique, journalistes, universitaires…j’ai dit que la peur devait changer de camp (groupes terroristes) car la lutte a porté et c’est grâce à elle que l’Algérie restera debout ».

    Echourouk Online, 21 oct 2020

    Tags : France, Emmanuel Macron, Reda Malek, plagiat, Islam, terrorisme, Samuel Paty,

  • Erdogan accuse Macron de «régler des comptes avec l’islam et les musulmans»


    Lors d’un discours en visioconférence ce 20 octobre, Recep Tayyip Erdogan a fustigé les propos de son homologue français, tenus le 2 octobre, sur la création d’un «islam des Lumières» en France. Le dirigeant turc considère que ces initiatives visent à «régler des comptes avec l’islam et les musulmans».

    Le Président turc a critiqué la volonté d’Emmanuel Macron de construire un «islam des Lumières» en France, lors de la visioconférence réalisée par l’Organisation de la coopération islamique ce 20 octobre.

    «Ceux qui sont perturbés par la montée de l’islam attaquent notre religion à travers les crises qu’ils provoquent. La rhétorique anti-islam et anti-musulmane est l’outil le plus utile pour les politiciens occidentaux pour dissimuler leurs échecs», a déclaré le Président turc.

    «”L’islam français”, “l’islam européen” et “l’islam autrichien” en sont des exemples récents», a souligné M.Erdogan, ajoutant que le véritable enjeu de ces initiatives menées par le Président Macron est de «régler des comptes avec l’islam et les musulmans». Il a déclaré que celles-ci visaient à créer un profil lâche, peu rassurant et timide pour les musulmans ainsi qu’un système anti-islamique dans lequel les rituels religieux ne peuvent être pratiqués qu’à domicile et où l’utilisation des symboles religieux est interdite.

    «Le nom d’un tel système n’est pas démocratie, mais totalitarisme», a conclu M.Erdogan.

    Loi «contre les séparatismes»

    Lors de son discours prononcé aux Mureaux le 2 octobre, le Président français a dévoilé une partie des mesures du projet de loi «contre les séparatismes», principalement l’islamisme radical, dans son pays. Un texte qui sera présenté le 9 décembre en conseil des ministres.

    Dans le cadre de la lutte contre le «séparatisme islamique», les autorités françaises ont l’intention d’accorder une attention particulière à l’éducation des enfants. Emmanuel Macron a également exprimé l’idée de créer, avec le Conseil français du culte musulman (CFCM), une organisation qui permettra de construire un «islam des Lumières» dans le pays.

    Pour ce faire, M.Macron a annoncé la fin des imams détachés, c’est-à-dire formés dans des pays étrangers (Turquie, Algérie, Maroc). Désormais, en accord avec le CFCM, la formation d’imams sera «labellisée» en France afin d’éviter l’ingérence de pays étrangers dans la pratique du culte sur le sol français, et de renforcer le contrôle du financement des mosquées.

    Un projet vivement critiqué

    «Ce texte sera un coup pour rien», a prédit le député Les Républicains Éric Ciotti. À son tour, Marine Le Pen a déploré que «rien» n’ait été dit sur l’immigration, «terreau du fondamentalisme islamiste», tout en reconnaissant qu’un «certain nombre de ces mesures vont dans le bon sens».

    Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise, a qualifié ce discours de «mise en scène dramatisante absolument inutile», puisque «la loi telle qu’elle est aujourd’hui permet de réprimer les actes délictueux tels que d’éventuels prêches, de quelque religion que ce soit». Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a regretté l’absence d’inflexion de la politique économique et sociale.

    Ecourouk online, 21 oct 2020

    Tags : France, Turquie, Emmanuel Macron, Erdogan, Islam,

  • Les musulmans et la démocratie

    En matière de relation entre l’islam et la démocratie, une grande partie des idées reçues est fausse.

    D’abord, beaucoup sont ceux qui imaginent que c’est l’islam en tant que religion qui est hostile à la démocratie. Ensuite, il y a ceux qui pensent que se sont les musulmans -à cause de leurs sous-développement- qui sont hostiles à l’idéal démocratique. Et les deux, s’appuyant sur les vérités des sociétés musulmanes actuelles, concluent que les musulmans sont par nature anti-démocratiques.

    Pour répondre à ces malentendus, j’ai choisit d’aborder la question sous deux angles différents. D’abord, sur le plan pratique, les pays musulmans sont-ils des démocraties ? Ensuite -et surtout- sur le plan théorique, quel regard porte les musulmans sur la démocratie ?

    La démocratie dans les pays musulmans :

    Il y a dans le monde aujourd’hui, 47 pays à majorité musulmane dans lesquels vivent entre 1,2 milliard et 1,5 milliard de musulmans constituant ainsi 20 % de la population mondiale.

    Les 47 pays musulmans sont répartits sur tous les continents et le plus grand nombre d’entre eux se trouve au Proche-Orient et en Asie.

    Contrairement à ce que pensent beaucoup, les pays arabes constituent moins de la moitié des pays musulmans et les arabes ne représentent que le 1/4 des musulmans.

    Afin de bien comprendre le phénomène que nous analysons, il faut diviser le monde musulman en plusieurs catégories :

    1- L’Islam asiatique –exclusion faite du Moyen-Orient- est parfaitement démocratique. Le plus grand pays musulman qu’est l’Indonésie est démocratique. Et la plus grande démocratie dans le monde qu’est l’Inde est gouverné par un musulman.

    2- L’Islam Africain –exclusion faite de l’Afrique du Nord- a fait d’énormes pas vers la démocratie. Le Sénégal et le Mali sont aujourd’hui reconnus comme des démocraties.

    3- L’Islam Arabe –comprenant l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient- n’est pas démocratique. Aucun pays des 23 pays arabes n’est incontestablement reconnu comme démocratique. Mais là aussi il y a des nuances à faire :

    Au Maghreb Arabe : 4 des 5 pays du Maghreb (Mauritanie, Maroc, Algérie et Tunisie) sont en transition démocratique.
    Au Machreq Arabe : L’ensemble de ces pays, en raison des régimes monarchiques qui gouvernent la majorité d’entre eux, sont encore loin de la démocratie. Exception faite du Liban (qui peut être considéré comme le pays arabe le plus démocratique) et le Kuweit qui se trouve en transition démocratique.

    Deux conclusions peuvent être tirées de ce tableau :

    1- La majorité des musulmans (950 millions de personnes) vivent dans des régimes démocratique ou en transition vers la démocratie.

    2- C’est dans le monde arabe qu’il y a le moins de démocratie. C’est le monde arabe qui donne de l’Islam une mauvaise image en matière de démocratie.

    On a ainsi clarifié certaines questions à propos de la démocratie dans le monde musulman en général, il importe maintenant de s’interroger sur le pourquoi de l’absence de la démocratie du monde arabe en particulier. Autrement dit, Cette absence s’explique-t-elle, comme le pense certains, par le refus des populations arabo-musulmanes de la démocratie ?

    La démocratie dans l’opinion musulmane :

    Dans les 10 dernières années, deux vagues de sondages ont étés réalisés par World Values Survey à propos de l’opinion des musulmans sur la démocratie.

    Les sondages réalisés en 1995-1996 et en 2002-2003 dans cinq pays arabes (Algérie, Egypte, Jordanie, Arabie saoudite, Maroc) et neuf pays musulmans (Albanie, Azerbaïdjan, Bangladesh, Bosnie, Indonésie, Iran, Kirghizstan, Pakistan, Turquie) nous fournissent de très importantes indications.

    En effet, la démocratie a une image très positive dans tous les pays arabes. Ainsi 61 % des personnes interrogées dans les pays arabes sont d’accords pour dire que « la démocratie peut avoir de nombreux problèmes, mais c’est la meilleure forme de gouvernement » contre 52 % des personnes interrogées dans 16 pays de l’Europe Occidental et … 38 % seulement dans l’ensemble Etats-Unis, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande.

    Ainsi, non seulement les arabes sont favorables à la démocratie mais ils sont ceux qui ‘‘l’aiment’’ le plus dans le monde entier.

    Nous voyons clairement que l’inexistence de démocratie dans le monde arabe n’est pas en elle même imputable aux musulmans.

    Peut–on l’imputer alors à certaines interprétations extrémistes de l’Islam qui ont vu le jour dans le monde arabe et ne se sont pas développées dans le reste du monde musulman ?

    Le débat est ouvert …

    Source : Islamiqua, 18 nov 2006

    Tags : Islam, démocratie, laïcité, religion, foi, culte,